Langemarck 1914

Philippe THERON
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Re: Langemarck 1914

Message par Philippe THERON »

Bonsoir à tous,

Lors de l’attaque allemande sur Ypres fin octobre début novembre 1914, les bataillons français arrivés en renfort dont ceux du 16eme CA furent mis à disposition d’autres unités au fur et à mesure de leur arrivée et en fonction des points les plus chauds. Ce qui entraîna un mélange inévitable des troupes sur le terrain.
Quelqu’un possèderait-il une carte militaire de la région de Wydendreft à l’Ouest de Langemarck, de cette période qui me permettrait de localiser certains lieux évoqués dans les JMO et historiques (ferme Grutervacle, Bois carré, ruisseau St Jean, tranchée des territoriaux…) ?
Merci de me faire connaître s’il existe des ouvrages sur la bataille d’Ypres évoquant les troupes du 16eme CA ou des carnets de route de soldats ayant appartenus à ses unités pour cette période.
Un grand merci d’avance.
Cordialement.
Philippe
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martinez renaud
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Re: Langemarck 1914

Message par martinez renaud »

bonsoir
je possède pas mal de renseignements dur le 16ème CA (53ème RI oblige) en Belgique
de quoi avez vous besoin
cordialement
Renaud
Philippe THERON
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Re: Langemarck 1914

Message par Philippe THERON »

Salut Renaud,

Sympa de trouver un Catalan sur le forum. :P
En fait je recherche tout document concernant le régiment de mon GP paternel, le 96eme RI de Béziers sur la période août – novembre 1914. A part le JMO et l’historique je ne sais pas s’il existe des mémoires ou des carnets de routes de soldats ou d’officiers de ce régiment sur cette période. En tout cas je n’en ai pas trouvés.
Par extension donc, j’ai élargi mes recherches aux régiments frères du 16eme corps, et j’ai pu trouver grâce à certains carnets mis en ligne dans les différents sites mentionnés par les nombreux intervenants de ce forum quelques maigres mais précieux renseignements sur la mobilisation dans la ville de Béziers, sur les diverses étapes lors de la montée vers le front en chemin de fer, sur les sentiments des soldats provenant de la même région, sur la météorologie…
En dehors de la langue (patois et catalan sont 2 langues différentes, mais pas si éloignées l’une de l’autre puisqu’on se comprend) il y a beaucoup de choses communes que les soldats d’un même corps partageaient aux mêmes moments : la chaleur, la pluie, les marches harassantes, ou parfois comme en Lorraine (lu dans l’excellent livre de Jacques Didier : « Echec à Morhange ») les piqûres de moustiques (un comble pour des sudistes….).
Et puis qu’est ce qui ressemble plus à un vigneron … qu’un autre vigneron !
Manque à mes recherches finalement la partie militaire. Il est réellement dommage pour nous méridionaux que le SDH ne soit pas à Toulouse ou à Montpellier, mais ne soyons pas égoïstes, tous les intervenants du forum doivent également penser la même chose par rapport à leur lieu de résidence. Il aurait été plus judicieux de concentrer dans chaque région militaire les archives concernant les régiments issus de ses régions (enfin ceci est un autre sujet…)
Renaud, en dehors de la Belgique et de ma demande précise sur les combats autour de Langemarck où mon GP blessé fut fait prisonnier, je prendrais bien volontiers tout ce que vous aurez l’amabilité de me donner (n’étant pas un spécialiste des archives militaires je vous laisse juge de ce qui pourrait m’être utile : rapports sur combats ? Cartes ? ).
Et je lance un appel fraternel aux autres « forumeurs » qui détiendraient cartes ou récits ou qui pourraient m’indiquer des ouvrages (allez tant pis maintenant je suis lancé) sur :
Le combat de Rorbach (17 – 18 août 1914).
La bataille de Bonviller Jolivet (22 août 1914) où le 96 laissa sur le carreau 2800 hommes.
Le combat de Frambois (30 août 1914).
Les combats du bois de la Hazelle et de St Baussant (du 22 septembre au 11octobre 1914).
Sans oublier Langemarck (du 26 octobre au 17 novembre 1914).
Vous remerciant Renaud pour l’attention que vous avez portée à mon message initial et à votre aide que vous me proposez et que j’accepte bien volontier, sans oublier les autres personnes pour leurs éventuelles contributions ou renseignements.
Très cordialement
Philippe.
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Frederic S.
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Re: Langemarck 1914

Message par Frederic S. »

Bonsoir,

Je vous propose un détail d'un canevas de tir de novembre 1917. Il montre la région de Weidendreft (=Wydendreft ?).

La carte ne date pas de 1914, mais elle devrait, je l'espère, vous être utile.

Je peux sans problème élargir le périmètre du scan (mais pas vers le sud), il suffira de demander.

Image

Cordialement,

Frédéric S.
Philippe THERON
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Re: Langemarck 1914

Message par Philippe THERON »

Bonsoir Frédéric,

Merci de me faire partager votre document, et j’accepte bien volontier un élargissement du périmètre du scan surtout vers l’Est , car les troupes françaises venant de Langemarck devaient attaquer en direction de l’axe Wydendreft – Mangelaen.
Je ne sais pas si Langemarck se trouve éloigné de Wydendreft, mais si les 2 localités pouvaient apparaître sur le scan, ce serait super.
Encore merci.
Philippe
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Frederic S.
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Re: Langemarck 1914

Message par Frederic S. »

Voilà donc, comme promis, une vue élargie de la région où l'on voit bien les localités que vous évoquez (plan directeur au 1/20 000e).

N'hésitez pas si vous avez besoin d'une autre vue ou d'un scan de meilleure qualité.

Image

Cordialement,

Frédéric S.
Philippe THERON
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Re: Langemarck 1914

Message par Philippe THERON »

La carte avec la ferme Grutervacle au centre est parfaite.

Merci de vote aide Frédéric.

Bien cordialement, Philippe.
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tresignies
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Re: Langemarck 1914

Message par tresignies »

JMO du 96e Régiment d’Infanterie du 21 aout 1914 au 17 octobre 1914
2e Armée

31e DI Gl Vidal

61e Brigade Colonel DAUVIN

81e RI Cl AUBERT

96e RI Cl ROIG

62e Brigade Gl XARDEL

122e RI Cl HENRY

142e RI Cl LAMOLE

21 août

le régiment se met en route sur Lunéville. Arrivé à 19h00.

22 août

Bataille de Jolivet et Bonviller

Le Colonel est blessé à la jambe et est remplacé par le chef de Bataillon Rippol qui lui-meme est blessé.

Retraite désordonnée sur Lunéville puis sur Xermaménil ou les officiers ramenent les débris du régiment.

Officiers tués: 3

Blessés: 18

23 août

Reconstruction du 96e RI après les combats de Bonviller: 5 Cies reconstituées plus la CHR.

Départ à 19 heures pour prendre les cantonnements à Roville devant Bayon.

24 août

Le régiment au NE de Lorey se porte sur Romain par la ferme des Bois (5h).

7h00, le régiment s’arrête au nord de la cote 387, face à Romain, à l’ouest du chemin Domptail-belechamps.

18h, marche pour Romain, Méhoncourt sur Lunéville.

22h, Fusillade à la sortie NE du bois de Vaqquenat.

Le régiment cantonne à Méhoncourt

27 août

4h, le régiment est dirigé sur Haudonville

8h, au débouché du bois d’Haudonville, le 1er régiment subit une cannonade allemande.

14h30, le régiment reçoit l’ordre de renforcer l’avant garde et de marcher sur Gerbeviller.

Les autres compagnies restent au bivouac.

Arrivée d’un détachement venant du dépôt du régiment de Beziers.

30 août

6h30, ordre de se porter à la lisière nord du bois de la Reine.

7h30, offensive et prise de Frambois.

8h, contre-attaque allemande.

10h45, le régiment est dispersé dans le bois de la Reine puis se reforme en un à la route de Lunéville. Le colonel commandant la 61e brigade Dauvin est blessé.

16h30, le régiment se replie sur le bois d’Haudonville par les passages de la Mortagne (?).

2 blessés.

31 août

emplacement

le 1er bataillon est aux avants postes de combats à la cote 299 face à l’est à 2km 900 de Gerbeviller.

