Recherches sur "Le mot du Soldat"

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gchl
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Re: Recherches sur "Le mot du Soldat"

Message par gchl »

Bonjour à tous,

Je suis un peu novice quant à l'utilisation de ce forum, donc je vous prie de m'excuser à l'avance si mes propos sont répétitifs, pas clairs, pas dans les normes…
Voilà, je suis actuellement en pleines recherches sur l'organisation clandestine qu'était "Le Mot du Soldat" durant 14-18. Ils se chargeaient de transmettre des lettres de soldats sur le front vers leurs familles, et vice versa. Personnellement, je me concentre sur les courriers des Belges passant par la frontière belgo-hollandaise pour rejoindre le front de l'Yser (et chemin inverse bien sûr)
J'ai trouvé beaucoup de documentation, mais j'arrive à un point où je stagne. Je viens donc demander votre aide !
Y aurait-il sur ce forum quelqu'un capable de m'aiguiller, de m'en apprendre encore un peu plus sur le fonctionnement de cette organisation? Par des liens, des travaux, des contacts, voire même des descendants ?

D'avance merci pour votre aide précieuse :hello:
Rutilius
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Re: Recherches sur "Le mot du Soldat"

Message par Rutilius »


Bonsoir, et bienvenue,


L’œuvre de droit belge « Le Mot du soldat » a fait l’objet, après-guerre, de l’ouvrage suivant :

— « Histoire du " Mot du soldat " », préface de Son Éminence le cardinal Mercier, Éd. Veuve Paul Ryckmans, Maline, 1920, in-8°, 125 p.


La Croix, n° 11.338, Mercredi 10 mars 1920, p. 3.


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Bien amicalement à vous,
Daniel.
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stcypre
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Re: Recherches sur "Le mot du Soldat"

Message par stcypre »

Bonjour,

J'ai travaillé la résistance durant la guerre de 14-18... passages de courriers, de soldats pris dans la nasse, réseaux de résistance comme celui de la Dame Blanche, etc... si je peux vous aider...
Cordialement.
J.Claude
la vérité appartient à ceux qui la recherchent et non à ceux qui croient la détenir.
gchl
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Re: Recherches sur "Le mot du Soldat"

Message par gchl »

Merci à tous les deux pour vos réponses !

Bonne journée !
smorance
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Re: Recherches sur "Le mot du Soldat"

Message par smorance »

Bonjour,

si vous avez fait des recherches sur le "Mot du Soldat", pouvez-vous me donner des précisions sur cette organisation à Ath et dans la région, et l'action de Joseph Hoyois, député catholique pour l'arrondissement Tournai-Ath ?
Merci beaucoup pour votre aide.

S. Morancé
gchl
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Inscription : mer. févr. 19, 2014 1:00 am

Re: Recherches sur "Le mot du Soldat"

Message par gchl »

Bonjour,

Je dois avouer que mes recherches sont tellement faibles que je serais incapable de vous aider sur ce point. Mais si par hasard je tombe sur des infos, je tâcherai de me souvenir de vous.

Bonne soirée
teag1934
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Inscription : lun. oct. 20, 2014 2:00 am

Re: Recherches sur "Le mot du Soldat"

Message par teag1934 »

