ENSEIGNE HENRY - Contre-torpilleur

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Ar Brav
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Re: ENSEIGNE HENRY - Contre-torpilleur

Message par Ar Brav »

Bonjour à tous,

ENSEIGNE HENRY Contre-torpilleur de 450 t type Spahi (1912 – 1928)

Chantier :

Rochefort
Commencé : 1910
Mis à flot : 12.05.1911
Terminé : 1912
En service : 04.1912
Retiré : 09.06.1928
Caractéristiques : 475 t ; 7 200 cv ; 67 x 6,75 x 3 m ; 4 cheminées ; machines alternatives ; 28 nds ; 75 h.
Symbole de coque : 06.1912 : EH.
Armement : VI de 65 + 3 TLT de 450.

Observations :

Du nom de l’EV Paul Henry qui fut tué le 30.07.1900 en défendant la citadelle de Pé-Tang
01.05.1912 : armé définitivement, de Rochefort pour Toulon, affecté à la 1ère flottille de torpilleurs de l’Armée navale
06.1912 : 2ème escadrille de contre-torpilleurs de la 1ère Armée navale en Méditerranée
14.03.1913 : désigné torpilleur d’escadre
1914 : Méditerranée
05.1915 : affecté à la division des flottilles de l’Adriatique ; protection des communications, surveillance du canal d’Otrante, aide à l’armée serbe
1916 : mer Egée
1917 : patrouilles de la Méditerranée, basé à Milo ou à Corfou, escortes de convois et lutte anti sous-marine
1918 : mer Noire
03.1919 : défense et évacuation des nationaux en mer d’Azov, soutien aux volontaires russes contre les Bolcheviks
1919 : défense mobile de Tunisie à Bizerte
09.06.1928 : condamné
02.05.1929 : vendu pour démolition à Bizerte à MM. Boccara, Scalabrino & Cie de Tunis.

Cordialement,
Franck
www.navires-14-18.com
Le cœur des vivants doit être le tombeau des morts. André Malraux.
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Yves D
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Re: ENSEIGNE HENRY - Contre-torpilleur

Message par Yves D »

En souvenir du courageux EV Henry

Image

Et si un jour vous vous intéressez à la personalité brillante de Paul Henry,

Image

un vieux livre à lire quand ce n'est pas à relire. Une grande page d'humanité.
Cdlt
Yves
www.histomar.net
La guerre sous-marine 14-18, Arnauld de la Perière
et autres thèmes d'histoire maritime.
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GENEAMAR
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Re: ENSEIGNE HENRY - Contre-torpilleur

Message par GENEAMAR »

Image HENRY Paul Charles Joseph Martin

Né le 11 novembre 1876 à ANGERS (Maine-et-Loire), il entre dans la Marine en 1893. Aspirant de 1ère classe en octobre 1896, il embarque sur la "MELPOMÈNE", École des gabiers à BREST (Cdt Pierre DANIEL), puis en 1897, il passe sur le croiseur "AMIRAL-CHARNER" en Méditerranée et participe aux opérations de CRÈTE. Élève Officier au Bataillon d'Apprentis-fusiliers de LORIENT. Enseigne de vaisseau le 5 octobre 1898. Il embarque sur le cuirassé "D'ENTRECASTEAUX", Division navale d'Extrême-Orient; bâtiment faisant partie de l'Escadre internationale envoyée en CHINE pour protéger les intérêts européens menacés par la révolte des Boxers.
C'est ainsi qu'HENRY, breveté Fusilier, se porte volontaire pour défendre la cité de PÉ-TANG, au centre de PÉKIN accompagné de 30 marins français et 10 marins italiens. La cité était le refuge de plus de 3 000 catholiques chinois. Henry accomplit sa mission avec le plus grand courage mais fut tué à la tête de ses hommes le 30 juillet 1900.

