EMMA LAURANS Trois-mâts barque

olivier 12
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Re: EMMA LAURANS Trois-mâts barque

Message par olivier 12 »

Bonjour à tous,

EMMA LAURANS

Trois-mâts barque lancé le 7 Février 1902 aux Forges et chantiers de la Méditerranée, à Graville près du Havre pour la Société des Voiliers Français dont le siège était 12 rue d’Enghien à Paris.
Le nom donné était celui de l’épouse (ou de la fille) de l’un des administrateurs de la compagnie.

Voilier type CA des chantiers de la Loire

2152 tx JB 1997 tx JN 3200 tpl
Longueur 84,2 m Largeur 12,30 m TE 6,20 m
2631 m2 de voilure

Pris au neuvage par le capitaine David. Voyage sur San Francisco et l’Orégon avec ciment à l’aller et blé au retour. Fit également des voyages sur La Réunion et l’Australie.

La perte de l’EMMA LAURANS

Voyage Bordeaux – New York. Départ de Bordeaux le 18 Novembre 1916 sur lest.

Capitaine GARNIER Louis CLC
Second CORNALY Louis CLC
Lieutenant ROUAULT Pierre
Maître Eq. KERSAUDY Guillaume

Les matelots ayant signé le rapport de mer sont :

PHILIPPE Célestin Mécanicien
BUQUET Ange Matelot
GAUDRIAULT Georges Matelot
LE VEUX Noé-Adrien Matelot
CHARBONNIER Georges Matelot
LE FAUVRE Euliao Matelot
BUNGER Prudent Matelot

Total de l’équipage 21 hommes

Le 9 Décembre à 08h30 du matin le navire se trouve par 27°48 N et 23°16 W (Greenwich), route au S30W, vitesse 6 nœuds, lorsqu’il aperçoit dans le sud un sous-marin qui fait route à 10 nds environ.
Beau temps, mer peu houleuse, très bonne visibilité.
Celui-ci envoie un coup de canon de semonce, s’approche et demande au capitaine de venir à son bord avec ses papiers.
Les basses voiles sont carguées, l’allure prise tribord amures et les embarcations débordées.
Très loin sur l’avant de l’EMMA LAURANS, il y avait un autre grand voilier, norvégien, qui faisait route. Mais aucuns signaux ne furent échangés.

Le voilier n’était pas armé et n’avait pas de TSF. Les marins durent l’abandonner et le sous-marin les prit tous à son bord. Le commandant allemand annonce alors qu’il va le couler et trois bombes sont installées par des hommes du sous-marin.
Auparavant, le sous-marin prend le voilier en remorque ; les Allemands disposent deux manches et transfèrent de l’eau douce depuis le voilier jusqu’au sous-marin, environ 4 tonnes.
A 12h00, le voilier est coulé par bombes et douze coups de canon.

La suite du rapport et de l’interrogatoire du capitaine Garnier est particulièrement intéressante, pour ne pas dire passionnante, car les Français vont séjourner 46 heures à bord du submersible. Pour la première fois, on découvre la vie de ces hommes des profondeurs vue, ce qui demeure exceptionnel, par les yeux de leurs victimes.

En voici un résumé :

Le capitaine fut interrogé par son homologue allemand sur destination, chargement, route suivie …etc
Le commandant allemand parlait bien le français, mais son second le parlait à la perfection et sans accent. Deux autres officiers le parlaient assez bien, et les officiers mariniers maîtrisaient très bien l’anglais.

