Bonjour Corinne, bonjour Renaud, bonjour à tous,
Renaud avait bien raison d'annoncer que les journées qui suivent, narrées par le prêtre brancardier, allaient être tragiques. La guerre montre son vrai visage de mort, de massacres de soldats parfois inutiles.
Heureusement, la journée du 27 août se termine par une note optimiste, presque qu'un symbole 94 ans plus tard du rapprochement Franco-Allemand et européen en général. Mais attention de ne pas tomber dans l'anachronisme ; nous sommes en 1914.
Cordialement
Eric
Lundi 24 août : Villacourt – Bainville-aux-Miroirs
Le réveil a lieu à 3 h. Nous arrivons à Virecourt puis Bayon, à 6 h. ½ environ. On s’arrête à l’entrée du village et la canonnade ne discontinue pas.
Nous sommes tout à coup avertis que des soldats du 142e peu délicats avaient en passant dévalisé nos sacs en emportant même un certain nombre. Je cours à la voiture, et heureusement je retrouve le mien à peu près intact, il n’y manquait que ma boîte de cigarettes que je gardais précieusement comme souvenir d’Avricourt : petit malheur en somme.
[...]
Mardi 25 août : Bainville – Froville
Départ de Bainville à 4 h. après une nuit assez agitée. Cela n’allait pas très bien intérieurement … Nous passons à la gare de Bayon sans nous y arrêter. Nous arrivons à Froville ; de là nous allons prendre plusieurs fois des blessés au poste de secours pour les ramener sur les brouettes brancards à Froville. Le manège devient assez fatigant.
Froville a été complètement pillé par les troupes françaises (m… ?) qui se sait, hélas ! tout permis, trouvant les maisons abandonnées.
[...]
Mercredi 26 août : Froville – Moriviller
Le réveil a lieu à 4 heures, le départ à 6 heures. Nous passons à Einvaux Au-dessus du village, sur un mamelon un triste spectacle s’offre à nos yeux : celui d’un champ de bataille après le combat. Il y a là sur une ligne de nombreux cadavres formés (?) de soldats français du 53e en particulier. Ils sont tombés dans l’assaut à la baïonnette fait pour enlever cette position, tués par des balles ou des obus qui nombreux ont labouré le champ. Déjà ces cadavres dégagent une odeur désagréable. On les fouille pour prendre leur livret, leur nom, leur argent, afin de remettre le tout à qui de droit.
[...]
Cette journée fut remplie de pénibles impressions.
Jeudi 27 août : Moriviller – Franconville
On est réveillé à 5 heures. Nous partons peu après et en chemin l’odeur des cadavres en putréfaction nous suffoque presque. A Franconville, nous trouvons les granges et l’église remplies de blessés allemands que l’ennemi n’avait pas emmenés. Le clocher du village a souffert du bombardement, plusieurs maisons sont détruites, des habitants ont été tués.
[…]
Extrait du 1e carnet de guerre d’un brancardier de la 16e Section d’Infirmiers Militaires, prêtre du diocèse de Rodez
16e section d'infirmiers militaires
Re: 16e section d'infirmiers militaires
Cordialement
Eric ABADIE
Eric ABADIE
Re: 16e section d'infirmiers militaires
Bonjour Eric, Reanud et Vincent
Merci pour ce témoignage Eric,les scénes que l'on imagine ,racontées par ce pretre , sont toujours aussi réalistes et poignantes.. des fois elles sont racontées avec tellement de distance (comme si elles étaient devenues choses courantes , comme habituelles)
On mange sur le champ de bataille au milieu de ces morts. De là on assiste à une violente canonnade non loin de nous ; on regarde éclater les obus où doivent se trouver des fantassins...c est là qu' on se rend compte de l horreur de ce conflit et de ce qu 'on du endurer tous ces poilus et soldats allemands....
cordialement
Corinne
Merci pour ce témoignage Eric,les scénes que l'on imagine ,racontées par ce pretre , sont toujours aussi réalistes et poignantes.. des fois elles sont racontées avec tellement de distance (comme si elles étaient devenues choses courantes , comme habituelles)
On mange sur le champ de bataille au milieu de ces morts. De là on assiste à une violente canonnade non loin de nous ; on regarde éclater les obus où doivent se trouver des fantassins...c est là qu' on se rend compte de l horreur de ce conflit et de ce qu 'on du endurer tous ces poilus et soldats allemands....
cordialement
Corinne
corinne
Re: 16e section d'infirmiers militaires
- je suis à la recherche d'informations concernant un certain Alexandre Ricard, plus communément appelé François, décédé justement ce 20 août 1914, au bois de Murwald, près de Bisping.
