ALVF à Verdun ?

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IM Louis Jean
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Re: ALVF à Verdun ?

Message par IM Louis Jean »

Re :hello: et merci!
En effet, il s'agit de la pièce de 32 cm modèle 1870-84 immatriculée P 3015 (et non pas P 3019 ce qui m'avait fait partir sur une fausse piste).
Avouez que c'était trompeur!

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Cordialement
Étienne
<< On peut critiquer les parlements comme les rois, parce que tout ce qui est humain est plein de fautes.
Nous épuiserions notre vie à faire le procès des choses. >> Clemenceau
chanteloube
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Re: ALVF à Verdun ?

Message par chanteloube »

Bonjour,

Sous la plume de spécialistes je lis souvent que des pièces d'artillerie ont été réalésées, n'étant ni métallurgiste, ni spécialiste de l'artillerie lourde et en étant resté au réalésage des cylindres du moteur mon Alpine, ( le temps passe !) je me pose la question de savoir quelles ateliers effectuaient ces réalésages -ce qui ne doit pas être une mince affaire- et si ce réalésage n'affaiblissait pas les "tubes"? Fallait-il alors diminuer les charges de poudre? Ce qui aurait, il me semble une influence sur la portée ?
A-t-on le temps de pratiquer des essais systématiques ?
Bon, j'en conviens, des questions naïves probablement!

Cordialement CC
ALVF
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Re: ALVF à Verdun ?

Message par ALVF »

Bonsoir,

Pour résumer en quelques lignes une question très complexe, on distingue deux grands types de réalésage de bouches à feu:

-des canons longs de marine tirant à l'origine à très grande vitesse initiale raccourcis et réalésés à un calibre largement supérieur pour constituer des obusiers ou mortiers. Dans ce cas, il n'y a aucun problème majeur de résistance intérieure car le tronçon sauvegardé et réalésé est très épais. De surcroît, ces obusiers réalésés tirent à vitesse assez faible des obus très lourds.
Exemples:
.....L'obusier 400 modèle 1915 provient du réalésage et du raccourcissement du canon long de 340 mm modèle 1887 qui fut la première bouche à feu de marine très longue conçue dès l'origine pour l'emploi de la poudre sans fumée.
.....L'obusier de 370 modèle 1915 provenant du canon de marine de 305 mm modèle 1887.
.....Le mortier de 370 Filloux, très court, dont le tube est constitué de tronçons de tube de 340 mm modèle 1912, on peut construire deux mortiers avec un seul tube. Toutefois ces matériels Filloux emploient des culasses neuves totalement différentes des culasses de marine alors que les obusiers de 400 et 370 utilisent les culasses d'origine du canon de marine.

-des canons longs de côte ou de marine dont le tube est intégralement conservé mais réalésé à un calibre supérieur. Les bouches à feu réalésées conservent des performances balistiques équivalentes au matériel initial et le réalésage est calculé dans les limites de résistance intérieure de la bouche à feu initiale.
Exemples:
.....Canon de 285 mm modèle 1917 provenant du canon de côte de 274 mm modèle 1893-96.
.....Canon de 320 mm modèle 1917 provenant de 305 mm modèle 1893-96.

A noter que ce réalésage ne peut être réalisé que sur des machines complexes n'existant qu'à Ruelle (Fonderie de la Marine) ou dans le privé chez Schneider au Creusot.
A l'issue des opérations de réalésage, les bouches à feu transformées sont éprouvées comme les bouches à feu neuves par des tirs à charge renforcée donnant des pressions bien supérieures aux charges d'emploi. Les bouches à feu sont aussi ré-immatriculées: exemple pour un 400 construit initialement à Ruelle comme 340 mm modèle 1887 en 1893 et réalésé à Ruelle en 1915: "34 Mle 1887 R 1893 n° 1 Té 40 R 1915 n° 3". Cette bouche à feu particulière arme l'affût ALVF P 5014 baptisé "Kinz Gram".

