Bonsoir à tous,
Petite synthèse.
• Le Journal de Fourmies, n° 3.919, Dimanche 5 octobre 1919, Supplément, p. 1.
« — Ainsi que nous l’avons annoncé, M. Charles-Valentin Wiart, ancien maire de Wignehies, a comparu devant le Conseil de guerre d'Amiens, le 24 septembre, pour intelligences avec l'ennemi. Quand arrivèrent dans la commune les allemands, ils n'y trouvèrent pas le maire, M. Mercier, qui avait rejoint son régiment. L’adjoint fut mis à pied et ils nommèrent à la fonction de maire Charles Wiart. Celui-ci fut leur auxiliaire complaisant ; il forma une garde municipale destinée surtout à persécuter ses concitoyens et prit arrêtés sur arrêtés pour favoriser les réquisitions ennemies. Trois soldats se cachaient dans la commune ; il les dénonça. Pour l’un, il fit cerner la maison et le malheureux dut se rendre. Il fut condamné à la déportation. Il tenta d’en affamer un autre pour l’obliger à se livrer lui-même. Comme il n’y réussissait pas, il le fit arrêter, ainsi que sa femme. Le malheureux, désespéré, se pendit.
Pour sa défense, Wiart a prétendu n'avoir agi que par ordre de la kommandantur allemande.
Après la lecture du rapport, de l’acte d'accusation, et l’audition des témoins, le Commissaire du Gouvernement a prononcé un réquisitoire sévère à l’égard de l’accusé. Il a d’abord déclaré que M. Théophile Piéton, herbager rue de Rocquigny, inculpé pour le même fait, restait toujours suspect, mais qu’en raison des charges insuffisantes relevées contre lui, l’instruction a été suspendue jusqu’à ce que d’autres charges fussent révélées par la suite et qu’il bénéficiait d’un non-lieu. L’accusation a développé en termes incisifs et impressionnants tous les actes d’accusation blâmant la conduite de l’accusé Wiart et de ses collaborateurs, en faisant ressortir toutes les coïncidences troublantes qui l’ont amené à terroriser toute une population de 3.000 habitants, dans l’intérêt de l’ennemi, et à provoquer la condamnation à mort du facteur Damerose et du soldat Théophile Carpentier, prisonnier de guerre évadé (1). Elle a démontré que l’exécution de Carpentier avait entraîné trois autres victimes : sa femme, condamnée elle-même à 3 ans de forteresse pour n’avoir pas livré son mari dissimulé, et qui s’est suicidée dans sa prison, et la mort de deux enfants en bas âge, conséquence de l’évacuation en France libre de 6 orphelins, due à l’initiative de M. Wiart. Elle a fait allusion a une déposition tardive d’Alice Carpentier (2), l’aînée de ces 6 orphelins, transmise en séance, par le tuteur, M. Eugène Carpentier, qui pourrait donner lieu à complément d’enquête, l’instruction étant close.
Cette déposition semble préciser les faits et démontrer que l’accusé aurait agi vis à vis de Carpentier de même que pour Damerose. L’accusation termina en demandant au verdict d’être impitoyable.
Après une chaude plaidoirie dans laquelle le défenseur chercha à réfuter toutes les charges d’accusation, à démontrer l’innocence de l’accusé, et enfin à plaider son acquittement, le Conseil, après avoir délibéré, l’a reconnu coupable, en admettant les circonstances atténuantes et l’a condamné à la peine de 3 ans de prison et les frais, avec le bénéfice de la loi de sursis, en raison de ses bons antécédents. »
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(1) CARPENTIER Théophile, né le 15 avril 1878 à Serain (Aisne), fusillé par l’ennemi le 24 septembre 1916 à Fourmies (Nord). Soldat de 2e classe, 10e Régiment d’infanterie territoriale, matricule n° 15.577 au corps, classe 1898, n° 1.445 au recrutement de Saint-Quentin.
• Fils de Désiré Joseph CARPENTIER, né vers 1846, domestique [Manouvrier en 1903], et d’Adèle Catherine LORQUIN, « ménagère », née vers 1856, son épouse (Registre des actes d’état civil de la commune de Serain, Année 1878, f° 11, acte n° 20).
• Époux de Modestine Blanche DIEU, née le 20 novembre 1877 à Saint-Michel (Aisne) (Registre des actes d’état civil de la commune de Saint-Michel, Année 1877, f° 64, acte n° 185), sans profession [Ouvrière de filature en 1899], avec laquelle il avait contracté mariage dans cette commune, le 24 octobre 1903 (Registre des actes d’état civil de la commune de Saint-Michel, Année 1903, f° 103, acte n° 208).
Fille d’Alphonse Louis DIEU, décédé le 4 avril 1892 à Saint-Michel, ancien « ouvrier en chaussures », et de Reinette Élisa BRASSEUR, née vers 1851, « ouvrière en chaussures » [en 1877], son épouse (Ibid.).
(2) Née le 23 juillet 1899 à Fourmies (Nord) (Registre des actes de naissance de la commune de Fourmies, Année 1899, f° 45, acte n° 175), femme de chambre [en 1927].
Épouse d’Adrien Albert ARIBERT, né le 9 janvier 1882 à Saint-Jean-d’Angély (Charente-Inférieure —aujourd’hui Charente-Maritime —), forgeron, avec lequel elle avait contracté mariage à Paris (XIVe Arr.), le 23 juillet 1927 (Registre des actes de mariage du XIVe arrondissement de Paris, Année 1927, acte n° 1.200).