Les 2e et 3e bataillons stationnent au bois de Sensal.

1 septembre

Bivouac au bois de Sensal, les retranchements ont été exécutés par le 1er bataillon 3k au SE de Gerbeviller.

2 septembre

Même emplacement que la veille.

Le bataillon, en position retranché est relevé par 190 hommes du 296e RI et de la 23e Compagnie du 322e RI plus une section de mitrailleuses.

3 septembre

Même emplacement que la veille.

Le régiment reçoit en renfort la 24e Cie du 322e RI et une section de mitrailleuses.

4 septembre

Départ pour relever le 142e RI aux emplacements cote 287 la Hongrie, face à Guerbeviller.

La 1ere Cie et la CHR sont dirigées vers le bois de Guigubois (?).

19h30, nouveaux emplacements

1 bataillon à Haudonville, cote 276.

1 bataillon au bois de Rouard

1 bataillon à Moriviller.

5 septembre

Bivouac toute la nuit au bois de Rouard des Parts(?).

6 septembre

le régiment est maintenu sur ses positions au contact de l’ennemi.

Situation des bataillons:

1er bataillon

1 Cie à Haudonville

2 Cies à la cote 276

1 Cie à Chauffour

2e Bataillon

Bois des Rouards des Parts

1 Cie qui soutient l’artillerie lourde au sud du bois de la fosse.

3e Bataillon

2 Cies aux tranchées de la cote 285 de Chauffour

2 Cies à Borville à la disposition de l’état major.

Le régiment subit le tir de l’artillerie allemande, passe la Mortagne et occupe le bois de la Reine.

7 septembre

le 1er bataillon et la CHR cantonne à Moriviller puis le régiment se rassemble a la lisière sud du bois de Rouards des Parts.

8 septembre

La CHR et la 2e Cie cantonnent à la ferme de Grand mezam

9 septembre

même emplacement

Le chef de Bataillon Boussat du 2e Bton de chasseurs à pied est nommé Lt-Cl au 96e RI

10 septembre

11h15 l'ordre d'attaque est donné.

Pendant que le 81e RI attaque sur la rive droite de Mortagne (cote 295), le 96e RI attaque sur la rive gauche. Le 1er bataillon doit se maintenir sur la position.

Le 2e Bton et la section de mitrailleuses relèvent le bataillon du 81e RI à la lisière NE du bois d'Haudonville.

La moitié du 3e Bton est en réserve de division à Grand Mezam.

Pertes : 2 tués, 3 blessés.

11 septembre

situation au matin

1er Bton aux tranchées cote 285, Chauffour SO de Gerbéviller

2e Bton :

2 Cies à Haudonville

2 Cies à la lisiere N et E du bois de Haudonville

3e Bton

2 Cies et CHR à Grand Mezam

2 Cies à Bonviller

22h, ordre du jour du Généralissime portant à la connaissance des troupes une victoire remportée par l'armée du Nord sur les armées allemandes qui opèrent dans cette région.

16 septembre

le 3e Bton est détaché à Domjevin, conformément à l'ordre de la division qui prescrit de pousser un détachement mixte de contact ( 1 Bton, 1 Pton de cavalerie, 1 section d'artillerie). Itinéraire du Bton: Coincourt, Vaucourt, Embermenil, Ogéviller et Domjevin.

17 septembre

Départ de Montcel les Lunéville pour Marrey.

Le Bton de Domjevin cantonne à St Nicolas du Port et le rejoint le lendemain.

18 septembre

Les 1er et 2e Bton cantonne à la caserne Landremont.

Les 3e et CHR à la caserne Blandant.

19 et 20 septembre

Même emplacement.

21 septembre

Le 1er Bton cantonne à Donmartin, 2 Cies du 2 Bton à la Champagne, 2 Cies du 2e Bton et 3e Bton à Gondreville.

16h, le régiment reste en position de combat et se retranche

2 tués, 2 blessés.

23 septembre

Suite du combat, le régiment se maintient sur ses positions malgré de lourdes pertes subies.

24 septembre

5h, le régiment reprend l'attaque du bois de la Hazelle. Le 1er Bton du 81e attaque la lisiere ouest, les 1er et 2e Btons du 96e RI et le 2e Bton du 81e ayant comme direction les lisières sud du bois reliant les bois de la Hazelle et du bois de Jury.

Position à la nuit:

1er Bton :

n'a pas dépassé les lignes de tranchées à 500 m au sud du bois de Hazelle. Situation difficile, beaucoup d'hommes sont mis hors de combat.

2e Bton

Essaie d'arriver à la corne SO du bois de la Hazelle.

3e Bton

n'a pas pris pied à la corne SE du bois

Grosse perte du régiment ces derniers jours .

11 officiers tués ou blessés

25 septembre

progression du régiment vers l'avant de concert avec le 142e RI et le 81e RI.

le 1er Bton vers le bois de Junry.

Le 3e Bton prend possession du bois de la Hazelle.

26 septembre

Attaque de la 61e brigade en direction du bois de Saunard et de St Beaussant. Le premier objectif du 96e est le bois au SO de la route Flirey-Essey. C'est un échec. Une deuxième tentative échoue à 13h20 en raison du feu de l'artillerie.

27 septembre

Disposition du 96e:

1er Bton est en 1ere ligne avec pour objectif le bois de Remieres, le 2e Bton et une section de mitrailleuses appuient l'attaque du 1er Bton Le 3e Bton est en réserve au bois de la Hazelle.

La tentative sur le bois de Remiere échoue.

Situation à 18h00:

Le 1er Bton est à la lisiere NO du bois de Jury.

Le 2e Bton est à la lisiere E, une section de mitrailleuses à la corne N.

Le 3e Bton, la CHR et une section de mitrailleuse sont à la lisiere N du bois de la Hazelle.

28 septembre

Situation à 19h00

1er Bton : Bois de Remieres

Le 2e Bton suit le mouvement du 1er Bton avec une section de mitrailleuse.

3e Bton : 1 Cie à la lisière N du bois de Jury, 3 Cies à la lisière N du bois de la Hazelle.

29 septembre

L'offensive reprend dans les même conditions.

Situation du 96e à 17h00.

Le 3e Bton a relevé le 1er Bton en lisière N du bois de Remieres.

Le 2e Bton, une section de mitrailleuses ont relevé le 81e RI dans le bois de Jury.

Le 1er Bton et la CHR sont à la cote 266 (Route de Bernecourt-Beaumont).

30 septembre

Pertes du 22 au 30 septembre :

Hommes de troupe : 125 tués, 695 blessés, 230 disparus.

Le régiment reçoit l'ordre d'attaquer dans les mêmes conditions.

1 octobre

Le régiment est relevé dans la nuit et va au repos à Grosrouvres.

2 octobre

Le régiment relève le 81e RI

4 octobre

Attaque générale du CA, combinée avec l'attaque de la 64e DR à 8h00.

Le 96e est en 1ere ligne, il reçoit comme direction générale St Beaussant.

1er Bton : en position au bois de Remieres avec ses 4 Cies.

3e Bton : en position au bois de Jury avec 3 Cies.

2 Cies du 2e Bton sont en 2e ligne au bois de Remiere, les 2 autres en réserve à la corne O du bois du Jury.

Pertes du 1er au 4 octobre:

36 tués, 144 blessés, 39 disparus.

Le bataillon du bois de Remiere a réussi à prendre pied dans les tranchées ennemis et a fait 9 prisonniers

5 octobre

Le 96e est relevé par le 81e et rentre aux cantonnements de Grosrouvres.

Renfort de 500 hommes du dépôt de Béziers.

6 octobre

Le régiment est remplacé dans son secteur par le 286e et se dirige vers Avrinville par Royaumeix et Manoncourt.

12 octobre

Repos dans le cantonnement d'Avrainville

13 octobre

Le régiment reçoit l'ordre de la 61e Brigade de s'embarquer.

Départ du 2e Bton et du TC à Toul à 7h30.

Départ de l'EM, de la CHR et du 3e Bton à Toul à 10h30.

Le 1er Bton débarque à Mézy à 12h et arrive à Brécy à 17h45.

15 octobre

Le 2e Bton débarque à Château Thierry à 4h et arrive à Brécy à 9h.

