L'invention du camouflage

Avatar de l’utilisateur
LABARBE Bernard
Messages : 4758
Inscription : mar. juil. 12, 2005 2:00 am
Localisation : Aix-en-Provence
Contact :

Re: L'invention du camouflage

Message par LABARBE Bernard »

Merci pour cette réponse sur un sujet "en aparté", car on dérive un peu à cause de moi du sujet initial de Guy François, les premiers camouflages...
Cordialement,
Bernard
Rutilius
Messages : 16710
Inscription : mar. avr. 22, 2008 2:00 am

Re: L'invention du camouflage

Message par Rutilius »


Bonsoir à tous,

Sur les procédés utilisés à l'époque pour obtenir la teinte kaki, V. ici —> pages1418/forum-pages-histoire/autre/pr ... 2150_1.htm

On relèvera qu'ils faisaient largement appel, en France, à l'extraction végétale à partir du cachou et du châtaignier, voire du palétuvier.
Bien amicalement à vous,
Daniel.
Avatar de l’utilisateur
pierret
Messages : 653
Inscription : jeu. févr. 03, 2005 1:00 am
Localisation : BOURG-EN-BRESSE

Re: L'invention du camouflage

Message par pierret »

Bonjour

Je reporte un article paru ce 5 novembre sur le blog lignes de défense.

Sources :

http://lignesdedefense.blogs.ouest-fran ... -1914.html

http://lignesdedefense.blogs.ouest-fran ... uingot.pdf


Louis Guingot? J'avoue avoir découvert l'existence de ce peintre lorrain en lisant l'ouvrage que Cécile Coutin vient de consacrer à l'invention du camouflage moderne en 1914-1918. Il s'intitule Tromper l'ennemi et est paru aux éditions Pierre de Taillac.

On découvre dans cet excellent ouvrage, fort documenté, la veste de Louis Guingot destinée à rendre moins visibles les soldats (voir page 25). Guingot la fit parvenir à l'Etat major français mais celui s'en désintéressa. Grâce à l'appui de quelques militaires, un an plus tard, la "découverte" du Lorrain trouvera une première application dans le camouflage du matériel.

Pour en savoir davantage sur Guingot et sa première tenue "léopard", on lira aussi un article de Frédéric Thiery (lire l'intégralité en cliquant ici): "La première veste de camouflage de guerre du monde est inventée par Louis Guingot."

L'auteur y explique que, "étudiant le mimétisme de son caméléon élevé en liberté dans son atelier et les couleurs à utiliser, l’artiste choisit arbitrairement trois couleurs de base empruntées à la nature et au jardin: un vert pré, un brun-rouge, un bleu sombre. Ensuite, il redistribua ces trois couleurs en un désordre étudié pour donner l’illusion qu’il s’agit d’herbes, de sous-bois, d’arbres ou de branchages. Nous pourrions parler d’un « effet impressionniste inversé »".

L'anecdote de la première tenue "léopard" n'est qu'une des nombreuses informations et histoires que contient le riche et captivant ouvrage de Cécile Coutin, conservatrice en chef à la Bibliothèque nationale de France et ancienne conservatrice du Musée d'histoire contemporaine.

En août 1914, les soldats français partirent au combat dans des tenues voyantes: les fameux pantalon rouge et capote bleue – qui en firent des cibles faciles. Inadaptées à la guerre moderne, elles provoquèrent une hécatombe.

Contre toute attente, ce sont des artistes, et non des ingénieurs militaires, qui trouveront des solutions et jetteront les bases d’une nouvelle arme : le camouflage. Le bouleversement est considérable : il ne s’agit plus de faire peur avec un uniforme impressionnant mais de disparaître grâce à une tenue qui se fond dans le paysage. La guerre de position, qui maintient les troupes face à face, est pour beaucoup dans cette évolution : pour ne pas être repéré par l’ennemi, et survivre, il faut être invisible.

Officiellement créée le 4 août 1915, la section de camouflage de l’armée française regroupe des artistes de tous horizons, particulièrement des décorateurs de théâtre rompus aux effets de trompe-l’œil, et des peintres cubistes aptes à la déformation de la réalité. Elle emploie des milliers d’hommes et de femmes. Son organisation et ses techniques inspirent celles des autres armées belligérantes qui les développent avec leur génie propre.

