Bonsoir,
Bravo aux participants et particulièrement à "Rutilius" qui ont rapidement identifié l'Emir Fayçal!
Cette énigme n'a pas résisté bien longtemps.
Oui, nous sommes à Wiesbaden le 13 mars 1919, l'Emir Fayçal participe à une prise d'armes où le 46e Régiment d'Artillerie de Campagne Portée (R.A.C.P) tient le premier rôle.
Je n'ai pas identifié l'autorité civile, peut-être Paul Tirard, Haut-Commissaire de la République dans les Provinces du Rhin ou un diplomate du Quai d'Orsay chargé d'accompagner l'Emir ?
Le contexte de la prise d'armes est particulier, les négociations du futur Traité de Versailles sont très âpres, les alliés s'affrontent ouvertement sur bien des questions en suspens et notamment sur les questions de "l'Orient compliqué".
Le gouvernement allemand n'en a pas fini avec la Révolution et des troupes allemandes interviennent même sur la rive gauche du Rhin pour mater les révolutionnaires.
Nos bons alliés anglais agissent pour discréditer la France en Orient, c'est l'époque où, profitant des très forts effectifs britanniques au Moyen-Orient, bien équipés et faisant contraste à notre très faible présence militaire, nos "alliés" déversent leur or et agissent pour discréditer la France. Les agents britanniques en Palestine, Syrie et Arabie ne répandent-ils pas perfidement le bruit que l'Armée française n'a pas d'aviation et des matériels surannés ce qui n'est pas complétement faux en Orient au début de 1919.
La prise d'armes a donc deux buts principaux à Wiesbaden en mars 1919:
-à usage local, il convient de montrer aux allemands le modernisme et la très grande mobilité de l'artillerie française portée entièrement motorisée: canons de 75 montés sur tracteurs 4X4 Jeffery et Nash, voitures Ford T, et motocyclettes "Triumph". Le 46e R.A.C.P transporte sur ses tracteurs ses munitions de guerre immédiatement disponibles et les servants sont exercés à débarquer rapidement leur matériel en effectuant des mises en batterie "éclair". L'exercice de mise en batterie est effectuée sous les yeux des autorités mais aussi des nombreux civils allemands postés sur tout le parcours du défilé du Régiment.
-à usage de l'Emir, il faut montrer au futur souverain la puissance militaire de la France et contrecarrer l'intense propagande britannique en Orient. Dans un an, l'Emir Fayçal devra renoncer à ses rêves de grandeur en Syrie après l'affrontement direct de ses forces et de l'Armée française.
L'Emir se souvient-il en voyant le 46e R.A.C.P défiler que Clemenceau lui a refusé en 1918 les 2 canons de 65 de Montagne français supplémentaires que ses troupes jugeaient indispensables pour leur projets offensifs contre les Turcs? Pendant des mois, seuls deux canons de ce type servis par les français étaient disponibles au Hedjaz alors que des centaines étaient envoyées aux Armées serbe, grecque et française d'Orient.
Un photographe a immortalisé la revue et le défilé du 46e R.A.C.P, je laisse de côté les vues "techniques" des matériels qui illustreront un article à paraître sur l'Artillerie Portée dans une revue spécialisée.
Je joins un gros plan de l'exercice en plein boulevard d'un 75 porté, l'Emir Fayçal est malheureusement caché par un réverbère. On notera aussi les caisses de munitions préalablement débarquées rapidement par les servants, ces caisses voyagent sur le tracteur pour constituer un premier approvisionnement des pièces. Petit détail, les munitions sont "bonnes de guerre", on est jamais trop prudent en territoire ennemi car la Paix n'est pas encore signée et l'armistice n'a été consenti que trois mois auparavant.
- 46e RACP Wiesbaden 13-3-1919 Jeffery .jpg (216.78 Kio) Consulté 1379 fois
Cordialement,
Guy François.