Image

Les défenseurs de PÉ-TANG

ImageImageImage

Joseph JOUANNIC - Guillaume ÉLIAS - Eugène MINGAM - Enseigne Paul HENRY - S-Lieutenant OLIVIERI - François MARREC - Pierre PRIGENT - Antoine QUEFFURUS -

Franois M CALLAC - Dominique CAMBIAGGI - Louis CONSTANZA - Joseph DAVID - Ernest DELMAS - Pierre DERRIEN - Guillaume FAY - Georges Albert FRANCK -

? GUEZENNEC - Jean Marie LALÈS - Yves LE COZE - Joseph LE GOFF - Albert LEHOUX - Michel LE QUÉRÉ - Ange LE RAY - Pierre Marie LE SEC'H -

Grégoire LOUARN - Jean Louis PEUZIAT - Alexandre REBOURS - Jean RUELLO - Louis Marie SÉNÉCHAL - Jean SOUVE - Henry STÉPHANY - Jules URCOURT -

Cordialement. Malou
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GENEAMAR
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Re: ENSEIGNE HENRY - Contre-torpilleur

Message par GENEAMAR »

[:alain dubois:8]

En décembre 1915, le bâtiment est commandée par le Lieutenant de vaisseau Marcel TRAUB, en Méditerranée. celui-ci se distingue à deux reprises par l'habilité de ses manoeuvres lors des torpillages du "NEA-GENEA" et de l' "ATHOS", qui lui vaudront deux témoignages de satistfaction (en janvier et février 1917.
Cordialement. Malou
Rutilius
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Re: ENSEIGNE HENRY - Contre-torpilleur

Message par Rutilius »

Bonsoir à tous,

Un marin de l'Enseigne-Henry mort pour la France :

- LE BRAS Jean, François, Marie, né le 13 mai 1898 à Saint-Derrien (Finistère) et y domicilié, " tué à bord de l'Enseigne-Henry par l'explosion d'une bombe flottante et tombé à la mer - Le corps n'a pas été retrouvé -", le 31 décembre 1918, Matelot de 2e classe canonnier, Matricule n° 109.936-2 (Jug. Trib. Toulon, 19 janv. 1921, transcrit à Toulon).

Bonne soirée,
Daniel.
dbu55
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Re: ENSEIGNE HENRY - Contre-torpilleur

Message par dbu55 »

Bonsoir à tous,

Deux marins de l'ENSEIGNE HENRY morts pour la France :

KERDUFF Joseph Marie né le 21/03/1896 à Lambézellec (Aujourd'hui Brest) (Finistère), Matelot de 2ème Classe Canonnier Breveté, décédé le 6/6/1916 (20 Ans) - Céphalonie (Hôpital) Grèce Maladie - Péritonite

GERME Denis Henri né le 02/05/1897 à ???, Matelot de 2ème Classe Canonnier, décédé le 31/12/1918 (21 Ans) - A bord de l'ENSEIGNE HENRY Tué par l'explosion d'une bombe flottante qui l'a précipité à la mer - Pas de ville de naissance ni de Département sur MDH


A propos du matelot LE BARS cité par Daniel, j'ai dans mon fichiier un matelot LE BRAS (j'ai vérifié sur MDH, pas de matelot LE BARS Jean François Marie mais un soldat de 2ème classe du 201ème RI, par contre il y a bien un LE BRAS Jean François Marie)

LE BRAS Jean François Marie né le 13/05/1898 à Saint-Derrien (Finistère), Matelot de 2ème Classe Canonnier, décédé le 31/12/1918 (20 Ans) - A bord de l'ENSEIGNE HENRY Tué par l'explosion d'une bombe flottante et tombé à la mer Corps non retrouvé

Cordialement
Dominique
Avec les Allemands, nous nous sommes tellement battus que nos sangs ne font plus qu'un [ Ferdinand Gilson, France, Figaro Magazine n°19053 du 05 nov. 2005 ]
Rutilius
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Re: ENSEIGNE HENRY - Contre-torpilleur

Message par Rutilius »


Bonsoir Dominique,

A propos du matelot LE BARS cité par Daniel, j'ai dans mon fichiier un matelot LE BRAS (j'ai vérifié sur MDH, pas de matelot LE BARS Jean François Marie mais un soldat de 2ème classe du 201ème RI, par contre il y a bien un LE BRAS Jean François Marie)

Il s'agit bien du même matelot. J'ai commis un lapsus calami en rédigeant la synthèse de sa fiche M.D.H. ! Je corrige en conséquence.

Donc cette explosion a fait au moins deux victimes ...

Bien amicalement à vous,
Daniel.
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Ar Brav
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Re: ENSEIGNE HENRY - Contre-torpilleur

Message par Ar Brav »

Bonjour à tous,

Je poste ici le rapport du Cdt de l'Enseigne Henry suite au torpillage de l'Athos et retranscrit par Daniel :

Cordialement,
Franck
Bonjour à tous,


LES CIRCONSTANCES DU TORPILLAGE DE L'ATHOS.

