Bonjour à tous,
Je cherche à comprendre comment une telle information a pu paraître dans plusieurs titres de la presse américaine fin mai, début juin 1919 (je traduis) :
"Paris - Le noir dont la mort a été rapportée hier, causée par un coup reçu à l'extérieur d'un café parisien, dimanche soir, était Eugene Bullard, de Chicago. Il avait rejoint la légion étrangère au début de la guerre, et était devenu aviateur."
Je doute fort qu'il ait pu être confondu avec le sous-lieutenant Edward L. Bullard, du 1st Air Depot, mort en Meurthe-et-Moselle le 8 avril 1919, puisque rien ne semble permettre une telle confusion.
Si qui que ce soit a une explication logique et / ou circonstanciée à cette dépêche erronée, je suis très intéressé, merci d'avance.
Bien cordialement,
Eric Mansuy
Bullard tué à Paris... quoique...
- Eric Mansuy
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Bullard tué à Paris... quoique...
"Un pauvre diable a toujours eu pitié de son semblable, et rien ne ressemble plus à un soldat allemand dans sa tranchée que le soldat français dans la sienne. Ce sont deux pauvres bougres, voilà tout." Capitaine Paul Rimbault.
Re: Bullard tué à Paris... quoique...
Bonjour
On évoque ce fait ici dans un livre
'Eugene Bullard, Black Expatriate in Jazz-Age Paris
De Craig Lloyd'
https://books.google.fr/books?id=SNJsEK ... 19&f=false
Cordialement
Bruno
On évoque ce fait ici dans un livre
'Eugene Bullard, Black Expatriate in Jazz-Age Paris
De Craig Lloyd'
https://books.google.fr/books?id=SNJsEK ... 19&f=false
Cordialement
Bruno
Bullard tué à Paris... quoique...
Bonsoir à tous,
— Claude RIBBE : « Eugène Bullard », Récit, éd. du Cherche-Midi, Paris, Juin 2012, p.157 et 158.
— Claude RIBBE : « Eugène Bullard », Récit, éd. du Cherche-Midi, Paris, Juin 2012, p.157 et 158.
« Par un bel après-midi de printemps où la terrasse du Café de Paris était pleine, à l’angle de la rue Scribe et du boulevard des Capucines, il [Eugène Bullard] était trop occupé sans doute à conter fleurette à quelque demoiselle, pour s’apercevoir de la présence, à une table voisine d’un officier de la police militaire des États-Unis.
En se levant de table, Eugène le bouscula légèrement et s’en excusa aussitôt. Peut-être esquissa-t-il un sourire en voyant l’uniforme de ce compatriote. Il n’ignorait pas que la police militaire se croyait autorisée à veiller, sur le territoire français, à la discrimination en vigueur en Amérique.
Sans crier gare, le prévôt donna à Eugène un uppercut qui le précipita contre l’étal d’un kiosque à journaux. Mais, à la plus grande satisfaction de l’assistance, le jeune homme se releva pour riposter. L’officier, boxé comme il le méritait, s’affala sans connaissance sur le trottoir.
La police française se contenta se relever les identités et ne donna aucune suite à cette affaire. On transporta l’agresseur à l’hôpital Beaujon. Il y reprit ses esprits. C’était sans gravité.
Mais le prévôt était vindicatif. Il ne voulait pas en rester là. Il se plaignit à son chef, lequel demanda aux autorités hexagonales que ce Bullard soit expulsé du territoire pour avoir frappé un blanc. Cette démarche n’occasionna que sarcasmes. Ne pouvant rien contre Eugène, le prévôt voulut se donner le beau rôle et se vanta auprès de correspondants de presse. Des articles parurent outre-Atlantique pour annoncer qu’un " raton laveur " avait trouvé la mort à Paris en voulant défier un " blanc ".
Du coup, Washington confia à l’attaché militaire de l’ambassade à Paris le soin de faire une enquête.