Il décrit le sous-marin avec force détails : 60 m de longueur pour 6 de largeur, deux canons de 100 mm à poste fixe à six mètres sur l’avant et l’arrière du kiosque. Quatre tubes lance-torpilles et huit torpilles. Pas de projecteurs. Trois périscopes situés sur l’avant du kiosque à 40 cm les uns des autres. Mais on ne sort qu’un seul à la fois, celui de l’arrière situé juste au dessus du compas. Le mouvement de rotation est obtenu en prenant à pleines mains deux poignées à angle droit ; on met alors l’œil à une lentille, comme celle d’une longue-vue.
Antennes TSF de 8 m de hauteur. Mât de pavillon national sur l’arrière du kiosque.
Les récepteurs et émetteurs radio sont près de la chambre du commandant. Le télégraphiste est très jeune, 18 ans peut-être. Il ne parle pas le français, mais en cachette du commandant a donné à lire au capitaine le communiqué français du jour.
Le sous-marin est peint couleur toile mouillée (sic) mais peinture vieille d’au moins trois mois ; presque plus de peinture sur la coque dont la tôle est galvanisée.

Voici les divers dessins effectués par les hommes de l’EMMA LAURANS.

Image

Image

Image

Le combustible liquide est contenu dans des réservoirs latéraux épousant la forme du navire. La contenance doit être d’au moins 250 tonnes. En raison de la forme de ces réservoirs, l’accostage des embarcations n’est possible que sur l’avant ou sur l’arrière. On note la présence de quatre cloisons étanches.

Vient ensuite la description des sous-mariniers, dont ils n’ont pu connaître les noms. L’équipage se compose de 43 hommes.
Le commandant , 28 ans environ, imberbe, petit, chétif, mais très énergique avec des yeux très vifs. Ne porte aucun galon.
Le second, environ 25 ans, grand, maigre, d’un caractère jovial, facile, aimant beaucoup parler et rire. En fait, c’est le fils d’une suissesse française, ce qui explique la facilité avec laquelle il s’exprime dans cette langue.
Le 1er lieutenant, environ 30 ans, assez grand (au dessus de la moyenne), figure charnue et porte la moustache. Il manque d’initiative.
Le 2e lieutenant, extrêmement jeune, peut-être 17 ans ; c’est probablement un aspirant, mais assure néanmoins le quart en chef. Il a un caractère encore un peu enfantin.
Il y a en outre un chef mécanicien et trois mécaniciens brevetés, ainsi que trois sous-officiers.

Par beau temps, les vêtements des officiers et des hommes sont les mêmes : paire de bottes en cuir, pantalon en cuir et veste en cuir, chapeau de toile huilée qui descend sur la poitrine et sur le dos, gants de cuir doublé de mouton à l’intérieur.
Par mauvais temps les hommes revêtent un vêtement de caoutchouc, comme les scaphandriers, mais sans casque et sans plomb (sic) . Ils gardent mêmes bottes et même chapeau.

Trois hommes assurent le quart passerelle : un officier, un sous-officier et un matelot veilleur, tandis que deux autres sont au compas, un à la barre et trois dans la machine. Les quarts sont répartis en trois fois huit heures.

Le sous-marin manœuvre à la perfection et on ne peut le comparer qu’à une baleine. Le commandant en est fier et pour bien faire admirer au capitaine du voilier français les qualités nautiques de son bâtiment, il s’est livré à des exercices de plongée et à des manœuvres. Il lui faut moins de 4 minutes pour disparaître sous la surface. Le commandant a dit qu’il pouvait plonger encore plus vite. En plongée sa vitesse est de dix nœuds et son rayon de giration est extrêmement faible. Le sous-marin gouverne parfaitement, ne tangue pas et ne roule pas. Il tient admirablement la mer. Il ne se ravitaille pas en combustible pendant les trois mois. Pour les vivres et autres provisions, il se fournit en partie sur les navires qu’il coule après évacuation de l’équipage.

Le compas est un véritable objet d’art. Il possède un systême électrique qui, par un procédé inconnu, permet d’avoir en permanence, et en tout point du globe paraît-il, le cap vrai du navire, indépendamment de toutes les variations magnétiques. Les officiers ont dit aux Français que la construction d’un tel compas était extrêmement coûteuse, 40000 marks au bas mot.