Le 3e Bton, l'EM du régiment et la CHR arrivent à Château-Thierry à 6h et à Brécy à 10h30.

Le 1er Bton est mis en route sur Rozieres ou 3 Cies cantonnent ( une autre à Equivry?).

Situation au soir:

1er Bton et EM à Rozieres.

2e et 3e Bton à Brécy.

16 octobre

Ler Bton et l'EM vont mouvement vers St Pierre l'Aigle; les 2e et 3e Bton cantonnent à Buzancy.

17 octobre

le 1er Bton cantonne à Vieux-Moulin, les 2e et 3e Bton à Mortefontaine..

Dans la journée, le 2e Bton, les 9e et 10e Cies, la CHR embarquent à destination de Compiègne par auto-camions.





Historique du 96e Régiment d'Infanterie
Imprimerie Berger-Levrault

Le 6 août 1914, par une splendide journée, le 96e Régiment d'infanterie massé sur les Allées Paul-Riquet, à Béziers, saluait son Drapeau et écoutait avec une émotion patriotique mal contenue la harangue du colonel Roig ; celui-ci exprimait en termes vibrants l'enthousiasme d'un peuple qui se lève pour la cause sacrée.

Deux jours plus tard, le régiment faisait partie de la 31e D. I. du 16e C. A. débarquait à Mirécourt (Lorraine) et entrait dans l'armée de Castelnau (Ile.)

Prise de contact. - Rohrbach (17 août 1914).

Dès le lendemain, le 96e entreprend une série de. marches pénibles par une. chaleur accablante qui cause de nombreux cas d'insolation. Le 9, il est à Bayon, le 10 à Lunéville et s'établit, le soir même, en réserve sur la position Bonviller-Champel, face à la grande foret de Parroy. Au cours de la marche du 10, le général de Castelnau longeant notre colonne, adresse en patois languedocien, un salut amical ( « Adissias toutis ») à ceux qu’il espère conduire de victoire en victoire.

Le canon gronde. dans le lointain et de nombreux incendies projettent sur le ciel noir de grands reflets rouges.

Le 16 août le ruisseau frontière est franchi prés de Vaucourt et les poteaux striés de noir jetés à terre.

Quelle fierté d'appartenir à cette génération qui foule le sol des chères provinces volées à la France ! et avec quelle noble ardeur ces braves soldats courent au combats pour défendre la Patrie aussi traîtreusement attaquée qu'il y a un demi-siècle.

Le régiment, flanc-garde à gauche de la Division, marche sur Bisping, travers la contrée de Morhange, parsemée d'étang, de marécages et de bois. Les détachements ennemis qui, depuis la frontière , se replient sans combattre s'arrêtent à Rohrbach où le Régiment reçoit le baptême du feu.

Avec un élan irrésistible, deux bataillons s'élancent. à l'assaut du village, Drapeau déployé, clairons sonnant et, après un vif combat, chassent l'ennemi jusqu'aux lisières du bois de Londrefing. L'artillerie allemande, renseignée par des habitants hostiles, canonne violemment nos positions, mais ne peut nous chasser du village.

Une centaine d'hommes sont tombés et, avec eux, de nombreux officiers (Capitaine Laveissière, lieutenant Boluix tués ; commandant Leclerc capitaine Riols, capitaine Chamerois, lieutenant Minocci : blessés).

Le 19 août la VIe armée allemande comprenant de nombreuses troupes bavaroises, a terminé sa concentration et se précipite en avant. A notre gauche, le 15e C. A. ne peut contenir la poussée de forces très supérieures ; le 96e, non attaqué, reçoit l'ordre de se retirer sur Lunéville. Seuls, deux officiers blessés, intransportables sont abandonnés à Rohrbach (Capitaine Chamerois, lieutenant Minocci).



Bataille de Lunéville (22 août 1914).

Aprés une retraite pénible sous un soleil de plomb, sur des routes encombrées et poudreuses, le Régiment arrive à Lunéville, le 21 août, à 19 heures après avoir exécuté, sans manger une étape de 50 kilomètres. Céder à l'extrême fatigue, c'est tomber aux mains de l'ennemi et nul n'y consent…

Le 22, le Régiment est prêt à recevoir l'ennemi qui nous a poursuivis. A 4 heures, un Zeppelin survole Lunéville ; à huit heures, l'alerte est donnée ; à 9 heures, le 96e se porte à la rencontre de l'ennemi qui a refoulé nos avant-postes au sud de la forêt de Parroy (322e R. I.) et aborde Bonviller. Le danger est pressant ; aussi, sans même attendre l'appui de notre artillerie, deux bataillons, puis tout le régiment sont lancés à l'assaut du village à travers un terrain découvert, balayé par de nombreuses mitrailleuses et martelé par une puissante artillerie.

L'ennemi est un instant bousculé ; le village de Bonviller, en flammes, est enlevé à la baïonnette, puis reperdu ; à 16 heures, presque tous les officiers sont tombés. Le colonel Roig a donné à son Régiment le plus bel exemple de courage et d'abnégation. Blessé au pied, il se fait mettre en selle et avec le même calme, donne ses ordres et enflamme les cœurs. Les actes de bravoure sont légion sur cette ligne de tirailleurs qui fond à vue d'oeil. Quatre soldats de la 7e Cie, voyant un petit groupe d'allemands s'acharner sur leur chef de section, mortellement blessé, se précipitent, baïonnette haute, et assomment leurs adversaires.

A 17 heures, les débris glorieux du Régiment (6 officiers, 400 hommes), gagnent Bayon, point fixé, par l'ordre de retraite. Le sacrifice du 96e n'a pas été vain, car l'ennemi, maîtrisé par nos furieux assauts, arrête un instant sa poursuite et ne se risque dans la vieille cité Lorraine que longtemps après le départ des derniers groupes français.

Bataille de la Mortagne (25 août, 12 Septembre 1914)

Les 23 et 24 août, la réorganisation du régiment s'effectue à cinq compagnies au lieu de douze. De nouveaux chefs sont choisis dans la troupe et le 25, avant le jour, le 96e est prêt à rentrer dans la bataille.

Parti à huit heures de son bivouac de Lorey, il prend position sur l'éperon de Belchamp qui domine la plaine au sud de la Mortagne.

L'ennemi, grisé par le succès de sa grande offensive du 20 qu'il compte exploiter, pousse ses bataillons sur la Mortagne pour gagner la trouée de Charmes et séparer les deux armées de Lorraine (Dubail Iere et de Castelnau IIe).

Son artillerie lourde n'a pu suivre l'infanterie, et, surpris par la contre-offensive d'une armée qu'il croyait en déroute, l'ennemi s'arrête. La 32e DI le bouscule à Rozelieures dans la journée du 25. A 14 heures, le 96e RI reprend sa progression, talonne les Allemands en retraite et entre à Mehoncourt à 16 heures, y capturant quelques prisonniers.

Dans la soirée, la 61e brigade (81e et 96e) (colonel Dauvin) reçoit l'ordre de. poursuivre l'ennemi « à fond ».

Les deux régiments tombent dans une embuscade au débouché de la foret de Lamath. Le 96e, rentré à Mehoncourt dans la nuit reprend l'offensive le 26, bouscule l'ennemi puis, se dirigeant vers l'Est, atteint Morivillers, s'empare le 29 d'haudonville (faubourg de Gerbéviller) et borde la Mortagne

La coquette ville de Gerbéviller a été la proie des incendiaires malgré le dévouement de soeur Julie et les crimes, commis dans la petite cité sans défense, resteront la honte des régiments bavarois qui y rivalisèrent de cruauté (5e, 21e, 142e).

Le 29, au soir, deux compagnies passent la Mortagne sur des passerelles de fortune, fréquemment détruites par l'artillerie ennemie,

Nos patrouilles fouillent le bois de la reine qui est occupé dans la nuit. Le 30, les Allemands réagissent très violemment, sur le bois dont la possession est maintenue par de durs combats au cours desquels le colonel Dauvin, commandant la brigade, est, grièvement blessé.

De violents orages rendent plus âpres les conditions de la lutte ; nos braves soldats sont si boueux que le rouge et le bleu de leurs vêtements depuis longtemps ne se distinguent plus. Ramené sur la rive gauche de la Mortagne, le régiment harassé, sale, difficilement ravitaillé, se reforme à douze compagnies en incorporant un renfort de 1.000 hommes et quelques éléments du 322e R. l. dissous.