Le rapport qui en résulta se gardait bien de mentionner la qualité d’ancien pilote de l’expatrié mis en cause. On se contenta de le présenter comme un ex-légionnaire qui, depuis qu’il avait été démobilisé, était connu pour jouer dans les orchestres de " nègres " et pour " manquer de respect aux femmes blanches ". Ces reproches étaient ceux du docteur Gros, que l’attaché militaire connaissait bien. Quant à la relation de l’incident et du combat qui avait suivi, elle se conformait à l’amour-propre du prévôt. Les témoins étaient nombreux. Le rapport de police faisait foi. Il était difficile de nier que l’officier avait frappé le premier. Mais on l’excusait du fait qu’il aurait été provoqué par des plaisanteries outrageuses. Comme il était inadmissible qu’un être supposé inférieur par nature, un " couard ", puisse mettre un " blanc " hors de combat, le rapport officiel concluait mensongèrement que c’était le prévôt qui avait eu le dessus et que l’ancien boxeur avait dû être hospitalisé. »
En se levant de table, Eugène le bouscula légèrement et s’en excusa aussitôt. Peut-être esquissa-t-il un sourire en voyant l’uniforme de ce compatriote. Il n’ignorait pas que la police militaire se croyait autorisée à veiller, sur le territoire français, à la discrimination en vigueur en Amérique.
Sans crier gare, le prévôt donna à Eugène un uppercut qui le précipita contre l’étal d’un kiosque à journaux. Mais, à la plus grande satisfaction de l’assistance, le jeune homme se releva pour riposter. L’officier, boxé comme il le méritait, s’affala sans connaissance sur le trottoir.
La police française se contenta se relever les identités et ne donna aucune suite à cette affaire. On transporta l’agresseur à l’hôpital Beaujon. Il y reprit ses esprits. C’était sans gravité.
Mais le prévôt était vindicatif. Il ne voulait pas en rester là. Il se plaignit à son chef, lequel demanda aux autorités hexagonales que ce Bullard soit expulsé du territoire pour avoir frappé un blanc. Cette démarche n’occasionna que sarcasmes. Ne pouvant rien contre Eugène, le prévôt voulut se donner le beau rôle et se vanta auprès de correspondants de presse. Des articles parurent outre-Atlantique pour annoncer qu’un " raton laveur " avait trouvé la mort à Paris en voulant défier un " blanc ".
Du coup, Washington confia à l’attaché militaire de l’ambassade à Paris le soin de faire une enquête.
Le rapport qui en résulta se gardait bien de mentionner la qualité d’ancien pilote de l’expatrié mis en cause. On se contenta de le présenter comme un ex-légionnaire qui, depuis qu’il avait été démobilisé, était connu pour jouer dans les orchestres de " nègres " et pour " manquer de respect aux femmes blanches ". Ces reproches étaient ceux du docteur Gros, que l’attaché militaire connaissait bien. Quant à la relation de l’incident et du combat qui avait suivi, elle se conformait à l’amour-propre du prévôt. Les témoins étaient nombreux. Le rapport de police faisait foi. Il était difficile de nier que l’officier avait frappé le premier. Mais on l’excusait du fait qu’il aurait été provoqué par des plaisanteries outrageuses. Comme il était inadmissible qu’un être supposé inférieur par nature, un " couard ", puisse mettre un " blanc " hors de combat, le rapport officiel concluait mensongèrement que c’était le prévôt qui avait eu le dessus et que l’ancien boxeur avait dû être hospitalisé. »
Bien amicalement à vous,
Daniel.
Daniel.
- Eric Mansuy
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- Inscription : mer. oct. 27, 2004 2:00 am
Re: Bullard tué à Paris... quoique...
Merci beaucoup pour ces éclaircissements. Je n'ai pas encore trouvé trace d'un démenti dans la presse américaine. Intéressant traitement de l'événement et de l'information, de part et d'autre de l'Atlantique.
Merci encore.
Bien cordialement,
Eric Mansuy
Merci encore.
Bien cordialement,
Eric Mansuy
"Un pauvre diable a toujours eu pitié de son semblable, et rien ne ressemble plus à un soldat allemand dans sa tranchée que le soldat français dans la sienne. Ce sont deux pauvres bougres, voilà tout." Capitaine Paul Rimbault.