Chers amis c'est un peu par hasard que je suis tombé sur ce forum où vous vous intéressez au 'Mot du Soldat'. Mon oncle, Joseph Devred de Tournai - je suis tournaisien aussi, jésuite, vivant à Nairobi - a été très engagé dans l'oeuvre du 'Mot du Soldat' avec toute sa famille. Le 8 août 1916, il fut arrêté. Gardé d'abord à la prison de Tournai, il fut transféré le 31 août à la prison de Malines. Il fut un élément majeur du procès sur l'oeuvre et envoyé le 1 juin 1917 en Allemagne, prison de Anrath. Il en revint à la fin de la guerre.
Il a rédigé et dactylographié tous ses souvenirs - une trentaine de pages - racontant l'engagement pour le Mot du Soldat, sa vie en prison à Tournai, à Malines, à Anrath et le procès lui-même.
Ce cahier contient plusieurs examplaires du 'Mot du Sodat' et de nombreuses notes manuscrites écrites sur toutes formes de papier, écrites tellement petites, qu'il est difficule de les lire.
J'ai commencé la transcription de quelques documents que j'affiche ici. J'espère que ce n'est pas trop long!
Que faire de ces documents? Ils ne seront pas gardés dans la famille et je fête demain mes 80 ans.
Merci pour vos suggestions.
-------------------
Œuvre du « Mot du Soldat »
Le travail du « Mot du Soldat » consistait tout d’abord dans l’impression de feuillets-lettres. Ceux-ci étaient remis à quelques chefs de groupe qui les distribuaient à ceux de leur connaissances qui désiraient écrire au front.
Chaque semaine, les chefs de groupe repassaient prendre les billets écrits et les remettaient à l’un d’entre eux désigné pour les transmettre à la direction. Batt, horloger, groupant pas mal de gens de la campagne, était certainement le plus important chef de groupe. Venaient ensuite : le Père Mazure, Carbonelle, Compagnon, Brasseur, Bodart, Pipers, le Chanoine Demeuldre, Derely, Wastrat, d’Espierres, Leroy, Blanquart, etc. Tous les paquets aboutissaient finalement chez l’Abbé Morel, rue du Château.
Chaque billet était numéroté : souche et feuillet. La souche était détachée ; elle portait un numéro et l’adresse de l’expéditeur. Toutes ces souches étaient remises alors chez les Dames de Saint André et une religieuse transcrivait fidèlement numéro et adresse dans un registre marqué « La Confrérie de Saint Michel ».
Théoriquement, le soldat ne devait pas mettre l’adresse du destinataire sur la réponse ; il suffisait de mettre le numéro. Le registre de la Confrérie donnait l’adresse correspondante. Mettre une adresse constituait un danger mais le soldat ne s’en doutait pas.
Chaque semaine, quelques 400 billets furent envoyés. L’œuvre fonctionna normalement pendant toute la guerre. Un certain Windal de Woodeck allant régulièrement à Bruxelles par le tram Ath-Enghien, portait les paquets à la 71eme commune, c’est-à-dire, rue de la Commune, n° 71. Il revenait de Bruxelles avec des clandestins… La libre Belgique ou Ame Belge etc.
Il y eut quelques arrêts en raison d’arrestations mais, sur la durée de la guerre, 12.000 envois furent assurés don 6.000 par la section de Tournai.
Bien souvent, des paquets de réponses destinés à Valencienne, Lille et même Gand et Bruges, arrivaient à Tournai. Il fallait alors les diriger discrètement vers ces régions.
Le Mot du Soldat demandait un appoint de 0,20 à 0,25 f. par billet pour couvrir les frais d’impression et d’expédition. D’autres correspondances arrivaient également mais elles étaient souvent fort coûteuses.



Transcription du message de Julia Devred à Henri Devred.
TAI 1033 SOLDATS ! Confiants en Dieu et votre héroïsme
Nous attendons votre retour triomphal !
Monsieur Henri Devred
Reg. 1rs Carabiniers ………………Bon 1er…………………Cie 2eme
6eme
Armée Belge en campagne Œuvre du MOT DU SOLDAT
CORRESPONDANCE Mon cher Henri 21 juillet
Jamais notre fête nationale n’a été aussi bien célébrée en Belgique !... Depuis quelques jours déjà les
affiches « Fermé le 21 juillet » pendaient aux fenêtres des magasins et ce matin quand je me suis levée
Je me serais crue un jour de grande fête. Tout le monde avait fait toilette et portait
au manteau ou au veston « une feuille de lierre » (qui remplace nos couleurs que l’on défend de porter)
Le Te Deum habituel a été remplacé par une Messe Solennelle à la cathédrale ! Tout était comble,
archi-comble. Nous sommes arrivés bien avant la messe. Toute la famille y était et nous avons eu
toutes les peines du monde à trouver une chaise pour maman ; ce midi, tu penses bien de quels refrains
patriotiques nous allons accompagner notre repas car nous sommes tous bien gais. Nous avons reçu
hier de tes bonnes nouvelles (indirectement par Mr L.) datées du 10 juillet dit-il et Joseph a très
bien réussi son examen. Mais il faut te dire il a eu une veine de pendu… si les pendus ont
quelques fois de la veine… Il me semble qu’au lieu de se suicider, ils feraient bien mieux de tirer
quelques coups de fusil dans le dos des A. Et sur ce, au revoir, puisqu’à mon prochain cour-
rier dans 15 jours ou trois semaines. Toute la famille se joint à moi pour t’embrasser
bien affectueusement. Ta sœur affectueuse Julia.


