Il y a cent ans, 700 soldats allemands vont mourir au Mont Cornillet

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JeanMiche
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Re: Il y a cent ans, 700 soldats allemands vont mourir au Mont Cornillet

Message par JeanMiche »

Bonjour,

Et à lire, l'historique du polygone de Gâvres cité par M. Guy François, ce site pas du tout inintéressant ....:

http://www.gavres.fr/La-rubrique-de-Marie-F.6393.0.html
Cordialement Jean Michel
humanbonb
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Re: Il y a cent ans, 700 soldats allemands vont mourir au Mont Cornillet

Message par humanbonb »

Bonjour,
Un tout grand merci à Guy François pour ce sujet on ne peut plus passionnant ! Un régal à lire !!!

Bonne journée.
Cordialement.
ALVF
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Re: Il y a cent ans, 700 soldats allemands vont mourir au Mont Cornillet

Message par ALVF »

Bonsoir,

Grâce à Maurice Sublet, il est possible de "passer de l'autre côté de la colline" avec le portrait d'un jeune soldat du Württembergisches Infanterie-Regiment Nr. 476.
Ce nouveau régiment, composé surtout de toutes jeunes recrues, a été mis sur pied en décembre 1916 et entraîné au début de 1917 avant d'être engagé dans le Secteur brûlant du Mont Cornillet.
Ce document est poignant, il y a de fortes probabilités pour que ce jeune soldat de la 4e Compagnie du régiment fasse partie des 1103 hommes signalés "disparus" en mai 1917 (36 officiers et 1064 sous-officiers et soldats).
La carte envoyée le 7 avril 1917 montre un jeune soldat équipé de neuf, il ne lui manque encore que son casque d'acier, lequel sera distribué avant son départ vers la Champagne...
ImageImage
Jeune soldat de la 4.Kompagnie du Württembergisches Infanterie-Regiment Nr.476 et sa plaque de ceinturon du Royaume de Wurtemberg.
Image
Sa dernière carte avant l'enfer du Mont Cornillet, écrite le 5 avril 1917 et postée deux jours après?

Cordialement,
Guy François.
ALVF
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Re: Il y a cent ans, 700 soldats allemands vont mourir au Mont Cornillet

Message par ALVF »

Bonsoir,

La trajectoire passant par une cheminée d'aération est une aimable plaisanterie, éventuellement envisageable pour une grenade poussée à la main, mais évidemment peu crédible pour un projectile de 900 kg tombant sous un angle de chute de 56° à la vitesse approximative de 370 m/s!
Tout au plus peut-on admettre que le projectile ait pu traverser une cheminée verticale sur un point de sa trajectoire augmentant légèrement sa capacité de perforation.

N'ayant pu trouver une pièce d'archive relatant une expérimentation de la capacité de perforation d'un projectile de 400, je vais faire une comparaison avec un obus tiré par un obusier de 520.
En effet, les obusiers de 400 ont été rapidement mis en service à l'été 1916 pour participer, d'abord à l'offensive de la Somme puis à la reprise des forts de Douaumont et Vaux à Verdun à l'automne. De ce fait, les expériences balistiques menées à Gâvres ont eu surtout pour but de vérifier la tenue du matériel et des obus d'une part et d'établir les tables de tir d'autre part, sans mener d'autres expériences plus poussées.
Pour la mise en service du 520, prévue à l'automne 1918, les mêmes expériences balistiques ont été menées par la Commission de Gâvres à Saint-Pierre-Quiberon et à Mailly avec en plus des observations précises des caractéristiques des entonnoirs créés par les obus explosifs et les capacités de perforation des obus à fusée retardée dans le sol.

On peut comparer certaines de ces expériences avec la capacité de perforation des obus de 400. Ainsi, une expérience des 18 et 20 mars 1918 a été menée dans des conditions balistiques voisines d'un tir de 400. Toutefois, ces expériences ont été alors menées avec un obus à amorçage de tête de 1360 kg tiré à la charge intermédiaire de 109 kg de BM 13 à la vitesse initiale de 470 m/s. Ce tir, malgré la différence de calibre et de poids de l'obus, est donc effectué des conditions balistiques presque similaires à celle de l'obus de 400 de 900 kg, lequel, pour sa part, est tiré à charge maximum à 467 m/s (conditions des tirs sur le Mont Cornillet).
Le projectile de 520, tiré verticalement sous l'angle de 56° à 470 m/s arrive sur l'objectif situé à 14.900 mètres sous l'angle de chute de 60° à la vitesse de 370 m/s dans un sol crayeux assez semblable à celui des Monts de Champagne mais plat.
Voici le résultat observé:
Image
Expériences des 18 et 20 mars 1918 à Mailly (obusier de 520).