Reprenant le contact de l'ennemi, il accentue sa pression tantôt au bois de la Reine tantôt en avant du viaduc de la Hongrie Française.

Le 12 septembre, après onze jours de combats sanglants, le 96e reprend son mouvement en avant, sous les ordres du lieutenant-colonel Boussat.

La victoire de la Marne a ranimé tous les espoirs ; le Boche recule précipitamment.

Des reconnaissances, vigoureusement conduites, harcèlent les arrière-gardes ennemies, capturent quelques prisonniers et couvrent l'installation des avant-postes sur la Meurthe dont les ponts sont détruits. Au loin, une immense colonne de fumée, suivie d'une explosion formidable, marquent la destruction du fort de Manonviller que, dans sa rage impuissante, l'ennemi fait sauter en se retirant.

Du 13 au 16 septembre, par un travail ininterrompu, nos bataillons organisent la position conquise sur la rive N.-E. de la Meurthe et cantonnent à Moncel-les-Lunéville, chaleureusement accueillis par une population qui a vécu vingt-deux jours sous la botte prussienne.

Un ordre du jour félicite la IIe armée (Général de Castelnau), qui a sauvé Nancy « à force d'endurance et de bravoure ». Le 18, le 96e fait son entrée dans la capitale lorraine dont il occupe la caserne du sergent Blandan.

Après un excellent repos de trois jours, le 16e C. A. quitte l'Armée de Castelnau et est affecté à l'Armée Dubail.

Bataille de Woevre (22 septembre, 9 octobre 1914).

Le 21 septembre, au matin, notre Régiment coquet, plein d'entrain et solidement encadré, traverse en chantant la forêt de Haye, défile sous le fort Saint-Michel de Toul, puis se dirige vers le Nord par une pluie battante.

Les Allemands tentent de s'engouffrer dans le vide que les précédents combats ont créé entre les deux armées de Lorraine. Les avant-gardes ennemies se sont arrêtées et installées sur les hauteurs de Beaumont, Flirey, à la limite de portée des canons de la forteresse.

Le 22 septembre, deux compagnies attaquent le bois de la Hazelle, entouré d'un glacis meurtrier. Malgré de très lourdes pertes, malgré la fatigue, malgré la pluie, nos éléments progressent par bonds et se terrent à 100 mètres du bois.

La nuit suivante, deux bataillons tentent par surprise l'assaut de la position ennemie sur laquelle plane un silence imposant.

Le Boche, alerté, laisse approcher nos vagues serrées à moins de 30 mètres du bois puis déclanche le feu terrible de cinq mitrailleuses qui fauchent nos deux bataillons. Le Régiment reporté sur sa ligne de départ (route de Beaumont à Bernecourt), s'y réorganise et le 25 au matin, enlève dans un élan intrépide le bois de la Hazelle, puis le bois de Jury progressant de plus de 2 kilomètres et faisant des prisonniers.

Les 26 27 et 28, de nouveaux combats acharnés se déroulent pour la conquête du bois de Remiéres, définitivement pris le 28 au soir. De nombreux officiers sont tombés au cours des rudes journées précédentes et parmi eux : capitaines Galtier, Gineste (tués) ; Mondielli (blessé) ; lieutenants Léhona, Talagrand (tués) ; Kreft (blessé).

La lutte se poursuit sans répit les 29 et 30 septembre aux abords du bois de Remières, face à Saint-Baussant. Quelques progrès sont accomplis à l'aide de grenades à bracelet et de boucliers. Les éléments de tranchée se multiplient, se creusent, se relient, se recouvrent. La guerre paraît changer de forme, le champ de bataille change d'aspect. Dans les premiers jours d'octobre, quelques prisonniers de la garde sont capturés devant Saint-Baussant ; toutes les contre-attaques sont repoussées et lorsque, le 11 octobre, le 96e quitte la Woevre pour de nouveaux exploits, il lègue à ses successeurs un front solidement élargi et à la postérité, une belle page d'histoire.

" Yser " (26 octobre 15 novembre 1914).

Le Régiment embarqué à Toul, va prendre part à cette frénétique course à la mer qui se terminera par l'échec sanglant des Allemands au cours des trois phases de la grande bataille de l'Yser.

Le 96e débarqué à Mézy près de Château-Thierry se rend par étapes à Coeuvres où, pour la première fois, il est embarqué en autobus. Déposé sur la place du Château, à Compiègne, après quelques jours de repos, il gagne par étapes Etelfay, s'embarque le 25 octobre à midi, à Montdidier, sur des plate-formes sans impédimenta, débarque le 26 (4 heures) à Bailleul, est enlevé aussitôt par autobus et déposé à Ypres à huit heures. Une heure après, nos glorieux soldats, noircis dans les tunnels, trempés jusqu'aux os, las d'avoir trop chanté pour affermir la confiance des régions traversées, s'avancent sur la route de Pilkem pour arrêter les masses ennemies qui, libérées du siège d'Anvers, déferlent sur la Flandre méridionale pour la conquête des côtes françaises. Il faut lutter contre des forces trois fois supérieures (5 corps contre 13), L'heure est grave. Le général Foch, chargé de « coordonner» les efforts, à appelé des troupes d'élite. Deux bataillons du 96e passent sous les ordres du colonel de Mitry, commandant le Ile corps de cavalerie, et la 31e division est rattachée provisoirement au 9e corps. Le général d'Urbal commande le détachement d'armée qui deviendra bientôt la VIlle armée.

Dès le 26, à 16 heures, la lutte est engagée ; le Régiment attaque, sur la chaussée Bixschootte - Langemarck, dépasse la ligne tenue par la 10e division territoriale bretonne et progresse, pas à pas, sur un terrain coupé de haies, marécageux et violemment battu.

Il est assez difficile de suivre dans leurs multiples assauts nos unités engagées, souvent isolément, et avec la plus grande souplesse, afin de « faire du volume ».

Les bataillons, les compagnies, les sections sont jetés dans la mêlée, pour parer au plus pressé et y parant par l'attaque.

Le 29 octobre, le IIe bataillon s'empare du hameau de Wyddendreft et la 5e compagnie (lieutenant Soulet) capture une centaine de prisonniers. Ce succès a l'honneur du communiqué officiel. Le 30 octobre, l'ennemi déclanche une attaque massive, puissamment préparée par l'artillerie. Nos bataillons doivent défendre leur gain pied à pied, quelques fractions submergées, complètement dépourvues de munitions, tombent aux mains de l'ennemi.

Jusqu'au 6 novembre, la bataille fait rage. Les Allemands attaquent en formations serrées, et, malgré leurs pertes effroyables, renouvellent leurs assauts de jour et de nuit.

Leurs ordres prescrivent de passer coûte que coûte, notre consigne est de se faire tuer sur place plutôt que de céder un pouce de terrain.

Nul n'oubliera les souffrances endurées au cours de ces combats où se mêlaient la rageuse exaspération et la froide ténacité des adversaires sur un terrain boueux, dans des tranchées informes, s'inondant par le fonds comme une barque qui sombre. Nul n'oubliera non plus le martyre de ce lambeau de Belgique martelé par le vandalisme prussien.

Le 9 novembre, après une légère accalmie, tous les efforts des masses ennemies n'ont pu nous arracher que morceau par morceau, les gains des derniers jours d'octobre et au prix de quels sacrifices ! Nos pertes sont sévères et le 96e doit être retiré des lignes pour se réorganiser. A peine arrivé au repos, le 10 novembre, un point de la ligne faiblit et les unités squelettiques se précipitent aussitôt vers la brèche pour y soutenir les combats les plus acharnés des 11, 12, 13 et 14 Novembre.

Le 17, le Régiment est au repos à Boesinghe ; la première des trois phases de la grande bataille de l'Yser se termine par un échec sanglant pour l'ennemi, qui va porter ses prochains efforts au sud d'Ypres (La Lys - Armentières).

Après trois jours de repos, les bataillons du 96e relèvent le 20, prés de Hooge (château d'Harrenthage) une brigade anglaise. L'ennemi se prépare à une nouvelle ruée et s'acharne à la destruction de la coquette cité flamande, dont les richesses archéologique sont déjà émiettées.

