Frontenay sur Dive 14-18

Parcours individuels & récits de combattants
regis 79
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Re: Frontenay sur Dive 14-18

Message par regis 79 »

Il y a cent ans, jour pour jour, le 10 mars 1918……...

Ce 10 mars 1918, Joseph Depoys, mon grand-père, envoie une carte postale à sa petite amie. Il écrit:
" Dimanche 10 mars 1918
Ma chère Marie,
Je me fait* un plaisir de t'envoyer un peu de mes nouvelles
aujourd'hui vu que pour le moment tout se passe assez bien, nous sommes
sortis des lignes cette nuit sans nous y attendre, et c'est sans regret que nous
avons quitté le coin si fameux ou* il est arrivé ce que je t'es* annoncé
dernièrement.
Je ne vois rien de plus à ajouter aujourd'hui le temps est
très beau c'est en ces moments-là qu'on songe le plus aux amours.
Bonne santé je t'embrasse de loin.
Ton petit ami qui ne t'oublie pas Joseph.
"

Joseph Depoys vient de quitter Pffeterhouse et écrit de Massevaux, près de Thann, dans le Haut-Rhin actuel.
Mais c'est un court répit, car les bataillons du 346ème RI vont retourner dans la zone de Pffeterhouse début avril 1918.

J'ai beau chercher dans le JMO et dans les cartes postales récentes, je ne trouve pas ce qui est arrivé au grand-père Joseph dans ce coin si fameux!

* = orthographe d'origine


Ce même Jour, Joseph Drouet, né à Frontenay en 1877, le père d'Emilie, quitte le 66ème RI où il est classé "à l'intérieur" pour rejoindre le 22ème RIT au front.
L'historique du régiment précise que ce dernier voit ses deux bataillons partir sur deux directions diférentes. Dès lors, difficile de suivre le parcours exact de Joseph Drouet. Ce qui est sûr, c'est que les deux bataillons après quelques jours à effectuer des travaux du côté de Meaux (Seine-et-Marne) vont se retrouver à la bataille de Somme à partir du 24 mars 1918, puis au Chemin des Dames dans l'Aisne lors de l'offensive allemande du 27 mai.
Selon l'historique de cette unité toujours, le régiment est malmené, sans trop de précisions toutefois. Joseph Drouet est évacué malade le 03 juin 1918 et on perd ici sa trace dans un quelconque régiment, puisque le 12 juin suivant, "pour des nécessités impérieuses de réorganisation, le 22ème RIT est dissous".

On retrouve Joseph Drouet le 13 janvier 1919 au 35ème RIT avant sa démobilisation le 5 février suivant.

Je ne sais pas pourquoi il est évacué. Ce que je sais par contre, après avoir vu sa petite-fille Marie-Claire il y a 2 ans environ, c'est que Joseph Drouet est victime de gaz au moins une fois durant ses 3 mois au front. Pourtant, sa fiche matricule n'en parle pas.

Joseph Drouet est décédé en août 1939 à Frontenay. Il repose dans le cimetière communal, aux côtés de son épouse Alexida Couillebault qui l'y rejoint en mai 1956.
regis 79
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Re: Frontenay sur Dive 14-18

Message par regis 79 »

Il y a cent ans, jour pour jour, le 15 mars 1918……

Sans rapport avec le 15 mars 1918, un ami internaute, Robert Beaufrère, avec qui j'ai eu l'occasion d'aller en pélerinage, en 2014, à la Nécropole de Gorcy (54), devant la fosse commune où sont inhumés Damien Corval de Frontenay et son arrière-grand-oncle Emile Nail, m'apporte la précision suivante:

Bonjour Régis,
J'ai tenté une recherche  à la question posée sur le Forum 14 18 :
"J'ai beau chercher dans le JMO et dans les cartes postales récentes, je ne trouve pas ce qui est arrivé au grand-père Joseph dans ce coin si fameux!"
Je répondrais :
"Clémenceau est venu en personne à Pfetterhouse le 11 février 1918 faire "un saut dans le premier poste français du front".
Le « KM0 » est l’un des deux bouts du Front franco-allemand de 14-18, qui s’étend sur près de 750 km entre Pfetterhouse et Ostende-Nieuport en Belgique, sur la Mer du Nord.
"

J'ai regardé dans la liste des conseils de guerre, je n'ai pas trouvé d'évènement concernant le lieu, donc on peut exclure un événement tel que celui d'un conseil de guerre.
Il est tout à fait évident que les déplacements de Clémenceau étaient des plus secrets.

