Grands mythes de la Grande Guerre

julienf67
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Grands mythes de la Grande Guerre

Message par julienf67 »

Bonjour

Voici un article qui présente différents mythes sur la Grande Guerre : les pantalons rouges, les fusillés, les taxis, l'état major, les offensives, les troupes coloniales, les USA, les blessures, l'Allemagne invaincue, etc

https://histoireguerres.wordpress.com/2 ... -mondiale/

Un certain nombre des infos est tiré du magazine guerre et histoire
garigliano1
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Re: Grands mythes de la Grande Guerre

Message par garigliano1 »

Bonjour à tous

Autour de la personnalité du général André BACH, historien unanimement reconnu comme le grand spécialiste des fusillés de 14/18 comme il l’était dans d’autres domaines, Prisme s’était constitué depuis de nombreuses années. Le général BACH étant le principal rédacteur des articles de Prisme jusqu’à son décès. A ce titre, nous pensons être en mesure d’appréhender la question des fusillés avec une bonne connaissance de ce sujet.

Nous répondrons spécifiquement sur le thème des fusillés.

1-Mais dès 1915 les autorités civiles reprennent le dessus et le contrôle sur l’armée et ce type de pratique diminue du fait du retour de procédures judiciaires plus longues : faux

A nouveau, nous répétons ce que nous avons déjà écrit. A la page 15 de son livre sur les mutineries, Guy Pedroncini mentionne la fin de la période de l’exceptionnalité du recours en grâce au 15 janvier 1915. Ceci est vrai mais uniquement des CdG permanents qui n’ont jugé et fait exécuter qu’une très petite partie de militaires français fusillés. Pour l’immense partie des fusillés, ce n’est que le 20 avril 1917 que la période de l’exceptionnalité du recours en grâce a pris fin, permettant au PR d’assumer seul la responsabilité de faire fusiller des soldats. Cette erreur de Pedroncini a été reprise par l’historien médiéviste Offenstadt à la page 20 de son ouvrage sur les fusillés puis récemment par des archivistes dans la rédaction des sources de la série 11 J au SHD.

En novembre 2014, le général BACH avait expliqué le rôle du politique dans le fonctionnement de la justice militaire. https://prisme1418.blogspot.com/2014/11 ... ns-la.html

Comme il est mentionné sur le graphique présent dans l’article ci-dessus, le pouvoir politique n’a repris que très progressivement la main sur le fonctionnement de la justice militaire. Un peu en octobre 1915, un peu en avril 1916, un peu en mai 1916 et complètement en avril 1917.
Visiblement, malgré nos efforts pour déconstruire les mythes, celui-ci persiste.

2-ceux abattus sans jugement sur le front, parfois dans le feu de l’action. Ce deuxième cas de figure est probablement le plus fréquent, et il est difficile de le quantifier puisque généralement l’officier responsable de l’exécution inscrivait le soldat qu’il avait abattu comme étant mort au combat pour éviter toute enquête ultérieure sur ce crime. C’est un jugement de valeur sans fondement.

Comme le général BACH l’avait explicité lors du colloque de Vic sur Aisne, en dehors des militaires français condamnés à mort par les conseils de guerre, il existe 2 autres catégories de militaires tués par des balles françaises :
-les exécutés sommaires en application ou non de l’article 121 du règlement sur le service en campagne, très vieil article de ce règlement dont la dernière mouture signée par le PR date du 2 décembre 1913 et a donc force de loi.
Les militaires « abattus », soit par les sentinelles en application de l’article 86 du règlement sur le service en campagne, soit par les forces de l’ordre.

Avant la parution des travaux du général BACH dans son ouvrage « les fusillés 14/18 », la « légende » voulait qu’une très grande quantité de militaires avaient été fusillés pendant les mutineries. Les travaux du général BACH ont balayé ce mythe. La plus grande quantité de fusillés a eu lieu entre le 01/09/1914 et le 17/10/1915 : exactement 64% (source André BACH/Prisme). Ne pouvant plus mettre en exergue ce mythe, certains milieux (qui ne font par ailleurs jamais la moindre recherche dans les archives) prétendent maintenant que beaucoup de militaires ont été sommairement exécutés durant les mutineries. Les recherches du général BACH n’ont jamais trouvé le moindre indice pour accréditer cette thèse. Pour en avoir parlé avec lui, c’est un mythe qu’il faut combattre.