La division toute entière défend le secteur de Kruystraat Zillebecke et entreprend son organisation sous des tirs violents d'artillerie. L'hiver s’annonce rigoureux et la plaine devient un immense bourbier.

Dans les premiers jours de décembre, le colonel Ganter remplace le lieutenant-colonel Boussat, puis, cède lui-même aussitôt la place au lieutenant-colonel Pouget, le chef qui, par son commandement éclairé, à la fois énergique et bienveillant, allait produire le 96e de Beauséjour, de la cote 193 et de Thiaumont.

A cette même époque, le 16e C.A passe sous les ordres du général Grossetti.

Le régiment occupe successivement divers secteurs autour d'Ypres (Dickebusch - Zillebecke - Voormezele) et supporte pendant deux mois d'hiver, sans repos appréciable, les rigueurs d'un secteur « marmité et détrempé ».

1915 - Champagne - Beauséjour (4 mars - 22 août 1915).

Le 1er février 1915, la division, relevée par des troupes anglaises, quitte la Belgique, laissant aux glorieux frères d'armes (20e C. A. - 9e C. A, fusiliers marins - troupes anglaises) le souvenir d'un régiment d'élite. Le général d'Urbal consacre un ordre du jour à la valeur des troupes qui ont défendu Ypres avec tant d'héroïsme.

Le 96e, acheminé sur Amiens, par étapes, y est embarqué le 22 à destination de la Champagne. Le front est stabilisé de la mer du Nord à la Suisse et l'effort de l'Allemagne va se porter sur le théâtre oriental.

Une offensive française est décidée, afin d'alléger le front Russe et retentir de nombreuses divisions ennemies.

Le 96e entre en ligne 4 mars, dans le secteur de Beauséjour, si improprement nommé, où coloniaux et marocains rivalisent de mordant.

L'attaque de la « Butte du Mesnil » est confiée à la 61e brigade (colonel Vernet) et c'est là un des plus « gros morceaux », de l'organisation ennemie. Les 6 et 7 mars les unités du Régiment attaquent avec acharnement les tranchées allemandes, mais il semble que nos efforts manquent de coordination et que la liaison avec notre artillerie soit imparfaite. L'ennemi, qui n'a pas été surpris, oppose à nos assauts fougueux mais dispersés, ses plus vaillantes troupes. Les résultats obtenus, bien que ne paraissant pas en rapport avec les sacrifices consentis, sont cependant appréciables. Les fentes nord du Ravin des Cuisines, le Bois du Mesnil sont en notre pouvoir et résistent aux furieuses contre-attaques de la Garde. Parmi tant d'actes de bravoure, chacun se souvient de la conduite admirable du Père Jésuite, l'abbé Soury-Lavergne, abordant toujours le premier, la tranchée à conquérir, ainsi que de la mort glorieuse du capitaine Boyat.

Le 8 mars un nouvel effort est tenté ; il se prolonge jusqu'au 15, sans grands résultats. Les troupes sont lasses, l'ennemi se renforce et prononce le 16 une contre-attaque impuissante.

Le 19, les soldats boueux de Beauséjour quittent les tranchées pour un repos bien gagné, mais nos successeurs surpris par une attaque soudaine ont légèrement faibli. Le 96e, rappelé, fait demi-tour et, le 20, rétablit la situation.

Le 22, le Régiment remonte à Beauséjour et entreprend l'organisation du terrain conquis. De nombreuses lignes blanches sillonnent bientôt ces collines arides et désolées de la Champagne, vraiment « pouilleuse ». Nos pertes quotidiennes sont encore élevées. L'ennemi, qui dispose d'une organisation plus avancée, d'observatoires dominants, et de nombreux engins de tranchée (« youyou » - « seau à « charbons » - « tortues » - « tuyaux de poële », etc...) ralentit nos travaux par un harcèlement continu.

Dès les premiers jours de mai, il inaugure un régime impressionnant de guerre de mine. Camouflets, contre-mines, luttes acharnées à la grenade pour la possession des enton­noirs, telles sont les occupations incessantes du Régiment qui ne se laisse pas « grignoter ».

Le 9 juin, le saillant de la cote 196 est envahi par l'ennemi à la faveur d'une surprise. Il en résulte les âpres combats des 10, 11, 12 juin, au cours desquels nos contre-attaques rétablissent presque intégralement la situation. Malgré les pertes journellement élevées, le Régiment poursuit jusqu'au 22 août l'aménagement du secteur.

Dans les premiers jours de septembre, le 96e est au repos à Dommartin-sur-Yèvre - Bussy-le-Repos - Vanneau-le-Chatel - Noirlieux, cantonnement agréables dans lesquels de gentilles fêtes agrémentent le séjour et rompent la sévérité d'un entraînement intensif.

Champagne (25 septembre - 8 octobre 1915).

Le 16e.CA est, en effet, destiné à participer à l'offensive de grand style que le commandement prépare sur un front étendu de Champagne avec des moyens d'une puissance exceptionnelle

Après l'enlèvement des premières positions ennemies (25 et 26 septembre) le Régiment est engagé le 27 sur la fameuse tranchée de la Vistule.

Par suite de l'inefficacité des tirs d'artillerie sur cette ligne à contre-pente, et de la présence de réseaux de barbelés défiant la cisaille, le superbe élan de nos unités est brisé. Arrêtés par des défenses accessoires intactes, mitraillés sans répit, nos tirailleurs dont presque tous les officiers sont tombés, s'accrochent au terrain et tentent un suprême effort, qui leur donne la route de Somme-Py à Tahure ; puis, un élément de la tranchée Vistule. De nombreux traits d'héroïsme pourraient être cités : Le capitaine Audrain est frappé à mort dans les réseaux ennemis qu'il veut personnellement reconnaître avant de lancer son bataillon à l'assaut. Son ordonnance, le soldat Azaïs au mépris de la plus violente fusillade, s'élance et ramène seul, le corps de son capitaine.

Le caporal Hénin blessé mortellement, refuse de se laisser emporter, exhorte ses hommes et meurt dans un dernier élan vers l'ennemi. Le sous-lieutenant Swaenepoel, mortellement atteint en avant de sa section, s'écrie en tombant : « Je vais mourir, ce n'est rien, vengez-moi ». De nombreux chefs sont hors de combat et parmi eux : les chefs de bataillon Comes, Chamoussey, Raynal (le futur défenseur du fort de Vaux), les capitaines Cougnenc, Berthod, Audrain, les lieutenants Daguerre, Chabanel, de la Barre.

Les attaques, reprises du 5 au 10 octobre apportent une nouvelle preuve de l'endurance et du dévouement de ce beau Régiment qui rivalise d'ardeur avec les meilleures troupes de France.

Le 31 octobre, le 96e, passé momentanément aux ordres de la 32e division, est désigné pour l'attaque de la Butte de Tahure devant laquelle les efforts précédents sont restés vains. En quelques heures, le Bois des Mures, situé au sommet de la Butte, est enlevé et l'ennemi chassé de sa position laisse entre nos mains plus de 100 prisonniers. C'est là que le commandant Genet, armé du fusil, coiffé de la calotte d'acier en usage part en tête de son bataillon la baïonnette haute et s'écrie : « Allez, braves gens, n'épargnez pas ces immondes boches ! ».

L'organisation du secteur est activée pendant le mois de novembre. Les rigueurs de l'hiver qui approche viennent ajouter à la désolation de ces collines blanchâtres, hérissées de petits bois déchiquetés par la mitraille. Les bois du Paon, de la Savate des Perdreaux resteront célèbres à la mémoire de ceux qui y subirent les gaz toxiques et les violents bombardements nocturnes. Aussi célèbres resteront les bourbiers profonds du Voussoir, du Trou-Bricot, de la Maison Forestière où s'enlisent attelages et caissons.

Du 7 au 24 décembre, le Régiment repousse quelques attaques locales et maintient ses positions.

Le 24, le 96e quitte enfin l'austère aridité et les horizons désertiques de cette Campagne « Pouilleuse » qui, durant dix mois, a été; le théâtre de ses exploits ; mais c'est avec une douloureuse émotion que le régiment défile, une dernière fois, devant les cimetières de Laval, de Saint-Jean, de Somme-Tourbe, où des centaines de camarades reposent en paix sous de modestes croix blanches avec cette simple et glorieuse épitaphe : « Mort. pour la France ».