Transcription de la réponse de Henri Devred

TAI 1033 No 2 Ϯ Œuvre du « MOT DU SOLDAT »
Soldats la Patrie est fière de vous
-----
DISTRIBUTION GRATUITE
Ranimez votre courage, vos héroïques fils, ramènent en
triomphe le Roi de l’Honneur !
Mes bien chers parents. J’ai reçu avec immense plaisir, il y a quelques jours, vos 2 feuillets par
L’œuvre du MdS. Je vous avais écrit par cette adresse, il y a un mois en même temps qu’à
G. Bernard pour le remercier des bonnes nouvelles qu’elle m’avait données de vous tous.
Ma santé est excellente et il ne manque rien, surtout pas d’argent. Je possède près de 320 Fr.
Cent fois de trop pour que je sois à l’aise et sans souci de ma bourse.
J’ai reçu depuis avril, une lettre de Marie, datée du 10 avril, le 10 mai (un billet pour le noël) –
Le 22 mai, celle de Julia et Joseph datée du 13 avril (lettre pr Mariette) – Le 17 juin, une retardataire
de Julia, datée du 16 Nbre - Le 26 juillet de Joseph & Julia & Mortier (lettre pr Mariette) datée du 9
juin et le 12 août, celle de papa adressée à M. Clément
Mariette de M. à l’arrière, Chautonnay (vendée) m’ envoyé
deux lettres pour Julia. Je les lui ai envoyées par 3 adresses différentes. J’espère qu’elle les possède
en ce moment. L’article pour le noël a paru dans le n° du 3 juin. Melle Delépine me l’a envoyé. Je n’ai
pas reçu la lettre de maman dont Julia me parle dans sa lettre du 9 juin. J’en suis bien triste surtout
que je n’ai encore reçu rien d’elle depuis onze mois. Couquet S.L. & M. Clément présentent à papa
leurs respects. Joseph Lepers a disparu à Beauséjour le 21 mars (120e infanterie). Jean va bien. Il est à
Hamey en vacances. Continuez à écrire tous sur les lettres que vous m’envoyez. Cela me fait beaucoup
de plaisir.
Ne sauriez vous m’envoyer votre photo ! Essayez !
Mille baisers à toute la famille & particulièrement à ma petite Lucienne que je félicite de tout cœur
Pour ses grands progrès en écriture.
Di…le 12-9-15 Votre fils reconnaissant. Henri.
En annexe, copie d’un billet envoyé par une personne de Templeuve « A sa Majesté le Roi Albert »

