L'honneur d'un capitaine (américain)
Publié : sam. mai 04, 2019 3:33 pm
Bonjour à tous,
1937 : Ernesto Bisogno, barbier new-yorkais, a soif de justice. Non pas pour lui, qui a combattu en France comme tant d’autres Américains, mais pour un ami qu’il y a laissé, Charles G[aston] Clement. Aussi est-ce pourquoi il ne manque jamais de conter à ses clients l’histoire de ce dernier, histoire qui va faire surface dans les pages de trois numéros de l’American Legion Magazine, début 1938. Surprenante, instructive, émouvante, elle a été détaillée dans sa thèse de doctorat, dont il a tiré le livre « The School of Hard Knocks. Combat Leadership in the American Expeditionary Forces », par le professeur Richard S. Faulkner. Elle vaut la peine d’être traduite.
Charles G. Clement fait ses humanités (Latin, Grec, Histoire…) à Mercer University (Macon, Géorgie), qu’il quitte avec le grade de Bachelor of Arts, avant d’enseigner à Americus, puis au lycée de garçons d’Atlanta. Il intègre les camps d’entraînement des officiers, Fort McPherson d’abord (en mai 1917), puis Camp Gordon, où il se distingue rapidement par son implication et son abnégation. Il y prend le commandement, en tant que capitaine, de la compagnie E du 328th infantry regiment (82nd division), en cours de formation. C’est également là qu’il fait la connaissance d’Ernesto Bisogno, déjà barbier, qui a en charge les officiers, sous-officiers et soldats de la compagnie de commandement du 328th infantry regiment. Lorsqu’ils se revoient, en France, c’est au moment où un lieutenant demande à Bisogno de couper les cheveux de Clement, avant la comparution de ce dernier devant une cour martiale.
Dans la nuit du 1er au 2 juillet 1918, le capitaine Clement ordonne à une patrouille d’entrer dans le no man’s land en vue d’y tendre une éventuelle embuscade. Il a l’intention d’accompagner cette patrouille, et en informe le sergent Cunningham. Ce dernier remarque immédiatement que son capitaine est sous l’emprise de l’alcool, et tente de l’en dissuader, aidé par un lieutenant. Rien n’y fait. La patrouille s’égrène, et peu de temps s’écoule avant que Cunningham ne ramène le capitaine Clement vers la tranchée de départ, considérant qu’il faisait tellement de bruit qu’il aurait été stupide de s’entêter. En conséquence, le chef de bataillon de Clement, le commandant Buxton, le fait traduire en cour martiale pour avoir enfreint l’article 85 du code militaire pour le temps de guerre : un officier trouvé ivre durant le service.
Dans son témoignage, Bisogno indique que le capitaine Clement n’était qu’un consommateur d’alcool très occasionnel, ne l’ayant vu boire du vin que deux ou trois fois, ne l’ayant jamais vu ivre.
En attendant sa comparution, Clement passe de l’aigreur à l’apaisement, sûr de pouvoir faire valoir son point de vue ; il reçoit de nombreuses visites d’officiers ; d’autres évoquent son cas chez le barbier, et surtout l’extrême sévérité qui l’a déjà suffisamment frappé.
Le jour de la comparution devant une cour martiale générale est arrivé. Bisogno coiffe et rase Clement avant qu’il ne s’y présente. Le capitaine, selon ses dires, est certain d’être acquitté, et impatient d’être confronté à ses accusateurs. Devant la cour, Clement reconnaît sa culpabilité : il dit s’abstenir généralement de boire – ce qu’approuvent les officiers qui viennent témoigner – et est incapable d’expliquer pourquoi il a consommé tant d’alcool durant la nuit de la patrouille (même s’il écrit à ses parents, en septembre 1918, qu’il s’est enivré, dans un abri, la fatigue lui ayant fait perdre ses repères). Il s’exprime alors ainsi – je traduis :
« Je suis coupable, mais si le verdict de la cour est la peine de mort, je n’ai rien à ajouter. S’il s’agit de me relever de mon commandement, en revanche, j’ai ceci à déclarer : dans le no man’s land, j’ai déshonoré ma personne, mon uniforme, et mon pays ; dans le no man’s land, je voudrais avoir la possibilité de me racheter, ne serait-ce qu’en partie. Relevez-moi de mon commandement, mais permettez-moi de rejoindre ma compagnie en tant que 2e classe, pour que j’y serve côte à côte avec les hommes que j’ai commandés, et pour y effectuer les missions les plus périlleuses. Et quand cette guerre aura pris fin, j’effectuerai quelque peine que ce soit dans un pénitencier.