Rapport de mer du lieutenant de vaisseau Marcel Traub, commandant du torpilleur d’escadre Enseigne-Henry, sur le torpillage de l’Athos (document manuscrit non daté : Cote SS Y 185, p. num. 615 à 618).



Le lieutenant de vaisseau Traub (M.-E.-F.), commandant du torpilleur d’escadre Enseigne-Henry, à Monsieur le Capitaine de frégate, commandant la 2e escadrille de torpilleurs.


Commandant,

Conformément aux ordres de Monsieur le Capitaine de frégate, commandant la Provence-IV, j’ai appareillé de Milo, le 16 février, à 5 h du matin, sous les ordres du commandant du Mameluck, pour me rendre à La Sude prendre avec lui l’escorte du paquebot Athos.
Fort frais de N. ¼ N.-E., mer grosse. A 12 h 20, je mouillai en rade de La Sude. Je quittai cette rade le même jour à 15 h, avec le Mameluck, pour aller prendre au large l’escorte de l’Athos. Ce bâtiment devait primitivement rentrer à La Sude vers 11 h du matin ; mais, retardé par le mauvais temps et abandonné pour cette raison par son escorte anglaise, il avait signalé son arrivée vers 16 h au large de l’entrée.
A 16 h 05, nous prenions l’Athos en escorte à 5 milles environ dans le Nord du cap Dripano et gardions route à 13 noeuds sur le canal de Cerigotto.
Je pris poste à bâbord de l’Athos, à 700 mètres, relevant sa passerelle à 10° sur l’arrière du travers. Je me tins à cette position jusqu’à la nuit. Je repris ce poste le lendemain matin au petit jour et le conservai jusqu’au moment où l’Athos fut torpillé.
Dès que nous eûmes franchi le canal de Cerigotto, la mer tomba et, le 17 dans la matinée, il faisait calme ; visibilité bonne.
Le 17, à 9 h 25, par 35°25 et 19°20 E. Greenwich, nous croisâmes par tribord, à 5 ou 6 milles par le travers, un quatre-mâts goélette dont la nationalité ne put être distinguée. Il me parut être un des voiliers américains que j’avais vus précédemment dans le port du Pirée. Je crois devoir vous signaler cette rencontre, bien que je ne pense pas qu’il y ait lieu d’établir une corrélation entre elle et le torpillage de l’Athos qui se produisit à 40 milles plus loin.
A 12 h 27, par 35°22 et 18°32 Est Greenwich, je perçus le bruit d’une explosion assez forte et un peu sourde, ressemblant à un coup de canon de petit calibre tiré à quelque distance. J’étais à ce moment à bâbord de ma passerelle, surveillant l’extérieur. Je crus d’abord que le Mameluck avait tiré sur un sous-marin, mais, ayant immédiatement regardé l’Athos, je vis l’eau provenant de la gerbe due à l’explosion de la torpille s’écouler en nappe le long du bord. L’Athos venait d’être torpillé par bâbord arrière, sous les poulaines de l’équipage, à une vingtaine de mètres de l’arrière.
Je mis immédiatement la barre toute à gauche, différenciai mes machines et pris route à toute vitesse sur le point probable où se trouvait le sous-marin, prêt à mettre en action tous mes moyens offensifs : torpille, grenades et canon. En même temps, je mettais nos embarcations en dehors, prêtes à être amenées pour le sauvetage des naufragés. Je ne vis absolument rien. Après avoir couru pendant quelques minutes sur différents sillages, dus probablement à l’Athos et à l’Enseigne-Henry, j’abandonnai la chasse et commençai les opérations de sauvetage. Il n’y avait alors à l’eau que quelques hommes qui, dès l’explosion, s’étaient jetés à la mer.
A 12 h 37, j’amenai ma baleinière près d’un petit groupe, à 12 h 40, mon youyou auprès d’un autre. Je donnai ordre à mes embarcations de ramasser tous les survivants, d’ailleurs peu nombreux, qu’elles trouveraient en ces points puis de se diriger sur l’Athos en recueillant au passage tous ceux qu’elles rencontreraient et mis en marche à toute vitesse vers l’Athos. Celui-ci avait couru sur son erre et se trouvait à 1 ou 2 milles du point où il avait été torpillé. Il avait d’abord donné une légère bande à bâbord, puis s’était redressé et s’enfonçait très lentement par l’arrière.
