II. — Propositions de récompenses formulées par le capitaine de frégate Pierre BRÉART de BOISANGER.
[• Torpilleur d’escadre Casque — alors commandé par le capitaine de frégate Pierre Marie Clément BRÉARD de BOISSANGER — Registre historique de la correspondance intéressant le personnel et le matériel du bâtiment — 21 mars 1916 ~ 21 déc. 1916 —, Note n° 3 : Service historique de la Défense, Cote SS Y 76, p. num. 941 et 942.]
[• Torpilleur d’escadre Casque — alors commandé par le capitaine de frégate Pierre Marie Clément BRÉARD de BOISSANGER — Registre historique de la correspondance intéressant le personnel et le matériel du bâtiment — 21 mars 1916 ~ 21 déc. 1916 —, Note n° 3 : Service historique de la Défense, Cote SS Y 76, p. num. 941 et 942.]
« № 3. —
Le 21 mars 1916.
à Monsieur le Capitaine de vaisseau,
Chef de Division
Chef de Division
Commandant,
J’ai l’honneur de vous communiquer les citations à l’ordre de l’Escadrille que j’ai faites à l’occasion de la perte du Renaudin.
J’ai cru devoir citer tous les survivants qui, étant à la mer ou recueillis sur le Bory, n’ont pas eu un mot qui trahit autre chose que la douleur de la perte de leur bâtiment et de leurs camarades et, surtout, l’amer regret de n’avoir pu nuire à l’ennemi.
En parlant de leur esprit militaire, je ne fais qu’exprimer la vérité : m’entendant appeler le berthon à l’aide d’un homme évanoui, de proche en proche, tous ont répété mon ordre, aucun ne songeant à arrêter en chemin cette embarcation.
Je propose M. l’enseigne de vaisseau de 2e classe Tros pour le grade de chevalier dans la Légion d’hon-neur. Etant à peine recueilli dans le berthon, souffrant terriblement, cet officier demandait si le com-mandant Hardy était sauvé et ajoutait : " Moi, je suis aveugle, mais mon pauvre Renaudin ! C’était ma deuxième sortie avec lui." Il n’a cessé depuis de donner à tous l’impression du caractère le plus élevé.
Je vous demande de proposer l’armement de la pièce de 10 cm avant pour une citation à l’ordre de l’Armée ; voyant la trajectoire de la torpille, ils ne pouvaient guère avoir d’espoir que nous l’éviterions ; aucun n’a songé à sa sécurité mais seulement à détruire le sous-marin. Le chef de la pièce, entraîné par son arme, n’est revenu en surface qu’au moment où l’avant a émergé verticalement ; me voyant peu après essayer de me débarrasser d’un lourd vêtement, il a nagé aussitôt vers moi et me l’a enlevé.
Le quartier-maître commis Cadic a été admirable de sang-froid ; après avoir à lui seul embarqué M. Tros dans le berthon, il n’a cessé d’encourager ses camarades, les renseignant sur les mouvements du Bory et aidant à grouper les épaves. Je le propose pour la médaille militaire ; si cette proposition n’avait pas de suite, je demande pour lui la citation à l’ordre de l’Armée et une médaille de sauvetage.
Le premier maître Le Gallais et le second maître Collinet sont cités dans le rapport du commandant du Bory comme ayant conservé toute leur vigueur physique et morale ; je demande pour eux une citation à l’ordre de [la] Division. Je crois devoir insister sur la façon dont le commandant Carrel, du Bory, nous a porté secours dans cette circonstance douloureuse ; appréciant difficilement notre distance à la terre, il avait lieu de croire à une mine et a assuré sa position et mis ses embarcations à la mer en conséquence. Manœuvrant alors contre un sous-marin, il a repris ses embarcations lourdement chargées de la façon la plus brillante, arrivant en vitesse et s’étalant sur place.
Le Bory m’a donné l’impression d’un bâtiment parfaitement en main, où chacun connaissait à fond son rôle et n’était nullement impressionné par la catastrophe du Renaudin et la proximité de l’ennemi.