Messieurs, je ne suis pas un buveur. J’ai été diplômé de l’université à 19 ans. Pendant 19 ans ½, je n’ai pas touché à l’alcool, et seulement extrêmement rarement ces 6 dernières années. Cette triste nuit, j’ai décidé de boire à une bouteille de Scotch qui m’a été offerte par deux capitaines anglais. Je l’avais amenée du secteur d’Abbeville 3 ou 4 semaines plus tôt. Environ 10 minutes plus tard, j’étais sur le départ, et j’en ai repris. J’étais sûr que je me sentirais tout à fait bien. J’en avais bu plus que je n’en avais l’intention. J’aurais mieux fait de ne pas y toucher. Je ne suis pas fier de moi.
Messieurs, pendant presque 26 ans, j’ai vécu sans entacher ma personne et mes actes. Quand le premier appel à une candidature d’officiers a été lancé, je me suis porté volontaire. A cette date, le 20 avril 1917, il n’y avait en moi ni perspective de récompense financière, ni crainte de la conscription. Je n’implore pas votre pardon. Messieurs, tout ce que je demande à cette cour, est d’être frappé de la peine maximale, ou d’être autorisé à servir jusqu’à la fin de la guerre en tant que soldat de 2e classe, avec la possibilité de me racheter aux yeux de ma compagnie, de mon peuple et de mon pays, afin que mon nom ne puisse être éternellement inscrit dans les annales des Etats-Unis comme celui d’un officier déloyal envers lui-même, envers son pays, et envers Dieu. »
Le 15 juillet 1918, le verdict tombe : 5 ans de travaux forcés à Fort Leavenworth. Clement le dit à Bisogno : il n’est plus un officier, plus un citoyen, il ne peut même plus voter, il a tout perdu. A l’unanimité, les membres de la cour martiale, sous la présidence du colonel Bryan Conrad, signent une demande de clémence en faveur du capitaine condamné.
Le 13 août, la sentence est transmise à la révision, au quartier général du corps expéditionnaire. Il y est répondu : « Sentence cas capitaine Charles G. Clement, relevé de son commandement : confirmée. Il cesse d’être officier le 14 août 1918. Autorisé à s’engager s’il le désire, sinon envoyé à Blois, France, avant retour aux Etats-Unis. »
Autorisé à rejoindre le service de renseignement du 2e bataillon de la compagnie de commandement, en tant que 2e classe, Clement se distinguera, entre autres, près de Vandières, en septembre, en prenant une mitrailleuse après avoir rallié une quinzaine de traînards.
En octobre 1918, Bisogno et l’aumônier du régiment s’affairent à donner une sépulture aux hommes tombés près de Châtel-Chéhéry, dans les Ardennes après, comme le dit Bisogno, « quatre jours de carnage ». Sur la crête de Cornay, deux corps gisent dans un trou d’obus. L’un des deux est face contre terre, mais il a pour Bisogno quelque chose de familier. Il tient encore son pistolet, et a une grenade à portée de son autre main. Bisogno tourne le corps, et reconnaît Clement : son casque a été troué, il a été tué d’une balle en plein front. Il est mort depuis peu, son corps n’est pas encore rigide. Sa manche porte la ficelle de 1re classe, gagnée pour ses actions des 10 et 15 septembre.
Clement avait d'abord reçu pour mission d’éclairer la cote 223, ce dont il s’est acquitté de telle sorte que sa citation indiquerait plus tard : « au cours de cette dangereuse mission, a rassemblé des renseignements de grande valeur sur les positions ennemies. » Il s’est ensuite consacré aux liaisons entre les P.C. du bataillon et du régiment. Le 9 octobre, alors qu’il se trouvait aux côtés du lieutenant Hugh Cochran, il avait été abattu par un tireur d’élite.