On constate que l'obus a parcouru 11 mètres dans le sol et atteint la profondeur de 7,50 m, sa fusée retardée a fonctionné mais le projectile était lesté et non chargé. Sa trajectoire commence sous une incidence de 62° et dévie ensuite, la souille est très nette et d'un diamètre constant de 0,80 m dans toute sa trajectoire souterraine.
La capacité de perforation d'un obus à amorçage de culot doit être légèrement supérieure et la capacité d'atteindre la profondeur de 8 à 10 mètres est comparable pour les obus de 400 et 520 tirés à cette vitesse voisine de 470 m/s.
Pour mémoire, à Gâvres, un obus de 520 tiré à 500 m/s traversera de part en part un rocher de granit de 1 mètre d'épaisseur et continuera sa course dans le sable!

Nous verrons ultérieurement comment le Chef d'escadron Batsale a analysé pour sa part le "coup heureux" du 20 mai 1917.
En attendant, les géographes, topographes et autres "spécialistes" du calcul peuvent faire une coupe de terrain du Mont Cornillet en prenant en compte la hauteur de Mont, l'altitude des entrées, la longueur et la hauteur des galeries jusqu'au carrefour des galeries transversale et Est afin de déduire la masse couvrante de craie protégeant les galeries au niveau de l'impact!
Cordialement,
Guy François.
celtemoin
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Re: Il y a cent ans, 700 soldats allemands vont mourir au Mont Cornillet

Message par celtemoin »

Bonjour à toutes et à tous,

Merci à tous les intervenants, en particulier à Guy pour ses explications de vulgarisation. Dans la revue tranchée du trimestre, il y a un documentaire très intéressant pour moi de Franck Beauclerc, sur le sujet. Encore bravo à tout le forum où l'on sait que tous les jours, on va apprendre de nouveau sur cette sombre période de notre histoire.
Cordialement

Patrick
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Chapelle de Falaise
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Re: Il y a cent ans, 700 soldats allemands vont mourir au Mont Cornillet

Message par Chapelle de Falaise »

Bonjour à toutes et à tous,

A lire, en suivant le lien ci-dessous, le récit du résultat coté allemand du bombardement français du tunnel du Mont Cornillet du 20 mai 1917. Il s'agit ici du rapport inédit émis le 25 mai 1917 par le Docteur Nagel, médecin en chef allemand du 2ème bataillon du Infanterie Regiment 476 stationné dans le tunnel. Le Docteur Nagel est, avec quelques camarades, l'un des rares rescapés de cette tragédie.
La lecture de ce récit laisse bien imaginer l'horreur vécue par tous ces malheureux soldats allemands qui vont mourir piégés et asphyxiés sous terre !

http://www.lesamisdenauroy.fr/Les-monts ... illet.html

Très cordialement.

David. :hello:
« Les hommes disent que le temps passe, le temps dit que les hommes passent… »
https://chapellefalaise.webnode.fr
humanbonb
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Re: Il y a cent ans, 700 soldats allemands vont mourir au Mont Cornillet

Message par humanbonb »

Bonjour,
Ce témoignage est saisissant, merci à vous de nous le faire partager !

Sait on avec exactitude le nombre des pertes ? Les chiffres différent énormément d'un témoignage à un autre.
Y a t'il des données précises à ce sujet ? Morts, blessés et individus "survivants" mais décédés suite à cette intoxication ?

Bonne journée à tous.
Bien cordialement.
ALVF
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Re: Il y a cent ans, 700 soldats allemands vont mourir au Mont Cornillet

Message par ALVF »

Bonsoir,

Mon invitation à dresser une coupe de terrain en prenant en compte les éléments en possession des artilleurs de l'A.L.G.P pour préparer leur tir n'avait d'autre but que de faire ressortir le sérieux des officiers du 30e Groupe de 400 du 3e R.A.P. Il n'est nul besoin d'être un spécialiste pour s'entraîner à cet exercice qui était en honneur dans les Armées avant la révolution numérique et le GPS qui permettent instantanément de produire les "parties vues et cachées" d'un compartiment de terrain, de faire figurer en trois dimensions le plan relief le plus exact et de déterminer les possibilités techniques de tirer sur un objectif!

