Bonjour à tous,
On remarque qu'il n'y avait pas de matelot gabier du nom de François MICHEL dans l'équipage du PARANA. Il s'agit sans doute d'un permissionnaire qui regagnait son unité.
Rapport du capitaine
15 Août 1917
Appareillé de Marseille avec
231 officiers et soldats pour Salonique
619 officiers et soldats pour Bizerte
1862 t de marchandises diverses
43 chevaux et mulets
17 Août
Escale à Bône de 07h00 à 18h30
18 Août
Escale à Bizerte. Débarqué les militaires au quai de la gare.
Embarqué 20 officiers serbes et 540 soldats serbes ainsi qu'un médecin français pour Salonique.
20 Août
Appareillé de Bizerte avec PAMPA et MEDIE, escorté par torpilleurs PISTOLET et SAGAIE.
23 Août
Escale à Milo de 13h00 à 17h00. Appareillé escorté par les torpilleurs FANFARE, POIGNARD et SAGAIE.
24 Août
Torpillé alors que nous franchissons le canal de Doro et que nous venons de passer le feu de Fassas. Le navire est ébranlé par une première torpille qui le frappe par bâbord, et recouvert par une immense colonne d'eau.
Malheureusement, une panique générale se produit à bord, suivie de scènes indescriptibles. Malgré les exercices effectués et une alerte au large de Malte, les soldats se ruent sur les canots sans écouter les ordres. Des garants sont coupés et les canots surchargés de gens affolés tombent à la mer, entraînant de nombreuses noyades.
La lumière est rétablie par l'électricien dans les faux ponts et les coursives passagers. L'eau pénètre dans la cale 2 et la soute à charbon avant. Essayé d'abriter le navire sur la côte Est d'Eubée pour permettre une évacuation.
Une seconde torpille frappe le navire sur bâbord. Nouvelle panique et les soldats serbes envahissent les canots qui restent, empêchant les marins de faire leur travail et de les amener jusqu'à la lisse. Des garants sont encore coupés, provoquant des catastrophes. Le contingent serbe est totalement affolé, le contingent français, dans une proportion de 1/10e.
Le poste de TSF est complètement démoli et cesse de fonctionner.Malgré un pompage intensif, l'eau entre dans les soutes à charbon, le sabord de chargement de la soute arrière s'étant déjointé. Le navire prend de la gite et s'incline dangereusement.
En différenciant les hélices, car le gouvernail a été emporté, mouillé près de la côte.
Nota : sur ce cliché de l'épave (site signalé plus haut par Yves) on voit très bien que le gouvernail a été arraché.
Le capitaine explique ensuite toutes les manœuvres qui vont être tentées pour assécher le navire et le remorquer. Il semble qu'il y ait eu des tensions avec le commandant de SAGAIE qui dans son rapport va vivement critiquer le commandant Fabre qu'il trouve trop pessimiste quant aux chances de sauver le navire. L'officier de marine, qui semble d'ailleurs se prendre pour le commandant du paquebot, donne plein d'ordres et se plaint qu'ils ne sont pas suivis d'effets.
Les tentatives ne donneront aucun résultat, surtout à cause du mauvais temps et de l'importance des voies d'eau et le navire coulera 26 heures plus tard.
Le capitaine Fabre signale la très bonne conduite du second Dapelo, des lieutenants Housselot et Couvin, du chef mécanicien Petitjean et des officiers mécaniciens Aimedieu et Jourdant. Il déplore la conduite de l'officier mécanicien de quart, Monsieur Bouche, qui a quitté son poste pendant un très long moment. Il déclare que le TSF Pellicia a parfaitement rempli sa fonction, transmettant des messages jusqu'à la destruction de son émetteur. Il est ensuite resté à la passerelle.
Il signale l'excellent comportement du 1er chauffeur Gayet et du graisseur Cacciaguerra qui se sont brillamment distingués. Il cite de nombreux marins des équipages pont et machine, dont le maître d'équipage Gourden, le capitaine d'armes Aspard et les seconds maîtres Picard et Poltri.
Il indique que le commandant d'armes des troupes de terre, le sous-lieutenant Chapelier et le médecin-major Josserand, embarqué à Bizerte, ont très bien secondé les officiers pont et sont parvenus à ramener le calme dans le contingent français.