1916.

Après quelques semaines de repos dans la région du nord d'Epernay, le 96e se rend par étapes au camp de Ville-en-Tardenois, exécute plusieurs manœuvres dirigées par le général Grossetti, fait un deuxième séjour aux environs d'Epernay (Hautviller - Romery), puis se dirige sur Fismes, où il cantonne dès le 22 février.

La bataille de Verdun est déchaînée et captive l'attention du monde sur un duel que le Konprinz croit décisif.

Le 96e est affecté, à la réserve de la Ve armée (général Franchet d'Espéray) et exécute quelques rocades sur la ligne Soissons-Reims sous une pluie glacée.

Le Bois des Buttes (20 - 30 avril 1916).

Le 14 mars, deux bataillons (1er et 2e) sont envoyés dans le secteur de Berry-au-Bac pour y constituer une réserve en arrière du bois des Buttes qu'un coup de main hardi a ravi à la 55e division. Le 3e bataillon exécute des travaux de défense dans la région de Paars.

Les unités, mises à la disposition de la 55e D I, participent les 25,26 et 27 avril à une puissante action sur le Bois des Buttes et occupent les secteurs de Beaumarais, du bois Franco-Boche que l'ennemi inonde de projectiles. Cinq officiers tués et 100 hommes hors de combat, telles sont les pertes de ces quelques journées d'invitation.

Le 20 mai, le Régiment rassemblé prend possession du secteur de Chassemy au confluent de l'Aisne et de la Vesle.

Nul n'oubliera le tranquille repos goûté jusqu'en première ligne ; sous ces, grands bois touffus, tapissés de muguet, de fraises et si peu battus.

Mais le 96e ne peut rester à l'écart de la gigantesque lutte qui doit immortaliser l'énergie du soldat de France. Relevé le 5 juillet par des territoriaux, le Régiment gagne le camp de Ville-en-Tardenois et en quelques semaines d'un entraînement bien dosé, sous la vigoureuse impulsion du colonel Pouget, retrouve sa forme des grands jours. Le 26 juillet il se présente impeccable à l'inspection du général Nivelle aux abords de la ferme des Marchines.

« Je compte sur vous » dit le général Pétain aux officiers rassemblés dans les ruines de Pretz-en-Argonne, et leurs regards fermes sont une éloquente réponse.

Verdun (31 juillet - 9 août 1916).

Le 30 juillet le 96e à les honneurs de la « voie sacrée » sur laquelle des camions poussiéreux emportent nos soldats confiants et résolus vers la plus grande mêlée de l'histoire. L'heure est critique. Autour de la citadelle se resserre l'étreinte du Boche qui a réussi à faire tomber la côte Froideterre.

Thiaumont, les abords de Fleury.

Le 31 juillet, le 1er bataillon, sous des barrages impressionnants, s'accroche à la côte Froideterre et, par trois fois, attaque la tranchée des trois arbres dans le ravin des Vignes. Les pertes sont sérieuses. Le 1er août, une contre-attaque ennemie s'empare par surprise de la redoute PC 139, où il capture un de nos petits groupes avec le lieutenant Laborde ; mais celui-ci, profitant du trouble causé par notre bombardement assourdissant assomme ses deux gardiens et rejoint nos lignes dans la journée.

Le 2 août après une préparation soignée, la 3e compagnie et une fraction de la 5e s'emparent de la fameuse tranchée qu'elle trouvent remplie de cadavres et y capturent une cinquantaine de prisonniers.

L'ardeur déployée par le 96e attire les félicitations du général d'Infreville, à la division duquel nous sommes momentanément rattachés.

Pendant la nuit, sous un feu d’enfer, un nouvel assaut est préparé. A l'aube du 3, il se déclenche irrésistible et donne à nos glorieux « Poilus » la ligne Dépot-Batterie, ainsi que de nombreux prisonniers. A 18 heures, la ligne ennemie est rompue, désorganisée, l'ouvrage de Thiaumont, un monceau de pierres émiettées, est enlevé par la 7e compagnie (capitaine Lemaire). La nuit, seule, arrête nos progrès.

Dès 20 heures, l'artillerie lourde allemande écrase avec une fureur croissante, le champ de bataille déjà chaotique, sur lequel nos tirailleurs sont tapis, par trois, par quatre, dans d'énormes trous d'obus.

Le 4, au petit jour, des troupes ennemies, fraîches, se précipitent sur nos trois bataillons épuisés qui se raidissent sous le choc et fusillent l'ennemi à bout portant. Le commandant Riols est tué, revolver au poing, le capitaine Bièche tombe sur ses pièces, mortellement atteint. Nos voisins de droite cèdent sous la formidable poussée et le 96e pour éviter un enveloppement certain, doit se reporter sur soit objectif primitif, la ligne Dépot-Batterie.

A droite, le village de Fleury, complètement rasé, est aux mains de l'ennemi ; à gauche, malgré l'avalanche de gros projectiles, les débris des 5e, 6e, 7e et 11e compagnies conservent sans faiblir Thiaumont et son saillant.

Le 4 au soir, une trentaine de survivants lèguent au 81e (3e bataillon) les glorieuses ruines de l'ouvrage, si brillamment conquises.

Dans la matinée du 8 août, le bombardement devient effroyable et Thiaumont succombe. De nombreux officiers sont tués au cours de ces combats acharnés : les commandants Faure, Riols ; les capitaines Coignard, Fournery ; les lieutenants Caubel, Le Coutour sont glorieusement tués ; les blessés ne se comptent plus.

Malgré les pertes les plus cruelles, le Régiment résiste à l'assaut furieux des masses ennemies que les mitrailleuses de l'adjudant Bonnafous fauchent sans arrêt. Grâce à l'action énergique de ce brave, l'attaque est rompue.

La tâche du 96e est terminée, Une des plus belles pages, de gloire vient de s'ajouter à son Livre d'or et le général Joffre en décorant notre Drapeau de la croix de guerre la résume ainsi :

« Régiment qui, sous les ordres du lieutenant-colonel Pouget, s'est constamment distingué depuis le début de la campagne par son allant et sa belle tenue eu toutes circonstances. A fait preuve, pendant la période du 2 au 4 août 1916, d'un mordant irrésistible et d'une ardeur persévérante en enlevant à la baïonnette deux positions successives bien organisées et fortement défendues, gagnant sur un front de 800 mètres, une profondeur de 1000 mètres de terrain, faisant en deux jours 500 prisonniers et prenant 8 mitrailleuses. »

(Ordre Général de la Ile Armée n° 358 du 25 août 1916.)

Argonne (6 septembre - 17 décembre 1916).

Recomplété à Villotte devant Saint Mihiel à l'aide de jeunes soldats et d'éléments du 322e R I, dissous pour la deuxième fois; le 96e peut affronter de nouvelles luttes.

Après le grand repos très apprécié de Villotte, les bataillons sont enlevés le 6 septembre en autobus et transportés en Argonne, où le secteur sévère de la Fille-Morte leur est confié. Pendant trois mois, le Régiment revit, dans la grande forêt cette guerre décevante de mines et de bombes, dont Beauséjour lui a laissé un mauvais souvenir,

La position avancée de la Fille-Morte semble n'avoir jamais été plantée d'arbres tant le sol y est bouleversé ; les photographies d avions donnent de ces lieux un véritable aspect lunaire.

Les épisodes de Champagnes se renouvellent journellement, mines aux entonnoirs de grandeur prodigieuse, camouflets, contre-mines, combats à la grenade.

Particulièrement violentes furent les mines des 25 septembre, 20 et 28 octobre, 10 novembre et 3 décembre 1916

Le 14 novembre, le caporal Fontan dont la bravoure et le dévouement sont déjà légendaires au Régiment, descend dans un entonnoir quelques minutes après l'explosion et, froidement, sous le nez du Boche, enlève successivement les cadavres de deux camarades à moitié ensevelis. Un tout jeune caporal, Catalifaud, s'offre spontanément pour retirer d'une galerie de mine deux sapeurs qui étouffent dans les gaz.