Que savaient donc les artilleurs au matin du 20 mai 1917?
-ils disposent de plans directeurs et de photographies aériennes détaillant parfaitement le relief du Mont Cornillet et la position exacte des entrées du Tunnel, impossibles à camoufler et très visibles compte-tenu de l'importance des déblais retirés de l'intérieur.
-les interrogatoires des prisonniers permettent de déterminer la direction générale des galeries et la longueur des galeries qui atteint 300 mètres, contrairement à beaucoup d'affirmations contradictoires. A cet égard, les documents saisis sur un officier du 173. Infanterie-Regiment appartenant à la 223. Infanterie Division ayant occupé le tunnel fin avril et début mai 1917 et les interrogatoires d'autres prisonniers ne laissent aucun doute. Le Chef d'escadron Batsale savait avant le tir du 20 mai que "l'organisation intérieure du tunnel du Cornillet comporte trois galeries ayant chacune 300 m de long environ, sur 2 à 3 m de large et boisées. A l'intérieur, à une cinquantaine de mètres des entrées, les galeries sont réunies par un couloir transversal...".
-les coupes de terrain réalisées à partir du Plan Directeur permettent de déduire que la masse couvrante atteint jusqu'à 30 mètres d'épaisseur sur l'essentiel de la longueur des galeries et que les parties vulnérables, protégées par moins de 10 mètres de masse couvrante, se situent sur les 60 premiers mètres des galeries.
Voilà les éléments qui ont conduit le commandement à prescrire un tir de 36 coups de 400 à raison de 12 coups par galeries en réglant sur les entrées. Ce tir ne peut être réglé que grâce à l'observation aérienne pour être efficace, ce qui oblige à attendre une journée d'excellentes conditions météorologiques. Le 20 mai 1917, toutes les conditions techniques sont réunies: les tirs préalables ont permis d'affiner les réglages et les corrections de portée et la luminosité est exceptionnelle.

Quelle était la réalité de l'organisation des tunnels?
Il est aujourd'hui possible d'examiner d'excellents plans et coupes du Tunnel du Cornillet en consultant le site allemand en ligne "Der Debus Tunnel und andere Tunnelanlagen im Ersten Weltkrieg, Champagne 1915" qui comprend un plan très complet mentionnant la position des descenderies reliant les lignes de défense du réduit du Cornillet avec les galeries du tunnel, la position des bouches d'aération et bien d'autres détails précieux. Il y a aussi la coupe des galeries du Tunnel que les allemands appellent d'Est en Ouest "Tunnel I, Tunnel II, Tunnel III".
Il est à noter que le chef d'escadron Batsale a assez bien déterminé la hauteur de la masse couvrante au niveau de la galerie transversale sauf en ce qui concerne le Tunnel III:
-dans le Tunnel I , la hauteur de la masse couvrante est de 9 mètres à 50 mètres de l'entrée puis passe à 10 mètres à 60 m pour augmenter ensuite.
-dans le Tunnel II, les chiffres sont de 10,50 et 14 mètres.
-dans le Tunnel III, la masse couvrante est plus importante de 20 mètres à 50 m et de 21 m à 60 m de l'entrée.
J'emprunte donc à ce site un extrait de la coupe de la galerie Est "Tunnel I" sur ses cent premiers mètres afin d'examiner la position exacte de l'impact de l'obus de 400:
Image
Coupe des 100 premiers mètres du Tunnel I (plan du site allemand "Der Debus Tunnel...".

La position de l'impact de l'obus de 400:
Les officiers de l'A.L.V.F n'ont pas pu visiter le tunnel avant leur départ mais les indications des officiers du Génie permettent d'assez bien le situer.
Le 9 juin 1917, le chef d'escadron Batsale écrit qu'après les tirs de réglage sur les entrées et l'observation de coups au but ou près du but, "Quant au tir d'efficacité, le capitaine (Aymone) a raccourci sa hausse de 60 mètres et reporté son tir aux points supposés de rencontre des trois galeries du tunnel avec la galerie transversale, épaisseur de la protection: 8 à 10 mètres".
L'écart probable d'un tir vertical d'obus en acier permet d'estimer que la moitié des coups probables a dû tomber dans la zone comprise entre 30 m et 90 m à l'intérieur du Tunnel I à l'aplomb des galeries mais avec une dispersion latérale de 10 mètres environ. La capacité de perforation est, on l'a vu plus haut de l'ordre de 7 à 8 mètres dans la craie. Il faut ajouter l'effet de la charge explosive qui crée des entonnoirs de l'ordre de 10 mètres de diamètre sur 5 mètres de profondeur dans un sol crayeux. La détonation a sans aucun doute provoqué l'effondrement de la galerie du Tunnel I quelque part vers 50 mètres à l'intérieur de la galerie. D'après le rapport du chef d'escadron Batsale, l'éclatement s'est produit à environ 50 mètres de l'entrée Est et a provoqué une zone de décombres d'environ 12 mètres de long, non encore déblayée à la date du 9 juin 1917.
Au vu de ces éléments, il semble bien que la bouche d'aération, située vers 112 m à l'intérieur du Tunnel I et sous 17 m de masse couvrante, n'a joué aucun rôle dans la destruction de la galerie.

