Bonjour
J'ai poursuivi mes recherches sur les hommes du 294e R.I., et voici les renseignements que j'ai pu réunir sur Georges Ternisien, d'abord maréchal des logis au 12e Régiment de Cuirassiers, puis sous-lieutenant au 294e Régiment d'Infanterie. J'ai consulté sa fiche Mémoire des hommes, sa fiche militaire, les J.M.O. des 12e RC et 294e RI, Geneanet et Wikipédia. Existe-t-il une autre banque de données qui pourrait apporter d'autres informations ?
La lecture du J.M.O. du 12e Régiment de Cuirassiers s'est montrée dépaysante par rapport à la lecture d'un J.M.O. de l'Infanterie, et intéressante. En effet de 1914 à 1915 on y voit la façon dont la cavalerie, qui ne fait que des marches, contremarches, et des opérations ponctuelles de reconnaissance ou de protection des fantassins, petit à petit se dépouille de ses hommes au profit de l'infanterie. Et les morts y sont si rares que le secrétaire a le temps de mentionner la blessure à la bouche de l'un ou de mentionner les pieds gelés de l'autre. On y voit aussi que les chevaux viennent à manquer : le régiment passe un certain temps, durant lequel il ne combat pas, à accueillir et dresser des chevaux importés d'Amérique du Nord.
GEORGES TERNISIENJ'ai poursuivi mes recherches sur les hommes du 294e R.I., et voici les renseignements que j'ai pu réunir sur Georges Ternisien, d'abord maréchal des logis au 12e Régiment de Cuirassiers, puis sous-lieutenant au 294e Régiment d'Infanterie. J'ai consulté sa fiche Mémoire des hommes, sa fiche militaire, les J.M.O. des 12e RC et 294e RI, Geneanet et Wikipédia. Existe-t-il une autre banque de données qui pourrait apporter d'autres informations ?
La lecture du J.M.O. du 12e Régiment de Cuirassiers s'est montrée dépaysante par rapport à la lecture d'un J.M.O. de l'Infanterie, et intéressante. En effet de 1914 à 1915 on y voit la façon dont la cavalerie, qui ne fait que des marches, contremarches, et des opérations ponctuelles de reconnaissance ou de protection des fantassins, petit à petit se dépouille de ses hommes au profit de l'infanterie. Et les morts y sont si rares que le secrétaire a le temps de mentionner la blessure à la bouche de l'un ou de mentionner les pieds gelés de l'autre. On y voit aussi que les chevaux viennent à manquer : le régiment passe un certain temps, durant lequel il ne combat pas, à accueillir et dresser des chevaux importés d'Amérique du Nord.
(1892-1916)
Le Sous-Lieutenant Georges Jean Ternisien avait 23 ans lorsqu’il tomba à l’ennemi. C’était un Parisien des beaux quartiers : il était né au 61 Boulevard de Montmorency à Paris, dans le 16e arrondissement, qui est aussi le lieu de transcription de son décès.
Son patronyme était "DAMIEN", avant qu’il soit légitimé par le mariage de ses parents en 1902. A cette date son père Hippolyte Eugène TERNISIEN (1852-1923) était tapissier décorateur et négociant. C’était pour sa mère Marie Anna DAMIEN de DELVA, née en 1859, un second mariage, et Georges avait donc déjà une demi-sœur et deux demi-frères.
Le père de Marie Anna, Jean Pierre Damien DAMIEN de DELVA, parfois écrit Jean-Pierre Damien de Delva, était Haïtien, réfugié en France après la fin de l’Empire d’Haïti établi par Faustin Soulouque de 1849 à 1859. Il était titré Comte DELVA de DALMARIE (De la petite rivière de Dalmarie). Général et homme d’état durant les dix ans de règne de l'empereur Faustin Ier, il s’exila en France après la chute de ce dernier, ayant eu la prudence de placer en Europe une bonne part de sa fortune considérable.
La fiche militaire de Georges Ternisien donne pour adresse le 22 Boulevard Flandrin dans le 16e Arrondissement, et indique qu’il exerçait la profession de drapier. Sans doute son père voulait-il que son fils reprenne son négoce.
Georges Ternisien fut engagé pour trois ans le 2 avril 1913, promu sous-lieutenant à titre temporaire le 29 novembre 1915 et affecté au 294e R.I., quittant le 12e Régiment de Cuirassiers où il servait jusqu’alors.