Le lieutenant-colonel Pouget, nommé au commandement d'une I.D, fait ses adieux au Régiment le 12 septembre. Quoique fiers de l'avancement qui échoit à leur chef, si estimé, tous les combattants du 96e regrettent le départ de celui qui, depuis vingt mois, a façonné et entretenu avec tant de soins, l'heureuse mentalité de son Régiment.

Vauquois - Hiver 1916 (17 décembre - 18 janvier).

Le 96e, relevé le 17 décembre, opère un glissement vers l'Est et occupe le secteur situé entre l'Aire et la forêt de Cheppy. L'activité des adversaires se borne à quelques combats de patrouilles et à une lutte acharnée contre l'eau et la boue qui envahissent nos tranchées, malgré les efforts les plus persévérant. Les abris, même légers, n'existent pour ainsi dire pas ; aussi, nos pionniers, dont l'activité est inlassable, se mettent ils à l'ouvrage le jour, la nuit par tous les temps. Grâce â l'intelligente et pratique impulsion de l'officier pionniers (Lieutenant Fornairon) il n'y a plus un homme sans abri lorsque le régiment quitte la vallée de l'Aire (18 janvier).

Cote 304 - Avocourt.

Après plusieurs étapes, le Régiment commandé par le colonel Bigeard, s'installe dans les baraques du Camp Davout près de Nixeville, pour quatre. jours de repos. Le froid est devenu si vif que les hommes luttent jour et nuit coutre l'engourdissement. Le thermomètre descend à 22 au-dessous de zéro le 4 février.

Ce même jour, un magistral coup de main, exécuté par un « Stosstruppen » de la garde prussienne, au sommet de la cote 304, anéantit complètement le bataillon chargé de la défense de cette célèbre colline. Le 96e, mandé aussitôt, accourt et occupe le secteur mouvementé (IIe et Ier bataillon). Le 3e bataillon est détaché au réduit d'Avocourt.

La température est si basse que le pain et le vin sont gelés. Des arbres éclatent comme frappés par la foudre, le sol se transforme en glace sur une profondeur de 40 centimètres.

Malgré les intempéries, les CM1 et CM2 restent vingt cinq jours en première ligne et poursuivent, au milieu des plus grandes difficultés, l'organisation de la défense par mitrailleuses.

Dans les derniers jours de février, un nouveau glissement vers l'Est amène le Régiment sur les pentes sud du Mort-Homme, dont les deux sommets sont, pour l'ennemi, des observatoires de premier ordre. Le secteur, au nom sinistre, est à peine habitable et le dégel transforme en ruisseaux de boue les tranchées ruinées où toute circulation est impossible de jour.

Deux mois après, grâce au travail méthodique de nos pionniers, aidés par quelques sapeurs du génie, nos corvées circulent à toute heure sans pertes appréciables.

Le colonel Bigeard s'est dépensé sans compter et ne peut résister aux fatigue de la mauvaise saison, il quitte à regret le 96e qu'il aimait tant et dont il avait si rapidement conquis l'estime et l'affection.

C'est à son successeur, le lieutenant-colonel Caré que reviendra, trois mois plus tard, l'Honneur de conduire le Régiment à son plus glorieux exploit sur ce même massif du Mort-Homme que nos soldats équipent sans relâche,

L'ennemi manifeste une certaine inquiétude et lance quelques Stosstruppen dans nos lignes. Leurs tentatives des 18, 28 et 31 mars et 9 juin sont victorieusement repoussées malgré une véritable débauche de " Minens » et d'obus. Le sous-lieutenant Bonnafous de la CM2, le mitrailleur de Verdun, poursuit avec un harcèlement féroce qui le rend populaire jusque dans les tranchées ennemies.

Le 28 juin, par une violente et soudaine attaque, précédée d'un furieux bombardement et appuyée par des lance-flammes, les Allemands s'emparent à notre gauche de la fameuse cote 304.

Le même soir, un détachement ennemi, après une courte préparation par engins de tranchée, pénètre dans notre ouvrage de la Croix-de-Fontenoy, enlève quelques hommes à l’une de nos compagnies et s'installe dans un de ses postes avancés. Par cinq fois, nos contre-attaques chassent l'ennemi qui, après chaque succès, écrase nos assaillants sous une pluie de bombes. Les pertes sont sérieuses, mais le combat ne prend fin que lorsque nos poilus ont marqué un succès en portant leur barrage à proximité du poste adverse. Au cours de cette opération le sergent Pla se précipite sans souci du danger dans l'ouvrage ennemi, enlève un prisonnier de vive force et le ramette dans nos lignes.

Conquête du Mort-Homme (20 août 1917).

Après dix mois d'occupation de ce secteur tourmenté, le 96e est transporté à Fains, véritable nid de verdure situé à quelques Kilomètres de Bar-le-Duc. Les distractions sportives, artistique et champêtres alternent judicieusement avec un entraînement progressif en vue d'une importante opération offensive.

Il n'est un secret pour personne que le régiment est désigné, ainsi que ses frères d'armes de la Division, pour la conquête du Mort-Homme, à laquelle chacun se prépare avec ardeur. Plusieurs répétition de l'attaque sont exécutées sur des terrains choisis et aménagés à l'image de celui qui sera notre réel objectif. L'état-major du 2e bataillon poussa la minutie de la préparation jusqu'à faire modeler en terre glaise (lieutenant Mittler) une miniature du Mort-Homme, sur laquelle toutes les tranchées ennemies et le fameux tunnel du Konprinz sont représentés. Pas un détail des différentes phases de l'attaque n'est livré au hasard.

Le 20 août, à 4h40, le 96e lance à l'assaut du massif avec la certitude du triomphe, ses trois bataillons échelonnés en profondeur. Malgré une violente contre-préparation par obus toxiques, le 2e bataillon qui est en tête, enflammé par l'exemple de son chef, le commandant Escarguel, dont la bravoure est légendaire à la division, submerge la position ennemie et s'empare du tunnel du Konprinz dont la sortie Nord s'est effondrée sous nos obus de 400. Des combats acharnés se déroulent pour la maîtrise des nombreuses sorties intermédiaires de l'immense galerie souterraine, farcie de Boches. Le sergent Méchin est glorieusement tué à t'attaque d'une de ces sorties. Le caporal Arnou, les adjudants Huet et Serrat soutiennent des corps à corps épiques à la grenade ou au pistolet.

Le capitaine Lacaze, les lieutenants Bordas-Larribe, Bonnaure, Bonnevialle, Bonnafous sont glorieusement tués.

Grâce à l'autorité et au sang-froid du commandant Escarguel la reddition de la garnison du tunnel s'effectue sans incident, livrant plus de 500 prisonniers.

Le 3e bataillon (commandant Pebay) à son tour, franchissent la ligne atteinte par le 2e, s'élance vers un objectif plus lointain et s'en empare après un combat mené avec ardeur par la compagnie Vancoppenolle. A midi, le 96e a progressé de deux kilomètres et capturé plus de 800 prisonniers, ainsi qu'un matériel considérable. Il a enlevé à l'ennemi tout le massif du Mort-Homme avec ses observatoires, interdisant ainsi toute tentative d'un nouvel investissement de Verdun par l'ouest.

Les Allemands, battus, tentent en vain quelques contre-attaques avec les débris de plusieurs régiments, mais nos braves soldats, enthousiasmés par leur éclatante victoire, conservent aisément le terrain conquis.

Sur le champ de bataille même, des récompenses sont remises aux glorieux combattants ; Le commandant Escarguel, déjà officier de la Légion d'honneur pour faits de guerre, reçoit la palme, le capitaine Cullier et le lieutenant Vancoppenolle sont faits chevaliers de la Légion d'honneur, l'adjudant Serrat, le sergent Cancilliéri, le soldat Héral reçoivent la Médaille militaire.