(Nota : les marins français ont découvert là un des premiers gyro-compas utilisés dans la marine. Le principe du gyroscope, énoncé par Foucault au 19e siècle, fut appliqué aux compas lorsqu’on disposa de puissance électrique pour entretenir la rotation de la toupie. Le premier gyro-compas fut construit en 1906 par les Allemands Hermann Anschutz et Max Schuller. C’était effectivement une petite merveille d’ingéniosité mécanique. Par la suite, des gyro-compas furent mis au point par l’Américain Sperry et par l’Anglais Brown vers 1911-1912. On apprend donc par ce rapport que les Allemands disposaient en 1916 de cet instrument sur leurs sous-marins.
L’équipage prisonnier, qui n’avait pas de notions particulières sur les lois de la mécanique, en est demeuré ébahi. Avoir en permanence le cap vrai leur semblait tenir du prodige…)

L’équipage du voilier, 21 hommes, fut donc logé à l’intérieur du sous-marin, en particulier dans le compartiment des torpilles.
Il faut souligner que les Français ont été très bien traités et que l’accueil a même été chaleureux. De toute évidence, les Allemands ont voulu leur montrer qu’ils n’étaient pas des sauvages (sic) . Les dernières paroles du commandant allemand avant la libération furent : « -Vous voyez, les Allemands ne sont pas des Barbares ».

Dans le compartiment des machines, les matelots allemands dormaient dans des hamacs. Mais ils les ont prêtés aux marins français et ont couché par terre. Le Capitaine a été logé dans la chambre du commandant où on lui a installé un hamac. Il y avait seulement deux couchettes, une pour le commandant et une pour le second.
La nourriture fut la même que pour l’équipage allemand.

La vie de cet équipage est tout à fait misérable, et les officiers ont bien laissé entendre qu’ils étaient un peu las de cette guerre.
L’eau douce manque continuellement . Jamais il n’est donné d’eau douce pour le lavage. Pour la boisson, elle est donnée en quantité infime.
L’air n’est pas très pur et malgré la ventilation, il fait toujours chaud. Il faut dire que l’on s’est retrouvé à 64 dans cet espace restreint. Les vêtements sont en permanence humides, imbibés d’eau de mer, et il n’y a aucune possibilité de les faire sécher. Bien sûr, il est strictement interdit de fumer à l’intérieur, mais le commandant a donné l’autorisation aux Français de monter cinq par cinq sur la passerelle, afin de pouvoir fumer pendant une demi-heure.

Le sous-marin a donc fait route en surface à la vitesse de 15 nœuds pendant 26 heures. C’est pendant cette navigation que, jetant un coup d’œil au journal de bord qui n’était pas dissimulé, le second capitaine a pu voir qu’il s’agissait du sous-marin U 52.
Selon son équipage, ce sous-marin avait quitté Kiel deux mois auparavant et avait coulé 14 navires dont le KEDIRI et l’EMMA LAURANS. Sa croisière devait durer trois mois. Ensuite il rentre sur Kiel où il reste deux mois au cours desquels l’équipage a droit à 14 jours de permission. Pendant ce temps de permission on leur accorde une ration et demie. A leur retour de permission, ils sont mis dans une caserne flottante où ils se reposent et s’entrainent jusqu’à la date de leur nouveau départ.

Le surlendemain 11 Décembre , le sous-marin est arrivé à la pointe de Mas Palomas, au sud de la Grande Canarie. Il a mouillé à environ 1,5 mille du rivage. Entre 21h00 et 22h00 des signaux lumineux morse ont été faits depuis la terre, destinés au sous-marin. Le 12 Décembre à 06h00 du matin, une grande torche a été brûlée et il s’agissait certainement d’un signal.
Le sous-marin s’est approché à 200 m de la côte, lorsqu’un coup de canon a été tiré. Aussitôt, un matelot allemand a fait des signaux avec une lampe et le feu a cessé. Les Allemands ont dit qu’il s’agissait d’un autre sous-marin, un de leur compatriote, mais les Français n’ont pas pu le voir.
Les Français ont débarqué à Mas Palomas dans une embarcation à 14h00 le 12 et ont reçu un bon accueil des autorités espagnoles.

