Re: Au détour d'un JMO (21) - Destructions du grand viaduc de Dannemarie
Publié : dim. mai 22, 2011 4:05 am
SUITE AU CHANGEMENT DE CONDITIONS D'UTILISATION DE L'HEBERGEUR D'IMAGES, UNE PARTIE VOIRE TOUTES LES IMAGES ONT ETE EFFACEES.
Retrouvez le sujet intégral ici : http://combattant.14-18.pagesperso-oran ... O_021.html
Bonjour à tous,
Alors que le sujet dormait dans un dossier depuis un an, une intervention d'Yves sur le forum pages 14/18 (1) m'a fait remettre le nez dans cette recherche et prendre enfin le temps de la terminer.
Il est parfois possible d'illustrer les propos des JMO par des images. Cela rend le texte encore plus parlant et laisse vagabonder notre imagination pour approcher un petit peu plus ce qui s'est passé. Comme dans le n° 19, retour au début du conflit, dans les Vosges, dans une compagnie du génie, non loin de Belfort.
Comme souvent, cela commence par une page de JMO, une image, un croquis. Cette petite recherche n'échappe pas à la règle.
Restent sous contrôle quelques poches en terre alsacienne, dont la vallée de la Doller jusqu'à Dannemarie (Dammarkirch en allemand). C'est dans ce dernier secteur, au moment où l'avenir est incertain, que va se dérouler une opération de destruction pour la compagnie 28/3 du génie.

Aidée de travailleurs du 50e RIT, de la 5e compagnie d'auxiliaires du génie, de travailleurs civils notamment, elle a débroussaillé, dégagé des champs de tir, aménagé l'ouvrage du Moulin du Bois (appelé ouvrage de la Madeleine), creusé des tranchées, fouillé pour des abris, mis en état de défense le village en lui-même.
Voici le stade où ils en sont début septembre 1914.

Ces travaux ont toutefois été ralentis en raison de la mission confié à la compagnie : faire sauter un viaduc de Dannemarie.


Le premier, dit "Grand viaduc ", permet de passer la vallée de la Largue du côté de Retzwiller (43 arches qui permettent de le reconnaître à coup sûr sur les CPA, pour une longueur de 500 mètres). On le trouve aussi sous le nom de "viaduc ouest" ou "viaduc sur la Largue".
Le second est un viaduc de 390 mètres de long et haut de 20 du côté de Ballersdorf. Il enjambe le Rossbaechel.
Il est décidé de procéder à la destruction de ces deux viaducs. Si la motivation exacte de cette décision n'est pas indiquée dans les JMO, elle figure dans l'instruction secrète n°1 envoyée le 25 août à la 57e division de réserve dont les unités tiennent encore le secteur. Il s'agit clairement, dans la crainte d'une avancée allemande, d'empêcher l'utilisation de cette voie de chemin de fer stratégique par les Allemands. D'ailleurs ces destructions s'accompagnent du sabotage de la voie ferrée en plusieurs points, de la mise hors service des gares de Dannemarie et d'Ilfurth, alors qu'elles venaient tout juste d'être remises en état par la 1ère compagnie du 5e régiment du génie.
Pour mener à bien cette mission, deux compagnies furent désignées : la 28/1 pour le viaduc de Rossbaechel ; la 28/3 que nous allons suivre pour l'autre ouvrage.
Le 26 août, départ à 3h15 de Retzwiller. Les travaux sont rapides pour le "Grand viaduc". En effet, des emplacements existaient déjà dans les deux culées. Le 10 août, ils avaient été désobturés par la compagnie 28/1 en raison du recul après une première avance en Alsace. La seconde offensive française avait entraîné leur réobturation par une cloison de briques.
Pendant qu'une demi-section garde les issues, le reste du peloton met les charges en place. Le travail est achevé à 5h00, "y compris la pose d'un masque en poutrelles à chaque fourreau et un bourrage en sacs de terre" précise le JMO du génie de la place de Belfort.
Le commandant de la 57e DR indique par téléphone que l'heure de la mise à feu sera 13h00. Avant, il faut prévenir les habitants de Dannemarie d'ouvrir leur fenêtre afin d'éviter les bris de vitres. Les ordres écrits arrivent à 11h30. A 13h05 environ, mise et feu. Les deux culées minées sont tombées, ainsi que des piles voisines : 5 travées sont détruites, soit environ 70 mètres de viaduc.

Pour le second viaduc, les travaux sont plus longs car il n'y a pas d'emplacements pré-existants. Il n'est détruit que le 27 août après 1h00 du matin.
Le 27 août, le 1er peloton du 28/3 retourne à Bessoncourt après avoir passé la journée du 26 à essayer, vainement, de détruire une écluse sur le canal Rhône-Rhin. La 114e brigade reprend son mouvement de retraite vers l'ouest. Dannemarie est dans une sorte de no man's land où des patrouilles des deux camps se rencontrent et s'affrontent, avant la marche en avant qui permettra la prise des deux viaducs à la mi-septembre 1914.
Le résultat des destructions est nettement visible sur ces deux clichés pris en octobre 1914.


Mais là n'est pas le problème : les éditeurs de cartes postales français eux-même multiplient les éditions sur le sujet, sans cacher les auteurs de la destruction, allant, pour l'un d'entre-eux, jusqu'à indiquer la compagnie qui a réalisé le travail !

