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La licéité des moyens de nuire à l’ennemi au regard du droit de la guerre
Les « actes internationaux » signés à La Haye, le 29 juillet 1899, à la suite de la Conférence internationale de la paix réunie en cette même ville, ont été introduits en droit français par le décret du 28 novembre 1900 (J.O. 1er déc. 1900, p. 7.898 ; Bull. des lois, XIIe Série, T. 62, 1er Sem. 1901, n° 2263, p. 1268 et s.). Il s’agissait :
1° ― de la Convention pour le règlement pacifique des conflits internationaux ;
2° ― de la Convention concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre ;
3° ― de la Convention pour l’adaptation à la guerre maritime des principes de la Convention de Genève du 22 août 1864 ;
4° ― de la Déclaration concernant l’interdiction de lancer des projectiles et explosifs du haut des ballons ou par d’autres moyens analogues nouveaux ;
5° ― de la Déclaration concernant l’interdiction de l’emploi de projectiles qui ont pour but unique de répandre des gaz asphyxiants ou délétères ;
6° ― de la Déclaration concernant l’interdiction de l’emploi de balles qui s’épanouissent ou s’aplatissent facilement dans le corps humain ;
7° ― de l’Acte final de la Conférence internationale de la paix.
I. ― La licéité, au regard des principes internationaux du droit des gens, des « moyens de nuire à l’ennemi », et notamment des armes et munitions, était déterminée en termes très généraux ― et donc fort peu contraignants juridiquement ― par les articles 22 et 23 du règlement annexé à la Convention concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre. Ces stipulations étaient ainsi rédigées :
« Art. 22 ― Les belligérants n’ont pas un droit illimité quant au choix des moyens de nuire à l’ennemi.
Art. 23 ― Outre les prohibitions établies par les conventions spéciales, il est notamment interdit :
a) D’employer du poison ou des armes empoisonnées ;
b) De tuer ou de blesser par trahison des individus appartenant à la nation ou à l’armée ennemie ;
c) De tuer ou de blesser un ennemi qui, ayant mis bas les armes ou n’ayant plus les moyens de se défendre, s’est rendu à discrétion ;
d) De déclarer qu’il ne sera pas fait de quartier ;
e) D’employer des armes, des projectiles ou des matières propres à causer des maux superflus ;
f) D’user indûment du pavillon parlementaire, du pavillon national ou des insignes militaires et de l’uniforme de l’ennemi, ainsi que des signes distinctifs de la Convention de Genève ;
g) De détruire ou de saisir des propriétés ennemies, sauf les cas où ces destructions ou ces saisies seraient impérativement commandées par les nécessités de la guerre. »
Le règlement annexé à la Convention internationale de La Haye le 18 octobre 1907 concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre (dite Convention IV et introduite en droit français par le décret du 2 décembre 1910 : J.O. du 8 déc. 1910, p. 9.930 et s.) renfermait, sous la même numérotation, deux articles rédigés en termes strictement identiques. A l’article 23, avait simplement été ajouté par les rédacteurs le paragraphe h. suivant :
« h) De déclarer éteints, suspendus ou non recevables en justice, les droits et actions des nationaux de la Partie adverse. »
II. ― La Déclaration concernant l’interdiction de l’emploi de projectiles qui ont pour but unique de répandre des gaz asphyxiants ou délétères stipulait ce qui suit :
« Les soussignés, plénipotentiaires des puissances représentées à la Conférence internationale de la Paix à La Haye, dûment autorisés à cet effet par leur gouvernements,
S’inspirant des sentiments qui ont trouvé leur expression dans la Déclaration de Saint-Pétersbourg du 29 novembre–11 décembre 1868,
Déclarent :
Les puissances contractantes interdisent l’emploi de projectiles qui ont pour but unique de répandre des gaz asphyxiants ou délétères.
La présente déclaration n’est obligatoire que pour les puissances contractantes, en cas de guerre entre deux ou plusieurs d’entre elles.
Elle cessera d’être obligatoire du moment où, dans une guerre entre les puissances contractantes, une puissance non contractante se joindrait à l’un des belligérants.
