Bonsoir à tous,
I. — Il n’existe que deux lois ayant été promulguées par le Président de la République à la date 17 juillet 1933 :
— la loi du 17 juillet 1933 ratifiant le décret du 16 octobre 1932 approuvant la délibération du Conseil général de la Guadeloupe et dépendances, en date du 11 juin 1932, demandant l’inscription au tarif spécial de cette colonie des futailles vides en bois
(J.O. 22 juill. 1933, p. 7.638).
—> https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6546976m/f2.item
— la loi du 17 juillet 1933 ratifiant un certain nombre de décrets rendus en exécution de la loi du 13 avril 1928 sur le régime douanier colonial
(J.O. 22 juill. 1933, p. 7.639).
—> https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6546976m/f3.item
La référence faite par le rédacteur de la
« fiche matricule » à l’article 4 d’une loi du 17 juillet 1933 est donc manifestement erronée, et ce d’autant que les deux lois promulguées à cette date ne comportaient qu’un article unique. Était donc bien nécessairement visé l’article 4 de la loi du 17 juillet 1933. Simple erreur matérielle donc.
II. — L’article 101, alinéa 3, de la loi de finances du 19 décembre 1926 avait créé une carte de combattant, destinée à être attribuée, dans des conditions fixées par un règlement d’administration publique,
« à toutes les personnes ayant droit de recourir à l’aide à l’Office national du combattant. » Cette disposition fut complétée par l’article 4 du décret du 28 juin 1927 fixant les attributions et le fonctionnement de l’Office national des anciens combattants
(J.O. 4 juill. 1927, p. 6.934), dont le premier et le deuxième alinéas étaient ainsi rédigés :
« Art. 5. — Les combattants recevront une carte d'identité spéciale, dite « carte du combattant », dont le modèle et le mode d'attribution seront déterminés par le règlement d'administration publique pris en conformité des dispositions de l'article 101 de la loi du 19 décembre 1926.
Toutefois, tiendra lieu provisoirement de carte du combattant un certificat constatant la qualité de combattant qui sera délivré sur demande des intéressés :
1° — Aux militaires des armées de terre et de mer visés à l'article 2 ,par les autorités énumérées dans des instructions spéciales des ministres de la Guerre et de la Marine ;
2° — Aux Alsaciens et Lorrains qui n'ont pas servi dans l'armée française, par le préfet, sur la proposition du président du groupe régional d'anciens combattants de la guerre 1914-1918 auquel ils sont affiliés. »
Au titres des opérations effectuées entre le 2 août 1914 et le 11 novembre 1918, pouvaient solliciter l’attribution d’un certificat tenant lieu provisoirement de carte de combattant
(D. 28 juin 1927, art. 2-A.) :
1° — Les militaires des armées de terre et de mer ayant appartenu, pendant trois mois consécutifs ou non, à des unités énumérées dans des tableaux annexés au décret du 28 juin 1927 ;
2° — Sous réserve d’avoir appartenu à ces unités, mais sans condition de séjour, les militaires des armées de terre et de mer ayant été évacués pour blessure reçue ou maladie contractée en service alors qu’ils appartenaient à ces unités et ceux ayant été fait prisonniers ;
3° — Quelle que soit l’unité à laquelle il avaient appartenus, sans condition de séjour dans cette unité, les militaires des armées de terre et de mer ayant reçu une blessure de guerre.
Toutefois, aux termes du troisième alinéa de l’article 5 du décret du 28 juin 1927,
« le certificat provisoire et la carte du combattant ne [pouvaient être]
délivrés aux militaires des armées de terre et de mer non amnistiés qui [avaient]
encouru une condamnation pour infraction commise pendant la durée des opérations. »
Les conditions de délivrance du certificat provisoire prévu par l’article 5 du décret du 28 juin 1927 furent déterminées par l’instruction du 28 juillet 1927
(J.O. 29 juill. 1927, p. 7.865), modifiée par l’instruction du 20 février 1928
(J.O. 20 févr. 1928, p. 2.064). Dans un nota séparé, cette instruction rappelait que
« le certificat ne sera pas délivré aux anciens militaires non amnistiés qui auront encourus une condamnation pour infraction commise pendant la durée des opérations. »
III. — Au cas présent, il appert de la fiche matricule établie à son nom qu’un certificat provisoire portant le n° 12.233 fut délivré le 12 avril 1937 au soldat Émile Antonin RAYNAUD par l’Office des anciens combattants du département du Var, bien que l’intéressé ait été déclaré déserteur du 10 au 22 juillet 1915, date de son arrestation par les militaires de la gendarmerie du Boulou (Pyrénées-Orientales). Mais, immédiatement après la mention de sa désertion, la même fiche indique expressément : « N’est pas l’objet d’une plainte en Conseil de guerre ».
Dès lors, n’ayant aucunement fait l’objet d’une condamnation revêtue de l'autorité de la chose jugée à raison d'une infraction au Code de justice militaire, rien ne s’opposait à ce qu’il bénéficiât du certificat provisoire prévu par l’article 5 du décret du 28 juin 1927.
Et il est probable qu’ayant été initialement déchu du droit à la retraite du combattant par application des dispositions rigoureuses de l’article 4 de la loi du 13 juillet 1933 portant amnistie (J.O. 14 juill. 1933, p. 7.358) — dispositions qui ne se référaient aucunement à l’existence établie d’une condamnation pénale —, sa situation fut reconsidérée à la suite de l’intervention de l’article 11 de la loi du 12 juillet 1937 portant amnistie (J.O. 13 juill. 1937, p. 7.914).
En toute hypothèse, il importe de relever que l’instruction n° 0703/Ad. du 26 juillet 1933 relative à l’application de ladite (J.O. 29 juill. 1937, p. 8.562) indique : « Comme sous le régime de l'article 4 de la loi du 13 juillet 1933, la déchéance instituée par l'article 11 de la loi du 12 juillet 1937 ne s'applique qu'à la retraite du combattant et non à la carte. Seuls sont déchus du droit à la carte et, par voie de conséquence à la retraite, les anciens militaires des armées de terre et de mer qui ont encouru une condamnation pour infraction commise pendant la durée des opérations, laquelle n'a pas été amnistiée. » Application classique du principe traditionnel d’indépendance des législations.