Alors où est le paradoxe ? Patience !
Retrouvez le sujet intégral ici : http://combattant.14-18.pagesperso-oran ... O_021.html
Bonjour à tous,
Alors que le sujet dormait dans un dossier depuis un an, une intervention d'Yves sur le forum pages 14/18 (1) m'a fait remettre le nez dans cette recherche et prendre enfin le temps de la terminer.
Il est parfois possible d'illustrer les propos des JMO par des images. Cela rend le texte encore plus parlant et laisse vagabonder notre imagination pour approcher un petit peu plus ce qui s'est passé. Comme dans le n° 19, retour au début du conflit, dans les Vosges, dans une compagnie du génie, non loin de Belfort.
Comme souvent, cela commence par une page de JMO, une image, un croquis. Cette petite recherche n'échappe pas à la règle.
- Contexte :
Restent sous contrôle quelques poches en terre alsacienne, dont la vallée de la Doller jusqu'à Dannemarie (Dammarkirch en allemand). C'est dans ce dernier secteur, au moment où l'avenir est incertain, que va se dérouler une opération de destruction pour la compagnie 28/3 du génie.
- La compagnie 28/3 :

Aidée de travailleurs du 50e RIT, de la 5e compagnie d'auxiliaires du génie, de travailleurs civils notamment, elle a débroussaillé, dégagé des champs de tir, aménagé l'ouvrage du Moulin du Bois (appelé ouvrage de la Madeleine), creusé des tranchées, fouillé pour des abris, mis en état de défense le village en lui-même.
Voici le stade où ils en sont début septembre 1914.

Ces travaux ont toutefois été ralentis en raison de la mission confié à la compagnie : faire sauter un viaduc de Dannemarie.
- Mission : faire sauter les viaducs de Dannemarie.


Le premier, dit "Grand viaduc ", permet de passer la vallée de la Largue du côté de Retzwiller (43 arches qui permettent de le reconnaître à coup sûr sur les CPA, pour une longueur de 500 mètres). On le trouve aussi sous le nom de "viaduc ouest" ou "viaduc sur la Largue".
Le second est un viaduc de 390 mètres de long et haut de 20 du côté de Ballersdorf. Il enjambe le Rossbaechel.
Il est décidé de procéder à la destruction de ces deux viaducs. Si la motivation exacte de cette décision n'est pas indiquée dans les JMO, elle figure dans l'instruction secrète n°1 envoyée le 25 août à la 57e division de réserve dont les unités tiennent encore le secteur. Il s'agit clairement, dans la crainte d'une avancée allemande, d'empêcher l'utilisation de cette voie de chemin de fer stratégique par les Allemands. D'ailleurs ces destructions s'accompagnent du sabotage de la voie ferrée en plusieurs points, de la mise hors service des gares de Dannemarie et d'Ilfurth, alors qu'elles venaient tout juste d'être remises en état par la 1ère compagnie du 5e régiment du génie.
Pour mener à bien cette mission, deux compagnies furent désignées : la 28/1 pour le viaduc de Rossbaechel ; la 28/3 que nous allons suivre pour l'autre ouvrage.
- Déroulement des opérations de destruction :
Le 26 août, départ à 3h15 de Retzwiller. Les travaux sont rapides pour le "Grand viaduc". En effet, des emplacements existaient déjà dans les deux culées. Le 10 août, ils avaient été désobturés par la compagnie 28/1 en raison du recul après une première avance en Alsace. La seconde offensive française avait entraîné leur réobturation par une cloison de briques.
Pendant qu'une demi-section garde les issues, le reste du peloton met les charges en place. Le travail est achevé à 5h00, "y compris la pose d'un masque en poutrelles à chaque fourreau et un bourrage en sacs de terre" précise le JMO du génie de la place de Belfort.
Le commandant de la 57e DR indique par téléphone que l'heure de la mise à feu sera 13h00. Avant, il faut prévenir les habitants de Dannemarie d'ouvrir leur fenêtre afin d'éviter les bris de vitres. Les ordres écrits arrivent à 11h30. A 13h05 environ, mise et feu. Les deux culées minées sont tombées, ainsi que des piles voisines : 5 travées sont détruites, soit environ 70 mètres de viaduc.

Pour le second viaduc, les travaux sont plus longs car il n'y a pas d'emplacements pré-existants. Il n'est détruit que le 27 août après 1h00 du matin.
Le 27 août, le 1er peloton du 28/3 retourne à Bessoncourt après avoir passé la journée du 26 à essayer, vainement, de détruire une écluse sur le canal Rhône-Rhin. La 114e brigade reprend son mouvement de retraite vers l'ouest. Dannemarie est dans une sorte de no man's land où des patrouilles des deux camps se rencontrent et s'affrontent, avant la marche en avant qui permettra la prise des deux viaducs à la mi-septembre 1914.
Le résultat des destructions est nettement visible sur ces deux clichés pris en octobre 1914.

- A la guerre comme à la guerre : ne pas être à un paradoxe près !

Mais là n'est pas le problème : les éditeurs de cartes postales français eux-même multiplient les éditions sur le sujet, sans cacher les auteurs de la destruction, allant, pour l'un d'entre-eux, jusqu'à indiquer la compagnie qui a réalisé le travail !

Alors où est le paradoxe ? Patience !