Le procès du Mot du Soldat à Tournai
Pour autant que nous ayons pu reconstituer le procès, il apparaît ceci :
Un paquet de Mot du Soldat avait été saisi en route vers la frontière. Une certaine dame « Verbrugge » d’Anvers, portait le paquet, disait-on. Comme les billets, sans adresse d’expéditeur, portaient tous la mention TAI (indicatif de Tournai aux P.T.T.) les recherches furent faites à Tournai.
Le bureau de l’État-Civil devait donner l’adresse de la famille du soldat auquel on écrivait. C’était un travail long et fastidieux… !
Au hasard, les Allemands arrêtèrent quelques personnes, en août 1916. Ils espéraient trouver par les premières dénonciations, la direction de l’œuvre… hélas ! il n’en fut rien. Les interrogatoires ne donnèrent aucun résultat et il fallut entreprendre les recherches complètes à l’Hôtel de Ville.
Du mois d’août au mois de novembre, ce fut à Tournai, le grand travail : Tel soldat… telle famille… tel prénom…etc. Finalement quand tout fut examiné, les arrestations commencèrent.
Entretemps, le Mot du Soldat avait continué de fonctionner et un nouveau paquet avait été intercepté par les Allemands. Novembre fut le mois des grandes arrestations.
Ordinairement, celui qui avait écrit, était interrogé sur l’origine du billet. S’il se souvenait de la personne qui lui avait remis le billet, il était libéré. S’il ne se souvenait pas, il allait réfléchir en prison. Et la réclusion durait environ un mois.
Je fus aussi arrêté et transféré à Malines. Un moment, je faillis être libéré … les billets que j’avais écrits avaient été remis à M. Honoré… et M. Honoré lui-même avouait être le porteur de la rue des Choraux. Pour éviter qu’on soupçonna quoi que ce soit de mes activités, à la rue des Choraux, j’avais accepté les billets que M. Honoré remettait régulièrement à papa.
Hélas ! Honoré avoua avoir remis les billets à la rue des Choraux, et d’autre part, il disait avoir donné les paquets de billets à M. Batt. Ce dernier avoua les remettre … au jeune Devred ! Papa fut donc arrêté pour les billets remis à M. Honoré et Julia pour sa correspondance …inintelligible… aux Allemands.
En janvier 1917, Blanquart avoua avoir imprimé les billets. C’est ce qui motiva mon retour de Malines pour quelques jours. Blanquart n’osant pas faire intervenir l’Abbé Morel, rejetait la faute sur le P. Dessy et sur le curé de Froyennes, tous deux défunts. Et comme j’étais déjà en prison, il me mêla à cette affaire.
Le 7 mai 1917, sans parvenir à éclaircir la situation, eut lieu un premier tribunal.
Le P. Masure fut représenté comme l’organisateur et votre serviteur comme le fac-totum. Puis venaient le différents porteurs. Le P. Masure et moi, nous fûmes envoyés en Allemagne ; les autres devaient passer leur peine en Belgique.
Mais le procès continuait et les arrestations s’opéraient dans les villages : Kain, Froyennes, Templeuve, etc.
Windal, le porteur des paquets de Tournai à Bruxelles, fut lui aussi arrêté à Woodeck. Il parla de moi et je fus rappelé d’Allemagne. C’est ainsi qu’en septembre 1917, je revins pour un mois à Tournai.. J’y fus confronté avec Windal, Hoyois etc. Comme le résultat était nul, je repris le chemin de la prison d’Anrath.
Le commissaire-instructeur du procès, un certain « Morelle (Moale) », avocat, commissaire à la police secrète de Malines, était appelé « commis » ou bien encore « le curieux ». Il était aidé par Kopman, surnommé « Absalon » (il n’avait plus de cheveux), marchand de souliers à Anvers avant la guerre. Un certain « Zeep » procédait aux arrestations.
Après le jugement du 7 mai 1917, ce fut la police secrète de Tournai qui s’occupa du procès
----------------------------
Annexes à « Souvenirs 1914 »
(Feuillet format A4 plié en deux et rempli d’une fine écriture sur 2 pages ½ - document X)
De Julia, Tournai à Joseph en prison à Tournai au moment de son départ pour Malines.