Il s'agit bien d'un "coup heureux" car 12 coups seulement ont visé chacune des galeries, ce qui est assez peu. Un tir des 36 coups sur une seule galerie aurait peut-être été plus sage. En tout cas, les tirs de 400 et de 370 sur les Grands tunnels de Verdun Rive gauche en août 1917 ont fait l'objet de plus de prise en compte des probabilités puisque sur chaque tunnel visé (et atteint avec des pertes humaines moins lourdes mais importantes), au moins deux pièces de 400 (ou de 370) ont "traité" chaque objectif en bénéficiant d'un approvisionnement de 100 coups par pièce.
En résumé, la destruction du Tunnel du Cornillet est certes l'effet d'un "coup heureux" mais certainement pas d'un "coup tombant par hasard" comme on le lit fréquemment.
Cordialement,
Guy François.

PS: j'aborderai ultérieurement la question des pertes allemandes dans le tunnel, même si je n'ai pas employé la méthode scientifique suivie par Eric Mansuy pour estimer les pertes du Linge!
ALVF
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Re: Il y a cent ans, 700 soldats allemands vont mourir au Mont Cornillet

Message par ALVF »

Bonsoir,

Cent ans, jour pour jour, après cette tragédie, je vais essayer de synthétiser les pertes subies par les troupes allemandes le 20 mai 1917 dans le tunnel du Mont Cornillet.
Cette étude ne s'appuie que sur les sources facilement accessibles et quelques notes prises dans des documents d'archives. Il convient de préciser que mes recherches ont porté en détail sur le rôle de l'artillerie dans la destruction du tunnel du Cornillet mais que la question du recensement des victimes n'a pas été menée avec le même souci de détail.
Une lecture est à conseiller pour tous les lecteurs qui veulent lire l'intégralité des témoignages principaux, ceux du Médecin-major Forestier du 4e bataillon du 1er Zouave, du Docteur allemand Nagel du II/476 I.R, les pages traduites de l'historique allemand du 476. I.R et de la 376e Compagnie de pionniers. Tous ces documents figurent en annexe d'un article du général Jean Grenouilleau, en même temps qu'une synthèse des fouilles de 1973-1975, dans la publication "1917, des Monts de Champagne à Verdun" (Actes du colloque Mourmelon-Verdun des 24 et 25 mai 2007 sous la direction du professeur François Cochet) publiée par 14-18 éditions en 2008.

-1: Combien y avait-il de soldats dans les tunnels au matin du 20 mai 1917?

Rappelons d'abord la chronologie du 20 mai 1917: les tirs de 400 se sont échelonnés entre 06h00 et 08h47, l'assaut du 1er Zouaves a été donné à 16h25 et la conquête du Cornillet a été réalisé en 40 minutes seulement, seuls des îlots de résistance ont nécessité des combats sévères.
-effectifs allemands dans le tunnel: 2 états-majors de bataillon, 6 compagnies d'infanterie, 2 compagnies de mitrailleuses, quatre pelotons de pionniers, des postes de secours, une station radio, quelques prisonniers français, au moins 40 blessés allemands et probablement un certain nombre d'isolés ayant trouvé refuge dans les tunnels (troupes de logistique, ravitaillement, etc..., nombre certainement non négligeable, ainsi à Verdun en août 1917 plus de 100 militaires divers avaient trouvé refuge dans le Kronprinz Tunnel en dehors des occupants). Il y avait donc un effectif important dans les tunnels, de l'ordre de 1000 hommes.

-les pertes du 476. I.R sont de 1103 hommes, celles de la 376e Compagnie de Pionniers sont de 82 hommes (unité chargée de déblayer les entrées et les descenderies, ces hommes sont considérés comme morts dans les galeries du Tunnel sous réserve de quelques prisonniers).

-les hommes ayant pu s'échapper du tunnel: environ 200 à 300 juste avant l'attaque d'infanterie.

-les prisonniers: leur nombre est très faible, le 10e Corps d'Armée ne signale que 80 prisonniers le 20 mai, faits pour la majorité par la 48e Division et essentiellement par le 1er Zouaves (chiffre incluant la trentaine d'allemands qui se rendent avant l'assaut du 1er Zouaves et qui appartiennent probablement aux troupes de première ligne, hors des tunnels).
Dans la nuit du 20 au 21 mai, une centaine d'allemands, la plupart sans arme, traversent la compagnie de soutien du 1er Zouaves après s'être échappés, soit du tunnel, soit d'abris de première ligne, 63 sont faits prisonniers, ceux qui étaient armés et combattent sont abattus par les Zouaves. A titre de comparaison, le 17e C.A qui attaque le même jour pour améliorer ses lignes sur les autres Monts plus à l'Est fait plus de 900 prisonniers sans avoir conquis beaucoup de terrain.