Tromper l'ennemi. L'invention du camouflage moderne en 1914-1918, 240 pages, 300 photos et documents, 35€


Cordialement

Jean-Louis
133° RI "Les Lions du Bugey"
"Pas s'en faire, pas s'en fichtre .... Le Lion atteint toujours sa proie"
air339
Messages : 3107
Inscription : mer. janv. 21, 2009 1:00 am

Re: L'invention du camouflage

Message par air339 »

Bonjour,


Voici deux illustrations de la "section de camouflage de Verdun", tirées de l'ouvrage du SHD "Les 300 jours de Verdun" :

Image
Image

Le texte évoque Guirand de Scevola, comme inventeur du camouflage à base de bandes de toile bariolées (et non l'idée même du camouflage). Son projet aurait été présenté à Poincaré et Joffre et aboutit à la création de la première section de camouflage à la IIème armée.

Le "Bulletin de renseignements du génie" de mars 1919 semble reconnaître l'apport d'artistes :

"Le camouflage dans l'Armée allemande, à l'inverse de celui en usage dans les Armées alliées, ne semble pas, a priori, avoir été confié à des spécialistes, ayant une organisation particulière.
Considéré comme essentiellement militaire, il a été presque toujours laissée à l'initiative des combattants, auxquels le Commandement s'est borné à donner des directives inspirées, du reste, de nos méthodes, ainsi qu'on le verra plus loin. Le côté artistique a été négligé ()"

Le texte ne précise pas ce qu'est un "spécialiste", ni "le côté artistique"...

Cordialement,

Régis
ALVF
Messages : 7124
Inscription : mar. oct. 02, 2007 2:00 am

Re: L'invention du camouflage

Message par ALVF »

Bonsoir,

Je viens de terminer le magnifique livre de Cécile Coutin "Tromper l'ennemi-L'invention du camouflage moderne en 1914-1918"-Editions Pierre de Taillac-2012.
L'illustration est somptueuse et l'étude très complète sur le côté artistique pour reprendre les termes de la conclusion de l'étude du lieutenant-colonel de Fossa "Renseignements généraux sur le camouflage dans l'Armée allemande" du 10 novembre 1918 qui reconnaît que "ces procédés (allemands), plus militaires qu'artistiques ont donné de bons résultats".
Je ne reviendrai pas sur les premiers messages de ce sujet et sur les études remontant à la fin du 19ème siècle, presque totalement passées sous silence, ce qui est dommage.Le côté militaire du camouflage aurait aussi mérité de plus amples explications car un certain nombre de militaires ont tiré après la guerre quelques conclusions intéressantes:
-à quoi sert de peindre de superbes couleurs de camouflage un canon d'artillerie lourde sur voie ferrée qui est employé sur des épis de tir de formes géométriques (épis en tenailles, à cercles concentriques, etc...) impossibles à dissimuler à l'observation aérienne,
-à quoi sert de peindre en camouflage des chars rampant à 3 ou 4 km/h (et souvent beaucoup moins) en pleine vue des observatoires et de n'avoir pas consacré le 1/10ème des dépenses au tir de quelques milliers d'obus fumigènes masquant totalement les blindés à l'observation et au tir de l'artillerie allemande?
-à quoi servent les magnifiques bâches camouflées destinées à camoufler les transports d'artillerie ou les pièces d'artillerie lourde sur voie ferrée quand la peinture inflammable de ces bâches peut s'enflammer au simple contact des escarbilles de locomotives à vapeur au cours des transports (faits vérifiables dans plusieurs JMO d'artillerie)?
-à quoi servent les magnifiques filets en raphia masquant des positions de P.C, des batteries de canons, des blockhaus, des emplacements de mitrailleuses,etc... alors que ces filets s'enflamment "comme des allumettes" à la moindre explosion d'un projectile à quelques mètres?
-à quoi servent les camouflages blancs de position sur la neige quand les cheminements sont visibles depuis l'observation aérienne?
Voilà quelques réflexions du côté militaire regretté par les utilisateurs de l'époque (on pourrait multiplier beaucoup ces exemples).Il est dommage que cet aspect militaire et pas seulement artistique n'ait pas eu l'étude qu'il méritait.
Le livre est toutefois magnifique et intéressera tous les amateurs de camouflage.
Cordialement,
Guy François.
Avatar de l’utilisateur
Charraud Jerome
Messages : 8405
Inscription : dim. oct. 17, 2004 2:00 am
Localisation : Entre Berry et Sologne
Contact :

Re: L'invention du camouflage

Message par Charraud Jerome »

