Bonjour à tous,
AILLY – UC 35
Combat du 16 Mai 1918
Le rapport du capitaine est conforme à celui déjà mis sur le forum en 2008. Nous ne reviendrons donc pas dessus.
Voici le ROI RENE, l'un des deux voiliers que remorquait l'AILLY
Lettre du 1er maitre de timonerie LE ROUX au Commandant WACKERNIC. 25 Mai 1918
Commandant,
Je viens de recevoir votre belle lettre que j’ai lue à mon équipage. Si vous les aviez vus ! Ils étaient heureux car cette victoire est aussi la votre. Vous nous avez formés et entraînés. Une de nos premières pensées a été pour vous : Que le Commandant WACKERNIC va être heureux lui aussi.
Le boche a très mal manœuvré et j’en ai profité. Il nous a toujours présenté son travers. J’avais deux grands voiliers à la remorque : GLORIA, 2000 t, et ROI RENE, 1100 t. Un coup de hache et route dessus. Il tire le premier et son coup est long. Je commence à 8000 m : long. 7000 m, le but est couvert. Feu continu. Il continue son tiret à son 3e coup, nous sommes encadrés. Je viens brusquement à gauche de trois quarts pour le dérouter. Bonne précaution car les trois coups suivants tombent par le travers tribord. A son 6e coup, il vire de bord et ne tire plus. Mais il me représente son travers. Vraiment, je croyais qu’il se moquait de nous. A notre 12e coup, je vois nettement une grosse explosion par son travers et une minute après il piquait du nez et disparaissait dans une position verticale, hélices en l’air. Cessé le feu à 5000 m et continué à faire route dessus pour lui donner le coup de grâce avec les grenades.
Arrivé sur les lieux, je repêche un homme. Stupéfaction ! C’est un Espagnol du vapeur VILLE DE SOLLER. Il m’indique que le sous-marin a coulé et que l’équipage est plus loin sur l’eau. J’en prends cinq, mais ils devaient être une quinzaine. Les autres boivent la tasse, histoire de goûter la belle bleue… D’après l’Espagnol, il a reçu à notre 4e coup de canon un obus sur l’avant qui lui a causé de graves avaries. Et notre 12e coup est arrivé dans son kiosque et a explosé en bas.
A l’arrivée à Toulon, on nous a comblés d’honneurs. Le préfet Maritime est venu à bord et nous a décorés de la Croix de Guerre. Mon chef de pièce était le brave TANGUY, que l’on voulait dernièrement m’enlever pour en faire un pilier de dépôt.
Enfin, bonne journée et travail bien fait comme vous dites. Je voudrais que mon rapport de mer tombe sous vos yeux car j’ai pensé aux chers disparus de SALAMBO.
Je termine, Commandant, en vous remerciant, de la part de mes lions et de moi.
Signé LEROUX
Lettre du CF BANAL, commandant la 4e escadrille des patrouilles de Méditerranée au Ministre
J’ai l’honneur de vous transmettre le rapport de mer du commandant de l’AILLY sur son engagement avec un sous-marin le 16 Mi 1918. Dès l’arrivée du chalutier à Port Vendres, j’ai pu recueillir à bord un certain nombre de renseignements et je signale les points suivants :
- Le sous-marin se tenait à l’affût maquillé en voilier, peut-être prévenu du départ des voiliers d’après les dires des prisonniers. Son maquillage a disparu brusquement.
- AILLY était bien paré. Au 1er coup de canon, la remorque a été coupée à la hache et AILLY a répondu moins de 20 secondes après.
- La maîtrise du commandant de l’AILLY apparaît dans les faits suivants : ayant apprécié au 1er coup, il a commandé 1000 m plus près. Son 2e coup étant court et bon en direction, une gerbe d’eau couvrant le but, il a fait un tir continu et a essayé une hausse intermédiaire dès qu’il l’a sentie longue. Puis il est revenu sur la bonne hausse courte qui lui a donné le but. Le tir du sous-marin a été excellent disent les hommes de l’AILLY, et lorsqu’AILLY a reçu des coups courts très bons en direction, il a fait un crochet judicieux qui l’a sans doute sauvé.
- 15 hommes étaient à la mer et 5 seulement ont pu être sauvés, bien qu’il fit très beau et qu’AILLY soit arrivé sur les lieux moins de 20 minutes après son engloutissement. Les hommes se tenaient par groupe et n’avaient pas de ceintures de sauvetage. Ils ont coulé peu à peu par manque de résistance ou parce qu’il ne savaient pas suffisamment nager.