Jeudi 31 août. Maman est au salut de 6 h. et nous rentrons d’avoir cherché la lessive. Nous trouvons le Frère Jean à la porte qui vient pour avoir des nouvelles. Aujourd’hui rien de bien spécial si ce n’est qu’on détruit les casemates. Notre montagne est donc détruite en partie et qu’un agent de police fait le tour de la ville, liste en main, pour savoir combien d’Allem. on a encore à loger et pour combien de temps. Ce soir début à 8 h. et demain adoration de N.D.
Dimanche 3 Sept. Eh bien tu m’en as fait faire des pas… des démarches et maintenant des écritures. Ce matin, je pensais t’écrire mais pas de carte postale. Ce sera pour demain. Je vais commencer mon journal. Crac. Une visite. Henriette qui vient passer la journée à Péronnes. On te dit condamné pour 21 jours. Toujours de la fantaisie. A midi, le Père Tuste vient passer l’après-midi. Toujours de bonnes nouvelles, lui. Les Russes ont fait 10.000 prisonniers. Le Roi de Grèce a capitulé en faveur de son fils. Les troupes roumaines arrivent. Les Alliés ne demandent que la paix etc… etc… Vendredi est passé un dirigeable. Personne ne l’a vu mais tout le monde l’a entendu. C’était un bruit formidable et cela sentait la benzine. [Hier, rien de spécial si ce n’est ton courrier qui nous a fait rire !!! aux larmes !!! Comment la médis. De mon gentil sous-officier. A qui nous avons remis hier du tabac. Sais-tu que c’est grâce à lui que maman a pu se trouver sur ton passage !. Je vais t’expliquer la chose. Vendredi, je suis allée chez Jeanne. C’est R. qui m’a reçue, reconnue. Mr. Est-ce que je puis porter le diner tous les jours à mon frère ?... Ah, c’est impossible, Melle - Mr. Et voudriez vous me donner la permission de le voir ? – Oh non ! – J’insiste… C’est parce que vous ne voulez pas. – Mais, Melle votre frère n’est pas arrêté pour nous et ses juges ne sont pas ici et ne peuvent donner permission.- Eh bien Mr. Où faut-il aller ? A Bruxelles ? Je suis prête à y aller parce que j’aime beaucoup à voir mon frère. Non Bruxelles ne peut rien faire, je regrette mais je ne peux rien. – Mais si Mr. Au moins me permettre de lui envoyer diners. Je vais téléphoner pour prouver ma bonne volonté mais je ne pense pas réussir. J’ai attendu 2 heures et à la fin, il me dit : impossible d’obtenir la communication avec la prison et avec Mons. Ce mot prison n’est pas perdu et je lui demande la permission ordinaire : nourriture et linge. Comme chaque vendredi, je vais chez Jeanne pour obtenir mon papier. Il me semblait que ce n’était pas nécessaire de toujours y revenir et que ton caporal serait assez complaisant pour … Le vendredi précédent, il était écrit sur mon billet que la permission n’était bonne que pour une fois… C’était trop peu de largeur…pour une permission ; aussi, je vais directement trouver le Fr. M. afin qu’il me la traduise car si cette permission n’est bonne que pour une fois, je suis bien décidée à ne pas la présenter. Il était écrit : « Défense absolue à Melle D. de voir et de causer avec son frère ». Comment ai-je eu l’idée de faire écrire au Frère un mot à son SS.off pour demander à qui je dois m’adresser pour te voir. Il répondit que tu vas être à Malines. Surprise puis contentement d’avoir enfin ton jugement. Le Frère M. m’a jugée bien audacieuse d’oser demander à un Allemand ce qu’un autre m’a refusé. Mais tu penses bien que je m’en fiche !... S’il savait toutes nos correspondances ! Oh, ce secret le plus absolu ! Une chose me revient : « L’Allemagne a encore changé de Généralissime des armées. Bon signe hein ! Vendredi soir, nous sommes allées chercher une chemise blanche pour te prévenir de ton départ. Et le lendemain, maman et Germaine ont bien eu de la chance de te voir. Elles sont revenues toute réconfortées. Puis le soir, ce fut délicieux avec ces longues nouvelles. A présent, je vais reprendre le journal en suivant le tien. Mais je m’endors. Bonsoir.]
Lundi, rien d’intéressant que des racontars au sujet de la Hollande et du Japon. Le bruit de ton départ se répand en ville. C’est le grand sujet du jour. Le corps médical part. Il en revient un autre de Lille, dit-on. Je t’ai écrit ce matin. Mr. Le Col a écrit au doyen de St A pour annoncer notre visite. J’en reviens aux événements d’il y a un mois.