Tous ces faits bruts laissent à penser que l'essentiel des pertes allemandes sont enregistrées dans le tunnel.

-2: Estimation des pertes par les français:

-les JMO sont tous contradictoires: plus de 400 (diverses unités), 500 (médecins), jusqu'à 1000 pour la IVe Armée, chiffre évidemment exagéré. Tous ces chiffres sont précoces (avant le 25 mai).
-les artilleurs de l'ALGP estiment ces pertes à 700 le 8 juin, après consultation du Génie et d'officiers ayant exploré plus ou moins les tunnels.
Le 1er Zouaves a eu à combattre férocement jusqu'à sa relève le 24 mai 1917 et n'a pas exploré le tunnel en détail en dehors de la reconnaissance des médecins.
Le 366e R.I relève le 1er Zouaves et un officier, le 26 mai, compte 50 cadavres dans le tunnel I de l'entrée jusqu'à la zone d'effondrement à 50 mètres de l'entrée.
Les travaux de déblaiement du Génie ne commencent vraiment que début juin, la compagnie 25/4 est employée à cette seule mission alors que les entrées des galeries sont effondrées et soumises au tir de l'artillerie allemande dès qu'un mouvement est perceptible.
A noter que le 8 juin, seulement 60 cadavres en décomposition avaient été hissés hors du tunnel par une étroite ouverture dans des conditions épouvantables. Durant toute la première quinzaine de juin 1917, le malheureux 288 Régiment d'Infanterie Territoriale est chargé d'approvisionner les troupes en ligne et de ramener les cadavres vers l'arrière, le régiment emploie à cet effet 6 attelages pour la seule tâche d'assainissement du champ de bataille du Cornillet. Ces vieux "Pépères" du 288e RIT subissent des pertes cruelles lors de ces missions et le général Vandenberg, commandant du 10e C.A, citera le 288e RIT le 24 juin pour ses efforts lors de l'exécution de ces missions difficiles.
Je n'ai malheureusement pas trouvé de "statistiques" de ces missions éprouvantes et je n'ai pas non plus la confirmation de la date à laquelle il a été décidé de regrouper les dépouilles des soldats morts dans le tunnel dans un rameau de galerie à condamner ensuite afin de rendre respirable l'atmosphère empoisonnée et empuantie des galeries.

-3: Nombre des corps exhumés:

-mai-juin 1917: au moins 60 corps hissés hors des tunnels, nombre certainement supérieur.

-1933: première opération franco-allemande sur le Mont Cornillet, rapidement arrêtée: je n'ai trouvé aucun chiffre exact, sinon la mention d'environ 100 corps exhumés avant l'arrêt des travaux.

-1974: engagement des Pionniers allemands du lieutenant-colonel Köberl et du Génie français: 265 ou 267 corps exhumés.

-1975: deuxième opération des Pionniers et du Génie: 54 corps exhumés portant le total des opérations de 1974-1975 à 321.

On arrive donc à un minimum d'environ 500 hommes tués dans les tunnels, il est probable que d'autres corps reposent toujours dans d'anciennes galeries du Tunnel de Cornillet. Une plaque de la Nécropole de Warmeriville évoque 414 noms de soldats tués dans les tunnels, je ne sais sur quels éléments s'appuie cette affirmation.

En tout cas, j'aurai une pensée particulière aujourd'hui pour toutes ces victimes mortes dans des conditions horribles et je me remémorerai les prières récitées dans ce tunnel en compagnie de quelques camarades et de notre médecin-chef lors d'une visite impressionnante d'une galerie de ce tunnel effectuée en 1978, trois ans après les opérations franco-allemandes alors que les déblais du travail accompli étaient toujours visibles et parsemés de centaines de débris de cuir racorni. Nous respirions mieux en sortant de ces lieux sinistres, aujourd'hui comblés.

Si d'autres chercheurs veulent bien compléter ces notes en citant d'autres sources ou travaux, je serai très intéressé.
Cordialement,
Guy François.
humanbonb
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Re: Il y a cent ans, 700 soldats allemands vont mourir au Mont Cornillet

Message par humanbonb »

Bonsoir et merci encore pour cette synthèse très détaillée.

Cdlt.
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