Enigme particulièrement difficile!

ALVF
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Re: Enigme particulièrement difficile!

Message par ALVF »

Bonsoir,

Nous commençons à mieux cerner ce Crapouillot.

La seule certitude réside dans la connaissance de l'origine de la bouche à feu. Pour les autres composants, il n'y a rien de certain sinon que ce montage a été réalisé dans un Parc d'artillerie bien outillé et peut-être avec l'assistance d'une ou plusieurs usines locales.
L'affût et les supports de tourillons proviennent sans aucun doute d'un matériel existant. Je ne reconnais pas exactement le profil de l'affût du mortier de 15 cm modèle 1838 (le seul méritant vraiment l'appellation de "Crapouillot"). Je pense, sans en avoir la preuve, qu'il s'agit d'un affût provenant d'un autre matériel ancien (la présence des sus-bandes va aussi dans ce sens).

Quant à la bouche à feu, il ne s'agit pas d'un 120 C comme l'a suggéré Marpie, il faut chercher ailleurs.
Voici un plus gros plan d'un support de tourillon et d'une sus-bande:
Crapouillot détail.PNG
Crapouillot détail.PNG (239.7 Kio) Consulté 3279 fois
Cordialement,
Guy François.
bernard berthion
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Re: Enigme particulièrement difficile!

Message par bernard berthion »

Bonjour à tous,

en effet, l'énigme semble difficile comme le montre le silence ....

Ne serions nous pas devant du matériel de prise transformé par un ingénieux artilleur ?

Bonne journée, cordialement BB
- Août 1914 dans le département des Ardennes : du début août avec l'arrivée et le passage des troupes se concentrant en se dirigeant vers la Belgique, au repli de fin août vers la Marne en résistant sur la Semoy, La Chiers, la Meuse, l'Aisne, la Retourne.
ALVF
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Re: Enigme particulièrement difficile!

Message par ALVF »

Bonsoir,

L'énigme résistant à toutes les investigations, je fournis quelques informations destinées à trouver la solution en s'interrogeant sur les inventeurs de cet engin:

L'officier "instigateur" de la création de notre engin est un officier supérieur d'artillerie en mesure de :
-trouver les ressources d'une grande place possédant des vieux modèles d'affûts et divers matériels et pièces provenant d'un Parc de Place.
-de bénéficier d'un appui important lui permettant de s'affranchir des règles ministérielles concernant les matériels désuets ou hors d'usage, cet officier est en l’occurrence proche d'un général, commandant d'Armée, ce qui aide considérablement dans la tâche de "création".
-cet officier est connu dès l'avant-guerre comme un partisan de l'obusier léger et même d'un "Minenwerfer" à la française car il a décrit dans les cours et conférences de l'école de guerre de 1913 l'existence de ces redoutables engins dans le parc de nos ennemis les plus probables.
-cet officier est devenu officier général, peu après la fin des hostilités, et a écrit un peu plus tard un livre plein d'intérêt (mais qui n'évoque pas cet engin).
-c'est donc un esprit "fort", ennemi de la routine et qui a prêché dans le désert avant et pendant la guerre ce qui ne lui a cependant pas nui puisqu'il devient général de brigade dès décembre 1918.
Le nom du "constructeur" de l'engin ne dirait rien aux lecteurs, c'est un officier subalterne d'artillerie dont l'histoire n'a pas retenu le nom car, finalement, "l'engin" n'a pas donné grand chose sur le front et a même fait l'objet de critiques malgré les fonctions de "l'instigateur" précité.
Amis lecteurs, à vos JMO!
Cordialement,
Guy François.
air339
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Re: Enigme particulièrement difficile!

Message par air339 »

Bonsoir,


Voilà du grain à moudre ! J'ai pensé à Jules Challéat, mais il n'accède au grade de général de Brigade que le 16 septembre 1921 selon son dossier de la légion d'Honneur.

Il faut donc chercher ailleurs.

Cordialement,

Régis


Pour l'anecdote, je vois que le général Challéat résidait rue de Montreuil à Vincennes (au n° 7), il se trouve que j'y passe la semaine prochaine, j'aurais une pensée pour cet auteur prolifique.
jpg57
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Re: Enigme particulièrement difficile!

Message par jpg57 »

Bonsoir,
Ce canon de tranchée tire des obus de 75 rebutés culot doté d'un empennage en bois ? 750m pour l'obus et400m pour une bombe d'environ 16kg..... c'est une proposition !!! pour faire avancer .
Cordialement
Jean-Paul
ALVF
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Re: Enigme particulièrement difficile!