Bisogno et l’aumônier du régiment placent Clement dans une couverture, puis le transportent au cimetière de Châtel-Chéhéry. Il a toujours au cou la plaque portant son grade de capitaine de la compagnie E du 328th infantry regiment. Dans un ultime hommage, c’est le grade que Bisogno et l’aumônier inscrivent sur sa croix.
La reconnaissance du sacrifice de Clement se limite à une citation régimentaire. Une demande de Distinguished Service Cross sera faite, sans succès, semble-t-il. Le général Lindsey, commandant la 164th brigade, écrira : « Il était un excellent soldat, et sa courageuse conduite donnait un splendide exemple à ses camarades. » Quant au colonel Conrad, président de la cour martiale ayant condamné Clement à 5 ans de travaux forcés, il a déclaré : « C’est une marque de haut courage moral. S’il avait demandé à être intégré à un régiment qui ignore son histoire, s’il y avait eu le moindre soupçon que sa demande de réintégration soit une manœuvre pour éviter l’emprisonnement, s’il avait invoqué l’épuisement pour excuser son enivrement, je n’aurais certainement pas demandé la clémence en sa faveur. Je sais que je ne l’aurais pas fait. A la lumière de la manière dont il s’est brillamment racheté, je suis d’avis que l’état de Géorgie devrait élever un monument à la mémoire du capitaine Charles G. Clement. »
Sa mère est venue sur sa tombe, à Romagne, en 1930, avec le pèlerinage des « Gold Star Mothers ». En 1938, une proposition au Congrès était en suspens, pour que Clement retrouve son grade de capitaine à titre posthume.
Parmi le très grand nombre de mots françaises utilisés en anglais, il en est deux qui viennent à l’esprit, concernant les vicissitudes de Charles Gaston Clement : « beau geste » et « panache ».
Une formule très émouvante nous a été léguée par Bisogno, qui s’est bien battu pour que Clement ne soit pas oublié : « L’homme le plus petit qu’il m’ait été donné de voir, l’homme le plus grand qu’il m’ait été donné de connaître pour ce qui est de l’âme. »
Si vous passez par Romagne-sous-Montfaucon, vous y verrez peut-être la tombe de ce « capitaine de 1re classe » :
https://images.findagrave.com/photos/20 ... 254994.jpg
Bien cordialement,
Eric Mansuy
1937 : Ernesto Bisogno, barbier new-yorkais, a soif de justice. Non pas pour lui, qui a combattu en France comme tant d’autres Américains, mais pour un ami qu’il y a laissé, Charles G[aston] Clement. Aussi est-ce pourquoi il ne manque jamais de conter à ses clients l’histoire de ce dernier, histoire qui va faire surface dans les pages de trois numéros de l’American Legion Magazine, début 1938. Surprenante, instructive, émouvante, elle a été détaillée dans sa thèse de doctorat, dont il a tiré le livre « The School of Hard Knocks. Combat Leadership in the American Expeditionary Forces », par le professeur Richard S. Faulkner. Elle vaut la peine d’être traduite.
Charles G. Clement fait ses humanités (Latin, Grec, Histoire…) à Mercer University (Macon, Géorgie), qu’il quitte avec le grade de Bachelor of Arts, avant d’enseigner à Americus, puis au lycée de garçons d’Atlanta. Il intègre les camps d’entraînement des officiers, Fort McPherson d’abord (en mai 1917), puis Camp Gordon, où il se distingue rapidement par son implication et son abnégation. Il y prend le commandement, en tant que capitaine, de la compagnie E du 328th infantry regiment (82nd division), en cours de formation. C’est également là qu’il fait la connaissance d’Ernesto Bisogno, déjà barbier, qui a en charge les officiers, sous-officiers et soldats de la compagnie de commandement du 328th infantry regiment. Lorsqu’ils se revoient, en France, c’est au moment où un lieutenant demande à Bisogno de couper les cheveux de Clement, avant la comparution de ce dernier devant une cour martiale.
