les écrivains Morts p l France

Parcours individuels & récits de combattants
Rutilius
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Re: les écrivains Morts p l France

Message par Rutilius »


Bonjour Violette,
Bonjour à tous,

Jean BERNARD, dit Jean-Marc BERNARD

Né le 4 décembre 1881 à Valence (Drôme.), tué le 9 juillet 1915 à Souchez (Pas-de-Calais), Soldat de 2e classe au 97e Régiment d’infanterie, Matricule n° M 8230, Classe 1901, n° 3235 au recrutement de A… (Acte transcrit à Saint-Rambert d’Albon, Drôme., le 1er sept. 1915).

- Bulletin des écrivains, n° 11, Sept. 1915, p. 1 :

« JEAN-MARC BERNARD a été tué à Carency. Il a été coupé en deux par un obus, le 4 juillet. Légèrement blessé en mai, il était reparti au front vec une joie sincère. »

- Ibid., p. 1, en rubrique « L’hommage aux morts » :

« JEAN-MARC BERNARD

C’était Ariel. Il circule à travers l’œuvre de Shakespeare un être exquis : la générosité du cœur dans la raison ailée ; il s’appelle Bénédict, Horatio, Du Maine (1), York… ou l’étincelant Mercurtio, ou, femme virile, Béatrice, Viola, Portia, puis, sous sa vrai forme, celle d’esprit aérien, Obéron ou Ariel. Tel fut Jean-Marc Bernard. Il sentait, lui qui préparait un Remords de Caliban devant montrer nos bas élans réduits par la sagesse. – Nul ne l’approchâ qui pût résister à son charme. – Par ses Satires, ses Epigrammes (genre perdu par la grossièreté " calibanesque " des temps et par lui retrouvé), par l’essaim des Guêpes : époque dans ce renouveau des Lettres qui a précédé la Grande Guerre, par ses articles critiques, il rendit la noblesse aux polémiques : mettant " la violence au service de la raison " ; ses victimes mêmes se retiraient ravies. – Pour ses poèmes, Sub tegmine fagi, les Odellettes, etc., où il n’envisageait que " jeux ", ou études en vue de vastes œuvres entreprises ils lui assurèrent aussitôt sa place : au premier rang. Et, écrivain et citoyen complet, il trouvait loisir pour faire servir au bien de la cause politique ou littéraire ses dons et son savoir d’humaniste. – Aussi, quand se leva la Guerre libératrice, malgré que son âme brûlante consumât un corps frêle, n’eut-il de cesse qu’il y fût admis, au rang d’honneur, comme dans les Lettres. Faisant l’exercice dans les Alpes couvertes de neige et toussant affreusement, sa terreur était de ne pouvoir aller se battre. Il y alla, et dès son arrivée, un éclat d’obus le frappa, à Arras. " Les Dauphinois ont la tête solide " : après une convalescence écourtée, et, à la victoire de Carency, une balle l’étendit, cette fois pour toujours.

FAGUS. *

(1) Rencontre :
Du Maine est le nom de guerre de Raoul Monier, un camarade de Lettres et de combat. »

--------------------------------------------------------------------------------------------------------
* Georges Eugène FAILLET, dit FAGUS (Bruxelles, 1872 – Paris, 1933). En février 1916, Georges FAILLET servait en qualité de soldat de 2e classe à la 7e Compagnie du 222e Régiment d’infanterie territoriale, qui se trouvait alors dans le Secteur 5 (Source : Lettre autographe à Fernand DIVOIRE, Directeur du Bulletin des écrivains, datée du 17 février 1916).

******
Bien amicalement à vous,
Daniel.
Rutilius
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Re: les écrivains Morts p l France

Message par Rutilius »


Bonjour à tous,

Bref complément à propos de Jean-Marc BERNARD :

Bulletin des écrivains, n° 11, Sept. 1915, p. 3, en rubrique « Pour lire dans les tranchées ».

« Jean-Marc Bernard écrivait, il y a un mois, à l’un de nous :

" Le lieutenant commandant ma compagnie m’avait proposé pour une citation à l’ordre du jour : « A fait preuve d’une grande énergie et d’un grand courage ; est resté pendant 48 heures aux créneaux de première ligne, pendant un bombardement de grenades et a abattu plusieurs ennemis », mais le colonel n’a pas voulu retenir cette proposition, disant que je n’avais fait que mon devoir – en quoi il a raison. Bah ! la guerre n’est pas encore finie et j’aurai d’autres occasions de mériter une citation et la croix de guerre ! " »

Bien amicalement à vous,
Daniel.
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violette
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Re: les écrivains Morts p l France

Message par violette »

Bonjour à tous,

Bref complément à propos de Jean-Marc BERNARD :

Bulletin des écrivains, n° 11, Sept. 1915, p. 3, en rubrique « Pour lire dans les tranchées ».