Il est possible de réaléser encore une fois les bouches à feu déjà réalésées: ainsi, un tube de 285 mm modèle 1917 sera réalésé à 288 mm en 1918.
Il était aussi prévu de réaléser les obusiers de 400 à 415 mm mais aucun 415 ne fut jamais réalisé.
L'avantage est de doubler voire de tripler la "vie" d'une bouche à feu très longue à construire et très onéreuse tout en conservant des organes très complexes (culasses de très gros calibres).
Ainsi, la "vie" d'un canon de marine tirant à très haute vitesse initiale (de l'ordre de 300 coups) est prolongée au moins du double (cas des 285 et 320 modèles 1917).
La "vie" d'un obusier tirant à faible ou moyenne vitesse initiale est beaucoup plus longue (de l'ordre de 1500 coups pour un 400).

Après la guerre, la construction des bouches à feu de marine et de DCA tirant à haute vitesse initiale sera améliorée par l'emploi de "chemises rayées" introduites dans le corps des bouches à feu. Au tir, seules ces chemises rayées subissent une usure rapide, après 300 coups, on change seulement la chemise rayée en usine en conservant le corps du canon et la culasse, organes les plus délicats à construire. Le réalésage est ainsi devenu inutile.
Dans la Marine, les canons de 330 mm des "Dunkerque" et les 380 mm du "Richelieu" et bien d'autres bouches à feu sont des canons chemisés, c'est pourquoi ils portent une double appellation: canon de 380 mm modèle 1935 C/1935 (C/1935 signifiant chemise modèle 1935). Voilà aussi pourquoi la plupart des sites mal informés appellent les canons de 380 mm du "Jean Bart" modèle 1935-1936 alors que ces canons sont des 380 mm modèle 1936 C/1935 car leur chemise est la même que celle des canons du "Richelieu" mais le canon a été légèrement modifié pour simplifier la construction.
Subtilités de l'artillerie...
Cordialement,
Guy François.
chanteloube
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Re: ALVF à Verdun ?

Message par chanteloube »

Bonsoir Guy François, bonsoir à tous,
Me voilà un peu moins ignorant que ce matin. Merci d'avoir éclairé ce sujet de façon didactique.
Dois-je penser que le deuxième réalésage d'un tube implique la fabrication de nouvelles munitions ?
Cordialement
CC
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Ben El Mehli
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Re: ALVF à Verdun ?

Message par Ben El Mehli »

Bonjour à tous.
Citation: " en étant resté au réalésage des cylindres du moteur mon Alpine,"
C'est une drôle d'idée que de réaléser des moteurs dont les chemises ( humides ) sont sauf erreur amovibles.Chez Renault ( dont dérive les moteurs d'Alpine ) on pratiquait le" coup de fouet " c'est à dire l'échange des chemises , pistons et segmentation ; il existait un " kit " pour cela. Par contre sur les moteurs de Simca par exemple,non chemisés et dont les cylindres finissaient par s'ovaliser, on pouvait faire réaléser et monter ensuite des pistons et segments à la cote réparation.
Au revoir.
Ben El Mehli
PS: par exemple
http://www.ebay.fr/itm/CHEMISES-PISTONS ... 519c4e6fe0
chanteloube
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Re: ALVF à Verdun ?

Message par chanteloube »

Bonjour,
je vous réponds en MP pour vous expliquer ça! j'ai dit les cylindres pas les blocs!
Cordialement CC
air339
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Re: ALVF à Verdun ?

Message par air339 »

Bonjour,



Dans le cours d'artillerie du capitaine Leroy, 1922, figurent quelques alésages pour des calibres moindres :

- 100 TR mle 1897 réalésé en 105, avec augmentation de la portée

- 14 cm mle 1910 réalésé en 145 avec un léger gain en portée

- 145 mle 1916 (Saint Chamond) réalésé en 155

Sait-on quelles sont les contraintes qui permettent ou pas d'effectuer un réalésage : un dangereux amincissement des parois du canon, ou l'existence préalable d'un projectile à la cote choisie ?


Cordialement,

Régis
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demonts
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Re: ALVF à Verdun ?

Message par demonts »

http://argonnaute.u-paris10.fr/search?q ... ch-query=1
Bonjour,
Voici des photos du site BDIC sur lesquelles on voit un ALVF à VERDUN. On ne distingue pas trop les environs...
Cordialement
François
ALVF
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Re: ALVF à Verdun ?

