Bilan humain du désobusage du Pas-de-Calais en 1920

[Arnaud Carobbi]

Bonjour à tous,

La guerre a continué à faire des victimes après le 11 novembre 1918. Ce document sur les victimes du "désobusage" est très parlant.
Bonne lecture,
Cordialement,
Arnaud


Source : Rapport du préfet du Pas-de-Calais Robert Leullier, Conseil général du département du Pas-de-Calais, 2e session ordinaire de 1920, service de reconstitution des régions atteintes par les Evénements de Guerre.
Pour télécharger le fichier pdf (47 Mo) comprennant ce rapport : http://books.google.fr/books/pdf/Rappor ... QNwog4xuBg

Transcription des pages 1083 à 1086.

"DESOBUSAGE
Le Service de désobusage (recherche et enlèvement des projectiles) a effectué jusqu'en décembre 1919 par les soins de l'autorité militaire. Depuis, le désobusage a été assuré par la main d'œuvre civile.
La surface désobusée comprend 175.500 hectares.
Le total des dépenses faites s'élève à 10.370.717 francs.
La dépense prévue pour terminer les opérations est de 3.456.905 francs.
Au cours de ces travaux particulièrement dangereux et difficiles, des accidents, dont un certain nombre mortels, ont été malheureusement à déplorer ; nous en donnons ci-après l'énumération.

Accidents survenus au cours des opérations de désobusage

A ARTIFICIERS CIVILS ET MANŒUVRES :
1° Accidents mortels - Le nom des artificiers civils et manœuvres tués accidentellement est de :
Pour Béthune : 6
Pour Arras : 16
Total : 22

Quatre accidents ont été particulièrement graves :
a) A Foncquevillers le 20 janvier 1920 : deux artificiers brûlés vifs dans leur cantonnement ;
b) A Bapaume le 13 mars 1920 : 7 morts, un blessé grave, un blessé léger ;
(Accident provoqué par l'explosion d'un obus explosif sur un tas d'obus à gaz).
c) A Le Sars près Bapaume, le 1er juin 1920, 3 tués, un blessé ;
d) Au bois des 14, le 3 juin 1920 : 3 tués (accident provoqué par l'explosion d'un obus tombant d'une voiture).

2° Blessures graves.
a) A Lens, le 24 janvier 1920 : un artificier, en démontant une fusée allemande provoque l'explosion de l'engin : trois artificiers blessés ; l'un est amputé de la main droite, subit l'énucléation de l'œil gauche, est atteint de blessures multiples au corps.
Un autre est blessé grièvement à la cuisse gauche, le troisième est blessé au dos ;
b) A Marquion, le 31 mai 1920, explosion d'une fusée de signalisation ; un chef d'équipe est brûlé grièvement à la face. Cette brûlure nécessite la pose d'un appareil dentaire ;
c) A Lebucquière, le 27 mai 1920 : explosion d'un détonateur ; un manœuvre amputé de deux doigts et énuclé de l'œil droit.

3° Blessures sans gravité : 40 artificiers civils et manœuvres ont été blessés sans gravité, la plupart à la suite d'explosions de détonateurs ou de grenades.

B CIVILS :

a) A Vis-en-Artois, le 27 septembre 1920 : Un chauffeur de la T.M. 070 est tué par l'explosion d'un obus ;
b) A Vimy, le 19 mars 1920 : Un conducteur de tracteur agricole blessé grièvement par l'explosion d'une grenade ;
c) A Héninel, le 23 juin 1920 : Un conducteur de tracteurs agricoles est tué par l'explosion d'une mine contre-tank.

C ARTIFICIERS MILITAIRES :
1° Tués
Arras : 11
Béthune : 9
Total : 20

2° Blessés
Arras : 23
Béthune : 38
Total : 61

Un accident a été particulièrement grave : le 20 janvier 1920, à Boiry-Becquerelle, provoqué par l'éclatement d'une bombe dans une sape et entraînant la mort de quatre artificiers militaires et trois prisonniers de guerre allemands. De plus, cinq artificiers ont été blessés dont un grièvement.

D ELEMENTS ETRANGERS
1° Tués
10 P.G. allemands ;
1 Indo-Chinois ;
1 Russe.

2° Blessés
10 P.G. allemands ;
6 Indo-Chinois ;
2 Russes.

En résumé, les pertes se chiffrent par :
54 tués ;
143 blessés.

En ce qui concerne les formalités remplies après chaque accident, un dossier a été établi conformément aux dispositions de la loi du 9 avril 1898 sur les accidents du travail.
Les frais d'obsèques, cercueils, envois des corps aux familles des hommes tués, ont été payés par le budget des Régions libérées.
Les pensions aux familles vont être attribuées conformément aux dispositions de la loi, par l'intermédiaire des Régions libérées, service employeur."

[gerald]

après le débarquement de normandie, en 1944, le déminage a été réalisé en grosse partie par les bagnards.
Ceux-ci ont surement dû etre également envoyés en 1918. a voir...

en 1998, deux enfants de mon quartier, âgés d'une dizaine d'années ont eu les poumons brulés par des gazs "moutardes", en s'amusant dans des galeries souterraines (creutes). Ces gazs, lourds, tapis dans les sous-sols, sont maintenus actifs à température froide.
Cette guerre continue à faire des victimes aujourd'hui.
on peut avoir une petite idée du nombre de victimes que laisseront les guerres récentes (ex-yougoslavie, cambodge,....)