Le sous-marin attaquant

C’était effectivement l’U 52 du Kapitänleutnant Hans Walther. Il venait de couler le croiseur-cuirassé SUFFREN, le 26 Novembre précédent. Il coulera beaucoup d’autres navires, entre autres le voilier TARAPACA en 1917.

Mais cet extraordinaire récit donne une vision tout à fait particulière de l’ambiance dans le sous-marin. On n’y sent aucune animosité entre les hommes enfermés dans cet engin. Il est évident que le récit ne fut pas publié à l’époque dans des revues comme L’Illustration ou autre. ll fallait entretenir la fureur guerrière et ce genre de « camaraderie maritime » comme le signale un enquêteur (à propos d’un autre naufrage de voilier, cette fois en Manche) déplaisait profondément.

Il serait aussi intéressant de savoir quels étaient ces autres officiers, si bien décrits, jusque dans leurs caractères, par le capitaine Garnier.

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Yves D
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Re: EMMA LAURANS Trois-mâts barque

Message par Yves D »

En voici déjà deux :
Oblt Max PLOEN 25 ans, w/o U 52 de 11.1916 à 1.1917 qui sera tué le 5.10.17 avec UB 42 son premier commandement.
Oblt Otto CILIAX 25 ans, w/o U 52 de 2.1916 à 8.1917 (il deviendra le célèbre Amiral de l'Operation Cerberus en Fev.42).
Je continue à chercher pour les autres, il y a encore des dizaines (centaines ?) de pages imprimées en gothique à parcourir et c'est une épreuve pour les yeux :ouch:
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Re: EMMA LAURANS Trois-mâts barque

Message par olivier 12 »

Bonjour à tous,

Merci Yves pour ces précisions.
Peut-être Otto Ciliax était-il le second, fils de la suissesse. Cela doit pouvoir se vérifier. Vu ce qu'il a fait par la suite, ce n'était pas le genre d'officier à manquer d'initiative.
Dans ce cas, Max Ploen serait bien sûr le 1er lieutenant.

Autre précision donnée par Yves : lorsque l'équipage de l'EMMA LAURANS était à son bord, Hans Walther ignorait encore qu'il avait coulé le SUFFREN, avec tout son équipage. Dans son journal de bord, il avait noté qu'il pensait avoir coulé un cuirassé anglais.
L'Amirauté n'a reconnu la perte du SUFFREN que fin Décembre, et l'U 52 n'est rentré à sa base (en l'occurence Cattaro) que le 29 Décembre.

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Re: EMMA LAURANS Trois-mâts barque

Message par Yves D »


La patrouille de l'U 52 au cours de laquelle sont intervenus les évènements cités par Olivier, bien qu'elle se soit achevée à Cattaro, n'était pas un transit d'Allemagne en Méditerrannée. Walther, basé à Héligoland avec la II U-Flottille, sa flottille d'appartenance avait reçu pour mission d'écumer le secteur des Canaries afin d'obtenir un effet de surprise en des lieux jusque là épargnés par les sous-marins. Il a fait ensuite route vers l'Adriatique qui se trouvait être moins éloignée que sa base de Heligoland. Remarquons au passage si j'en juge par les informations de durée de la patrouille donnée aux français (plusieurs mois), que cette incursion en Méditerrannée devait être prévue depuis le départ. Ensuite, une fois le sous-marin révisé et remis en état de reprendre la mer, il a pris fin mars 1917 le chemin du retour vers l'Allemagne, non sans au passage améliorer notablement son palmarès en Méditerrannée avant de repasser Gibraltar et mettre cap au nord.
Voila à ce stade ce que l'on peut apporter comme éclairage sur cette extraordinaire histoire car à ma connaissance c'est bien la première fois qu'un U-Boot recueille à son bord tant d'hommes en plus pendant 2 jours. J'ai bon espoir d'obtenir copie du KTB pour cette période, nous en apprendrons alors peut-être davantage.
Etonnamment tout de même, Arno spindler qui a fait des KTB sa principale source d'information ne mentionne absolument rien sur ce sujet.
A suivre...
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Re: EMMA LAURANS Trois-mâts barque