La présente déclaration sera ratifiée dans le plus bref délai possible.
Les ratifications seront déposées à La Haye.
Il sera dressé du dépôt de chaque ratification un procès-verbal, dont une copie certifiée conforme sera remise par la voie diplomatique à toutes les puissances contractantes.
Les puissances non signataires pourront adhérer à la présente déclaration. Elles auront, à cet effet, à faire connaître leur adhésion aux puissances contractantes, au moyen d’une notification écrite adressée au gouvernement des Pays-Bas et communiquée par celui-ci à toutes les autres puissances contractantes.
S’il arrivait qu’une des hautes parties contractantes dénonçât la présente déclaration, cette dénonciation ne produirait ses effets qu’un an après la notification faite par écrit au gouvernement des Pays-Bas et communiquée immédiatement par celui-ci à toutes les autres puissances contractantes.
Cette dénonciation ne produira ses effets qu’à l’égard de la puissance qui l’aura notifiée.
En foi de quoi, les plénipotentiaires ont signé la présente déclaration et l’ont revêtue de leurs cachets.
Fait à La Haye, le 29 juillet 1899, en un seul exemplaire, qui restera déposé dans les archives du gouvernement des Pays-Bas et dont les copies certifiées conformes sont remises par la voie diplomatique aux puissances contractantes. »
III. ― La Déclaration concernant l’interdiction de l’emploi de balles qui s’épanouissent ou s’aplatissent facilement dans le corps humain était ainsi rédigée :
« Les soussignés, plénipotentiaires des puissances représentées à la Conférence internationale de la Paix à La Haye, dûment autorisés à cet effet par leur gouvernements,
S’inspirant des sentiments qui ont trouvé leur expression dans la Déclaration de Saint-Pétersbourg du 29 novembre–11 décembre 1868,
Déclarent :
Les puissances contractantes interdisent l’emploi de balles qui s’épanouissent ou s’aplatissent facilement dans le corps humain, telles que les balles à enveloppe dure dont l’enveloppe ne couvrirait pas entièrement le noyau ou serait pourvue d’incisions.
La présente déclaration n’est obligatoire que pour les puissances contractantes, en cas de guerre entre deux ou plusieurs d’entre elles.
Elle cessera d’être obligatoire du moment où, dans une guerre entre les puissances contractantes, une puissance non contractante se joindrait à l’un des belligérants.
La présente déclaration sera ratifiée dans le plus bref délai possible.
Les ratifications seront déposées à La Haye.
Il sera dressé du dépôt de chaque ratification un procès-verbal, dont une copie certifiée conforme sera remise par la voie diplomatique à toutes les puissances contractantes.
Les puissances non signataires pourront adhérer à la présente déclaration. Elles auront, à cet effet, à faire connaître leur adhésion aux puissances contractantes, au moyen d’une notification écrite adressée au gouvernement des Pays-Bas et communiquée par celui-ci à toutes les autres puissances contractantes.
S’il arrivait qu’une des hautes parties contractantes dénonçât la présente déclaration, cette dénonciation ne produirait ses effets qu’un an après la notification faite par écrit au gouvernement des Pays-Bas et communiquée immédiatement par celui-ci à toutes les autres puissances contractantes.
Cette dénonciation ne produira ses effets qu’à l’égard de la puissance qui l’aura notifiée.
En foi de quoi, les plénipotentiaires ont signé la présente déclaration et l’ont revêtue de leurs cachets.
Fait à La Haye, le 29 juillet 1899, en un seul exemplaire, qui restera déposé dans les archives du gouvernement des Pays-Bas et dont les copies certifiées conformes sont remises par la voie diplomatique aux puissances contractantes. »
En bref, étaient donc interdites par le droit de la guerre, non pas « la fabrication » et la « mise sur le marché », mais uniquement « l’emploi » de « balles qui s’épanouissent ou s’aplatissent facilement dans le corps humain ». Cette formulation large incluait nécessairement tous les modèles de balles expansives en usage ou à créer, et ce quel que soit le mode opératoire employé pour permettre leur expansion au moment de leur impact ou de leur pénétration dans corps humain.