Sylvie
Bonsoir à tous,
Voilà la narration de la journée du 20 août. Renaud nous apportera peut être des précisions sur l'unité de Chasseurs Alpins dont il est question et sur les blessés abandonnés dans l'église d'Angviller.
Cordialement
Eric
Jeudi 20 août (1914) : Bisping
C’est une journée qu’il faudrait marquer d’un caillou noir. La canonnade continue. Je monte un village [Angeviller (Angviller)] chercher des brancards. On m’occupe à évacuer les blessés de l’église sur les voitures réquisitionnées. Il faut faire un peu plus vite. Le temps passe, les événements se précipitent, des obus tombent en avant du village. Les balles sifflent.
Nous évacuons tous les blessés que nous pouvons sur les voitures. Nous sommes obligés, faute de voitures, d’en laisser 7 ou 8 dans l’église. Hélas ! C’était avec le plus grand regret car les Allemands, quelques moments après bombardaient le village et l’église où ils durent périr. Notre tâche finie, nous redescendons rejoindre les autres qui déjà avaient marché en arrière. Nous partons précipitamment entraînant nos brouettes, nous marchons pendant 40 km jusqu’à Avricourt, faisant en une fois ce que nous avions fait à l’aller en 2 jours. Dans cette retraite (car il faut alors parler de retraite, qu’il est triste d’avoir à reculer), nous avons connu un danger sérieux d’être pris. Ayant reçu l’ordre en cours de retraite d’aller relever les blessés, nous devons y renoncer parce que les Allemands sont là et nous gênerions les Français dans leur tir, nous trouvant entre les 2 feux. Plus loin, nous allons chercher les blessés dans un village, Guermange, à peine avons-nous le temps, car les balles sifflaient, un tringlot même fut blessé et une balle termina sur la voiture où étaient nos officiers. Traînant nos blessés, nous filons, nous canons.
Heureusement les Alpins sont là ; ils se retranchent à l’entrée du bois et là attendent l’ennemi ; nous leur dûmes le salut, ils se sacrifièrent et criblèrent les Allemands qu’ils laissèrent approcher. Entourés, encerclés, ils tombèrent en nombre, noyés beaucoup dans l’étang. L’artillerie (une batterie bien placée) arrêta un peu l’ennemi et lui fit du mal. C’est dans cette déroute que fut prise la 4e ambulance qui marchait avec nous.
Je l’ai dit : c’est une journée qu’il vaudrait mieux n’avoir pas vécu.
A un village, nous remîmes nos blessés aux voitures et continuâmes notre marche en avant, où plutôt en arrière. Nous revîmes aussi Mézières (Maizières), Moussey que nous avions traversés si plein d’entrain et enfin on s’arrêta exténués de fatigue à Avricourt.
Avant de prendre un peu de repos bien gagné, je vais à la gare embarquer les blessés que le dernier train devait emporter au plus vite, vers 8 heures.
Extrait du 1e carnet de guerre d’un brancardier de la 16e Section d’Infirmiers Militaires, prêtre du diocèse de Rodez
Re: 16e section d'infirmiers militaires
- Bonsoir, je m'ajoute au forum car je cherche des renseignements sur Alexandre RICARD, plus communément appelé François et décédé le 20 août 1914 au bois de Murwald près de Bisping. Je suis impressionnée de lire les récits s'y rapportant et même émue, même si je n'ai pas connu ce grand oncle. Pourriez-vous éclairer mes recherches en me disant comment on peut obtenir le dossier militaire des personnes disparues ? Pensez-vous qu'écrire à la mairie de ce village m'apportera les renseignements que je cherche, à savoir connaître précisément son lieu d'inhumation ?