Dans la nuit du 1er au 2 juillet 1918, le capitaine Clement ordonne à une patrouille d’entrer dans le no man’s land en vue d’y tendre une éventuelle embuscade. Il a l’intention d’accompagner cette patrouille, et en informe le sergent Cunningham. Ce dernier remarque immédiatement que son capitaine est sous l’emprise de l’alcool, et tente de l’en dissuader, aidé par un lieutenant. Rien n’y fait. La patrouille s’égrène, et peu de temps s’écoule avant que Cunningham ne ramène le capitaine Clement vers la tranchée de départ, considérant qu’il faisait tellement de bruit qu’il aurait été stupide de s’entêter. En conséquence, le chef de bataillon de Clement, le commandant Buxton, le fait traduire en cour martiale pour avoir enfreint l’article 85 du code militaire pour le temps de guerre : un officier trouvé ivre durant le service.
Dans son témoignage, Bisogno indique que le capitaine Clement n’était qu’un consommateur d’alcool très occasionnel, ne l’ayant vu boire du vin que deux ou trois fois, ne l’ayant jamais vu ivre.
En attendant sa comparution, Clement passe de l’aigreur à l’apaisement, sûr de pouvoir faire valoir son point de vue ; il reçoit de nombreuses visites d’officiers ; d’autres évoquent son cas chez le barbier, et surtout l’extrême sévérité qui l’a déjà suffisamment frappé.
Le jour de la comparution devant une cour martiale générale est arrivé. Bisogno coiffe et rase Clement avant qu’il ne s’y présente. Le capitaine, selon ses dires, est certain d’être acquitté, et impatient d’être confronté à ses accusateurs. Devant la cour, Clement reconnaît sa culpabilité : il dit s’abstenir généralement de boire – ce qu’approuvent les officiers qui viennent témoigner – et est incapable d’expliquer pourquoi il a consommé tant d’alcool durant la nuit de la patrouille (même s’il écrit à ses parents, en septembre 1918, qu’il s’est enivré, dans un abri, la fatigue lui ayant fait perdre ses repères). Il s’exprime alors ainsi – je traduis :
« Je suis coupable, mais si le verdict de la cour est la peine de mort, je n’ai rien à ajouter. S’il s’agit de me relever de mon commandement, en revanche, j’ai ceci à déclarer : dans le no man’s land, j’ai déshonoré ma personne, mon uniforme, et mon pays ; dans le no man’s land, je voudrais avoir la possibilité de me racheter, ne serait-ce qu’en partie. Relevez-moi de mon commandement, mais permettez-moi de rejoindre ma compagnie en tant que 2e classe, pour que j’y serve côte à côte avec les hommes que j’ai commandés, et pour y effectuer les missions les plus périlleuses. Et quand cette guerre aura pris fin, j’effectuerai quelque peine que ce soit dans un pénitencier.
Messieurs, je ne suis pas un buveur. J’ai été diplômé de l’université à 19 ans. Pendant 19 ans ½, je n’ai pas touché à l’alcool, et seulement extrêmement rarement ces 6 dernières années. Cette triste nuit, j’ai décidé de boire à une bouteille de Scotch qui m’a été offerte par deux capitaines anglais. Je l’avais amenée du secteur d’Abbeville 3 ou 4 semaines plus tôt. Environ 10 minutes plus tard, j’étais sur le départ, et j’en ai repris. J’étais sûr que je me sentirais tout à fait bien. J’en avais bu plus que je n’en avais l’intention. J’aurais mieux fait de ne pas y toucher. Je ne suis pas fier de moi.
Messieurs, pendant presque 26 ans, j’ai vécu sans entacher ma personne et mes actes. Quand le premier appel à une candidature d’officiers a été lancé, je me suis porté volontaire. A cette date, le 20 avril 1917, il n’y avait en moi ni perspective de récompense financière, ni crainte de la conscription. Je n’implore pas votre pardon. Messieurs, tout ce que je demande à cette cour, est d’être frappé de la peine maximale, ou d’être autorisé à servir jusqu’à la fin de la guerre en tant que soldat de 2e classe, avec la possibilité de me racheter aux yeux de ma compagnie, de mon peuple et de mon pays, afin que mon nom ne puisse être éternellement inscrit dans les annales des Etats-Unis comme celui d’un officier déloyal envers lui-même, envers son pays, et envers Dieu. »
Le 15 juillet 1918, le verdict tombe : 5 ans de travaux forcés à Fort Leavenworth. Clement le dit à Bisogno : il n’est plus un officier, plus un citoyen, il ne peut même plus voter, il a tout perdu. A l’unanimité, les membres de la cour martiale, sous la présidence du colonel Bryan Conrad, signent une demande de clémence en faveur du capitaine condamné.