Mais il s'attarde surtout sur les deux mousses, Fenocchio et Oreille, qui ont fait preuve d'un grand sang froid malgré leur jeune âge et se sont montrés particulièrement dévoués. Plus tard, le mousse Oreille a été saisi par un soldat serbe qui l'a dépouillé de sa ceinture de sauvetage et l'a jeté à la mer. Il a pu être sauvé et le capitaine estime que ces deux mousses méritent une récompense.
Rapport de l'officier enquêteur(LV commandant HELENE)
Positions
00h10 38°03 N 24°42 E Torpillage (le 24 Août)
03h30 38°04 N 24°33 E Abandon
09h18 38°02 N 24°33 E Naufrage (le 25 Août)
Le navire faisait route au N20E à 11 nœuds. Vent frais de NNW; Mer forte. Nuit étoilée avec bonne visibilité.
Navigation en ligne de file dans l'ordre PAMPA – PARANA – MEDIE avec distance de 800 à 1000 m entre chaque navire.
FANFARE à droite, POIGNARD à gauche, SAGAIE sur l'arrière.
PARANA a été torpillé sur bâbord à 5 milles au nord du cap Fassa. Deux torpilles l'ont touché à 20 minutes d'intervalle. Le timonier de quart Corte et l'homme de barre Cabel ont vu le sillage de la 2e torpille. Le sous-marin a été éclairé momentanément par un des torpilleurs.
Cale 2 et soutes à charbon se sont remplies d'eau. Le safran du gouvernail a été arraché et l'hélice bâbord endommagée. L'eau a commencé à entrer par les presse-étoupes de lignes d'arbres.
Lors de la 1ère explosion, environ 80 hommes, pris de panique, ont sauté à la mer. Une nouvelle panique s'est produite lors de la 2e explosion. Canots et radeaux sont tombés à la mer dans la plus grande confusion. Quand le calme a pu être rétabli, il ne restait plus à bord que 6 canots sur 14 et 2 radeaux sur 20.
Il y avait à bord 560 officiers et soldats serbes ainsi que 232 officiers et soldats français. Une vingtaine de Sénégalais, qui dormaient dans le faux-pont 2, ont du être tués lors de la 1ère explosion. Mais tout le monde, exception faite de ces premières victimes, aurait pu être sauvé si les ordres du commandant et des officiers pont avaient été suivis. L'attitude des Serbes a été particulièrement mauvaise. Les officiers serbes n'ont rien fait pour rétablir l'ordre. Ils n'ont même pas cherché à traduire les ordres des officiers français. Un soldat serbe s'est même emparé du mousse Oreille, l'a dépouillé de sa ceinture et l'a jeté à la mer.
Du côté français, un tiers de l'équipage, dont l'officier mécanicien Bouche, a abandonné son poste. Certains ont même quitté le navire et c'est la raison pour laquelle ils ont péri.
On compte finalement environ 150 disparus, dont 23 à l'équipage (nota : en réalité ce chiffre s'est avéré inexact; 7 hommes d'équipage seulement avaient disparu)
Les rescapés ont été recueillis par SAGAIE, POIGNARD, FANFARE et l'anglais KOLNE, puis conduits à Salonique par MEDIE et PAMPA.
L'officier enquêteur note que les autres officiers du navire, ainsi que le sous-lieutenant Chapelier et le médecin-major Josserand, des troupes de terre, ont eu un très bon comportement et se sont montrés efficaces. Ces deux derniers ont aidé les officiers du bord à rétablir l'ordre.
Toutefois, il déplore que l'officier de tir, le lieutenant Housselot, ne se soit pas rendu aux pièces pour vérifier la présence de l'armement. Aucun tir ne s'est déclenché quand le sous-marin a été éclairé de façon inopinée par un escorteur.
Les moyens d'épuisement du bord étaient insuffisants. Le TENEDOS, arrivé sur les lieux à 19h00 le 24, n'est pas parvenu à amorcer ses pompes d'assèchement et le mauvais temps l'a empêché de passer une remorque au PARANA. Celui-ci a coulé le 25 à 09h18. D'après les clichés de l'épave, il s'est posé droit sur le fond.
Cdlt