bonjour Renaud, Eric et vincent
bonjour à tous
je viens de recevoir le dossier militaire de evariste cyprien chancel,j ai de nouveaux renseignements sur son engagement dans la 16éme section d infirmiers( date, officiers etc)
Il y est fait mention des causes de son décés,
Si un scan de ces documents peuvent vous interresser Renaud ,Eric ou vincent ... faites le moi savoir par message privé
amicalement
corinne
- Jean RIOTTE
- Messages : 5774
- Inscription : sam. nov. 05, 2005 1:00 am
Re: 16e section d'infirmiers militaires
Bonsoir Sylvie,
Je vous souhaite la bienvenue sur notre Forum sur lequel vous trouverez de quoi avancer dans vos recherches.
La première chose à faire est de demander aux Archives Départementales le registre matricule de votre grand-oncle. Vous aurez ainsi tout son parcours sous les drapeaux. Pour plus de renseignements, voyez le message permanent se trouvant en tête de la rubrique "Qui cherche quoi?".
Bonnes recherches.
Cordialement.
Jean RIOTTE.
Je vous souhaite la bienvenue sur notre Forum sur lequel vous trouverez de quoi avancer dans vos recherches.
La première chose à faire est de demander aux Archives Départementales le registre matricule de votre grand-oncle. Vous aurez ainsi tout son parcours sous les drapeaux. Pour plus de renseignements, voyez le message permanent se trouvant en tête de la rubrique "Qui cherche quoi?".
Bonnes recherches.
Cordialement.
Jean RIOTTE.
Re: 16e section d'infirmiers militaires
Merci pour votre réponse rapide et bien renseignée. Lire ces témoignages est vraiment bouleversant ; c'est un bond dans le passé, comme si toutes ces années qui nous en séparent n'existaient plus soudain.
Bonne soirée.
Sylvie
Bonne soirée.
Sylvie
- Jean RIOTTE
- Messages : 5774
- Inscription : sam. nov. 05, 2005 1:00 am
Re: 16e section d'infirmiers militaires
Re-,
Nous avons tous connu ces moments d'intense émotion lorsque nous avons débuté nos recherches et enfin compris ce que ces hommes (nos GP, oncles, GO...) ont dû endurer. Mais même après plusieurs années de recherches et de cohabitation avec leur mémoire, l'émotion est toujours présente.
Surtout, ne pas les oublier et passer le flambeau aux jeunes générations.
Cordialement.
Jean RIOTTE.
Nous avons tous connu ces moments d'intense émotion lorsque nous avons débuté nos recherches et enfin compris ce que ces hommes (nos GP, oncles, GO...) ont dû endurer. Mais même après plusieurs années de recherches et de cohabitation avec leur mémoire, l'émotion est toujours présente.
Surtout, ne pas les oublier et passer le flambeau aux jeunes générations.
Cordialement.
Jean RIOTTE.
Re: 16e section d'infirmiers militaires
bonjour à tous, jean, renaud, vincent , ERIC
bonjour Sylvie ,
Jean a trés bien résumé ce que nous ressentons tous. bienvenu parmi nous
Et puis il y a au détour de trés belle surprise , comme E ric qui patiemment retranscrit les carnets de ce pretre brancardier de l
bonjour Sylvie ,
Jean a trés bien résumé ce que nous ressentons tous. bienvenu parmi nous
Et puis il y a au détour de trés belle surprise , comme E ric qui patiemment retranscrit les carnets de ce pretre brancardier de l
corinne
Re: 16e section d'infirmiers militaires
la 16eme section d' infirmiers miltaires. Section sur laquelle il y a tres peu de documents..Renaud sait de quoi je parle..