"Faute d'avoir été le théâtre de grandes batailles, le Kilomètre Zéro est longtemps oublié, éclipsé par le front des Vosges. Il reçoit toutefois la visite de Clémenceau en février 1918, un peu moins d'un an avant la fin de la guerre. C'est également ici que meurt le caporal Peugeot, le premier soldat français tué pendant la Grande Guerre, à l'âge de 21 ans."

"En Alsace, M. Clemenceau, président du Conseil et ministre de la Guerre » (10-11 février 1918), effectue une visite dans les territoires de l’Est de la France en compagnie des généraux de Boissoudy et Mordacq.
Il se rend dans les villes de la Croix (Territoire de Belfort), Masevaux, Thann et Dannemarie où une foule chaleureuse l’accueille.
"

"S’il est souvent tout près du front, c’est sans risques excessifs durant l’année 1918 car comme le révèle Marceau Doussot dans "Paysans d’une vie, soldats d’une guerre", les Allemands sont toujours avertis de l’endroit approximatif de ses déplacements.
Du fait de ces visites, ils arrêtent de bombarder les tranchées de l’endroit en question lorsqu’il vient.
Tuer un chef de gouvernement d’un tel âge aurait été ajouté par la propagande alliée à une longue liste de crimes et aurait certainement galvanisé le moral des Français, en leur fournissant un héros à venger.


Merci Robert pour ces informations. Même si ce n'est pas forcément l'événement dont veut parler le grand-père Joseph, cela fait partie de son vécu en 1918, puisqu'il reste plusieurs mois à Pfetterhouse et plus précisément le 11 février 1918.

D'autre part, en cherchant des informations sur le jour le plus meurtrier de l'Armée Française, j'ai découvert ce tableau, qui recense les pertes françaises au cours de toute la guerre 14/18. Que l'auteur veuille bien m'excuser de ne pas le citer, j'ai perdu ses références.

Inutile de rajouter un commentaire, on ne peut que rester bouche bée devant de tels chiffres!
On peut toutefois remarquer que l'Empire Allemand n'a pas fini de nuire, bien au contraire, car les prochains mois de 1918 vont encore être très sanglants......

1914
Août : 84 500 morts
Septembre : 99 000 morts
Octobre : 46 000 morts
Novembrre : 38 300 morts
Décembre : 33 300 morts
Pour 1914 : 301 100 morts (23.6%)

1915
Janvier : 25 400 morts
Février : 23 500 morts
Mars : 28 500 morts
Avril : 27 700 morts
Mai : 41 600 morts
Juin : 43 400 morts
Juillet : 22 400 morts
Août : 10 500 morts
Septembre : 59 700 morts
Octobre : 37 600 morts
Novembre : 7 800 morts
Décembre : 5 600 morts
Pour 1915 : 333 700 morts soit 26.2%

1916
Janvier : 7 900 morts
Février : 14 200 morts
Mars : 19 400 morts
Avril : 17 800 morts
Mai : 24 000 morts
Juin : 26 600 morts
Juillet : 30 500 morts
Août : 20 600 morts
Septembre : 35 100 morts
Octobre : 23 600 morts
Novembre : 13 600 morts
Décembre : 10 400 morts
Pour 1916 : 243 700 morts soit 19%

1917
Janvier : 5 400 morts
Février : 5 700 morts
Mars : 9 700 morts
Avril : 40 700 morts
Mai : 25 900 morts
Juin : 10 400 morts
Juillet : 11 500 morts
Août : 14 900 morts
Septembre : 10 800 morts
Octobre : 10 800 morts
Novembre : 4 700 morts
Décembre : 3 900 morts
Pour 1917 : 154 400 morts soit 12.1%

1918 (jusqu'au 11 Novembre inclus)
Janvier : 3 400 morts
Février : 4 100 morts
Mars : 9 000 morts
Avril : 17 500 morts
Mai : 20 500 morts
Juin : 22 200 morts
Juillet : 29 600 morts
Août : 29 000 morts
Septembre : 22 000 morts
Octobre : 37 400 morts
Novembre (jusqu'au 11.11 inclus) : 7 900 morts
Pour 1918 : 202 600 morts soit 15.9%

APRES LE 11 NOVEMBRE 1918: 26 300 morts soit 2.1%
regis 79
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Re: Frontenay sur Dive 14-18

Message par regis 79 »