Il y a eu, tout au long du conflit, des exécutés sommaires ou des abattus. S’agissant de ces 2 derniers cas, les textes même s’ils étaient contestables sur un plan moral, fournissaient un cadre légal du moins quand ils ont été utilisés dans le cadre prescrit (ce qui n’a pas été toujours le cas). L’un a été fourni par le pouvoir exécutif, l’autre par le pouvoir législatif.

Prisme s’est intéressé à ces exécutés sommaires non pas pour tenir une comptabilité mais pour bien séparer les exécutés sommaires ou les abattus des militaires fusillés après un conseil de guerre ordinaire ou spécial, domaine prioritaire de recherche du général BACH et de Prisme comme nous l’avons explicité dans notre dernier article concernant le soldat LE PARC.

Lors du colloque de l’hôtel de ville de Paris en janvier 2014, cette question du nombre de sommaires a été évoquée. Si le nombre de militaires français fusillés par les conseils de guerre ordinaires et spéciaux recensé par Prisme durant le conflit est actuellement de 667, le nombre de sommaires et d’abattus est probablement bien inférieur. Par comparaison, l’historienne italienne Irene Guerrini, présente lors de ce colloque avec Marco Pluviano, a fourni un chiffre de 350 sommaires pour 750 fusillés italiens (pour un nombre de militaires italiens engagés dans le conflit bien inférieur à la France).

Ce n’est pas parce que le nombre de sommaires ou d’abattus serait toujours impossible à déterminer précisément, qu’il faut en déduire qu’ils ont été plus nombreux que les fusillés. Cette affirmation est un jugement de valeur sans fondement.

3- Il ne faut pas oublier non plus qu’une partie des fusillés présents dans les statistiques sont des espions et des criminels.

De quels fusillés parle-t-on ? S’il s’agit des militaires français, le nombre d’espions est très, très faible (environ 0,9%). S’il s’agit de civils français ou étrangers, il est important.
De quelles statistiques parle-t-on ? S’il s’agit des dossiers mis en ligne sur MDH, pour lesquels Prisme avait publié un article dénonçant le chiffre de 1009 fusillés pseudo militaires français alors qu’en réalité presque 200 sont des militaires étrangers et des civils dont une bonne partie de bandits de grands chemins.

4-Le cas de 1917 est révélateur, puisqu’en situation de crise profonde due aux nombreuses mutineries, les peines de mort ont massivement été commuées.

Depuis le 20 avril 1917, la justice militaire qui juge, rappelons-le, « au Nom du Peuple Français » (c’est mentionné en en-tête des jugements) fonctionne comme en temps de paix. La « rechute » de ce fonctionnement pendant les mutineries ne concerne que les cas de révolte à travers la suspension du recours en révision pour les seuls articles 208 et 217 et à travers la suspension du recours en grâce pour réprimer les crimes concertés ou collectifs d’abandon de poste (article 213 du code de justice militaire), de refus d’obéissance (article 218), de révolte (article 217) ou de provocation à passer à l’ennemi (article 208).

Nous rappelons que le jugement pouvait recevoir son exécution dans les conditions visées par les articles 145 et 146 du code de justice militaire sauf dans les cas suivants :
1°) si l'autorité qui a délivré l'ordre de mise en jugement estime devoir recommander le ou les condamnés à la clémence du Chef de l'Etat.
2°) si un ou plusieurs des juges ont signé un recours en grâce.
3°) si le Président de la République a demandé communication du dossier.
Dans ces trois hypothèses, il devra être sursis à l'exécution du jugement jusqu’à ce que je vous aie donné l’avis de la décision du Président de la République.
Si néanmoins vous estimez que même en pareil cas les nécessités de la discipline exigent une prompte répression, vous pourrez, par télégramme, me demander de vous faire connaître la décision du Président de la République dans les conditions déterminées par la circulaire du 20 avril 1917 ». Signé Painlevé.

bilan global 2.JPG
bilan global 2.JPG (90.36 Kio) Consulté 1736 fois
Ça a été le cas pour les 7 de Pétain. On voit donc que si les commutations de peine ont été massives, c’est parce ce que le fonctionnement de la justice militaire avait été remis sous le contrôle du pouvoir politique.
S’agissant des fusillés comme d’autres sujets, pour traiter de cette question, il faut y consacrer de très, très nombreuses heures dans les archives pour pouvoir espérer appréhender et maitriser le sujet.

