SOUS-MARINS - Les Chantiers Schneider

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Ar Brav
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Re: SOUS-MARINS - Les Chantiers Schneider

Message par Ar Brav »

Bonjour à tous,

LES CHANTIERS SCHNEIDER

Vers 1909, les autorités navales françaises reconnurent l'importance que la lutte sous-marine pourrait avoir dans les actions navales futures. Elles décidèrent de mettre à contribution les ressources industrielles privées du pays et de permettre par là même à l'industrie française concernée de postuler pour fournir des sous-marins aux nations étrangères amies de la même façon qu'elle le faisait pour d'autres armements. Les autorités donnèrent également la permission aux industriels nationaux de mettre en évidence les avantages de leur propre production en regard des bâtiments du même type construits par des chantiers rivaux d'autres nations.

Parmi les compagnies privées qui ajoutèrent la construction de sous-marins à leurs autres spécialités, seuls les Etablissements Schneider & Co de ChaIon sur Saône en construisirent en France pour les marines étrangères.

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« …Monsieur Laubeuf qui s'était associé avec Schneider a établi les plans de ces submersibles.

Ils se présentent sous la forme d'une coque interne légèrement ovale sur toute sa longueur, et d'une coque externe qui protège complètement la première coque contre tous les chocs. La coque externe présente globalement une forme équivalente à celle d'un bâtiment de surface avec une étrave droite, une poupe voûtée, de fines lignes d'eau et une section transversale qui donne au bateau de bonnes qualités nautiques. On notera que l'avant du bâtiment a une forme de dos de tortue.
La propulsion est assurée par deux types de moteurs : deux moteurs électriques pour la navigation en plongée et deux moteurs à huile lourde pour la navigation en surface ; ces derniers peuvent être couplés au moteur-générateur électrique pour recharger les batteries utilisées lors de la navigation en plongée. L'huile utilisée a une densité d'au moins 0,8, L'utilisation de pétrole, gaz oil ou benzine fut tout d'abord écartée pour les submersibles du type Laubeuf, ceci à cause des sérieux accidents que de tels combustibles auraient occasionnés dans d'autres marines. Aucune explosion n'a jamais été à déplorer sur les types Laubeuf.
Depuis quelques années, MM. Schneider ont ajouté, à leurs spécialités, la construction de moteur type Diesel. Ils construisirent tout d'abord un moteur 4 temps, conçu plus spécialement pour la propulsion des sous-marins pour la France et pour les marines étrangères. Considérant les avantages touchant aux applications des moteurs deux temps pour les moyennes et fortes puissances, du point de vue de la réduction de poids et de l'espace occupé, la régularité de fonctionnement et Ia facilité de sa conduite, ils entreprirent également la fabrication de ce type de moteur. Toutefois, avant de lancer leurs moteurs 2 temps sur le marché, MM. Schneider finalisèrent leurs travaux par une série d'essais sur les moteurs de ce type, de différentes puissances et tailles, ce qui leur permit de mener une étude complète concernant les difficultés touchant à la régulation et au fonctionnement, et surtout de trouver les moyens de surmonter ces difficultés.

Les résultats de ces tests leur ont permis de construire des moteurs 2 temps rapides et légers des plus satisfaisants pour les sous-marins. Parallèlement, ils ont procédé à la construction de moteurs Diesel 2 et 4 temps lents et lourds pour les cargos et aussi des moteurs stationnaires (fixes) horizontaux à double action et très puissants. Dans tous ces travaux, leur expérience dans la construction de machines à vapeur et à gaz de toutes sortes les a placés à un bon niveau sur le marché.

Les moteurs Diesel à simple action verticale pour sous-marins, ainsi que les moteurs 2 et 4 temps construits par MM. Schneider sont équipés de piston en forme de fût. Les armatures de fond, les bâtis et l'enveloppe sont en fonte d'acier fondue au creuset ; les cylindres fondus ensembles en une pièce ou formant des pièces séparées sont en fonte de fer ou en fonte d'acier et possèdent des chemises en fonte de fer. Les fins de cylindre sont en fonte d'acier fondue au creuset spécial et, dans le cas de moteurs 4 temps, sont équipées de soupapes d'aspiration, d'échappement, d'injection et de démarrage. Dans les moteurs 2 temps, les soupapes d'aspiration et d'échappement sont remplacées par des soupapes refoulantes. Les vilebrequins sont en acier demi-dur durci et recuit et tous les composants les plus sollicités tels que roulements, aiguilles, soupapes et volets de soupapes de compresseurs sont en acier de qualité spéciale. Les tubulures d'air de refoulement et d'échappement sont en tôle d'acier. Toutes les parties exposées à la chaleur sont refroidies par eau.
Pour les moteurs 2 temps et les 4 temps ayant des cylindres de large diamètre, les pistons sont refroidis par huile. La lubrification forcée est également utilisée. Le compresseur d'air et, pour les moteurs 2 temps, à la fois le compresseur et la pompe refoulante sont directement entraînés par l'arbre de transmission, indépendamment l'un de l'autre ou couplés. Ce dernier entraîne également souvent les pompes à huile de lubrification et de refroidissement ainsi que les pompes à eau.
Ils ont tous été construit au Creusot à Chalon sur Saône (les 6 premiers SC 0 à 3 et SD 1 et 2) ou aux Forges et Chantiers de la Gironde à Bordeaux, société associée à Schneider (SD 3 et 4).