Bonsoir
Cécile Coutin est conservateur du département "Arts du spectacle" de la BNF. De par sa fonction, l'ouvrage a tendance à tourner vers le côté spectaculaire, plus que sur le côté militaire de la chose.
Nous avons ainsi quelques approximations:
Page 34, je note: "... des cartonniers et des ouvriers en fer, prélevés sur les ressources en R.A.T. (Régiment d'artillerie territoriale) des dépôts de toutes les armes. ..."
nous avons là une jolie petite erreur révélatrice:
les R.A.T. sont la Réserve de l'Armée Territoriale (voir pages1418/forum-pages-histoire/reserve- ... 2806_1.htm ) et non pas une sous sous réserve de l'artillerie.
D'ailleurs, au niveau syntaxique il est impossible d'associer "les ressources en Régiment d'Artillerie Territoriale" et "des dépôts de toutes les armes". Un régiment n'appartient qu'à une seule arme.

Guy, le camouflage des voies ferrées de l'ALGP est page 1914. Ce camouflage fait d'ailleurs très chétif.

Cordialement
Jérôme Charraud
Les 68, 90, 268 et 290e RI dans la GG
Les soldats de l'Indre tombés pendant la GG
"" Avançons, gais lurons, garnements, de notre vieux régiment."
Image
Avatar de l’utilisateur
Yannickckck
Messages : 372
Inscription : sam. mai 14, 2011 2:00 am

Re: L'invention du camouflage

Message par Yannickckck »

Bonsoir,

En effet magnifique ouvrage que celui de Cécile Coutin et très intéressant à bien des égards avec une splendide iconographie, grand merci aussi à Guy François dont les précisions apportées ici sont des compléments aussi passionnants qu'indispensables sur le sujet.

Je reviens sur l'évocation des "bâches camouflées destinées à camoufler les transports d'artillerie ou les pièces d'artillerie lourde sur voie ferrée", je dispose d'une photo sur laquelle on aperçoit ce genre de bâche que je vous fais partager ici :

Image

Tout en haut de l'image sur le pont l'ensemble bâché est effectivement plutôt intégral vu sous cet angle, et semble même continu entre les wagons !! La bâche est bien peinte en différentes nuances de couleurs, le contenu du chargement est parfaitement masqué dessous, difficile de dire ici ce que transporte ce train :

Image

Amicalement
Yannick LE GRATIET
https://www.gvc1418.fr
NOUVELLE ADRESSE depuis le 19 juin 2023
Avatar de l’utilisateur
Ferns
Messages : 1053
Inscription : jeu. juil. 05, 2007 2:00 am

Re: L'invention du camouflage

Message par Ferns »

Bonjour,

Une petite précision lexicale. Le terme "camouflage" n'est pas militaire au départ mais appartient au monde du théâtre. Apparemment, le mot remonte à 1887 et désigne un "déguisement". Comme technique militaire, le mot apparaît tardivement en 1917, ce qui me paraît assez curieux, la source est pourtant sérieuse mais on ne sait jamais...
http://www.cnrtl.fr/definition/camouflage
Si le terme apparaît dans une source militaire avant 1917, c'est qu'ils se sont trompés. On devait donc utiliser d'autres mots du genre "dissimulation, invisibilité, cache..."

Cordialement,


L'homme en campagne a les mêmes besoins qu'en temps de paix ; ces besoins deviennent même plus impérieux, étant exacerbés par une existence plus active et plus énervante.(Henry Mustière)
ALVF
Messages : 7124
Inscription : mar. oct. 02, 2007 2:00 am

Re: L'invention du camouflage

Message par ALVF »