Message par ALVF »

Bonjour,

Nous "tournons" autour de la solution de l'énigme!
Jean-Paul, à quel matériel précis pensez-vous pour justifier les "performances balistiques" prêtées à cet "engin" ?
Ces données balistiques sont d'ailleurs inexactes, "l'engin" fait mieux!
Cordialement,
Guy François.
pierreth1
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Re: Enigme particulièrement difficile!

Message par pierreth1 »

Bonjour

L'officier en question ne serait il pas le général Firmin GASCOUIN né en 1866 promu général de brigade le 28 décembre 1918 ? je ne vois que lui les autres artilleurs officiers supérieurs intervenant dans ces années à l'école de guerre seront tous généraux bien avant 1918

Au début de la guerre il a un bel avancement (chef d'escadron en juin 1909): Lieutenant colonel à tite temporaire en octobre 1914 à titre définitif en novembre 1914 colonel à titre temporaire en octobre 1915 à titre définitif en décembre 1915.
A partir de septembre 1912 il était professeur adjoint de tactique appliquée à l'artillerie à l"Ecole supérieure de Guerre
De plus en 1920 il a publié un livre interessant sur l'artillerie "l'evolution de l'artillerie pendant la guerre" chez Flamarion

Je verrai bien cet officier qui commande dès le 12 avril 1915 le 17eme RAC faisant partie de la 3eme DI celui ci combat aux éparges à cette période et donc est proche de Verdun (qui devrait à cette époque disposer d'un parc d'artillerie conséquent pour faire des expériences)cette arrivée du Lieutenant Colonel Gascouin correspond à la période où nous essayons tous les expédients possibles pour compenser notre infériorité technique (en matiere d emortiers de tranchées et de grenades) face aux allemands,
Qu'il ait fait essayer par son régiment un matériel de son invention semble possible d'autant plus que le JMO d'une des batteries fait état d'un canon tronqué:

Le calibre de ce canon ne serait il pas de 75mm et pourquoi pas une pièce inutilisable par usure dont on aurait sectionné une partie du fut du canon

dans le JMO de la 2eme batterie de ce régiment il est fait mention le 25 mai 15 d'un canon tronqué ce qui pourrait correspondre à la piece photographiée,
- 25 mai "La pièce du maréchal des logis Leroux sert un canon tronqué qu'elle installe dans le bois des peupliers à proximité de Fresnes"
26-27-28-29 mai " Réglage du canon tronqué qui manque de précision la pièce d eFresnes est déplacée de 100M"
31 mai "le capitaine Ribaucourt aidé du Sous lieutenant Borda du 5eme lourd perfectionne le canon tronqué en le faisant pointer au goniomètre tonnerre (?) et en lui constituant une charge de 200g de poudre BC. La précision devient acceptable"
4 juin " Le capitaine règle la pièce de Fresnes sur la haie servant de but auxiliaire sur le plateau de Combres, d'abord à charge de plein fouet puis à charge de 0kg35 de poudre BSP. ce dernier tir de 18 projectiles permet au capitaine d'établir une table de tir du canon de 75 pour cette charge et de calculer les écarts probables et la dérivation.
Si il s'agit bien de cette pièce, entre Fresne et Combres il y a 4 km à vol d'oiseau , la crête de combres est approximativement à 700/800m de la ligne de front donc dans ce cas une portée de plus d'un KM? (2 à 3 km de portée??, en se basant sur les positions et cibles supposées citées dans le JMO

Donc si il s'agit bien de ce canon, il aurait été utilisé aux éparges fin mai 1915, poudres BC et BSP étaient utilisées pour les obusde 75 s'agirait il d'un 75 "raccourci"

Cordialement

Pierre



Cordialement

Pierre
Dernière modification par pierreth1 le mer. juin 12, 2019 6:22 pm, modifié 7 fois.
pierre
jpg57
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Re: Enigme particulièrement difficile!

Message par jpg57 »

Bonjour,
pour Mr Guy François
J'ai lu beaucoup de choses sur les obusiers, dont un canon ARCHER mortier tube en bronze âme lisse de 40m/m qui tire des obus de 75 rebuté avec un culot doté d'un empennage en bois avec une porté de 750m pour l'obus et 400 m pour une bombe d'environ 16kg mais je ne suis pas un spécialiste .....
Cordialement
Jean-Paul
ALVF
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Re: Enigme particulièrement difficile!