Il y a cent ans et 4 jours le 13 mars 1918……

Voici une carte postale que je viens de classer à l'instant et que je livre donc avec quelques jours de retard. C'est une carte envoyée par Radégonde Depoys, épouse Messier, à son frère Joseph Depoys au front avec le 346ème RI en sud-Alsace, au kilomètre zéro, comme je l'ai appris il y a 2 jours par Robert Beaufrère.
Radégonde écrit:
"Frontenay 13 mars 1918,
Cher frère
Ta carte du 9 nous est parvenue ce matin
pas grand chose de nouveau a te dire non plus nous
Il a fait une belle journée nous nous sommes lancées
dans la vigne Berthe et moi à la Légarnie, il y fait beau
mais il n'y a pas longtemps. Ma mère et Ernest étaient
labourer en chéselle on met toujours le poulain qui est aimable
comme tout a ta prochaine perme on tachera de l'atteller
pour que tu le vois prendre car toi tu ne l'à encore pas vu
Demain tout le jour la foire de la mi-carème de Mirebeau
j'y irai peut être faire un tour par affaire. bonne santé
on t'embrasse bien fort ta soeur Radégonde
"

En 1918, Radégonde a 36 ans, Joseph 28 ans et la jeune soeur Berthe 20 ans. Je suppose que le "Ernest" en question est toujours Ernest Taupin, le père de Joseph, Joseph, soit toujours en permission à Frontenay-sur-Dive, soit de retour au front avec le 203ème RI en Italie, à Castelnuovo, près du lac de Garde, entre Brescia et Vérone.
Quand à la "Légarnie", j'ai beau connaître les lieuxdits du village, ça ne me dit rien du tout comme emplacement.
Quant à Chéselle qu'on écrit plutôt Chézelle, c'est sur la route de Poitiers-Thouars, direction Thouars. C'est à plus de 2 km de la maison de Marie-Louise, la mère de Joseph Depoys............
regis 79
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Re: Frontenay sur Dive 14-18

Message par regis 79 »

Il y a cent ans, jour pour jour, le 19 mars 1918……...

Ce 19 mars 1918, Hyacinthe Bironneau, né à Frontenay en 1893, toujours au front en Orient, envoie une carte postale à son cousin germain Joseph Depoys, mon grand-père. Il écrit:

"Klbasnica le 19.3.18
Cher cousin
En reponse de ton aimable lettre que je viens de recevoire
qui ma fait plaisir tu peux croire de te savoire toujours en
bonne santé, pour moi on ne faire mieux. Es
que tu est toujours en lignes quant est que se fourbi finira
Je viens également de recevoir des nouvels de Hubert qui
espère être en perm longue je devaient recevoire sa lettre
pour aujourd'hui cher cousin que puis je te raconté pas
grand chose la situation est toujours le même illisible
Ton cousin devoue qui t'embrasse Hyacinthe
"

Le cousin Hyacinthe ne s'embarrasse pas avec l'orthographe ou la ponctuation. Mais en ne faisant que de la phonétique, on arrive à comprendre ce qu'il écrit au grand-père Joseph.

Ce même 19 mars 1918, Raphaël Depoys, né à Frontenay en 1897, le fils d'Isidore et de Mélina Garnier, est en poste avec son régiment, le 265ème RI, dans l'Aisne, près de Monampteuil, entre Laon et Soissons.
L'aviation et l'artillerie allemande sont particulièrement actives depuis plusieurs jours, sans compter les embuscades et les patrouilles de reconnaissance.
Les tirs d'obus à gaz (ail, oignon brûlé, moutarde, ypérite, etc...) sont le presque quotidien des soldats provoquant des conjonctivites douloureuses et des vomissements.
Déjà les 16 et 17 mars, 94 soldats et sous-officiers sont évacués de la zone des combats, durement intoxiqués.
Ce 19 mars 1918, la journée est plus calme. On en profite pour évacuer 6 soldats légèrement intoxiqués. Parmi eux, gazé à Bruyères, à 10 km de Laon, figure Raphaël Depoys qui ne tardera pas à revenir au front.

La pression semble pourtant de moins en moins intense. Mais le 21 mars suivant, les troupes allemandes libérées par l'effrondrement de la Russie permettent d'enclencher la seconde bataille de la Somme.
Toutes les permissions sont suspendues dès le 24.
Je ne sais pas pendant combien de temps est évacué Raphaël Depoys, mais je sais qu'on le retrouve le 27 mai suivant, à la 3ème bataille du Chemin des Dames.