A 12 h 40, il commença à se mâter et, à 12 h 41, il s’enfonçait verticalement et disparaissait.
A 12 h 44, j’amenai mes deux berthons sur le bord de la zone des épaves.
A 12 h 48, je stoppai au milieu des embarcations et des radeaux et manoeuvrai pour ramasser du bord les gens qui se trouvaient à l’eau, en presque totalité des sénégalais et des chinois. Il n’étaient d’ailleurs pas en très grand nombre et furent très rapidement ramassés directement du bord dans la région où je me trouvais, ou recueillis par les embarcations que je renvoyais au fur et à mesure, une fois déchargées. J’estime que vers 13 h 05, il n’y avait plus personne dans l’eau.
J’avais complété les armements de quelques embarcations de l’Athos avec le personnel que j’avais disponible, c’est-à-dire le quart de chauffeurs et de mécaniciens non de service, sous la direction du 1er Maître mécanicien. Mr l’Enseigne de vaisseau de 2e classe de Verdelhan des Molles, sur la brillante conduite duquel j’aurai à revenir, avait pris place dans un berthon afin de transmettre mes ordres aux embarcations et de les diriger.
A 13 h 20, je mis en marche et fis route sur un sillage qui m’avait été signalé. Je tirai trois coups de canon, obus A.
A 13 h 25, je stoppai de nouveau au milieu des embarcations.
A 13 h 32, ayant environ 600 personnes à bord (614 après pointage à l’arrivée) et ne pouvant plus en prendre d’autres, je décidai de protéger les opérations du Mameluck qui avait encore quelques radeaux non déchargés près de lui, et remis en marche. Je commençai en même temps à mettre un peu d’ordre à bord et à répartir le personnel entre les postes, appartements, machines, chaufferies et soutes à charbon.
Je communiquai avec le Mameluck et il fut décidé que nous prendrions chacun la moitié des embarcations à la remorque. Je revins à 13 h 48 près des embarcations, stoppai près d’elles et leur donnai l’ordre de se grouper et de se prendre mutuellement à la remorque. Puis j’allai explorer la zone des épaves jusqu’au point origine et m’assurai qu’il n’y avait aucun survivant oublié.
A 14 h 07, je pris cinq embarcations à la remorque et mis en route à 3 nœuds ; mais les remorques cassèrent successivement et les points d’attache cédèrent. Il fallut après plusieurs tentatives renoncer à tout remorquage. Le commandant du Mameluck, qui s’était trouvé aux prises avec les mêmes difficultés, m’informa alors que nous restions à garder les embarcations jusqu’à l’arrivée de la Baliste et de la Moqueuse qui avaient annoncé leur ralliement.
De 14 h 28 à la nuit, je fis des routes diverses à 13 nœuds autour des embarcations.
A 17 h, les embarcations me signalèrent qu’elles avaient des blessés. J’attendis le coucher du soleil et, à 17 h 45, j’amenai ma baleinière et les recueillis. Puis je donnai ordre aux embarcations, commandées par le second de l’Athos et sept hommes du quartier-maître de l’Enseigne-Henry, de se grouper et d’allumer leurs fanaux afin de faciliter leur repérage. Je pris ensuite la ligne de file derrière le Mameluck.
Nous restâmes croiser Nord-Sud près des embarcations jusqu’à l’arrivée de la Baliste, vers 20 h 30.
A 22 h, la Moqueuse rallia. Je lui donnai ordre de m’accoster afin d’opérer le transbordement d’une partie de mon personnel. J’estimai en effet, puisque la Moqueuse était là, qu’il était plus prudent d’évacuer environ 200 hommes. Toutes les apparences semblaient présager un changement de temps, le baromètre baissait légèrement, la brise passait à l’O.-S.-O. et l’horizon était chargé dans l’Ouest. J’étais en outre à 210 milles de La Valette.
La Moqueuse m’accosta à 22 h 35 et me quitta à 22 h 48, ayant près de 255 survivants.
Je fis route aussitôt à 15 nœuds 5 sur La Valette où j’arrivai le 18 à 12 h 47.

