roi albert Ier

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Haudromont
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Re: roi albert Ier

Message par Haudromont »

Que dit la constitution belge au sujet du commandement de l'armée ?

Article 64 : « Le roi ne peut exercer aucune de ses prérogatives sans le concours d’un ministre qui se rend de plein droit responsable de l’acte. »
Article 68 : « Le roi commande les forces de terre et de mer, déclare la guerre, etc. »

« L’article 68 est emprunté à la Charte française de juillet 1830, et cette charte, comme la nôtre, avait copié la Constitution anglaise. Or le roi de Grande-Bretagne, tout en étant investi du commandement de l’armée, ne peut exercer le pouvoir si ce n’est par l’intermédiaire d’un ministre. On doit donc inférer de là que les constituants de 1830 n’ont pas voulu affranchir le pouvoir royal de la responsabilité ministérielle quand il s’agit du commandement militaire.
A l’occasion de la campagne des dix jours, en août 1831, le ministre de la guerre accompagnait le roi, commandant en chef, et contresignait tous les ordres d’opération. » (Les pouvoirs militaires du roi d’après la Constitution belge, article du général de Selliers dans la Revue Belge)

Monsieur Ganshof van der Meersch, haut magistrat belge, éminent spécialiste de droit constitutionnel, note : « qu’on ne saurait invoquer des principes généraux de droit pour soutenir que le commandement de l’Armée peut être soustrait à la règle de la responsabilité ministérielle et être exercé comme un pouvoir personnel. » Il estime que l’esprit de la Constitution condamne la thèse de la prééminence royale car dit-il « L’esprit comme le texte de la Constitution s’inspirent de la prééminence nationale. » Il note enfin que l’article 68 de la Constitution attribue trois pouvoirs au roi : commander les forces de terre et de mer, déclarer la guerre, faire les traités de paix, d’alliance et de commerce, et que, du moment que les deux derniers actes ne peuvent être accomplis, selon une interprétation incontestée, que sous le couvert de la responsabilité ministérielle, il en est de même du premier. » (Ganshof van der Meersch. Le commandement de l'armée et la responsabilité ministérielle en droit constitutionnel belge. Des rapports entre les Chefs de l'Etat et le Gouvernement en droit constitutionnel belge. In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 3 n°1, Janvier-mars 1951. pp. 197-199)

« Dès 1911, le général de Ryckel, sous-chef d'Etat-major général, puissamment appuyé par le général Jungbluth, chef d'Etat-major général, aide-de-camp et ancien précepteur du roi, avait cherché à faire prévaloir que l'Etat-major général devrait, en temps de paix comme en temps de guerre, relever directement du roi, commandant en chef et, à ce titre, « personnellement responsable » de la préparation à la guerre et de la conduite des opérations. Le ministre de la guerre n'aurait plus, d'après cette thèse, qu'à assurer l'administration de l'armée et à défendre au parlement son budget. Ce serait là une violation évidente de la constitution, qui a expressément voulu garantir l'inviolabilité de la personne du roi et couvrir la couronne en toutes circonstances par la responsabilité ministérielle. Aussi, malgré des intrigues peu reluisantes, qui ont déjà été dévoilées par les « Mémoires » du général de Ryckel et sur lesquelles d'autres « Mémoires » jetteront certainement une lumière plus grande, le général Hellebaut, feu mon père, ne consentit-il jamais à violer son serment en se faisant, contre la constitution, l'instrument des visées ambitieuses de certains conseillers personnels du roi, et ce fut même la cause de son départ du ministère en février 1912. M. de Broqueville adopta énergiquement la même attitude dès qu'il eût pris le portefeuille de la Guerre. »
« La Constitution belge attribue au Roi, sous le couvert de la responsabilité ministérielle, le commandement des « forces de terre et de mer », sans faire aucune distinction entre le temps de paix et le temps de guerre. En temps de guerre, les opérations doivent être exécutées dans les vues du gouvernement, par un général, libre mais personnellement responsable du choix des moyens. » (lieutenant-général Hellebaut, Quelques mots au général Galet, Revue belge, 1924)

« Il semble que le modus-vivendi adopté pendant le cours de la guerre 1914-1918, (…) témoigneraient plutôt de la volonté du baron de Broqueville de couvrir le roi dans les actes qu’il accomplissait comme commandant de l’armée que du souci du commandant en chef de n’agir que sous le couvert de la responsabilité ministérielle, même dans la conduite des armées. » (Ganshof. op. cit)

Le roi interprète la constitution de façon toute personnelle

Le 8 août, « on fait dire aux commandants de division de proposer directement au GQG, sans passer par le ministre, les nominations d’officiers et de sous-officiers. » (Carnets des officiers d'ordonnance du roi Albert I (1914-1918) Archives de l’Etat (Belgique), disponibles en ligne)
« On reproche à des généraux leur manque d’accord avec le souverain dont ils ignoraient, le plus souvent, la pensée, parce que le roi traitait avec ses conseillers personnels en-dehors des autorités responsables ou qualifiées, et parce que celles-ci ne recevaient, tout au plus, que de vagues et rares directives. » (lieutenant-général Hellebaut, op. cit.)