Raphaël Depoys et le 346ème RI vont subir ce jour-là un nouveau déluge de feu.........
regis 79
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Re: Frontenay sur Dive 14-18

Message par regis 79 »

Il y a cent ans, jour pour jour, le 21 mars 1918……...

Fait rare pour être évoqué:
Ce 21 mars 1918, Victor Prinet, né à Frontenay en 1874, en poste avec le 69ème RIT, se marie à Paris 1er avec Clémentine Aimée VINCENT.
C'est son second mariage, après celui de 1908 à Ouzilly (86) avec Mélanie Bironneau décédée aussi à Ouzilly le 07 octobre 1912.
Et ce 21 mars 1918, le 69ème RIT, où ne figure plus, de Frontenay, outre Victor Prinet, que Ernest Ridouard, né en ce lieu éponyme en 1873, se bat toujours près d'Oeuilly dans la Marne, à ravitailler les premières lignes des autres régiments et à entretenir les boyaux inondés par la pluie.
Ernest Ridouard quittera le 69ème RIT le 16 novembre 1918 et sera démobilisé le 07 janvier suivant ("parti en congé illimité à Frontenay")
Je ne lui connais pas de descendance, tout comme pour Victor Prinet, démobilisé le 26 janvier 1919 ("parti en congé illimité à Ouzilly").
regis 79
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Re: Frontenay sur Dive 14-18

Message par regis 79 »

Il y a cent ans, jour pour jour, le 23 mars 1918……...

Ce 23 mars 1918, Victorien Meunier, né à Frontenay en 1890, cousin issu-de-germain de ma grand-mère Marie Panier, est en poste avec le 131ème RI dans l'Aisne. Je l'avais évoqué la dernière fois en avril 1917.
Rescapé de la journée la plus meurtrière de l'Armée Française le 22 août 1914 à Signeult en Belgique, reconnu et cité par ses chefs, il prend régulièrement du galon et devient sergent le 1er juin 1917.

Selon le JMO, le régiment, après avoir participé à la bataille du Chemin des Dames en 1917, se trouve encore dans L'Aisne le 22 mars 1918, date à laquelle il est envoyé précipitamment dans la Région de Tergnier (Aisne toujours) pour consolider les positions de l'armée anglaise malmenée par l'attaque allemande de la Somme du 21 mars.

Ce 23 mars 1918, le début de l'attaque française est fixé à 7h00.
La mission de la 125ème DI dont dépend le 131ème RI est de repousser l'ennemi au-delà du canal de St Quentin. A 10h30, un bataillon a atteint son objectif, mais l'autre est cloué sur place à cause du brouillard. A 13h00, l'ennemi contre-attaque puissamment, profitant aussi du brouillard. Les pertes sont très élevées pour les 2 bataillons qui peinent à se reconstituer. Il n'existe plus de section, ni de compagnie du 131ème RI dans Viry-Noureuil (02).
Pour compléter son offensive, l'ennemi bombarde toujours les positions françaises, de nuit et même l'aviation allemande s'y met, profitant du clair de lune.
Les jours qui suivent ne sont pas meilleurs.
Le bilan est lourd pour 5 jours de combats qui font 19 tués, 110 blessés et 727 disparus.

Victorien Meunier fait partie des victimes. Sa fiche matricule le déclare "tué par balle le 23 mars 1918 à Viry-Noureuil".
Avec ce détail aussi précis, on suppose que son corps est retrouvé. Mais il m'est impossible de lui découvrir une sépulture, ni dans une nécropole nationale, ni dans sa ville d'adoption, Ste Maure de Touraine (37), où il est cependant inscrit au Monument aux Morts.
Sa nièce Huguette, une cousine lointaine donc, qui habite au Louroux (37), que j'ai rencontrée par deux fois récemment, me confirme ne pas savoir où est inhumé Victorien Meunier.
regis 79
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Re: Frontenay sur Dive 14-18

Message par regis 79 »

Il y a cent ans, jour pour jour, le 24 mars 1918……...