*
* *

De l’enquête forcément un peu sommaire à laquelle j’ai pu procéder, il semble résulter que la torpille, lancée à 1000 ou 1200 mètres, a frappé sous une inclinaison d’environ 45° sur l’arrière du travers. S’il en est bien ainsi, en admettant 35 nœuds comme vitesse de la torpille, celle-ci aurait été lancée à 450 mètres environ sur l’arrière de l’Enseigne-Henry. Son sillage n’a été vu par personne à mon bord. Je n’ai à aucun moment vu le sous-marin. J’ai ouvert le feu, par acquis de conscience, sur un sillage problématique. Je n’ai pas jugé devoir lancer de grenades au hasard, étant donné mon très faible approvisionnement de ces engins ; je n’en possède en effet que quatre, nombre réglementaire, deux simples et deux jumelées. J’ai estimé devoir les garder pour le cas où j’apercevrais, ne fût-ce qu’un instant, le périscope ou un sillage certain.
Les opérations de mise à l’eau des radeaux et des embarcations paraissent avoir été faites, à bord de l’Athos, avec le plus grand ordre. Tous les survivants que j’avais à mon bord avaient un moral excellent ; ils m’ont donné l’impression qu’il n’y avait pas eu de panique. Je crois devoir cependant signaler qu’une assez grande quantité de radeaux n’ont pas été utilisés ; ils flottaient vides d’occupants.
Le commandant de l’Athos, le capitaine au long cour Dorise, n’a quitté son bord qu’au moment où le bâtiment sombrait ; il a été atteint à la tête par l’une des cheminées. Il a été sauvé, ainsi que Mr le Contrôleur des services maritimes Maurel, par Mr l’Enseigne de vaisseau de 2e classe de Verdelhan des Molles qui, tout habillé et sans ceinture de sauvetage, s’est jeté à l’eau de son berthon pour les aider à atteindre un radeau puis une embarcation. Le commandant de l’Athos, pris de congestion, s’était évanoui dans l’eau ; recueilli à mon bord, il n’a pu être rappelé à la vie et a expiré quelques instants après son arrivée, vers 12 h 55. J’ai conservé son corps et l’ai ramené à La Valette.
L’Athos avait pu, avant de couler, lancer un S.O.S. ; j’ai fait le même signal à 12 h 50 et l’ai renouvelé à 14 h 30 en le rectifiant, la première position étant éloignée de 7 milles.
A 12 h 55, j’ai reçu de l’Asie en clair le signal suivant
: « Devons-nous nous diriger sur les lieux ? », auquel j’ai naturellement répondu : « Non ». Je crois devoir vous signaler ce fait qui semble indiquer que les commandants des bâtiments de commerce n’ont pas encore bien compris les dangers auxquels ils s’exposent en émettant des signaux et en venant au secours de bâtiments torpillés.
Je dois également vous informer que, vers 16 h, ma vigie m’a signalé un vapeur en vue vers le N.-O ; ce navire n’avait pas, en admettant qu’il fut muni de T.S.F., appliqué assez largement les règles de déroutement.

J’avais pu recueillir à bord de l’Enseigne-Henry :

- Femmes…………………………………......................... 20
- Enfants……………………………………......................... 6
- Femmes de chambre………………………..................2
- Passagers civils……………………………...................18
- Marins de l’Etat permissionnaires……..............22
- Officiers de l’Athos…………………………..................5
- Officiers et adjudants…………………….................17
- Militaires européens……………………….................24
- Equipage de l’Athos……………………….................35
- Boys annamites……………………………...................11
- Tirailleurs sénégalais……………………................132
- Chinois……………………………………….......................39
- Blessés………………………………………......................28
-----
359
+ Transbordés sur la Moqueuse 255
-----
Total : 614

Mon second, Mr l’Enseigne de vaisseau de 2e classe Hue, m’ayant demandé de faire sortir les couleurs, cette cérémonie fut l’occasion d’une manifestation qui, après les heures dramatiques de la journée, fut émotionnante et non sans grandeur : tous les survivants, debout sur le pont et découverts, saluèrent le pavillon de trois cris de « Vive la France ! » et de trois hourras.
Je vais en terminant, Commandant, rendre hommage au calme, au sang-froid, à l’entrain et à l’absolu dévouement dont tous, officiers et équipage de l’Enseigne-Henry, ont fait preuve au cours de ces tragiques évènements.

Signé : Marcel Traub.