Sa fiche donne le signalement suivant : « Cheveux bruns, yeux marron foncé, front découvert, nez rectiligne, visage rond, taille 1,86 m ». Cette haute taille le plaça d’emblée dans la cavalerie lourde plutôt que légère, et s’il changea d’arme au cours du conflit, ce ne fut pas de son fait, mais parce que la cavalerie, arme d’élite jusqu’alors, se montra inadaptée aux nouvelles formes de la guerre, une guerre de tranchées et d’artillerie. On finit par démonter des cavaliers pour les faire combattre comme des fantassins, on en réaffecta même dans l’infanterie. Le J.M.O. du 12e Régiment de cuirassiers fait ainsi régulièrement état de départs de cavaliers passés à l’infanterie. Au 27 novembre 1915, il signale que « le maréchal des logis Ternisien de l’escadron à pied passe sous-lieutenant à titre temporaire au 294e Régiment d’Infanterie. » Ce changement d’arme et de grade correspond à une réorganisation des troupes de cavalerie. Selon Wikipédia, « en 1915, la moitié des sous-officiers des régiments de cavalerie est passée dans l’infanterie pour devenir chef de section. »
Selon sa fiche militaire, Ternisien fut « tué à l’ennemi le 15 mars 1916 au NO de Souain (Marne) « au bec de Canard » et fut cité à l’Ordre général du 27 mars 1916 – 4e Armée selon les termes suivants : « Officier d’une bravoure et d’un sang froid remarquables, a entraîné avec une rare énergie sa section à l’assaut d’une tranchée ennemie qu’il a enlevée d’un seul élan, a été mortellement frappé en se portant au devant d’une contre-attaque ennemie. »
Le sous-lieutenant Ternisien est évoqué plusieurs fois dans la correspondance d’Octave Noir, hospitalisé à Paris après avoir été blessé lors de l'affaire du Bec de Canard près de Suippes, où il gagna ses galons de capitaine.
Lettre d’Octave Noir à son père du 30 mars 1916
Je n’ai pas encore tous les détails que je voudrais sur les pertes de ma Cie mais j’ai appris avant-hier que mes 2 S-Lts sont tués mon 3e chef de section, adjudant de grande énergie militaire et d’un zèle rare est tué aussi : le 4e n’est que blessé. Vous voyez ce que, dès lors, cette troupe pouvait se trouver désorganisée d’autant que les sergents ont donné leur part. De près je vous raconterai, mais je crois que maman l’a déjà fait, ce petit tout petit épisode qui nous a coûté à notre pauvre régiment si cher.
De responsables, je n’en vois guère, la cause de tout le mal a été presque uniquement le bombardement allemand qui a commencé à tout bouleverser 4 heures avant notre attaque et s’est prolongé jusqu’au lendemain.
Plus tard Octave raconte dans deux lettres différentes la visite qu’il reçut des parents de Georges Ternisien le 30 avril 1916, alors qu’il était hospitalisé au lycée Janson de Sailly à Paris.
Dans la lettre à son père datée du 1er mai 1916 :
Le matin [du 30 avril] j’avais eu la navrante visite de ces pauvres Mr et Mme Ternisien père et mère de mon brave et si sympathique lieutenant tué le 15 mars. Ils ont été très aimables et moi désolé de ne pouvoir [i]leur donné[/i] (sic) de renseignements bien consolants sur sa mort qui fut fort douloureuse et livra son corps aux allemands.
Dans la lettre à sa mère datée du 1er mai 1916, Octave développe davantage :
Hier matin ces pauvres Mr et Mme Ternisien sont venus me parler de leur fils, le si brave officier de ma Cie tombé à l’avant du 15 mars. Pauvres gens, quelle désolation, que c’est navrant de ne pouvoir rien leur dire de bien consolant, ils m’ont demandé avec insistance s’il était mort sur le coup je n’ai pas osé leur répondre autrement que d’une manière évasive, la vérité est qu’il a beaucoup souffert pendant les quelques minutes de son agonie —ni pu leur dire que le corps était chez nous, mais leur apprendre qu’il est resté aux mains des allemands. Pour des milliers de familles, ces douleurs se répètent ; mais il ne faut pas que la nature parle seule et songer que l’on a donné sa vie pour son pays doit faire taire un peu ce que la souffrance pourrait dire de trop amer.
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Cordialement
P&L51