Les constructions se répartissent comme suit :

Deux pour la Grèce :

SC 0 Delphin lancé le 2 août 1911
SC 2 Xiphias lancé le 26 juin 1912
Déplacement :
311 t en surface
465 t en plongée
Flottabilité :
154 t
Puissance des 2 moteurs Diesel Schneider :
720 cv
Vitesse :
14 nœuds en surface
9 nœuds en plongée

Le Delphin est acquis par une souscription nationale lancée auprès de la population grecque.

Deux pour le Pérou :

SC 1 Aguirre rebaptisé Ferré en avril 1912, condamné en 1919
SC 3 Palacios 1913, condamné en 1919.

Le Delphin arrive à Saint-Mandrier pour la mi-février 1912, il passe sous pavillon grec le 26 août 1912, et quitte Toulon le 30 septembre 1912, il arrive au Pirée le 5 octobre 1912, couvrant d'une traite et sans escale ni convoyage la distance de 1 100 milles qui sépare les deux ports, en 130 heures. Ce raid reflète bien la qualité de la conception du matériel, ainsi que celle de l'équipage grec.

Avec le Xiphias, un essai de relevage est pratiqué le 9 septembre 1913 à - 36 m avec le dock releveur de Saint Nazaire devant le cap Cepet. Les essais de recette se terminent le 15 septembre 1913 avec une marche à 13,5 nœuds pendant 4 heures.
Le 13 octobre, il prend le pavillon grec et part le même jour, en urgence (guerre balkanique) pour le Pirée. Il y arrive 10 jours plus tard, ayant dû passer 5 jours à Civitta Vecchia et Messine à cause du mauvais temps.

Les autres bâtiments étaient prévus pour :

Le Japon. Un sera livré en 1917, l'autre, réquisitionné, deviendra l'Armide en 1915.
La Grèce. Les deux seront réquisitionnés et deviendront les Antigone et Amazone.
La Roumanie. Les trois seront réquisitionnés avant même leur mise en chantier et seront les Louis Dupetit-Thouars, Henri Fournier et O’ Byrne. »

Source :
Article de Gérard Garier, spécialiste et auteur de nombreux ouvrages sur les sous-marins français, paru dans la revue Marines n° 40


Cordialement,
Franck

(à suivre)
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Ar Brav
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Re: SOUS-MARINS - Les Chantiers Schneider

Message par Ar Brav »

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Le SC 3 Palacios en achèvement sur la cale de lancement

Préparatifs pour le lancement du Palacios

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Re: SOUS-MARINS - Les Chantiers Schneider

Message par Ar Brav »

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L'Aguirre, futur Ferré, et le Palacios sous la grue, pour l'installation des périscopes.


Le lancement du SD 2 le 7 avril 1916 destiné à la Marine japonaise.

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Re: SOUS-MARINS - Les Chantiers Schneider

Message par Ar Brav »

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Le Xiphias, avec l'Aguirre au second plan. Au fond, sur la droite, le pétrolier Rhône, de la Marine Nationale.
On distingue bien la barre de plongée milieu du Xiphias, grâce à l'ombre portée sur la coque.


Photo Marius Bar, Toulon.
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Re: SOUS-MARINS - Les Chantiers Schneider

Message par Ar Brav »

Bonjour à tous,

Suite de l'article :

Description des emménagements

La coque épaisse est divisée en compartiments par des cloisons étanches.

Le premier compartiment à l'extrême avant est utilisé pour contenir de l'eau des ballasts et servirait à neutraliser les effets d'une collision ; un accident qui écraserait l'avant du bâtiment n'aurait, en effet, aucune influence sur l'assiette et sur la flottabilité.

Le deuxième compartiment, qui se termine devant une cloison étanche demi-sphérique, contient un tube lance-torpilles sous-marin, des torpilles de rechange et le poste d'équipage avant. Dans le compartiment suivant se trouvent les accumulateurs électriques ; puis suit le poste central contenant les commandes des gouvernails de direction et de plongée ainsi que la chambre des officiers, avec communication vers le kiosque.
En allant vers l'arrière on entre dans le compartiment des moteurs Diesel et des appareils auxiliaires ; puis dans celui des moteurs électriques, et enfin le poste arrière contenant les compresseurs d'air et abrite également le poste des officiers-rnariniers. Le compartiment suivant en dehors de la coque épaisse sert de ballast.

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Armement

4 systèmes de tubes lance-torpilles escamotables sont montés sur le pont, où ils sont sérieusement protégé à l'intérieur de la passerelle. Ils fonctionnent avec de l'air comprimé venant de l'intérieur du bâtiment.

Avec le tube intérieur à l'extrême avant, cela fait 5 torpilles à poste prêtes à être lancées, et des torpilles de rechange pour le tube avant.