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Bien amicalement à vous,
Daniel.
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Le cœur des vivants doit être le tombeau des morts. André Malraux.
Rutilius
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Re: ENSEIGNE HENRY - Contre-torpilleur

Message par Rutilius »


Bonjour à tous,


■ Registre historique de la correspondance intéressant le personnel et le matériel du bâtiment – 4 janv. 1916 / 3 janv. 1919 - : Enseigne-Henry, Cote SS Y 185, p. num. 622 et 623.


Note sur la rencontre d’une épave puis d’un sous-marin au cours de la traversée de Bizerte à Milo, du 9 au 12 juin 1917 – Adressée au Chef de division (Hélène).


Convoi composé de Argenfels, Amiral-Nielly, Etonian, escortés par Enseigne-Henry seul. Formation en angle de chasse, Enseigne-Henry en avant de 1000 à 1200 mètres.

Le 12 juin à 7 h 15, aperçu 4 ¼ par tribord objet suspect. Fait route pour le reconnaître.
7 h 40 – Ouvert le feu à 500 m sur l’épave voilier Roland dont l’arrière émerge verticalement de 3 à 4 m. Gouvernail et une partie de la quille visibles. Tiré 16 coups de canon ne produisant aucun effet. Epave peut-être dangereuse. Position : 35° 59’ Nord et 21° 39’ Est.

9 h 27, le même jour – Ma vigie me signale un bâtiment à 4 ¼ par tribord.
9 h 29 – L’Argenfelds me demande si j’ai aperçu un bâtiment qui ressemble à un sous-marin.
Mis à 20 noeuds le cap, d’après les indications de ma vigie, sur le bâtiment signalé, invisible tout d’abord de ma passerelle. Aperçu peu après l’objet suspect ; ressemble à un petit voilier vu de l’avant.
9 h 34 – Reconnu un sous-marin à grande passerelle au moment où il s’émerge et ouvert le feu ; distance estimée : 7 à 8.000 mètres. Position : 35° 50’ N. et 22° 09 E.
Dérouté le convoi, croisé sur les lieux jusqu’à 10 h 55 puis rallié convoi.

L’Argenfels m’ayant dit depuis que sa vigie avait vu émerger le sous-marin. Je suppose que celui-ci, en plongée ou en demi-plongée, n’avait pas vu l’Enseigne-Henry et, ayant manqué son attaque à la torpille, manoeuvrait pour attaquer au canon. Il n’a pu apercevoir l’Enseigne-Henry qui se présentait par l’avant et se projetait sur les navires du convoi qu’assez tard. Je ne m’expliquais pas autrement qu’il ait bénévolement manifesté sa présence.
Le convoi faisait des zigzags de 20° d’amplitude.

Milo, le 13 juin 1917.

Signé : Marcel TRAUB.



■ Journal de navigation n° 6/1917 – du 2 juin 1917 au 12 sept. 1917 – (extraits) : Enseigne-Henry, Cote SS Y 185, p. num. 417 et 418.


Mardi 12 juin 1917.


- 6 h 15 – Mis le cap sur objet suspect au S. 18 W. vrai.

- 7 h 15 – Reconnu l’objet suspect être une épave : bâtiment presque piqué verticalement, l’arrière seul émergeant.

- 7 h 30 – Stoppé.

- 7 h 40 - Manœuvré pour s’approcher de l’épave. Reconnu le voilier Roland, nom écrit sur l’arrière. L. : 36° 59 – G. : 21° 39 gr.

- 7 h 42 – Tiré 16 coups de canon pour essayer de couler l’épave. Pas réussi.

- 7 h 44 – Mis à 240 t pour regagner convoi.

- 9 h 30 – A 9 h 30, aperçu un sous-marin dans le sud à environ 9000 m [mention marginale : 36° 02 N. – 22° 03 E. ]. Tiré 5 coups de canon à 9 h 34.

9 h 35, le sous-marin disparaît.

Foncé sur les lieux et commencé routes en zigzags avec changement de cap toutes les 2 minutes à l’approche du lieu où le sous-marin a plongé. Recherché sans rien. Plus rien vu.

- 10 h 55 – Fait route pour rejoindre le convoi.

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Bien amicalement à vous,
Daniel.
Rutilius
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Re: ENSEIGNE HENRY - Contre-torpilleur

Message par Rutilius »


Bonsoir à tous,


L’explosion d’une bombe flottante en mer Noire, le 31 décembre 1918.


