Une reconnaissance hardie pour un peloton du 5e Hussards

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jacques didier
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Re: Une reconnaissance hardie pour un peloton du 5e Hussards

Message par jacques didier »

Bonjour à toutes et à tous,

La comtesse Anne-Marie de Moustier, âgée de 20 ans, résidant avec ses parents au château de Clémery, en avant-poste de Nomeny, tient un journal où elle note ses impressions de campagne depuis le 1er août 1914. Elle évoque cette reconnaissance dramatique d’un peloton du 4e escadron du 5e Hussards.

« Mardi matin 11 août 1914, pendant la messe de six heures, le canon retentit pour la première fois si près de nous, que les vitraux de l’église en tremblèrent et, de l’entrée du village où j’entraînai mon père à l’issue de l’office, on voyait des panaches de fumée s’échapper, par intervalle, de la côte de Lesmenils ; nous sûmes depuis que l’on bombardait Pont-à-Mousson. Un peloton du 5e Hussards était dans Clémery et l’officier nous dit qu’il partait en reconnaissance sur l’autre rive de la Seille. Ces malheureux hussards tombèrent dans une embuscade préparée par les Allemands, du côté d’Eply ; ils livrèrent un combat acharné au corps à corps où les sabres français se mesurèrent avec les lances prussiennes ; finalement, obligés par le nombre de se replier, ils profitèrent de l’abri que leur offrait les arbres du parc et nous les vîmes passer au grand galop, à travers les pelouses, les allées , couchés sur l’encolure de leurs chevaux, tandis qu’au dessus de leur têtes, les balles sifflaient d’une façon lugubre. Pendant que la lutte se poursuivait au Moulin, des soldats, remarquant le drapeau de la Croix Rouge qui flottait depuis la veille sur le château, nous amenèrent six blessés que nous pensâmes aussitôt, sous la direction de mon père qui a le diplôme de la Croix Rouge. Ils avaient, en général, de grosses plaies faites par des coups de lance ; l’un d’entre eux perdait tant de sang qu’on pouvait le suivre à la trace, il se trouva mal de faiblesse. Un autre n’avait que quelques égratignures, mais la chaleur et l’émotion lui avait occasionné un transport au cerveau et, brandissant une lance prussienne, il nous racontait avec force gestes qu’il avait été fait prisonnier, mais qu’ayant arraché ses liens, il était parvenu à se sauver et voulait se battre encore. Impossible de le calmer, il gesticulait et criait comme un beau diable et nous eûmes toutes les peines du monde à l’empêcher de se déshabiller au milieu de la cour pour nous montrer ses blessures ! Cet incident, malgré la gravité de la situation, avait quelque chose de comique.
Vers 10 heures, peu d’instants après le départ des derniers hussards, les Allemands firent leur entrée dans le village au galop et tirant dans toutes les fenêtres. Un pauvre homme de 81 ans, qui travaillait dans son grenier, reçut deux balles dans le ventre et mourut sur le coup. »

Les gens d’Eply s’occupèrent à enterrer les chevaux. Les blessés sont très difficiles à trouver dans les champs, d’autant plus qu’ils se cachent le plus souvent quand ils entendent des voix allemandes.
Cinq cavaliers français et deux allemands ont été enterrés côte à côte à Eply (54) :

BOULANGER (Xavier), hussard au 4e escadron.

CORROYER (Joseph Charles), hussard au 4e escadron.

MEDARD (Charles Eugéne), hussard au 4e escadron.

MENUEL (Camille Onésine), hussard au 4e escadron.

SOURIMAN (Charles François), hussard au 4e escadron.

(extrait de : Six mois dans un château aux avant-postes. Journal de guerre d’Anne-Marie de Moustier)

Cordialement.
J. Didier
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