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Ar Brav
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Re: SOUS-MARINS - Les Chantiers Schneider

Message par Ar Brav »

Re,

Habitabilité

La question de l'habitabilité a été prise en compte à partir de la très simple constatation que l'endurance d'un submersible dépend complètement de l'endurance de son équipage, et, par conséquent, du degré d'habitabilité du bâtiment lui-même.
Quand le bâtiment navigue en surface, les hommes qui ne sont pas de service peuvent prendre place sur le pont, exactement dans les mêmes conditions que sur un bâtiment de surface (torpilleur), tandis qu'un système très complet de ventilation permet d'assurer à l’intérieur le service avec un minimum de fatigue. Quand le bâtiment est immergé, le volume d'air disponible et les moyens de renouvellement de celui-ci sont suffisants pour permettre à l'équipage de demeurer ainsi sans trouble pendant une période de plus de 12 heures consécutives.

L'habitabilité du bateau est également augmentée par le fait que les accumulateurs électriques sont localisés dans un compartiment séparé, la chambre des officiers et le poste d'équipage ne possèdent aucun élément d'une installation susceptible de polluer l'air, ils sont ainsi rendus aussi confortables que possible dans les bâtiments de ce type. L'espace réservé à l'équipage contient quelques couchettes fixes dont le nombre varie avec la grandeur du navire. Dans les bâtiments du type C et D une pièce supplémentaire avec 4 couchettes fixes est réservée aux sous-officiers, et une avec 2 couchettes fixes pour les 2 officiers.

Tous les bateaux contiennent une cuisine, avec fourneau électrique, une étuve à pétrole et un ou deux lavabos,
La ventilation est assurée par des ventilateurs électriques qui font circuler l'air à travers la totalité du sous-marin. Leur nombre et leur efficacité varie en fonction du type de navire. L'oxygène de l'air à bord du navire peut être renouvelé.

Sécurité

Les conditions de sécurité qui résultent de la double coque et des positionnements des ballasts à l'extérieur de la coque interne, combinés à un dispositif fournissant de l’air comprimé de secours permettent au bâtiment d'acquérir quasi instantanément une grande flottabilité, lui permettant par la même occasion d'émerger très rapidement. Les valves déclenchant l'arrivée d'air comprimé de secours sont placées bien en vue de l'officier de quart. Des pompes électriques de drainage qui agissent simultanément sur les différents ballasts peuvent vider ceux-ci en très peu de temps. Les dispositifs de sécurité incluent des plombs de sécurité largables situés dans la quille, des boucles de relevage et une bouée téléphonique, flotteur équipé d'un câble, peut-être larguée pour communiquer avec les bâtiments de surface.

Divers

Pour réguler l'immersion d'un submersible du type Cb, l'officier aux commandes dispose d'un ensemble d'indicateur d'assiette et de 3 paires d'indicateurs des barres de plongée, un devant, un derrière et en face du kiosque qui lui permettent de maintenir la profondeur voulue.
Tous les auxiliaires, tels que compresseurs d'air, pompes et treuils sont largement dimensionnés en regard de leur fonction.
Ce navire est gréé avec deux périscopes, chacun d'eux donnant une vue complète de l'horizon dans son ensemble, leurs mouvements de montée et descente sont effectués par des moteurs électriques.
Les communications avec le bâtiment lui même et les sister-ships sont assurés au moyen de cloches sous-marines. La télégraphie peut-être aussi utilisée.

Les qualités nautiques du submersible type Laubeuf et la facilité d'utilisation ont été démontrées en service réel. L'inventeur et les constructeurs, M.M. Schneider, travaillent pour améliorer encore les caractéristiques. »

Nul doute que voilà un bâtiment idyllique de part sa présentation, hélas, les cruelles réalités de la guerre viendront quelque peu ternir ce portait flatteur, à commencer par la nette supériorité des sous-marins allemands, notamment en matière de propulsion.

La suite de cet article consacré au transport des sous-marins en 1912, de l’acheminement par voie fluviale jusqu’à son chargement sur cargo, pour les bâtiments destinés à l’exportation, est relatée ICI.

Cordialement,
Franck
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geryonesime
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Re: SOUS-MARINS - Les Chantiers Schneider

Message par geryonesime »

Bonjour,

Et un petit reportage sur les chantiers Schneider de Chalon-sur-Saône sur le site de France 3 Bourgogne-Franche-Comté : Les sous-marins de Chalon

À bientôt
Jean-Marc
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geryonesime
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Re: SOUS-MARINS - Les Chantiers Schneider

Message par geryonesime »

Bonjour,

Et aussi des cartes postales des chantiers Schneider sur le site des archives municipales de Chalon-sur-Saône : http://archives.chalon.fr/f/Iconographi ... ?&debut=50

À bientôt
Jean-Marc
garance.
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Re: SOUS-MARINS - Les Chantiers Schneider

Message par garance. »

Petite parenthèse pour parler des hommes
Souvenez-vous que pour un sous-marinier digne de ce nom, il n'existe que deux types de bâtiments :
Les sous-marins et... les cibles !
confinement
G
"Il pleuvait en cette nuit de Noël 1914, où les Rois Mages portaient des Minenwerfer."
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