JULES GOMMES Trois-mâts carré

[l'amiral]

Bonjour à tous,
En marge de l’histoire de ce voilier, permettez-moi de vous rapporter une anecdote à propos du petit port de Regnéville-sur-Mer où il existe un resto-bar portant une enseigne d’un grand voilier trois-mâts et baptisé Jules Gommès.

Selon le patron de l'établissement, le Jules Gommès fut lancé en 1901 à Penhouët (Saint Nazaire), pour la Société Bayonnaise de Navigation, plus connue à l’époque, sous le pseudonyme de Maison Légasse. Son patronyme Gommès était celui d’une famille juive qui, suite aux Edits de 1492 et 1498, émigra du Portugal pour s’installer d’abord à Montpellier et plus tard, au XIXè siècle, dans le quartier St-Esprit à Bayonne. Jules Gommès (1816-1910) y débuta comme commis d’enregistrement, devint ensuite marchand de tissus et fonda une succursale à Madrid avant de se lancer dans la finance et de créer sa propre banque, la plus importante de la ville.
Après la chute de Second Empire (1870), il devint une personnalité en vue et surtout le banquier des armateurs Légasse qui pratiquaient la pêche à la morue depuis des années. Outre le Jules Gommès, ils armèrent cinq autres voiliers du même type qui portèrent des noms du pays basque, Bidard, Guéthary, Bayonne, Biarritz et Socoa. En 1911, l’entreprise fut rachetée par messieurs Prentout & Leblond qui la rebaptisèrent Société Anonyme des Voiliers Normands.

Le Jules Gommès fut, comme ses sister-ships cap-horniers, destiné aux campagnes d’Australie et d’Amérique. Pris à son neuvage par le capitaine D. Baudry, le trois-mâts effectua un premier voyage vers l’Oregon (U.S.A.) en 1901 et navigua sans incidents notoires jusqu’en 1917. Cette année-là, affrété par le gouvernement français et commandé par le capitaine Rodolphe Nicolle, il quitta Ipswich sur lest pour Bahia Blanca, mais le 12 mars, situé par 49°10 N et 08°50W, il fut arraisonné par le sous-marin allemand U-62. Le voilier mit en panne, déborda deux embarcations à bord desquelles les 24 hommes d’équipage abandonnèrent le navire avant que les bombes placées par l’assaillant n’explosent. Le Jules Gommès se coucha sur bâbord et coula bas. L’équipage fut recueilli en mer, le lendemain et ramenés en Angleterre d’où il rallia St. Malo.

Toujours selon le patron des lieux, si ce restaurant fut nommée en mémoire de ce voilier, c’est essentiellement parce que des quatre capitaines au long cours qui le commandèrent entre 1901 et 1917, tous étaient nés-natifs de Regnéville. Messieurs Quatrevaux et Thoumiretous du port lui-même ; Désiré Beaudry du hameau d’Urville et R. Nicolle de celui de Grimouville. A cette époque, grâce à trois instituteurs remarquables, Leroud, Lebargy et Duprey, ce bourg constitua un creuset de capitaines de haut bord. Ainsi, au 19è siècle, sur une population de 1.865 âmes, on en dénombra près de 200 … et pas moins de 17 capitaines au long cours sur une population de 1.530 habitants, rien que pour l’année 1900 ! Sans oublier que l’équipage du Jules Gommès fut toujours exclusivement composé de … Regnévillais pur sang !
Mais peut-être que ceci dépasse le cadre de ce forum ?
Maritimes salutations.