« Jean-Marc Bernard écrivait, il y a un mois, à l’un de nous :

" Le lieutenant commandant ma compagnie m’avait proposé pour une citation à l’ordre du jour : « A fait preuve d’une grande énergie et d’un grand courage ; est resté pendant 48 heures aux créneaux de première ligne, pendant un bombardement de grenades et a abattu plusieurs ennemis », mais le colonel n’a pas voulu retenir cette proposition, disant que je n’avais fait que mon devoir – en quoi il a raison. Bah ! la guerre n’est pas encore finie et j’aurai d’autres occasions de mériter une citation et la croix de guerre ! " »

Bien amicalement à vous,
Daniel.
Bonsoir Daniel,
Bonsoir à tous,
Ce n'est pas que Jean-Marc Bernard soit une idée fixe (dommage qu'il ne soit plus édité, mais il se trouve en bouquiniste, ouf.) mais puisque vous y revenez, je me permets d'apporter ma pierre à l'édifice en faisant partager ce très beau texte qui fait echo aiux lignes précédentes :
DE PROFUNDIS

Du plus profond de la tranchée
Nous élevons les mains vers vous
Seigneur : Ayez pitié de nous
Et de notre âme desséchée !

Car plus encor que notre chair
Notre âme est lasse et sans courage.
Sur nous s'est abattu l'orage
Des eaux, de la flamme et du fer,

Vous nous voyez couverts de boue
Déchirés, hâves et rendus...
Mais nos cœurs, les avez-vous vus ?
Et faut-il, mon Dieu, qu'on l'avoue,

Nous sommes si privés d'espoir
La paix est toujours si lointaine
Que parfois nous savons à peine
Où se trouve notre devoir.

Éclairez-nous dans ce marasme
Réconfortez-nous et chassez
L'angoisse des cœurs harassés
Ah ! rendez-nous l'enthousiasme !

Mais aux morts, qui ont tous été
Couchés dans la glaise et le sable
Donnez le repos ineffable,
Seigneur ! ils l'ont bien mérité.

Jean-Marc Bernard

Cordialement,
Violette
Les lignes de Carco choisies comme citation sont tirées d'un poème écrit en mémoire de JM Bernard
"Voici que point ton dernier jour - Dépose ici toute espérance - Hélas, comme un fardeau trop lourd"
F Carco in La Bohème et mon coeur
Rutilius
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Re: les écrivains Morts p l France

Message par Rutilius »


Bonsoir Violette,
Bonsoir à tous,

Nouveau complément à propos de Jean-Marc Bernard :

Bulletin des écrivains, n° 12, Octobre 1915, p. 3, en rubrique « Pour lire dans les tranchées » :

« Jean-Marc Bernard avait donné à la librairie Larousse une édition populaire de Villon, qui doit paraître incessamment. Il avait établi le texte du Grand testament qui doit se publier, en édition de grand luxe, avec des illustrations de Bernard Naudin. Il avait en préparation un roman, sorte d’autobiographie intellectuelle et un livre de critique, le Repentir de Caliban. »

Bien amicalement à vous,
Daniel.
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Achache
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Re: les écrivains Morts p l France

Message par Achache »

Bonjour,
Merci, Violette, de nous avoir rappelé ce magnifique poème de Jean Marc Bernard, cet écrivain né dans la Drôme, belle terre de poésie, donc de déchirure...
Ce poème, Paul Galland l'avait publié, autrefois, dans son Histoire de la Grande Guerre 14-18 (Ed. Durassié & Cie 1974, p.250), avec cette présentation:
"Voici la pièce magistrale, le joyau de la littérature 1914-1918, "le plus beau chant que la guerre ait arraché aux hommes", a dit Dorgelès."
Que pourrait-on ajouter ?
Bien à vous,
Achache
Achache
Émouvante forêt, qu'avons-nous fait de toi ?
Un funèbre charnier, hanté par des fantômes.
M. BOIGEY/LAMBERT, La Forêt d'Argonne, 1915
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bruno17
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Re: les écrivains Morts p l France