[Le mardi de ton départ, jusqu’à 8h ½ nous avons attendu ton retour. Alors Maman et Marie sont très décidées d’aller voir Ph. V-L. Revenez demain 9 h. Aussi nous disons cela à Papa avant de se coucher seulement. Nettoyage de ta chambre. Nous prévenons Mr. Ch. Et nous portons pardessus. Le lendemain, nous allons voir Ph. V.L. Papa doit aller dans l’après-midi. Ton élargissement dépendra de ce que dira Papa. A 3 h. je pars avec Papa. Je ne peux assister à l’interrogatoire. Papa revient rassuré. Punition minime pour le poil à gratter. Le reste de la semaine se passe dans des nettoyages. Visite de nouvelles places très agréables pour la vue et la commodité. Puis visite au Dr. Desmons et gardiens belges. Rien à faire. Le vendredi, plaisir incroyable de recevoir nouvelles. Et le samedi douche incroyable d’apprendre changement. Nous voyageons du Ch. P à d’Esp. etc. Nous apprenons aussi fils Desmons. Le malheur des autres fait qu’on se console un peu. Ici, il faut souvent remonter les poids. Assomption ; triste fête. Nous commençons à douter des demandes si nous pouvons faire quelque chose pour toi. Mr. Leg. Nous engage toujours à faire passer des livres et à attendre. Ms toujours attendre ! Aussi, le vendredi, sans rien dire, un ouvrage dans ma poche et mon livre de messe, je vais voir le V.C et reviens bien contente d’avoir pu obtenir pour la nourriture. J’ai oublié. J’ai oublié la joie que nous avons eue de recevoir ton linge. Le samedi, G. t’a presqu’entendu causer. Samedi, j’apprends que V.L. et Coug. Peuvent avoir nourriture tous les 2 jours. … Je suis désolée que tu n’as rien remarqué pour ton linge. Rien de spécial, jusqu’au V. suivant. Nous trouvons dans une pochette 2 billets et nous brûlons sans remords. Un de ces jours, nous recevons nouvelles et aussi une lettre de toi. Comme vendredi je n’ai pas obtenu permission d’envoyer des livres, nous allons suivre ta lettre signée ‘Dreyffus’ qui nous sert de permission, G. te donne livres et montre. Nous sommes heureux. Le samedi, grand émoi prévu. Après avoir attendu longtemps, nous devons revenir lundi pou rechercher le linge. Le lundi nous nous asseyons sur montage pour voir si c’est enfin que c’est vrai. Germ. Découvre beurre ; joie générale. Nous recopions, lisons et relisons. Le mardi, je réponds et j’apprends arrestation Melle Loyola saisissement. Mercredi …illisible…de recevoir billet facteur. Nous oublions de préparer diner. Je cherche livres. Vois 2 fois …Je casse 2 parapluies. Porte argent. Remets cigares puisqu’il nous donne ton billet. Je voisine cellule R. Mazure. Nous cherchons prétexte pour aller de ce côté. L’intra… de M.. W. ne se prête à rien. Vendredi, Jeudi. Je fais écrire Luce par police secrète. Le vendredi je vais priton ?? après avoir travaille tte la journée pour toi. Grande agitation. J’apprends ton départ maintenant plutôt heureuse d’avoir enfin jugement. Maman, idée sublime ; aller te voir à la gare. Entrevue réconfortante et à présent projets.] Quant aux nouvelles de la ville, j’ignore. Je vais tâcher de les écouter à présent.
Mardi 5. Hier j’ai oublié de te dire que Mr. Leg. a été au … à ta place. Que nous convenons ton ravitaillement au Mevl. On a changé les feuilles. De sorte qu’il a fallu très longtemps sur lesquelles feuilles. Il était marqué quelque chose s’approchant de ‘Minutes’. Tu devines la panique générale et les bruits en ville. C’était tout simplement ‘Modèles’ car il y a 2 nouveaux modèles de cartes.
Jeudi 7 Bien reçu nouvelles hier tous très heureux. La soirée se passe à déchiffrer un rébus et à t’écrire. M. le Ch. vient un moment A Bruxelles et ailleurs, tout le monde a de l’espoir. On annonce quantité de bonnes nouvelles dans la Somme, en Russie et dans les Balkans. Veux-tu un morceau de papier blanc pour coller sur l’œil de l’espion ? Tu ne seras pas vu comme cela.