Message par Yves D »

avait coulé 14 navires dont le KEDIVI ( ?) et l’EMMA LAURANS. Sa croisière devait durer trois mois.
Bonsoir Olivier et tous
Dans le SR de 1901 la réponse à ton interrogation :

KEDIRI NE 1T (11)
3,778 N.V. Rotterdamsche Lloyd (W. Ruys & Zonen), Rotterdam 345.0 x 44.5
C Blohm & Voss, Hamburg (8) #147
Torp. and sunk by U 47, 30 Nov 1916, 10 miles SSE of Maspalomas, Gran Canaria, voy. Batavia - Marseille & Rotterdam, sugar, general cargo & tin (previously damaged by U 52)

Tout finit par se recouper avec quelques précisions en plus. U 52 avait laissé ce Kediri en sinking condition mais il n'a pas coulé et c'est l'U 47 de Metzger qui raflait la mise.

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Re: EMMA LAURANS Trois-mâts barque

Message par Yves D »

Bonjour à tous
Je viens de recevoir copie du KTB de l'U 52. Le document est de très mauvaise qualité et il ne va pas être facile de le déchiffrer (photos pas nettes de ce qui doit être la 3e ou 4e copie carbone !). Il semble en première lecture que l'Emma Laurans n'a été sabordé que le lendemain et que l'U 52 a remorqué au moins une embarcation jusqu'à la mise à terre de l'équipage du voilier.
A suivre
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Re: EMMA LAURANS Trois-mâts barque

Message par olivier 12 »

Bonjour à tous,

Les informations du KTB concordent dans le moindre détail avec le rapport du capitaine Garnier.

L'EMMA LAURANS fut en effet coulé le lendemain à 12h00. Les marins allemands mirent deux bombes grosses comme des obus de 75 dans la cale vide du navire, solidement amarrées dans une caisse. Puis douze coups de canons furent tirés. L'équipage français n'a pas vu couler son bateau.

Le sous-marin prit en effet en remorque les deux baleinières de l'EMMA LAURANS, mais l'une d'entre elle fut perdue dans la nuit qui suivit. C'est donc dans un seul canot que les Français ont débarqué à Mas Palomas.
En revanche, quand ils montaient cinq par cinq à la passerelle pour fumer une demi heure, on peut penser qu'ils prenaient place dans le canot en remorque.
Cinq hommes de plus dans le kiosque n'aurait pas permis aux Allemands d'assurer un quart et une veille correcte. Et à quinze noeuds, il ne devait pas être possible de rester sur le pont du sous-marin.

Cdlt

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Re: EMMA LAURANS Trois-mâts barque

Message par Yves D »

Bonjour Olivier, bonjour à tous
Après avoir "épluché" bien 3 à 400 pages du Ehrenrangliste, j'ai trouvé ces officiers ayant fait partie de l'équipage du U52
- Oblt z.S. Otto Ciliax 1 W/O de 2.1916 à 8.1917. Il venait d'avoir 25 ans en Dec.16. Il deviendra en 1942 après avoir commandé le Scharnhorst, Amiral-Cuirassés et réalisera l'audacieuse percée des cuirassés Scharnhorst, Gneisenau, Prinz Eugen à travers la Manche en fev.42 (Operation Cerberus). Je n'ai pas réussi à authentifier son ascendance à travers une mère suisse-romande.
- Oblt z.S. Max Ploen 2W/O de 11.1916 à 1.1917 Il prendra ensuite le commandement de l'UB41 et disparaîtra à son bord avec tout son équipage le 5.10.1917.
- Oblt Helmut Forberg succède à Ploen avant d'être ensuite affecté à U64
Non impliqué dans l'affaire de l'Emma Laurans, il y aura parmi les officiers de quart de l'U52, l'Oblt z.S. Bernhard Rogge qui se rendra célèbre dans la 2e guerre comme commandant du croiseur corsaire Atlantis avant de devenir Vice-Amiral et de terminer sa carrière comme le premier Amiral de la Bundesmarine.
En dehors de cela, j'ai retrace deux jeunes Lt.z.S. mais eux aussi plus tard.
Enfin, le chef mécanicien (Leitende Ingenieur) était le LI Emil Auerbach, 29 ans, qui fut en charge de la machine de l'U52 de 5.1916 à 10.1917