aimcalement
corinne
aimcalement
corinne
corinne
Re: 16e section d'infirmiers militaires
Bonjour à tous, bonjour Corinne,
je reviens aujourd'hui sur le 14 décembre 1914 que je complète plus avant :
Lundi 14 décembre 1914 VANDENBUSCH – DICKELBUSCH
[…]
« A Dickelbusch (Dikkebus), on nous fait arrêter dans la cour de l’ambulance, où nous trouvons déjà arrivés les brancardiers de la 31e. On se salue et on cause…
La soirée ne devait pas se terminer sans un malheur plus sensible pour nous que tous les autres. Tout à coup un cycliste arrive et apporte la triste nouvelle que nos majors partis en promenade ont été atteints par un obus meurtrier. Vite 2 autos anglaises partent avec plusieurs brancardiers. L’accident est arrivé à l’ancienne division ( ?), près de Wystchaete, où ceux-ci invités par notre médecin chef, allaient prendre la goutte et rendre visite au commandant de la 32e : quittant la route ils passent pour arriver sous un hangar quand un obus tombe au milieu d’eux ; le médecin-chef, notre commandant, est couvert de terre, de paille et de p.. ( ?) mais n’a aucun mal ; le major lieutenant Coste est déchiqueté et tué sur le coup ; un médecin auxiliaire Chancel a les 2 jambes brisées ; un autre est atteint gravement au ventre ; 2 autres sont blessés, l’un à la tête et au bras, l’autre aux jambes mais moins gravement. Un artilleur a été partagé en deux et une partie du corps est suspendue à un arbre ; un autre artilleur est blessé légèrement. C’est dans cet état que nos brancardiers accourus trouvent nos malheureux médecins et un spectacle navrant s’offre à leurs yeux. On les a relevés et on les place dans les autos.
Nous sommes tous impressionnés quand les autos entrent dans la cour de l’ambulance et qu’on descend les blessés et le mort. Notre médecin-chef est à côté du premier chauffeur et descend seul. Celui qui est atteint aux deux jambes gravement demande boire et de la morphine, il souffre. Le mort est mis de côté dans une salle. Les blessés sont mis dans la salle des blessés et on leur fait les pansements et on leur donne les soins que demande leur état. A travers les vitres de la salle nous assistons à tout cela. On voit les pâles figures de ces malheureux. Bientôt le bon M. Chancel expire. C’était avec M. Coste les 2 plus aimés et estimés de nos chefs. On craint que M. Delacarte ne survive pas à ses blessures. On les emporte tous en auto à Reninghelst.
Quant à nous, c’est pour ne rien faire que nous sommes venus à Dickelbusch. A 2h ½ nous reprenons le chemin de Vandenbusch, le cœur gros des tristes événements. Nous avons cette fois été atteints nous-mêmes et payé notre dette à la patrie. Les coups sont toujours plus pénibles. »
Mardi 15 décembre 1914 VANDENBUSCH
« A 10 h ½, je pars avec le caporal Antérieu pour aller à Bailleul acheter 2 couronnes funéraires pour nos 2 officiers morts.
[…]
Dans la soirée, les brancardiers sont allés à Reninghelst à l’enterrement de nos deux malheureux officiers qu’on enterre dans le cimetière où l’aumônier et le pasteur inspecteur prennent la parole. »
Samedi 19 décembre : VANDENBUSCH
A 9 h. ½ nous allons à Reninghelst assister à l’enterrement du médecin auxiliaire Delacarte, mort la veille des suites de ses blessures au ventre. On se range devant l’ambulance. Notre aumônier arrive précédé de la croix portée par un brancardier prêtre : le caporal Antérieu. Je prends place derrière le corbillard, portant une couronne destinée à la tombe de M. Chancel. Un autre brancardier porte à mes côtés celle de M. Costes. Deux autres sont devant le cercueil portant celles destinées à la tombe de M. Delacarte. Le père du défunt, colonel d’intendance, suit le cercueil de nombreux officiers sont là. Le général Grossetti du XVIe Corps prend place dans le cortège et dans l’église à côté du père de celui qu’on va ensevelir. Les brancardiers – prêtres portent le double cercueil de chêne et de plomb. La messe est célébrée par notre aumônier et servie par l’abbé Segards ( ?). Pendant la messe, les orgues jouent, l’abbé Couderc chante le « Dies irae » et autres chants ; l’aumônier dit quelques mots là l’éloge du défunt. Le cortège se rend au cimetière. La cérémonie prend fin sans autre particularité. […]
Extrait du 2e carnet de guerre d’un brancardier de la 16e Section d’Infirmiers Militaires, prêtre du diocèse de Rodez
Mémoire Des Hommes
COSTE Pierre Albert, né le 6 août 1882 à Brézillac, département de l’Aude. Médecin Aide Major à la 32e Division du 16e Corps d’Armée. Mort pour la France le 14 décembre 1914 à Reninghelst (Belgique), de plaies multiples par éclat d’obus. Acte transcrit à Arzens, département de l’Aude, le 20 janvier 1916.