Ce 24 mars 1918, Joseph Depoys, mon grand-père, envoie une carte postale à sa chérie. Il écrit:
"Dimanche 24 mars 1918
Ma chère Marie
Aujourd'hui dimanche je te fait* parvenir quelques lignes tout
en songeant que c'est aujourd'hui la fête des Rameaux, ici il fait une
journée magnifique ce qui parait*-il est à considérer ce jour-là.
Nous on ne s'aperçoit pas de ce jour ou* on ne doit jamais manquer
la messe dans le but d'aller rendre visite a* ceux que nous regrettons nous faisons
du terrassement toute le journée.
J'ai reçu ta lettre du 18 et je viens a* mon tour te souhaiter une bonne
fête en honneur de tes 25 ans qui sont proches à ce coup-ci tu la coiffe* Ste Catherine
Enfin que veux-tu, espérons que le sort nous est réservé de pouvoir nous unir
un jour je l'espère avec joie
a* propos de mon cousin j'ai reçu de ses nouvelles hier il aurait fallu en
effet que je soit* en perme aussi pour faire la foire j'avais oublier* de t'en parler
Bons Baisers Joseph
"

Le grand-père Joseph a une écrirure très soignée, fait quelques fautes d'orthographe, mais le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il ne s'embarrasse pas trop avec la ponctuation!

Le km 0 de la ligne de front à Pfetterhouse en sud-Alsace est plutôt calme. Le 346ème RI et le grand-père Joseph font bien d'en profiter. La bataille de la Somme vient de commencer et le régiment va bientôt être sollicité. Quant au grand-père Joseph, il va prendre presque aussitôt une direction que j'ignorais, mais qui ne me surprend pas, après son court mais dur passage à Verdun en 1916 ...............
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Re: Frontenay sur Dive 14-18

Message par regis 79 »

Il y a cent ans, jour pour jour, le 29 mars 1918……...

Ce 29 mars 1918, Abel Mercier, né à St Jean de Sauves (86) en 1898, marié à Frontenay et Aimé Dubois, né à Frontenay en 1898, quittent le 49ème RA pour rejoindre le 214ème RA et non le 224ème RA comme je l'ai écrit dans mon message du 14 janvier dernier. Selon l'historique du régiment, 150 servants dont probablement Abel Mercier et Aimé Dubois et du nouveau matériel arrivent le lendemain dans cette unité, stationnée dans l'Oise .

Le 30 mars 1918 justement, l'Etat-Major sollicite le 214ème RA pour rejoindre immédiatement le front en Belgique, mais y renonce finalement, le régiment n'ayant pas le temps nécessaire d'organiser ses différentes batteries.
Ce n'est que partie remise puisque le 214ème part de l'Oise pour rejoindre le Kemmel près d'Ypres le 26 avril 1918.
Les combats durent du 1er au 29 mai 1918, sans relève. Le régiment enregistre 6 tués et 56 blessés.
Il tire 210 000 coups de canon, soit une moyenne de 7 500 par jour!
Et fait 300 prisonniers. Pas mal pour un régiment avec de nouvelles recrues.

Mais ce n'est pas fini, le régiment est renvoyé dans l'Oise en un temps record: 300 km parcouru en 32 heures, pour finalement l'y faire temporiser.
Après un mois d'attente, on envoie le 214ème RA dans la Marne, pour parer à une attaque allemande finalement déclenchée le 15 juillet 1918. En 3 semaines, le régiment compte 23 tués et 69 blessés. Il tire 58 000 obus.

On retrouve ensuite le 214ème RA dans l'Aisne et l'Oise, accompagnant les offensives des 3ème et 10ème Armées qui mènent à la victoire finale.
Voilà le parcours d'Abel Mercier et d'Aimé Dubois qui sont finalement démobilisés le 23 octobre 1919.
Abel Mercier se marie le 11 avril 1921 à Frontenay avec Germaine Guillon et aura 4 enfants (Rémy, Jean, Michel et Pierre).
Agriculteur, plusieurs fois conseiller municipal, puis adjoint au maire, il meurt le 17 août 1986 à Loudun (86).
Abel Mercier repose dans le cimetière communal aux côtés de son épouse décédée en 1944.

Aimé Dubois se marie à Hélène Laillault le 15 janvier 1921 à Loudun (86) et aura 3 enfants (Edith, Denise et Roger). Tenant une ferme à Primery près de Frontenay, il meurt le 09 juin 1962 à Saint Jean de Sauves (86).
regis 79
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Re: Frontenay sur Dive 14-18

Message par regis 79 »

Il y a cent ans, jour pour jour, le 30 mars 1918……...