Message par bruno17 »

Bonjour, Je ne me souviens plus s'il a déja été évoqué: Alain Fournier, qui n'écrivit qu'un livre, et quel livre: "Le grand Meaulnes".
"Lieutenant de réserve, il quitte son domicile parisien du 2 rue Cassini à Paris 14è (où il a écrit Le Grand Meaulnes) pour rejoindre en campagne dès la mobilisation le 288ème régiment d'infanterie. Une plaque apposée sur la façade de l'immeuble commémore le fait. On porta Fournier disparu au cours des combats des Éparges, près de Verdun, le 22 septembre 1914, dans les premiers affrontements de la Première Guerre mondiale. Cette disparition fit travailler l'imaginaire de beaucoup jusqu'à ce que son corps fût retrouvé et identifié en 1991 à quelques centaines de mètres de la Tranchée de Calonne. Il avait été enseveli dans une fosse commune creusée par l'armée allemande à Dommartin-la-Montagne, avec 20 autres soldats français originaires pour la plupart de la région de Mirande.
Il est inhumé l'année suivante dans le cimetière militaire de Saint-Rémy-la-Calonne.
Son nom figure sur les murs du Panthéon de Paris dans la liste des écrivains morts au champ d'honneur pendant la guerre 1914-1918".
Image
Tombe de Fournier Henri dit Alain-Fournier dans la nécropole nationale de Saint-Rémy-la-Calonne
(Extrait de Wikipedia)
Bruno BAVEREL - Romans: "La voiture de Vandier" - "Les aventures du lieutenant Maréchal" - "Le manuscrit de Magerøya ou le Tombeau des quatre ours" (Éditions des Indes Savantes)
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bruno17
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Re: les écrivains Morts p l France

Message par bruno17 »

Un écrivain bordelais inconnu : Georges Pancol (7 juin 1888, Villars-en-Pons, en Charente – 25 septembre 1915, en Champagne) est un poète français.
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Après des études secondaires à Bordeaux, Georges Pancol quitte sa région natale pour séjourner en Angleterre, puis fin 1910 s'installer à Paris. Il suit les cours de l'École des Sciences Morales et Politiques, puis s'inscrit pour le concours d'entrée à l'École Coloniale. Georges Pancol doit partir en novembre 1913 pour l'Indochine, où il est nommé élève-administrateur. Il est au Tonkin lorsque la Première Guerre mondiale éclate. Il aurait pu rester en Asie, loin des champs de bataille européens, mais il demande à rentrer en France, car il refuse de ne pas participer au sacrifice commun, de ne pas être là où tout se décide.
Son séjour sur le front ne sera en fait que de quelques mois. Lieutenant au 3ème régiment d’infanterie coloniale, il est tué en Champagne le 25 septembre 1915, d’une balle en plein front, lors d'un assaut dans le secteur de Ville-sur-Tourbe. Il sera enterré au cimetière militaire de Virginy. Deux jours avant sa mort, il écrivait à sa fiancée :

"La canonnade gronde partout : le temps est superbe et si doux.
Je n'ai aucun pressentiment funèbre; comment le pourrais-je, par un tel soleil ?
Et pourtant ?
Comme le passé est loin et comme l'avenir est proche !
Good bye, darling."

Ses poésies, son journal, ses lettres à sa fiancée ont été éditées pour la première fois, en 1923, préfacées par un de ses amis, Paul Tuffrau, qu'il avait connu au lycée de Bordeaux. Dans son livre sur les Œuvres complètes de Jean de la ville de Mirmont, Michel Suffran écrit : « Je sais ici, à Bordeaux, un frère oublié de Jean de la Ville, son contemporain absolu, dans la vie comme dans la mort, Georges Pancol, enseveli, lui aussi, dans une tranchée de boue et de sang. Un petit livre, plus qu’épuisé, presque mythique, enferme ses restes. Par un amer symbole, ce coffret de papier ne porte en couverture aucun nom d’auteur, aucun titre, tout juste le repère, anonyme, d’une sépulture militaire : Virginy, tombe 556. Et parmi les quelques traces, ce constat, qu’aurait pu accomplir Jean de la Ville :
« Tâtonner et ne rien saisir. Ne voir clair ni dans les autres ni dans soi même_ l’impénétrable, la désespérante solitude ! Cette journée n’est qu’un interminable rêve où je passe comme un automate. Et je me regarde souffrir sans curiosité »…
Bruno BAVEREL - Romans: "La voiture de Vandier" - "Les aventures du lieutenant Maréchal" - "Le manuscrit de Magerøya ou le Tombeau des quatre ours" (Éditions des Indes Savantes)
Lorraine
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Re: les écrivains Morts p l France

Message par Lorraine »

Bonsoir à Tous,

Passée au Panthéon la semaine dernière, voici quelques photos des écrivains.