CHANCEL Evariste Cyprien, né le 21 octobre 1888 à Fontainebleau, département de Seine-et-Marne. Médecin Auxiliaire à la 16e Section d’Infirmiers Militaires de Perpignan. Mort pour la France le 14 décembre 1914 à Reninghelst (Belgique) des suites de blessures de guerre. Acte transcrit à Antibes, département des Alpes Maritimes, le 7 février 1917.
DELACARTE Charles Maurice Jean, né le 17 novembre 1895 à ?, département de ?. Aspirant à l’Ecole de Santé Militaire de Lyon. Mort pour la France le 17 décembre 1914 à Reninghelst (Belgique) des suites de blessures de guerre. Acte transcrit à Vincennes, le 28 septembre 1916.
14 décembre 1914
Un obus allemand de 105 (?) éclatant au-dessus des médecins du Groupe de Brancardiers de la 32e Division a tué le Médecin Aide Major Coste et l’Aspirant Chancel, blessé grièvement l’Aspirant Delacarte, blessés les Aspirants Camper et Maniguet.
Extrait du JMO de la Direction du Service de Santé du 16e Corps d’armée cote 26 N 162/7
http://www.jmo.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr/
Il serait intéressant d'avoir de plus amples informations sur l'Aspirant Delacarte. Peut-être y a-t-il une personne de Vincennes sur le forum qui pourrait se procurer sa transcription de décès à la date du 28 septembre 1916 ?
Cordialement
Eric
je reviens aujourd'hui sur le 14 décembre 1914 que je complète plus avant :
Lundi 14 décembre 1914 VANDENBUSCH – DICKELBUSCH
[…]
« A Dickelbusch (Dikkebus), on nous fait arrêter dans la cour de l’ambulance, où nous trouvons déjà arrivés les brancardiers de la 31e. On se salue et on cause…
La soirée ne devait pas se terminer sans un malheur plus sensible pour nous que tous les autres. Tout à coup un cycliste arrive et apporte la triste nouvelle que nos majors partis en promenade ont été atteints par un obus meurtrier. Vite 2 autos anglaises partent avec plusieurs brancardiers. L’accident est arrivé à l’ancienne division ( ?), près de Wystchaete, où ceux-ci invités par notre médecin chef, allaient prendre la goutte et rendre visite au commandant de la 32e : quittant la route ils passent pour arriver sous un hangar quand un obus tombe au milieu d’eux ; le médecin-chef, notre commandant, est couvert de terre, de paille et de p.. ( ?) mais n’a aucun mal ; le major lieutenant Coste est déchiqueté et tué sur le coup ; un médecin auxiliaire Chancel a les 2 jambes brisées ; un autre est atteint gravement au ventre ; 2 autres sont blessés, l’un à la tête et au bras, l’autre aux jambes mais moins gravement. Un artilleur a été partagé en deux et une partie du corps est suspendue à un arbre ; un autre artilleur est blessé légèrement. C’est dans cet état que nos brancardiers accourus trouvent nos malheureux médecins et un spectacle navrant s’offre à leurs yeux. On les a relevés et on les place dans les autos.
Nous sommes tous impressionnés quand les autos entrent dans la cour de l’ambulance et qu’on descend les blessés et le mort. Notre médecin-chef est à côté du premier chauffeur et descend seul. Celui qui est atteint aux deux jambes gravement demande boire et de la morphine, il souffre. Le mort est mis de côté dans une salle. Les blessés sont mis dans la salle des blessés et on leur fait les pansements et on leur donne les soins que demande leur état. A travers les vitres de la salle nous assistons à tout cela. On voit les pâles figures de ces malheureux. Bientôt le bon M. Chancel expire. C’était avec M. Coste les 2 plus aimés et estimés de nos chefs. On craint que M. Delacarte ne survive pas à ses blessures. On les emporte tous en auto à Reninghelst.