A Anvers, en 1914, « une crise se dessinait, dont M. Ganshof a noté la saisissante analogie avec celle que Léopold III allait connaître le 25 mai 1940. Mais les circonstances générales accorderaient, au père, un destin plus miséricordieux que celui qu’elles réservaient au fils. » (Les relations entre le roi commandant en chef de l’armée et le gouvernement belge en 1914-18, Jacques Willequet, Revue d'histoire moderne et contemporaine, 1954)

La question royale qui a mis en cause l’attitude du souverain de 1940 trouve sa source en 1914 - 1918, mais l’issue victorieuse de la guerre a évité au roi Albert la crise causée par l’attitude de Léopold III, qui, en fils respectueux a suivi le chemin tracé par son père. Le fils cependant, contrairement à son père, avait, dès le début du conflit, inséré l’armée belge dans le dispositif franco-britannique.


Problèmes de commandement

Dans la place d'Anvers, « La présence du souverain compliquera l’exercice du commandement. (…) Le 18 septembre, le général commandant la position fortifiée donne l’ordre d’établir des retranchements à 6 km en avant de la ligne principale. Trois jours après, le commandant de l’armée de campagne se substituant au commandant de la position fortifiée, donne l’ordre de pousser plus en avant les postes extérieurs, qui sont ainsi hors d’état d’être appuyés efficacement par le canon de la place et de tenir sérieusement. Ils battent en retraite sous la première poussée allemande. » (Ecole d'application d'artillerie. Fortification : Tome 2, la fortification pendant la guerre 1914-1918. 1935)
Il y a, à Anvers, deux commandements. Le général commandant de la place n’est pas en mesure de parler d’égal à égal au général commandant de l’armée de campagne étant donné que celui-ci est le souverain qui prétend commander seul l’armée.


Après la sortie d’Anvers, le haut-commandement belge n’a pas l’intention de combattre aux côtés des Alliés : « Le 10 octobre, le général Pau informe le général en chef qu’au cours d’une séance d’un conseil militaire présidé par le roi, à laquelle il assistait, il a été décidé que l’armée belge poursuivrait son mouvement de retraite et franchirait la frontière pour gagner la région Sud-Ouest de Calais, Saint-Omer. (…) Le commandant en chef s’élève aussitôt contre cette décision. Il estime en effet que l’armée belge ne doit pas renoncer, sans y être contrainte par l’ennemi, à coopérer avec les forces alliées à la défense de son territoire. » (Les Armées françaises dans la Grande Guerre, tome Ier, 4e vol., 3e partie, chapitre XI)

« (…) le roi Albert n’était nullement préparé à ses lourdes responsabilités actuelles. Non seulement la technique de chef d’armée lui fait défaut ; mais, ce qui est plus grave, le caractère et le tempérament indispensables lui sont totalement étrangers. (rapport du colonel Génie, attaché militaire français près du GQG belge, rapport du 4 août 1916, cité par Albert Duchesne dans son article « L’armée et la politique militaire belges de1871 à 1920 jugées par les attachés militaires de France à Bruxelles », In: Revue belge de philologie et d'histoire. Tome 40 fasc. 4, 1962)
Dans un autre rapport de décembre 1916, le même colonel fait du roi un portrait simple et humain, bien éloigné des clichés excessifs: « Je ne voudrais pas avoir l’air de mésestimer la grande figure du roi qui jouit chez nous d’une telle popularité si bien méritée. Mais cette popularité résulte, je crois, de raisons étrangères à la guerre. Le roi n’est ni un chevalier ni un paladin ; il n’aime pas la guerre qu’il connaît mal ; il trouve qu’elle a assez duré et son cœur sentimental s’attendrit sur des souffrances dont il n’aperçoit pas le terme… » (Duchesne, op.cit.)
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Arnaud Carobbi
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Re: roi albert Ier

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