Je n'ai pas pu identifier le tout jeune officier dont parle le Capt. Garnier mais j'avoue qu'il a pu m'échapper car c'est un fameux exercice que d'éplucher toutes ces pages.

Et pour finir une photo de Hans Walther en 1917. Il est bien tel que le décrit le Cdt Garnier : imberbe et paraissant chétif (un redoutable capitaine d'U-Boot néanmoins !).
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Re: EMMA LAURANS Trois-mâts barque

Message par olivier 12 »

Bonjour à tous,

Voici la traduction, faite par une personne de langue allemande, du KTB de l' U 52 concernant l'affaire de l'EMMA LAURANS.

EMMA LAURANS

09/12/16

11h00
Arrêté le voilier français EMMA LAURANS. Envoyé un commando de prise à bord. Jusqu’au crépuscule attendu une occasion de pouvoir transférer l’équipage français de 22 têtes. Fait route à l’Est avec la prise.

10/12/16

Vent de NNW s’orientant ensuite vers la droite.
A 00h30 la prise est arrêtée par l’U 47. Communiqué par signaux avec l’U 47. Il a coulé un grec. Il dit qu’il est mécontent de sa position d’attente.

Au cours de la matinée, le vent tourne vers la droite. Le voilier durement malmené se positionne contre le vent. Cela m’oblige à me diriger vers le sud. Je décide de couler le voilier.
(Nota : je pense que le voilier est en remorque afin de prendre l’eau douce. C’est ce qui empêche le sous-marin de tenir son cap)
Je prends l’équipage à bord et les embarcations en remorque.

A 16h30 le voilier EMMA LAURANS est coulé avec deux bombes et plusieurs obus. Cap sur Mas Palomas avec les deux embarcations prises en remorque.

Les ballasts 1, 2 et 3 ont été remplis. Cette manœuvre difficile a été réussie malgré la houle. Mais l’un des canots a été légèrement endommagé. L’autre est plein (d’eau ?) et ne tient que sur ses caissons à air. Il va être perdu pendant la nuit.

11/12/16

Route vers Mas Palomas.

Vent de nord maniable. Mer houleuse. Très brumeux.
Prenant en considération que le canot est endommagé, j’approche à 500 m du phare. L’équipage de l’EMMA LAURANS est déposé à terre avec le canot.
Le capitaine me remercie chaleureusement pour le bon accueil reçu. Il me remercie en bonne et due forme pour le bon traitement réservé à bord.
(On note qu’Hans Walther insiste particulièrement sur ces remerciements, répétant deux fois sa phrase)

Il semblerait que dans le récit côté français il y ait eu une confusion ou une incompréhension de l'officier enquêteur : la rencontre avec le 2e sous-marin, en l'occurence l'U 47 du KL Heinrich Metzger, n'a pas eu lieu au moment de l'arrivée à Mas Palomas, mais alors que l'EMMA LAURANS était encore à flots. En fait, Hans Walther a bien failli se faire piquer sa prise par son collègue...

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EMMA-LAURANS ― Trois-mâts barque ― Société des voiliers français.

Message par Rutilius »

Bonsoir à tous,

L’Ouest-Éclair ― éd. de Caen , n° 6.270, Dimanche 31 décembre 1916,
p. 3, en rubrique « Nouvelles maritimes ».

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Bien amicalement à vous,
Daniel.
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