Quant à nous, c’est pour ne rien faire que nous sommes venus à Dickelbusch. A 2h ½ nous reprenons le chemin de Vandenbusch, le cœur gros des tristes événements. Nous avons cette fois été atteints nous-mêmes et payé notre dette à la patrie. Les coups sont toujours plus pénibles. »
Mardi 15 décembre 1914 VANDENBUSCH
« A 10 h ½, je pars avec le caporal Antérieu pour aller à Bailleul acheter 2 couronnes funéraires pour nos 2 officiers morts.
[…]
Dans la soirée, les brancardiers sont allés à Reninghelst à l’enterrement de nos deux malheureux officiers qu’on enterre dans le cimetière où l’aumônier et le pasteur inspecteur prennent la parole. »
Samedi 19 décembre : VANDENBUSCH
A 9 h. ½ nous allons à Reninghelst assister à l’enterrement du médecin auxiliaire Delacarte, mort la veille des suites de ses blessures au ventre. On se range devant l’ambulance. Notre aumônier arrive précédé de la croix portée par un brancardier prêtre : le caporal Antérieu. Je prends place derrière le corbillard, portant une couronne destinée à la tombe de M. Chancel. Un autre brancardier porte à mes côtés celle de M. Costes. Deux autres sont devant le cercueil portant celles destinées à la tombe de M. Delacarte. Le père du défunt, colonel d’intendance, suit le cercueil de nombreux officiers sont là. Le général Grossetti du XVIe Corps prend place dans le cortège et dans l’église à côté du père de celui qu’on va ensevelir. Les brancardiers – prêtres portent le double cercueil de chêne et de plomb. La messe est célébrée par notre aumônier et servie par l’abbé Segards ( ?). Pendant la messe, les orgues jouent, l’abbé Couderc chante le « Dies irae » et autres chants ; l’aumônier dit quelques mots là l’éloge du défunt. Le cortège se rend au cimetière. La cérémonie prend fin sans autre particularité. […]
Extrait du 2e carnet de guerre d’un brancardier de la 16e Section d’Infirmiers Militaires, prêtre du diocèse de Rodez
Mémoire Des Hommes
COSTE Pierre Albert, né le 6 août 1882 à Brézillac, département de l’Aude. Médecin Aide Major à la 32e Division du 16e Corps d’Armée. Mort pour la France le 14 décembre 1914 à Reninghelst (Belgique), de plaies multiples par éclat d’obus. Acte transcrit à Arzens, département de l’Aude, le 20 janvier 1916.
CHANCEL Evariste Cyprien, né le 21 octobre 1888 à Fontainebleau, département de Seine-et-Marne. Médecin Auxiliaire à la 16e Section d’Infirmiers Militaires de Perpignan. Mort pour la France le 14 décembre 1914 à Reninghelst (Belgique) des suites de blessures de guerre. Acte transcrit à Antibes, département des Alpes Maritimes, le 7 février 1917.
DELACARTE Charles Maurice Jean, né le 17 novembre 1895 à ?, département de ?. Aspirant à l’Ecole de Santé Militaire de Lyon. Mort pour la France le 17 décembre 1914 à Reninghelst (Belgique) des suites de blessures de guerre. Acte transcrit à Vincennes, le 28 septembre 1916.
14 décembre 1914
Un obus allemand de 105 (?) éclatant au-dessus des médecins du Groupe de Brancardiers de la 32e Division a tué le Médecin Aide Major Coste et l’Aspirant Chancel, blessé grièvement l’Aspirant Delacarte, blessés les Aspirants Camper et Maniguet.
Extrait du JMO de la Direction du Service de Santé du 16e Corps d’armée cote 26 N 162/7
http://www.jmo.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr/
Il serait intéressant d'avoir de plus amples informations sur l'Aspirant Delacarte. Peut-être y a-t-il une personne de Vincennes sur le forum qui pourrait se procurer sa transcription de décès à la date du 28 septembre 1916 ?
Cordialement
Eric
Cordialement
Eric ABADIE
Eric ABADIE