[ Registre historique de la correspondance intéressant le personnel et le matériel du bâtiment – 4 janv. 1916 / 3 janv. 1919 – : Rapport d’accident du Capitaine de corvette BOURDET (E. A. L.), commandant l’Enseigne-Henry, au Vice-amiral, commandant la 2e escadre, Bord, Constantinople, 2 janv. 1919 (Enseigne-Henry - Cote SS Y 185, p. num. 643 à 645 – Rapport incomplet et pages inversées). ]


Résumé :

Alors qu’il escortait de Sébastopol à Constantinople un convoi constitué par le Varna et le Dobwudja ( ?) , le 31 décembre 1918, à 10 h 25, l’Enseigne-Henry rencontra, par 42° 51’ N. et 31° 29’ E., un « objet flottant » par tribord ; il s’en approcha à une quinzaine de mètres afin de l’examiner. L’objet en question avait la forme d’une bouée biconique rouge, légèrement inclinée, d’une hauteur d’environ 80 à 85 cm et d’un diamètre de l’ordre de 35 cm ; il était dépourvu de tout mécanisme apparent. Le jugeant inoffensif, le commandant BOURDET donna l’ordre de s’en emparer. Cueilli à la gaffe, l’objet explosa en retombant sur le pont ; il blessa deux hommes et en projeta trois à la mer, qui se trouvaient à cet instant appuyés à la filière ; leurs corps ne purent être retrouvés. Outre quelques avaries mineures, l’explosion provoqua une large brèche sur une cloison. Après avoir rendu les derniers honneurs aux disparus, l’Enseigne-Henri remit en route à petite vitesse, en raison de voies d’eau.

Appelé au secours, le Bisson arriva à 19 h avec un médecin ; il prit en charge le blessé dont l’état était le plus grave. Il décéda à bord le 1er janvier 1919, dans la matinée.

Le Ruby, dépêché par le Commandant en chef britannique, rejoignit à 21 h l’Enseigne-Henry et le convoya jusqu’à Constantinople, où les deux bâtiments parvinrent le 2 janvier 1919, à 8 h 30.

Les quatre victimes de l’explosion de la bombe flottante furent :

COLOMB Emile, Louis, Arthur, né le 1er juin [la fiche M.D.H. indique 1920 !] à Sisteron (Basses-Alpes) et y domicilié, décédé le 31 décembre 1918 « à bord de l'Enseigne-Henry par l'explosion d'une bombe flottante et tombé à la mer »,Matelot de 3e classe électricien, Matricule n°73233-5 (Jug. Trib. Toulon, 19 janv. 1921, transcrit à Toulon, le 23).

GERME Denis, Henri, né le 2 mai 1897 à [lieu de naissance et domicile non précisés], décédé le 31 décembre 1918 « à bord » par « l'explosion d'une bombe flottante qui l'a précipité à la mer », Matelot de 2e classe canonnier, Matricule n°1606-Boulogne (Jug. Trib. Toulon, 19 janv. 1921, transcrit à Toulon). (*)

LE BRAS Jean, François, Marie, né le 13 mai 1898 à Saint-Derrien (Finistère) et y domicilié, « tué à bord de l'Enseigne-Henry par l'explosion d'une bombe flottante et tombé à la mer - Le corps n'a pas été retrouvé – », le 31 décembre 1918, Matelot de 2e classe canonnier, Matricule n° 109.936-2 (Jug. Trib. Toulon, 19 janv. 1921, transcrit à Toulon). (*)

VIGOUROUX Augustin, né le 26 janvier 1894 à Tartas (Landes) et domicilié à Arcachon (Gironde), décédé le 31 décembre 1918 « à bord du Bisson », à la « suite de blessures causées par l’explosion d’une bombe flottante », Quartier-maître canonnier, Matricule n° 2826-Arcachon (Acte transcrit à Arcachon, le 22 juin 1921) – A s’en tenir au rapport d’accident du capitaine de corvette BOURDET, Augustin VIGOUROUX est décédé non pas le 31 décembre 1918, jour de l’explosion, mais le 1er janvier 1919 au matin. Et, de manière curieuse, sa fiche M.D.H. indique qu’il appartenait au Bisson et se trouvait « en subsistance sur l’Enseigne-Henry » !

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(*) Reprise, à des fins de synthèse, d'une contribution précédente.
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Bien amicalement à vous,
Daniel.

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