Message par ALVF »

Bonsoir,

Bravo à Pierre qui a trouvé l'essentiel des éléments pour la solution de l'énigme!
Pour Jean-Paul, non, l'engin n'est pas une des multiples inventions d'Archer et dont plusieurs sujets anciens ont rappelé les créations
Les indices concernant l'officier "instigateur" de la réalisation de cet engin ont été parfaitement exploités par Pierre. Il s'agit bien du futur général Gascouin, encore lieutenant-colonel au début de 1915 et dont le dossier "Léonore" est très complet. Cet officier est l'auteur d'un livre très intéressant paru en 1920 chez Flammarion "L'évolution de l'artillerie pendant la guerre", ouvrage assez critique des méthodes employées avant et pendant la guerre.
Revenons à l'engin:
Quelques précisions: le lieutenant-colonel Gascouin est au début de 1915 commandant du 5e R.A.L et de l'A.L de la Ière Armée après avoir été très proche de général Dubail (chef du 2e bureau à l'état-major de la Ière Armée), il lui a été donc assez facile d'obtenir diverses autorisations pour "se servir" en matériels divers dans les Parcs et dans les Places. Il prend le commandement du 17e R.A.C le 12 avril 1915.
L'engin est bien un "75 tronqué" dont deux exemplaires provenant de tubes éclatés ("crise du 75") ont été récupérés probablement à Somme-Bionne où existe un dépôt de matériels détériorés destinés à partir vers l'arrière.
Il est hors de doute que le lieutenant-colonel Gascouin ait été l'instigateur de la création de ce matériel probablement en s'appuyant sur le sous-lieutenant Borda du 5e R.A.L pour la confection du matériel. Les éléments proviennent d'un Parc d'Artillerie de Place, probablement celui de Toul où l'A.L de la Ière Armée puise pour ces travaux et l'équipement de ses batteries automobiles (parmi les premières du genre à la fin de 1914).
Pierre a trouvé des allusions à l'emploi du "75 tronqué" dans le JMO de la 2e batterie du 17e R.A.C mais il y aussi quelques détails supplémentaires dans le JMO de l'artillerie du 2e Corps d'Armée. On y trouve l'essentiel d'un rapport du lieutenant-colonel Gascouin qui résume bien les caractéristiques de l'engin:
-emploi de tubes de canons de 75 éclatés et servant alors comme mortiers à charge réduite.
-le 75 tronqué peut tirer 4 à 5 coups à la minute (au lieu de 1 coup toutes les 3 ou 4 minutes pour le mortier de 58 T, seul engin de tranchée an nombre au début de 1915).
-placé à 500 ou 1000 m en arrière des lignes, le 75 tronqué peut tirer des obus explosifs de 75 à 2000 m avec une charge de 125 grammes de poudre BC ou à 3000 m avec une charge de 200 grammes.
-l'engin peut tirer 200 coups en 24 heures.
-l'engin est plus précis que le 58 T.
Son principal défaut est qu'il est difficile de changer de direction et que son meilleur emploi est le tir d'enfilade des tranchées, ravins ou boyaux.
Le 13 mai, un 75 tronqué est établi à Champlon pour tirer sur Combres, sur les Eparges et sur le 77 du Bois en éventail (éperon ouest de Combres).
A noter un texte cité le 18 mai 1915 où le G.Q.G rappelle que les pièces dégradées sont employées à l'arrière pour les réfections et qu'il n'est pas possible de donner satisfaction à la réalisation d'un engin à tir courbe utilisant les canons de 75 dégradés.
Manifestement, le général Dubail est intervenu puisque dès le 23 mai une note du GQG autorise, par exception, le 2e Corps d'Armée à conserver momentanément les deux dispositifs d'obusiers de tranchée réalisés avec des canons de 75 dégradés.
Les unités en ligne ne semblent pas toutes avoir été convaincues par l'engin puisque l'on trouve dans le JMO de la 7e brigade de la 4e Division d'Infanterie, en date du 3 mai 1915, secteur Bois-Haut, Tranchée de Calonne: "une pièce de 75 raccourcie a été amenée dans l'angle nord-est du carrefour central. Les servants ne peuvent contrôler leurs résultats et il serait peut-être préférable s'il y a des expériences à faire qu'on les fasse ailleurs".
Il reste à analyser l'engin car aucun rapport n'a été trouvé sur les conditions de sa construction et les éléments employés.
La seule certitude est que deux engins, réalisés à partir de 75 tronqués, ont été construits. La photographie, la seule que je connaisse à ce jour, pose plusieurs problèmes, j'y reviendrai dans un message ultérieur.
Pour ce soir, merci aux participants et encore bravo à Pierre!
Cordialement,
Guy François.
bernard berthion
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Re: Enigme particulièrement difficile!

Message par bernard berthion »

Bonsoir Guy François,
Bonsoir à tous,

passionnante énigme qui nous livre une passionnante histoire.
Merci.

Cordialement BB
- Août 1914 dans le département des Ardennes : du début août avec l'arrivée et le passage des troupes se concentrant en se dirigeant vers la Belgique, au repli de fin août vers la Marne en résistant sur la Semoy, La Chiers, la Meuse, l'Aisne, la Retourne.
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