Nous ne pouvons que recommander à l’auteur du texte de relire les 2 ouvrages du général BACH et les articles de Prisme sur cette question.

Pour information, dans un texte publié le 4 novembre 2013, l’historien médiéviste Nicolas Offenstadt voulait en finir avec 10 idées reçues.
https://www.lemonde.fr/centenaire-14-18 ... 48834.html

Cordialement
Yves
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Stephan @gosto
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Re: Grands mythes de la Grande Guerre

Message par Stephan @gosto »

Bonjour,

Merci Yves pour ce texte. Il est toujours utile et profitable de revenir aux sources régulièrement.

Bonne journée.
Stéphan
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air339
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Re: Grands mythes de la Grande Guerre

Message par air339 »

Bonjour à tous,


Yves est revenu sur le second article, « Les fusillés, situations diverses et complexes ", mais dès le premier article il y a de quoi frémir : « Les taxis sont arrivés trop tard sur la Marne » Non ! Pas plus qu’aujourd’hui, la Marne, en 1914, ne remontait jusqu’à Nanteuil-le-Haudoin.

Florilège :

« les soldats qui attaquent le saillant allemand lors de la bataille de la Marne » : un saillant, mais où donc ? A la maison est de Saint-Soupplet ?

« Les troupes transportées par taxis depuis Paris sont arrivées à la fin de la bataille » : les bienheureux ! Sauf que le transport à lieu le 7 en fin d’après-midi, là ce moment a bataille de l’Ourcq est indécise, et se finira le 10 après le retrait, totalement imprévu, des troupes ennemies.

« dans des secteurs calmes » : la division des As appréciera le "calme". Quand le 104e RI, arrivé la veille par automobile à Silly, atteint Bouillancy, c’est pour soutenir la 14e DI qui est engagée dans un combat très dur.

Ci-dessous, extrait du JMO du 104e RI, le 8 septembre :

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104.jpg (25.21 Kio) Consulté 1506 fois
JMO de la 14e DI, le même jour dans ce secteur « calme » :
14 DI.jpg
14 DI.jpg (44.75 Kio) Consulté 1506 fois

« cette myriade de taxis chargés de soldats a été vu par toute la population sur le chemin du front, depuis le centre-ville de la capitale ». Ladite myriade de taxi a embarqué les troupes à Gagny et Livry, voilà le centre-ville parisien qui s'invite en banlieue !

Tous les articles sont du même acabit.

J’écris cela en mémoire de mes aïeux des 44e et 102e RI, et de leurs camarades combattants de l’Ourcq.

Régis R.
garigliano1
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Re: Grands mythes de la Grande Guerre

Message par garigliano1 »

Bonsoir à tous, bonsoir Stéphan

Il est toujours utile et profitable de revenir aux sources régulièrement.

C’est tout à fait vrai. Beaucoup de recherches, beaucoup d’investigations car rien n’est inné. La génération spontanée du savoir n’existe pas.

Toutes les sources existantes doivent être étudiées, contredites à la manière de J.N. Cru.

Les informations dont on n’a pas la confirmation, doivent être mises de côté jusqu’au jour où une source contradictoire soit trouvée.

Cordialement
Yves
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dominique rhety
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Re: Grands mythes de la Grande Guerre

Message par dominique rhety »

Bonjour,
l'article me fait penser au livre du général Irastorza publié en 2019 : les taxis de la Marne, les pantalon rouges, l'année 1917 fut l'année des fusillés pour l'exemple etc ...
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Dominique Rhéty
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