Vendredi 8. Délestons de notre tête toutes les nouvelles qui y sont accumulées. D’abord chez Marquette, on m’a dit qu’on réquisitionnait le caoutchouc des vélos et chambres à air. Gare ! Dans les banques, on fait une saisie des coffres étrangers. Quelques banquiers refusent. A Gibraltar, on passe facilement. Si on est pris, 24 jours de prison. Est-ce tout ? Notre voyage se décide et se précise de plus en plus. Demain, j’irai jusqu’à la prison.
Vendredi. Retour de Malines, hier. Grands mouvements de troupe à Bruxelles et partout. Bruxelles mène parce qu’ils ont chanté au passage d’un avion. Optimisme invraisemblable. Une lettre de d’Espierre. Bonnes nouvelles de la Somme. Papa a acheté des cartes.
Samedi. Grands mouvements de troupes et beaucoup d’avions. On parle beaucoup de l’étape. A Bruxelles, on peut conserver que 300 bouteilles de vin.
Dimanche. On annonce arrivée d’autos. Aéro survole la ville ce matin de très bonne heure si pas nuit. Ecrit à J Rencontre Centrale et Riele que lui cela lui manque à lui. – Lundi. Bombe à Froyennes – Samedi. Gare de Mouscron et ailleurs aussi. Allemand tué à Templeuve. A la frontière une personne tuée malheureusement pour la sœur de Mr. Lemaire.
Mercredi. Rien de neuf. Si ce n’est qu’on attend des A. en ville et que Mr. Doutrelingh doit quitter sa maison. Chez Eunion et maisons voisines. Ils ont des portes de communication pour roi de Bavière et la … Bonne nuit.
Dimanche. On commence à se demander si ce n’est pas de l’esbrouffe que tous ces bureaux ! Peeters Duthoit a dû déménager dans les 2jours. Casino chez Blandlr qui ne pouvait pas enlever tapis. – Mercredi. On déménage ou emménage, etc. Il y a une vraie cacophonie dans leurs mouvements. Ils ne s’y retrouvent plus eux-mêmes. C’est ce que je sais c’est qu’on tire en ce moment sur des aéros. – Mercredi. Hier des affiches en ville demandant des ouvriers pour travailler pour les Allemands. Menaces des Allemands. Dans les villages environnant, idem. – Jeudi. On blâme beaucoup Conseil Communal d’avoir fait poser les affiches. – Samedi. Pas d’ouvriers qui se présentent. On réquisitionne des draps. On les paies ou on donne des bons. – Mardi. Hier grabuche à l’Hôtel de Ville. Je ne sais pas encore ce qui se passe. Les b . prennent les ouvriers chez eux. On les conduit à la caserne. Ce serait pour faire ligne de chemin de fer et pistes d’aviation ! Bonnes nouvelles du front. Attendons impatiemment nouvelles de Joseph.
Mercredi. Hôtel de Ville. Discussion entre Wib. Et bourgmestre. L’un a passé des listes que l’autre avait refusé. Démission échevin non acceptée. Ouvriers ne se sont pas présentés. Une réunion devant Rond-point. Ils décident pas travailler. PO sont pris. – Mercredi matin, W est pris pr partir Allemagne avec les PO et en ville Affiches rouges avec les vertes. Vertes disaient rentrés à 9 h. et sortis à 6 heures. Rouges annonçant départ. W et ouvriers. En cas de récidive mesures sévères. Hier fermé charrettes ouvriers St Amand qui refusent travail et chantent Marjolaine et Brabançonne.
Mardi - 14 Mitrailleuses. Voit des aéroplanes. Écrit Joseph et envoyé casquette. Bombes tombées avant-hier derrière chez C. Avila. A Blandain des enfants et des ouvriers doivent se tenir à disposition Allemands. – Mercredi, on prend tous les ouvriers au Bureau de Bienfaisance. Sans doute tantôt chômage. Ou les arrête aussi dans la rue et on leur demande carte identité. Alors eux doivent se présenter à 1 heure. En France, plus d’hommes jusque les 9 ans. Gand on fait comme Tournai. Avec cela paraît un article courrier sur sans travail/ œuvre moralisatrice et danger pour allemands. Communiqué officiellement.
Samedi 21 – Passage autant de civils ou en relâche. Belle lettre hier bourgmestre. – Dimanche – Punition de 5 à 6 heures. – Mardi : Blanquart encore arrêté. – Mercredi 21 octobre : On a payé l’amende qui se rapportait à la punition mais pas les 20 .000 à paye chaque jour. La punition … à l’heure est levée. Rien de neuf. Toute la Belg. Suit l’exemple de Tournai. – Dimanche 4 N. :Police Malines ici sur la Plaine. Explosion de même. Vais chercher explication absence Joseph. Antoing demande ouvrières.