Le personnel mécanicien a notamment exécuté les manœuvres ordonnées d’une façon remarquable.
Il ne m’appartient pas de faire des propositions pour un bâtiment qui n’est pas dans mon escadrille, mais je me permets de souligner l’ancienneté de grade de Mr le lieutenant de vaisseau Carrel et les services de guerre précédemment rendus par le bâtiment sous ses ordres.
J’attire également votre bienveillante attention sur le quartier-maître réserviste Artuffel qui a fait preuve d’initiative intelligente en signalant à son commandant la présence du sous-marin. »
J’ai cru devoir citer tous les survivants qui, étant à la mer ou recueillis sur le Bory, n’ont pas eu un mot qui trahit autre chose que la douleur de la perte de leur bâtiment et de leurs camarades et, surtout, l’amer regret de n’avoir pu nuire à l’ennemi.
En parlant de leur esprit militaire, je ne fais qu’exprimer la vérité : m’entendant appeler le berthon à l’aide d’un homme évanoui, de proche en proche, tous ont répété mon ordre, aucun ne songeant à arrêter en chemin cette embarcation.
Je propose M. l’enseigne de vaisseau de 2e classe Tros pour le grade de chevalier dans la Légion d’hon-neur. Etant à peine recueilli dans le berthon, souffrant terriblement, cet officier demandait si le com-mandant Hardy était sauvé et ajoutait : " Moi, je suis aveugle, mais mon pauvre Renaudin ! C’était ma deuxième sortie avec lui." Il n’a cessé depuis de donner à tous l’impression du caractère le plus élevé.
Je vous demande de proposer l’armement de la pièce de 10 cm avant pour une citation à l’ordre de l’Armée ; voyant la trajectoire de la torpille, ils ne pouvaient guère avoir d’espoir que nous l’éviterions ; aucun n’a songé à sa sécurité mais seulement à détruire le sous-marin. Le chef de la pièce, entraîné par son arme, n’est revenu en surface qu’au moment où l’avant a émergé verticalement ; me voyant peu après essayer de me débarrasser d’un lourd vêtement, il a nagé aussitôt vers moi et me l’a enlevé.
Le quartier-maître commis Cadic a été admirable de sang-froid ; après avoir à lui seul embarqué M. Tros dans le berthon, il n’a cessé d’encourager ses camarades, les renseignant sur les mouvements du Bory et aidant à grouper les épaves. Je le propose pour la médaille militaire ; si cette proposition n’avait pas de suite, je demande pour lui la citation à l’ordre de l’Armée et une médaille de sauvetage.
Le premier maître Le Gallais et le second maître Collinet sont cités dans le rapport du commandant du Bory comme ayant conservé toute leur vigueur physique et morale ; je demande pour eux une citation à l’ordre de [la] Division. Je crois devoir insister sur la façon dont le commandant Carrel, du Bory, nous a porté secours dans cette circonstance douloureuse ; appréciant difficilement notre distance à la terre, il avait lieu de croire à une mine et a assuré sa position et mis ses embarcations à la mer en conséquence. Manœuvrant alors contre un sous-marin, il a repris ses embarcations lourdement chargées de la façon la plus brillante, arrivant en vitesse et s’étalant sur place.
Le Bory m’a donné l’impression d’un bâtiment parfaitement en main, où chacun connaissait à fond son rôle et n’était nullement impressionné par la catastrophe du Renaudin et la proximité de l’ennemi.
Le personnel mécanicien a notamment exécuté les manœuvres ordonnées d’une façon remarquable.
Il ne m’appartient pas de faire des propositions pour un bâtiment qui n’est pas dans mon escadrille, mais je me permets de souligner l’ancienneté de grade de Mr le lieutenant de vaisseau Carrel et les services de guerre précédemment rendus par le bâtiment sous ses ordres.
J’attire également votre bienveillante attention sur le quartier-maître réserviste Artuffel qui a fait preuve d’initiative intelligente en signalant à son commandant la présence du sous-marin. »
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