Bullard tué à Paris... quoique...
Bonsoir à tous,
Et, déjà, une application extraterritoriale du droit américain. Nihil novi sub sole !
Et, déjà, une application extraterritoriale du droit américain. Nihil novi sub sole !
Bien amicalement à vous,
Daniel.
Daniel.
- jml2000_fr
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Re: Bullard tué à Paris... quoique...
Bonjour
Si ma mémoire est bonne Eugène Bullard est mort aux Etats-Unis. Il retourne aux USA après la seconde guerre mondiale et meurt là-bas dans l'anonymat le plus complet en 1961.
Si son départ de l'aviation est bien lié à une bagarre, les sources diverges quand à son adversaire. Certains prétendent qu'il s'agissait d'un soldat US d'autres d'un adjudant français. Franchement, je n'en sais rien et cela importe peu. La ségrégation n'existait pas en France et c'est la raison pour laquelle il est resté après la grande guerre.
Une dernière information, selon mes informations il était caporal, pas lieutenant.
Bonne fin de journée
Jean-Michel
Si ma mémoire est bonne Eugène Bullard est mort aux Etats-Unis. Il retourne aux USA après la seconde guerre mondiale et meurt là-bas dans l'anonymat le plus complet en 1961.
Si son départ de l'aviation est bien lié à une bagarre, les sources diverges quand à son adversaire. Certains prétendent qu'il s'agissait d'un soldat US d'autres d'un adjudant français. Franchement, je n'en sais rien et cela importe peu. La ségrégation n'existait pas en France et c'est la raison pour laquelle il est resté après la grande guerre.
Une dernière information, selon mes informations il était caporal, pas lieutenant.
Bonne fin de journée
Jean-Michel
Qui sait si l'inconnu qui dort sous l'arche immense
Mêlant sa gloire épique aux orgueils du passé
N'est pas cet étranger devenu fils de France
Non par le sang reçu mais par le sang versé.
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Mêlant sa gloire épique aux orgueils du passé
N'est pas cet étranger devenu fils de France
Non par le sang reçu mais par le sang versé.
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- Lucien Morareau
- Messages : 2900
- Inscription : mer. oct. 10, 2007 2:00 am
Re: Bullard tué à Paris... quoique...
Bonjour,
En tout cas, je n'ai qu'un seul Bullard breveté pilote :
BULLARD James, Eugen, né le 09/10/1894 à COLOMBUS, Ga, États-Unis, DCD le 22/10/1967 à NEW YORK CITY, NY, États-Unis
Sdt du 1e RE, breveté n° 6259 le 05/05/1917 à Tours, ACF n° 6950 le 08/09/1917 sur Nieuport/Blériot, DGC : Cal
A servi aux escadrilles n° 93² et 85².
Les FM des EV du 75 ne sont pas encore numérisées...
En tout cas, je n'ai qu'un seul Bullard breveté pilote :
BULLARD James, Eugen, né le 09/10/1894 à COLOMBUS, Ga, États-Unis, DCD le 22/10/1967 à NEW YORK CITY, NY, États-Unis
Sdt du 1e RE, breveté n° 6259 le 05/05/1917 à Tours, ACF n° 6950 le 08/09/1917 sur Nieuport/Blériot, DGC : Cal
A servi aux escadrilles n° 93² et 85².
Les FM des EV du 75 ne sont pas encore numérisées...
Re: Bullard tué à Paris... quoique...
bonjour
les élèves de CM2 de l'école élémentaire 103 av de Choisy Paris 13ème ont imprimé une BD sur Eugène Bullard
"la vie extraordinaire d'un homme ordinaire"
avec moult détails sur sa vie
Beau travail
les élèves de CM2 de l'école élémentaire 103 av de Choisy Paris 13ème ont imprimé une BD sur Eugène Bullard
"la vie extraordinaire d'un homme ordinaire"
avec moult détails sur sa vie
Beau travail
"Il pleuvait en cette nuit de Noël 1914, où les Rois Mages portaient des Minenwerfer."