Carte postale envoyée le 4 Octobre 2016 de la Prison de Malines à ‘Monsieur Henri Devred – rue des Choraux – Tournai’
58e jour
Chers Parents. J’ai été très heureux de recevoir la lettre du 27. Je crois voir maman une mèche de cheveux sur le front, les lunettes sur le nez, la lettre de faire part d’une main et de l’autre un bout de crayon. Comme ce serait une belle photo ! Félicitations pour le commencement de Germ. Je n’ai pas beaucoup de place, aussi je commence de suite…C’était dur à trouver … Pas vrai, Germaine ? Merci quand même. J’essaierai sur un genou ou l’autre … sur mon lit. Mais pour le moment, je suis assommé d’ouvrage et ne fais pratiquement rien. Avec le changement d’horaire, nous devons aller coucher avec les poules. Pourvu que les santés n’en souffrent pas. (Je suis l’heure avec ma montre qui concorde avec le lever et le coucher du soleil). Le soir la lumière ne brille pas d’une façon extraordinaire. Aussi, je me couche à une heure impossible…6 h mais me lève à 5 h. Je viens de monter une attrape à souris. Le première nuit, une souris est venu faire une promenade sur mon oreiller… ça m’a plutôt donné froid dans le dos… (je n’en suis pas malade). 2e nuit, je trouvais que c’était ennuyeux d’entendre toujours croquer du papier et maintenant, j’y suis habitué. J’avais essayé de monter une attrape avec mon bassin, une ficelle, des livres, du papier, des pans d’étoffe, etc. … Mais je n’ai rien pu… il a fallu emprunter le matériel d’autrui. J’en ai été très morfondu… !! Samedi dernier, j’ai reçu un paquet : pommes, couques, charcuterie, chocolat… mais je n’ai jamais reçu le paquet envoyé le lundi 18. Il serait le paquet avec les chaussons ?) J’ai acheté ici une ½ l. de beurre, 10. Est-ce permis de m’accuser de manquer de jugement… tout, lil, aiguilles, m’est venu bien appoint. A la fin de la semaine prochaine, je vous donnerai probablement la liste des objets d’hiver et de rechange dont j’aurais besoin. Que Julia aille baiser l’anneau de Mgr pour moi ! Merci à la tante de Simone de ses bonnes prières mais je refuse le globe. Amitiés à X Y Z. Votre fils dévoué. Joseph.
J‘attends impatiemment la robe de chambre.
Texte d’un feuillet d’une page écrit à l’arrivée à Malines.
Malines – septembre 1916 – Caserne des Lanciers cellule n°1
Parti de Tournai à 6h30 par l’express se Brx ; arrivé à Brx à 8h10 et départ à 8h40 pour Malines. Arrivée à Malines à 9h1/2. Chargé comme j’étais, je n’ai guère examiné la ville. Nous nous rendons d’abord au bureau de police allem. Où je retrouve une connaissance. Après avoir délivré nom, prénom, adresse, etc. nous nous remettons en marche. Enfin, le long de la route, une âme compatissante vient encore m’aider et nous entrons dans la caserne des Lanciers dans le quartier détention Là la propreté ne brille pas tout partout ; enfin c’est passable. Je traverse un couloir puis un autre mais je n’ai pas le temps de rien examiner et on m’enferme au n°16. En voici la description. 4 murs de briques blanchies à la chaux ; 2m de large, 3 m 50 de long, hauteur 3m50 également. Un des côtés est agrémenté d’une porte (bleu gris) s’ouvrant vers l’extérieur. Il n’y a rien qu’un trou pour espionner ; très petit. A droite une bouche d’air qui permet quand la petite porte est ouverte de voir les jambes des autres condamnés. Au passage, on peut en faire une étude.. !! Sur un des murs latéraux, un ‘Crochetier’ à 3 branches ; sur l’autre, un miroir et une liste de livres français et flamands. Enfin, sur le 4e mur, un clou et un attrape-mouches (car elles abondent). Le parterre toujours idem : carreaux quadrangulaires jaunâtres. Mais me voici au plafond : curiosité extraordinaire. 1°) une série de13 poutrelles en fer (d’une largeur de 15 à 20 cm), placées dans le sens de la largeur et espacées entre elles de 2 à 3 cm. Au dessus, encore un espace libre. D’un côté, le mur monte jusqu’au toit ( c’est vrai, j’avais oublié de dire qu’il n’y avait qu’un étage), charpente en bois ; de l’autre côté, le mur s’élève encore de 0,5 m de hauteur puis s’arrête. Il y a sur le toit une fenêtre à cheval sur le mur mitoyen à 2 cellules, grandeur : 1 m sur 1 m. De temps en temps, là-haut nous entendons piétiner des moineaux ; c’est d’un effet assez singulier. Aspect général : beaucoup d’air, on se croirait dans une cave. Il fait humide et trop frais. Passons au mobilier ; d’abord le lit …hum !!! Planche de bois inclinée placée à 0,50 m d’un côté et 0,30 m de l’autre. Tout cela attaché au mur. En-dessous, cela peut servir de cave à vin si on en a. Or il y fait sale et il fait noir. Au-dessus de la paille dans un sac sur toute l’étendue de la planche. A la tête, un oreiller superbe en plumes. Je ne blague pas, en plumes d’oiseau. C’est vraiment doux dans une toile à matelas un peu vieillotte mais passable. Viennent ensuite 2 couvertures militaires pas si bonne qu’à Tournai mais suffisamment chaudes. Une belle chaise de bureau en bois ; une petite table de jardin ronde 0,60 m de diamètre avec à mi-hauteur un rond (…) reliant les 3 pieds qui sert de support à la gamelle en émaillé et la pinte également en émaillé et à la cuillère en fer. Passons au lavabo, tout simple, lavabo de jardin, également tout en fer. Un bassin émaillé puis 1 héritage : savonnière puis avec le pot d’eau potable toujours en émail de Meaux. Nous sommes dotés également d’un bac d’eau rectangulaire, 0,25 x 0,15 qui fait 0,3 plein d’eau pour se laver et des ustensiles (…) Enfin, la dernière nouveauté, le WC. Cette fois, c’est un monument de 0,75 m de haut ; diam. 0,40 à 0,50.
Court message sur ‘papier japonais’ avec la mention ajoutée « correspondance reçue en prison !?! – Comment est-elle passée ! »
Tournai, 9 9bre – Bien cher Joseph
Le voisin de Denoulet a donné à M. Linskens (Père) une dizaine d’images que Jef a très bien encadrées à sa façon ; il les a d’ailleurs remis au bout de 8 jours à M Linskens qui ne les a même pas examinées ! Juge si cela a fait plaisir à Jef ! L’enfant de la Glanerie se désintéresse tout à fait de l’affaire de l’Enflé ! Gérard va toujours bien et ne parle que de l’employé de M. Bréda. Il oublie tout le reste. Adolphe est mort. Au central, il n’y a plus personne. On m’a dit à la police que mes correspondances avaient trop de longitude ! J’abrège donc par pitié pour le correcteur. Bon courage, cher petit frère. Sache bien que c’est ta gaité que soutient notre monde. 5 gros baisers. Julia

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J'espère que cette collaboration vous fera plaisir et vous aidera à garder vivante la mémoire de ces généreux belges!
eat1934
teag1934
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Re: Recherches sur "Le mot du Soldat"

Message par teag1934 »

Je n'avais pas vu comment insérer des images. Voici un scan d'un 'Mot du Soldat' avec le billet pour répondre et une carte écrite par une dame de Templeuve au Roi Albert I. Je ne sais pas si la carte lui est parvenur!
eat1934
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