Message par ALVF »

Bonsoir,

D'abord, pour répondre à Claude Chanteloube, il est bien entendu nécessaire de fabriquer de nouvelles munitions quand les pièces réalésées sont de calibres jusque là inusités.
Ainsi, les projectiles de 400, 288, 285 sont de nouvelle fabrication.
On cherche toutefois, chaque fois qu'il est possible, à réaléser des pièces à un calibre déjà utilisé, c'est le cas des 305 réalésés à 320 qui peuvent utiliser les projectiles des canons existants de 32 cm modèle 1870-93, 1870-84 et 1870-81.
Il y a tout de même des limites car, en fonction des caractéristiques des rayures, des vitesses initiales, tous les obus ne sont pas interchangeables dans un calibre donné. Ainsi, il est impossible d'employer les obus de 370 destinés aux mortiers de 370 Filloux dans les obusiers de 370 modèle 1915 (et réciproquement!).

Pour répondre à Régis, bien sûr, il y a des réalésages pour des calibres inférieurs aux exemples choisis plus haut mais ils concernent toujours des pièces tirant à forte vitesse initiale, caractérisées par une usure rapide des rayures:
-100 mm modèle 1897 de côte réalésé en 105 (large gamme d'obus dans ce calibre).
-14 cm modèle 1893, 14 cm modèle 1910 tubé en 145 mm (utilisation dans la Marine et sur des affûts terrestres): nécessité de nouveaux projectiles peu différents de ceux de 14 cm.
-le cas du 145 mm modèle 1916 Saint-Chamond est un peu différent, les tubes de ce modèle ont été construits neufs aux dimensions des pièces de marine réalésées à 145 mm et prévus dès l'origine pour pouvoir être réalésés au calibre 155 mm (vaste gamme d'obus disponibles).
Les 200 pièces neuves construites étaient toutes en service au début de 1918, la formidable quantité d'obus de ce calibre tirés durant les phases de combat du printemps et de l'été 1918 ont abouti à une grande usure des matériels, les plus performants des canons mobiles (hors ALVF). De ce fait, à l'automne 1918, les 4/5èmes des pièces étaient usées et envoyées en usine pour réalésage en 155 mm. Tous ces canons devaient être réalésés pour le printemps 1919, date longtemps prévue pour l'offensive finale destinée à porter les alliés au delà du Rhin...
-canons ALVF de 19 cm modèle 1870-93: les tubes de ces matériels très utilisés devaient être réalésés en 203 mm (8 pouces) afin de pouvoir employer les très nombreux obus américains disponibles provenant des pièces de côte du littoral américain. En fait, un seul tube de ce calibre a été installé sur un affût ALVF, non employé au front mais une douzaine de tubes avaient pu être réalésés à la fin de la guerre.
-il existait un très gros programme de réalésage d'autres pièces d'ALVF, programme interrompu par l'armistice.

Le problème de la résistance longitudinale des bouches à feu réalésées est négligeable et le mode de construction des pièces frettées permet de réduire les risques de diminution des conditions de résistance transversale des tubes réalésés, en restant dans des limites calculées. En fait, aucun accident imputable au seul réalésage n'a été enregistré ou du moins prouvé.
A noter aussi, à la fin de la guerre, que la solution du tubage par autofrettage semble bien plus prometteuse que le réalésage. En effet, grâce aux travaux de l'Ingénieur Général de l'Artillerie Navale Malaval, la France a pris un avantage considérable dans ce domaine. Cette fois, il s'agit de tuber à un calibre inférieur les pièces existantes, même anciennes, et de leur donner ainsi une puissance balistique exceptionnelle. Ainsi, les canons de 24 cm tubés en 194 mm voient leur portée augmentée de près de 50% en tirant, il est vrai, des projectiles plus légers mais l'avantage est considérable.
Les travaux de l'Ingénieur Général Malaval conduiront ensuite au chemisage des bouches à feu, principe adopté ensuite par toutes les grandes puissances dans les années 1920 pour les canons tirant à haute vitesse initiale.
Cordialement,
Guy François.
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IM Louis Jean
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Re: ALVF à Verdun ?

Message par IM Louis Jean »

Bonsoir à toutes et à tous,

Le sujet du réalésage est passionnant et mériterait un fil à lui tout seul! Les interventions sur l'ALVF et/ou l'ALGP à Verdun seraient aussi plus visibles.

Cordialement
Étienne
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