J'ai évoqué André Valançon pour la dernière fois le 13 juin dernier. Né à Frontenay en 1896 et cousin germain de Marie Panier, ma grand-mère maternelle, André Valançon est à ce moment-là au front avec le 319ème RI à 20 km au sud de St Quentin (02).
Depuis cette date, l'historique du régiment précise qu'il n'a pas quitté l'Aisne: le Chemin des Dames et Malmaison d'octobre à novembre 1917, le Plateau de Californie à Craonne en décembre suivant, puis Braye-en-Laonnois de janvier à mars 1918.
le JMO rappelle que ce dernier secteur est relativement calme durant ce mois de mars 1918, lorsque soudainement le régiment reçoit l'ordre d'embarquer le 25, pour se retrouver le 27 suivant dans la Somme, à Ressons-sur-Matz.
On ne fait pas tout avec les véhicules. Les 30 derniers kilomètres sont réalisés à pied, on tire encore à bras les charettes à mitrailleuses.
Ordre est donné le 28 mars 1918 de se porter à Orvillers, dans l'Oise. Dans la nuit du 29 au 30, les 5 et 6èmes bataillons du 319ème RI montent en premières lignes, le 4ème bataillon et donc la 13ème compagnie d'André Valançon reste en réserve. Les 3 bataillons sont dispersés et ne sont plus sous contrôle direct du chef de corps.
A 7h30, une violente canonnade est déclenchée sur les positions françaises et des groupes ennemis déboulent assez rapidement. Les Français répliquent, mais 8 avions allemands interviennent et tirent sur le 6ème bataillon.
Les hommes des 5 et 6èmes bataillons tombent sous la mitraille adverse. Vers 9h30, les munitions viennent à manquer et le repli est amorcé. Après 1800 mètres de recul, ces deux bataillons arrivent à se regrouper et à barrer aux Allemands la route de Lille à Paris.
Et c'est au moment où les lignes françaises sont enfoncées que la 13ème Compagnie d'André Valançon est envoyée pour combler le vide entre ces deux mêmes bataillons où l'ennemi commence à s'infiltrer.
Il faut réduire les mitrailleuses ennemies et on en vient au corps à corps. La brèche est colmatée, l'attaque allemande est enrayée. Les boches perdent beaucoup d'hommes, les Français aussi.
Le bilan est lourd pour cette journée du 30 mars 1918: 20 tués, 104 blessés et 382 disparus!
A elle seule, la 13ème Compagnie compte 8 tués, 8 blessés et 15 disparus.
André Valançon fait partie des victimes. Son corps est retrouvé et il repose désormais à la Nécropole Nationale de Vignemont dans L'Oise, où je me suis rendu deux fois pour me recueillir sur sa tombe.

Souvent, lorsque je me rends au Pays Basque, je m'arrête à Mérignac(33) chez la nièce d'André Valançon, 93 ans en cette année 2018, Elle me parle avec ferveur de cet oncle qu'elle n'a pas connu, mais qu'elle n'oublie pas. Elle sait très bien où est inscrit son nom sur l'imposant Monument aux Morts de Bordeaux, dernière résidence d'André Valançon avant son départ à la guerre.
Le nom d'André Valançon est aussi inscrit sur celui de Frontenay, sa commune de naissance.
regis 79
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Re: Frontenay sur Dive 14-18

Message par regis 79 »

Il y a cent ans, jour pour jour, le 01 avril 1918……

Ce 01 avril 1918, Joseph Depoys, mon grand-père, envoie une carte postale à sa promise. Il écrit:
"Lundi 1er avril 1918
Ma chère Marie
A l'occasion des fêtes de Pâques je viens encore une fois te souhaiter le bonjour
je voulais t'écrire hier après avoir assisté a* la messe dans l'Eglise que je t'es* envoyé*
la vue en carte. Voici que dans l'après midi nous avons reçu l'ordre de se tenir prêt
a* partir j'ai donc suspendu l'écriture nous avons marché une partie de la nuit
et nous voici un peu a* l'arrière mais pour remonter en lignes ce soir même a* un autre
endroit. Qu'est-ce qu'on se tape comme ligne depuis quelques temps il y avait
juste 2 jours que nous étions au repos.
Enfin il y a encore de plus mal que nous c'est ce qu'il faut songer.
Les fêtes de Pâques ne se passent pas par le beau temps car il tombe
de l'eau presque continuellement depuis hier nous allons encore prendre quelque chose pour
monter ce soir. je t'écrirai de nouveau un de ces jours.
Bonne santé Celui qui ne t'oublie pas Joseph
"

* = écrit ainsi sur l'original

Ce 01 avril 1918, le JMO annonce que le régiment cantonne à Rechézy et ses environs, à 5 km du point 0 de la ligne de front. Et je suppose que l'église dont parle le grand-père Joseph est celle de Pfetterhouse, car c'est la seule que j'ai retrouvée en recto de carte postale envoyée par ses soins à la future grand-mère Marie.
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