Le 13 août, la sentence est transmise à la révision, au quartier général du corps expéditionnaire. Il y est répondu : « Sentence cas capitaine Charles G. Clement, relevé de son commandement : confirmée. Il cesse d’être officier le 14 août 1918. Autorisé à s’engager s’il le désire, sinon envoyé à Blois, France, avant retour aux Etats-Unis. »
Autorisé à rejoindre le service de renseignement du 2e bataillon de la compagnie de commandement, en tant que 2e classe, Clement se distinguera, entre autres, près de Vandières, en septembre, en prenant une mitrailleuse après avoir rallié une quinzaine de traînards.
En octobre 1918, Bisogno et l’aumônier du régiment s’affairent à donner une sépulture aux hommes tombés près de Châtel-Chéhéry, dans les Ardennes après, comme le dit Bisogno, « quatre jours de carnage ». Sur la crête de Cornay, deux corps gisent dans un trou d’obus. L’un des deux est face contre terre, mais il a pour Bisogno quelque chose de familier. Il tient encore son pistolet, et a une grenade à portée de son autre main. Bisogno tourne le corps, et reconnaît Clement : son casque a été troué, il a été tué d’une balle en plein front. Il est mort depuis peu, son corps n’est pas encore rigide. Sa manche porte la ficelle de 1re classe, gagnée pour ses actions des 10 et 15 septembre.
Clement avait d'abord reçu pour mission d’éclairer la cote 223, ce dont il s’est acquitté de telle sorte que sa citation indiquerait plus tard : « au cours de cette dangereuse mission, a rassemblé des renseignements de grande valeur sur les positions ennemies. » Il s’est ensuite consacré aux liaisons entre les P.C. du bataillon et du régiment. Le 9 octobre, alors qu’il se trouvait aux côtés du lieutenant Hugh Cochran, il avait été abattu par un tireur d’élite.
Bisogno et l’aumônier du régiment placent Clement dans une couverture, puis le transportent au cimetière de Châtel-Chéhéry. Il a toujours au cou la plaque portant son grade de capitaine de la compagnie E du 328th infantry regiment. Dans un ultime hommage, c’est le grade que Bisogno et l’aumônier inscrivent sur sa croix.
La reconnaissance du sacrifice de Clement se limite à une citation régimentaire. Une demande de Distinguished Service Cross sera faite, sans succès, semble-t-il. Le général Lindsey, commandant la 164th brigade, écrira : « Il était un excellent soldat, et sa courageuse conduite donnait un splendide exemple à ses camarades. » Quant au colonel Conrad, président de la cour martiale ayant condamné Clement à 5 ans de travaux forcés, il a déclaré : « C’est une marque de haut courage moral. S’il avait demandé à être intégré à un régiment qui ignore son histoire, s’il y avait eu le moindre soupçon que sa demande de réintégration soit une manœuvre pour éviter l’emprisonnement, s’il avait invoqué l’épuisement pour excuser son enivrement, je n’aurais certainement pas demandé la clémence en sa faveur. Je sais que je ne l’aurais pas fait. A la lumière de la manière dont il s’est brillamment racheté, je suis d’avis que l’état de Géorgie devrait élever un monument à la mémoire du capitaine Charles G. Clement. »
Sa mère est venue sur sa tombe, à Romagne, en 1930, avec le pèlerinage des « Gold Star Mothers ». En 1938, une proposition au Congrès était en suspens, pour que Clement retrouve son grade de capitaine à titre posthume.
Parmi le très grand nombre de mots françaises utilisés en anglais, il en est deux qui viennent à l’esprit, concernant les vicissitudes de Charles Gaston Clement : « beau geste » et « panache ».
Une formule très émouvante nous a été léguée par Bisogno, qui s’est bien battu pour que Clement ne soit pas oublié : « L’homme le plus petit qu’il m’ait été donné de voir, l’homme le plus grand qu’il m’ait été donné de connaître pour ce qui est de l’âme. »
Si vous passez par Romagne-sous-Montfaucon, vous y verrez peut-être la tombe de ce « capitaine de 1re classe » :
https://images.findagrave.com/photos/20 ... 254994.jpg
Bien cordialement,
Eric Mansuy