- Sur le lieu de l’engloutissement, AILLY n’a constaté ni nappe de mazout, ni dégagement de bulles d’air. A peine un mince filet huileux, très léger et peu visible, d’un mètre de large sur 300 m de long. Sans la présence des naufragés, personne à bord n’aurait cru qu’un sous-marin avait été coulé à cet endroit.
Conclusion
AILLY bien préparé, bien en main, a fait preuve de virtuosité, et tout ce qu’il y avait à faire pour le plus rapidement possible surmonter un ennemi plus puissant que lui, dont le tir était excellent.
Le commandant de l’AILLY, le 1er Maître timonier LE ROUX Victor, exerce son commandement depuis deux ans et demi d’une manière exceptionnellement brillante, déployant à chaque occasion des qualités de chef et de marin qui ont étonné les officiers qui l’ont vu à l’œuvre. Il juge sainement les situations, prend des décisions rapides, les exécute avec une extrême habileté technique et commande admirablement des hommes qui lui sont attachés. C’ »est à lui que revient l’honneur de cette belle journée.
J’exprime le vœu, conforme à son désir, que le commandement de l’AILLY lui soit réservé, comme élément très important de l’efficacité de la 4e escadrille.
Récompenses
Citation à l’Ordre du Corps d’Armée
LEROUX Victor Marie 1er maître de timonerie Lorient 1432
Commandant de chalutier modèle, magnifique d’ardeur et de bravoure. A su communiquer à son équipage l’esprit qui l’animait. Attaqué pendant qu’il remorquait deux voiliers, par un sous-marin plus puissamment armé que l’AILLY, n’a pas hésité à filer ses remorques pour courir sus à l’ennemi et l’a coulé au canon après un court et brillant combat.
CARON René Raymond Victor 1er maître de manœuvre temporaire. Chef de quart
Par sa vigilance, sa manœuvre habile et son sang froid a permis à l’AILLY son immédiate et foudroyante riposte.
TANGUY Yves Marie Binic 8827 QM fusilier chef de pièce
A toujours fait preuve de qualités militaires hors ligne, et dont le coup d’œil et le sang froid parfait sous le feu ont assuré la destruction du sous-marin ennemi.
LE DU Pierre Joseph 97749.2 Canonnier breveté. Chargeur de la pièce de 75 mm
RAMONE Aimé Bienvenu Port Vendres 1206 Fusilier auxiliaire
BERGERIE Raymond 51303.5 Chauffeur breveté
Par leur sang froid et leur bravoure sous le feu, ont assuré le fonctionnement rapide et précis de la pièce de 75 qui a détruit le sous-marin.
MOZALI Joseph Gabier breveté Ajaccio 1819
A déjà donné des preuves de dévouement héroïque lors de l’incendie de l’ABOUKIR en essayant de réparer la drosse à côté d’un parc à munitions qui sautait. Attitude toujours magnifique au moment du danger.
VILLEDARY Edmond Emile Sd maître mécanicien Fusilier marin. Chef de section pièce AR
S’est montré plein de courage et de sang froid pendant le combat. S’est prodigué avec le plus grand dévouement pour recueillir et soigner les naufragés.
Citation à l’Ordre de la Brigade
GOUIMOUX Sd maître mécanicien Toulon 14277
MONSAURET Arthur Louis Matelot mécanicien 36994.1
LACLABERE Jean Chauffeur breveté Bayonne 5182
PERTHOULOUX Michel Marie Chauffeur breveté 99615.2
NAESOUARN Chauffeur breveté
Dans le combat entre l’AILLY et un sous-marin ennemi, ont permis par leur calme et leur vaillante activité de faire donner le maximum de vitesse à leur bâtiment qui courait sus à l’ennemi.
BERTHET QM timonier
GIORICO Ciro Antoine Gabier breveté Bastia 794
LE VERGEOIS Eugène Alexandre Boulanger Coq 46546.1
BON André Edouard Matelot TSF 41289.1
LACROIX Matelot TSF
SERENE Jean Lucien Matelot sans spécialité 57542.5
MARTIN François Xavier Matelot sans spécialité Fécamp 9699
LESCROEZ Pierre François Matelot sans spécialité La Hougue 1887
PIERROTTI Dominique Matelot sans spécialité 430 C.5
FRERE Joseph Maurice Matelot sans spécialité Dieppe 670
Pour leur belle attitude et leur ardeur dans un combat entre l’AILLY et un sous-marin ennemi, qui s’est terminé par la destruction du sous-marin.
(Voir aussi le torpillage du PAX par l'UC 35, 5 jours auparavant, alors qu'il était escorté entre autres par l'AILLY)
Cdlt