Bonjour,

Méfiez-vous des affirmations du CNRTL ou "Wikipédiatesques" sans mention de sources!
Il est vrai qu'avant guerre, les militaires n'emploient que les termes suivants:
-invisibilité du matériel, invisibilité aux vues du large par les artilleurs de côte, déjà évoqués ci-dessus.
-défilé aux vues de l'ennemi, défilement des batteries, rechercher le défilement aux vues de l'observation aérienne, termes utilisés constamment dans les instructions d'artillerie des années 1910 à 1914.
Je veux bien que le terme "camouflage" appartienne au monde du théatre mais les militaires l'ont adopté très vite.En voici quelques traces:
-le 12 février 1915; le lieutenant-colonel Buat, chef de cabinet du ministre de la guerre, signe la décision ministérielle instituant le "camouflage":
"...j'ai décidé la constitution d'une équipe dite de "camouflage"....Cet officier artilleur, futur général et futur généralissime désigné après la guerre (avant sa disparition prématurée), savait de quoi il parlait, même s'il est bien évident que Guirand de Scevola a inspiré ce texte.
Madame Cécile Coutin, qui a beaucoup consulté les archives du SHD, publie cette décision dans son livre.Il serait d'ailleurs souhaitable que les auteurs se replongent dans les archives et ne se contentent pas de la lecture des JMO et des ouvrages de seconde main avant de publier articles et livres!
-il existe de nombreux textes provenant de l'Artillerie Lourde à Grande Puissance évoquant le "camouflage" en 1916, il doit y en avoir d'autres dès 1915, je vais d'ailleurs les rechercher.
A noter, que les militaires de 1917-1918 auraient préféré "Mimétisme" à "Camouflage", l'instruction du 2 avril 1918 écrit d'ailleurs: "Le véritable nom scientifique de tout le camouflage...serait mimétisme...".
Rappelons les textes importants du G.Q.G relatifs au camouflage datant des années 1917 et 1918:
-Note du G.Q.G du 25 octobre 1917 sur l'organisation du Service de Camouflage aux Armées du Nord et du Nord-Est (texte souvent occulté).
-G.Q.G-Note sur l'Etude et et l'Interprétation des photographies aériennes du 5 janvier 1918 (dont le texte et surtout le gros volume de photographies et schémas constituent une vraie étude de la nécessité du camouflage au point de vue militaire).
-Ministère de la Guerre-Instruction sur le Camouflage du 2 avril 1918 (textes et planches).
-Ministère de l'Armement et des Fabrications de Guerre-Direction des Inventions, Etudes et Expériences Techniques-Lieutenant-colonel de Fossa, chef de la Section d'Etude du Camouflage "Renseignements généraux sur le camouflage dans l'Armée allemande avec étude spéciale des positions de Crépy et Beaumont d'où l'ennemi a tiré sur Paris" en date du 10 novembre 1918.
Les trois derniers textes cités auraient mérité une étude complète car, au delà de l'aspect technique, ces trois documents "recadrent" le camouflage dans son utilité militaire tout en contenant de discrètes allusions sur l'inutilité de certains travaux d'artistes de la Section de Camouflage."Allusions discrètes" car à cette époque, il ne faut pas se heurter au généralisime (général Pétain) qui défend "sa" section de camouflage et Guirand de Scevola alors que la "Direction des Inventions" a une approche plus scientifique et militaire du camouflage.Pour répondre d'avance aux objections, je précise que le Directeur des Inventions est un civil, le député socialiste du Cher, Jules-Louis Breton, dont l'entourage est composé d'officiers d'Artillerie et du Génie.
Il est dommage que les conclusions de ces textes et surtout les enseignements de la guerre n'aient pas fait l'objet d'un développement dans le beau livre de Cécile Coutin.
Au risque de fatiguer le lecteur, il faut aussi tenir compte d'un point un peu trop facilement oublié par les écrivains (anciens et modernes):
Quand on attaque en masse à découvert dans les champs de tir croisés de mitrailleuses, que l'on porte un uniforme rouge, bleu horizon, kaki, Feldgrau, jaune canari ou "camouflé feuilles d'automne d'Ukraine" ou "dégel du front russe" (car les allemands sont sérieux quand ils étudient un problème dans les années 1940!), le résultat sera le même car les mitrailleuses tirent dans un secteur pré-déterminé et ne font pas du "tir au lapin", sauf peut-être sur les rares malheureux survivants essayant de se traîner en dehors de cette zone de mort!
Que ces arguments n'empêchent pas les amateurs d'acquérir le beau livre de Cécile Coutin, il est vraiment magnifique comme un album de Detaille ou d'Alphonse de Neuville de la guerre de 1870-71.
Cordialement,
Guy François.
ALVF
Messages : 7124
Inscription : mar. oct. 02, 2007 2:00 am

Re: L'invention du camouflage

Message par ALVF »

Bonjour,

Merci à Yannick pour la belle photographie montrant un train camouflé de bout en bout par une bâche joliment peinte.Pourvu que la locomotive à vapeur ne crache pas trop d'escarbilles!
Pour tenter d'identifier le contenu de ce train et peut-être le créneau de date, serait-il possible de lire sur l'original agrandi les numéros figurant au col des vareuses des militaires au premier plan?
Cordialement,
Guy François.
Répondre

Revenir à « Sujets généraux »