Désolée, mais j'ai découvert ce site après ces photos et si j'avais su j'aurais pris toute la liste...! Je me suis focalisée sur Alain-Fournier et Joseph de Marliave et sur la plaque au sol

Mais ce n'est que partie remise puisque je compte y retourner d'ici quelques semaines.



Bravo pour ce site et ce forum passionnant !!!

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Lorraine
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ae80
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Message par ae80 »

Bonjour à tous,
Dans la liste ci-dessus figure :
ROBERT DROUIN - 1893 -1er octobre 1914 à Saint-Mard-les-Triots (Somme)
http://www.memoiredeshommes.sga.defense ... =434675892
A la sortie du village, une tombe individuelle située au bord de la route conduisant à Laucourt porte une plaque à son nom. Voici quelques photos de l'endroit.

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Cordialement
Eric
Cordialement
Eric ABADIE
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bruno17
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Re: les écrivains Morts p l France

Message par bruno17 »


Jean de la Ville de Mirmont pendant son service militaire.
mesimages/1757/Numeriser55.jpg
Bonsoir à tous,
Il faut que l'on sache ce que fut la belle conduite de Jean de La Ville devant Verneuil. Après sa mort, le 28 novembre, son capitaine, M. Bordes, l’a racontée dans une lettre émouvante à sa mère. C'est à lui qu'il convient de laisser ici la parole :

« Le 2 novembre, à l'aube, les Allemands attaquaient le saillant de Verneuil que défendait la rive droite de l'Aisne. Celle-ci franchie, c'était la Marne, 70 kilomètres de plaine sans défense. Tout leur effort se portait là à ce moment. J'avais vainement demandé du renfort. Nous étions très peu nombreux contre une avalanche de Boches. La préparation d'artillerie avait été si terrible que, dès les premières heures, les chefs étaient tous tombés. Je dis au sergent de Mirmont de prendre le commandement de la gauche de la tranchée, face au bois des Boules, position très importante parce que rien ne la protégeait et que, par là, on gagnait directement Verneuil et l'Aisne. Je me réservais la partie la plus longue, vers Beaune et Chivy, protégée par les grandes carrières. Le soir du 2, nous avions dû céder une grande partie du terrain; mais le sergent de Mirmont n'avait pas reculé d'un pouce. Resté seul avec une poignée d'hommes qu'il électrisait, il allait de l'un à l’autre, faisant face à tout, magnifique de sang-froid, terrible de vaillance, endiablée. Aussi les Boches ne l'ont pas manqué. Le 28 novembre, ils attaquaient cette partie irréductible des tranchées.
« Dans deux jours, votre fils allait être sous-lieutenant. J'en étais heureux pour lui, mais ennuyé pour moi qui le perdais. C'était un compagnon délicieux, un ami exquis, ne causant pas beaucoup mais si bien ! Il avait une intelligence claire et savait tant de choses ! Il était mon bras droit. Il nous a rendu des services inappréciables. Non seulement il avait un courage fantastique, mais, avec cela, une simplicité, un calme, une pondération inouïes : un vrai chef. Le commandant, qui l’avait observé, m'avait dit: « Vous avez là un homme remarquable et il n'est que sergent ! Dépêchez-vous d'en faire un officier ! Ah ! il a été sublime ! Oui, je le répète, Sublime


On a trouvé, dans le carnet de route d'un de ses compagnons rescapés du 2 novembre, cette phrase venant après un bref récit du combat : « Sans le courage et le sang-froid du sergent de Mirmont, nous étions tous tués et la mitrailleuse prise. »
C'est pour sa belle conduite à Verneuil, le 2 novembre, que la médaille militaire a été attribuée à sa mémoire par arrêté du 27 mai 1920, paru au Journal Officiel du 23 octobre 1920.

Extrait de:
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Bruno BAVEREL - Romans: "La voiture de Vandier" - "Les aventures du lieutenant Maréchal" - "Le manuscrit de Magerøya ou le Tombeau des quatre ours" (Éditions des Indes Savantes)
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