Pour sa brillante conduite dans la bataille, le 96e est cité à l'Ordre de l'Armée avec le motif suivant :

« Le 96e régiment d'infanterie, le 20 août 1917, sous les ordres de son vaillant chef, le lieutenant-colonel Caré, a enlevé dans un élan irrésistible tous les objectifs qui lui étaient assignés, sur une profondeur de 2 kilomètres emportant de haute lutte des positions extrêmement fortes et s'emparant d'un important tunnel qui servait de place d'Armes à son adversaire ; a brisé, le soir, sur les positions conquises, deux violentes contre-attaques de l'ennemi. A fait au cours de cette opération prés de 900 prisonniers dont 13 officiers, pris 7 minenwerfers, 28 mitrailleuses et un matériel de guerre considérable. »

(Ordre Général de la IIe Armée n° 960 du 20 septembre 1917.)

Le 30 le Régiment relevé, est transporté dans ses anciens cantonnement à Fains, où lui est réservé l'accueil le plus chaleureux.

Peu de jours après, le 96e embarque à Revigny (5 septembre) à destination de Lure. Au cours de l'embarquement nocturne, des avions ennemis bombardent le train du 3ebataillon, à la faveur d'un brillant clair de lune, tuant ou blessant 15 hommes et 30 chevaux.

Le 26 septembre, devant la division rassemblée, le 96e reçoit du général Pétain la fourragère aux couleurs de la Croix de guerre, juste récompense de sa vaillance et de ses efforts. A l'issue de cette cérémonie, le généralissime accroît encore le tribut d'honneur offert au drapeau du Régiment en déclarant aux officiers réunis « qu'il tient la division pour une des meilleures de l'armée française ».

Alsace (9 octobre 1917 - 27 mars 1918).

Le 5 octobre, le Régiment quitte ses agréables cantonnements de Gouhenans, des Aynans et se dirige par étapes vers l'Alsace. Le 9, il traverse l'ancienne frontière sur la route de Rougemont à Massevaux. Un mois de repos a suffi pour rendre aux vainqueurs du Mort-Homme leur forme et leur entrain,

D'ailleurs la quiétude des secteurs d'Aspach, de Michelbach, de Guewenheim, de Burnhaupt qu'occupent successivement nos bataillons n'est que rarement troublée par un bombardement ou un coup de main. Les journées du 28 novembre au 5 décembre sont cependant mouvementées ; l'ennemi, craignant une attaque sur le Kahlberg, exécute de violents tirs de contre-préparation qui causent de nombreux dégâts mais peu de pertes.

Néanmoins cette alerte a fait ressortir l'insuffisance de l'organisation de cette partie du front d'Alsace et, dès le 15 décembre, tous les effectifs disponibles complètent les deuxièmes lignes et ébauchent une position d'arrêt.

Les jours de repos passés a Ramersmatt, Sentheim, Soppe, les visites à Thann, Massevaux, les excursions du Rossberg, celle du lac de Sewen dans la vallée de la Doller, les tonalités ravissantes des grands bois de sapins, semés de taches claires ou dorées, resteront pour nous un des plus agréables souvenirs de la guerre.

Après quelques semaines de repos à Giromagny, le Régiment embarque le 31 mars à Champagney, près de Belfort.

Bataille des Monts de Flandre (29 avril – 15 mai 1918). Depuis dix jours, la grande offensive ennemie de printemps est déclenchée. Les Allemands, débarrassés du théâtre oriental par la défection russe, ont rassemblé une masse de divisions solidement entraînées pendant l'hiver et les lancent furieusement à l'attaque au point de jonction des armées françaises et britanniques, en direction de Compiègne.

Ils espèrent un succès décisif et la presse d'Outre-Rhin affirme à grand fracas que rien ne saurait arrêter les soldats d'Hindenburg, ni sauver la France du désastre.

Le 1er avril, le 96e débarqué à Estrées-Saint-Denis (Oise), fait partie du GAR, (groupe d'armées de réserve). Après un succès important sur la droite des armées anglaises (Ve Armée), la poussée allemande, endiguée, puis maîtrisée, se transporte plus au nord et s'exerce en direction d'Amiens, même échec. Nouvel effort vers Bailleul, sans plus de résultat. Le 96e a suivi parallèlement au front le déplacement des masses ennemies qui paraissent gagner la Flandre méridionale.

Le 13 avril, le Régiment quitte Liancourt, traverse au milieu d'un flot de camions Beauvais, Amiens, Fruges, Arques, et débarque, non loin de Cassel, en arrière de la ligne, des Monts, à l'assaut desquels se ruent les hordes du grand duc Albert.

La situation est grave ; le mont Kemmel, sentinelle avancée, de la ligne des Monts (Mont Sharpenberg, Mont Rouge, Mont Vidaigne, Mont Noir, Mont des Cats), perdu le 25 avril, devient pour l'ennemi un observatoire précieux.

Arrivé le 28, alerté le 29 au matin, le 96e reçoit à midi l'ordre de « contre-attaquer l'ennemi qui a pris pied sur les pentes des Monts Rouge et Vidaigne », Au cours de la marche d'approche, l'ordre d'attaque est remplacé par un ordre de relève pour la nuit suivante, prescrivant de « profiter de l'opération pour élargir le front ».

Arrivés à minuit sur un terrain complètement inconnu, dépourvu de toute organisation et dont les défenseurs ont été à peu prés anéantis, les 1er et 2e Bataillons (commandants Clavet et Latil) attaquent droit devant eux à 2 heures. Grâce à l'exemple magnifique des chefs et à l'ardeur de leurs hommes, la route Bailleul Locre est dépassée.

La compagnie Haon enlève de haute lutte trois mitrailleuses et capture 20 prisonniers, le soldat Maurette, abordé par un groupe de quatre Allemands, en tue un et force les trois autres à rejoindre nos lignes. Au cours de ces combats acharnés, se distinguent particulièrement le sous-lieutenant Huchard, le lieutenant Dufour, le sergent Olivier.

Malgré trois attaques successives conduites avec le même entrain, sous un pilonnage indescriptible, le bois Long ne peut être atteint et les pertes sont particulièrement lourdes.

La plupart des officiers sont hors de combat (capitaine Lesseur, lieutenant Dufour, capitaine Vigneron (blessés) ; lieutenant Girardel (tué) ; lieutenant Régnier (tué) ; lieutenant Peyre, capitaine Haon, lieutenant Thibault (blessés) ; Desprès (tué).

Au dire des combattants qui les ont vécues, ces journées comptent parmi les plus terribles de la Grande Guerre,

Momentanément relevé le 3 mai de la 1ere ligne, le Régiment la réoccupe le 12 et réussit par un travail acharné, au prix de lourdes pertes, à ébaucher l'organisation défensive des Monts que la ténacité de nos glorieux « poilus » a interdits à l'ennemi. Une fois de plus, le 96e s'est montré digne de son brillant passé.

Relevé le 16 mai, le Régiment est transporté à Gravelines dont la paisible population fête généreusement ceux qui ont si noblement défendu ses foyers. Dix jours plus tard, les unités transportées en Lorraine, par voie ferrée, débarquent à Einvaux, et, après quelques jours de repos sur les bords de la Meurthe (Damelevières - Rosieres-en-Salines) vont occuper le secteur d'Hoeville, face à la grande forêt de Bezange.

Lorraine (4 juin - 21 août 1918).

La Loutre Noire, aux rives marécageuses, sépare nos ligues des avant-postes ennemis. L'existence est douce dans ce secteur calme, et presque entièrement recouvert par les forêts de Ranzey et de Sainte-Marie. La présence de ces grands bois facilite les travaux d'organisation de la positon.

Les bataillons en ligne manifestent cependant leur esprit offensif par des coups de main journaliers. De jeunes officiers se distinguent à la tête de ces opérations hardies et parmi eux les lieutenants de France, Baugier, Dubourdieu, Catalifaud.

Au repos, non loin des lignes, à Réméréville et à Hoéville, de petites séances cinématographiques ou théâtrales rompent la monotonie de nos occupations.

L'offensive ennemie du 15 juillet est magistralement enrayée et déjà, le général Foch esquisse une riposte qui permet tous les espoirs. Depuis le 8 août les Allemands battus chancellent et perdent du terrain.

Ailette (Plateau de Moyembrie).

Relevé le 21 août, le 96e, embarqué, à Einvaux sur le théâtre même de ses premiers exploits, est transporté à Nanteuil-le-Haudouin, puis, traversant le champ de bataille encore tout fumant de la contre-offensive victorieuse (Villers-Cotterets - Coeuvres – Vic-sur-Aisne) gagne le plateau de Nouvron-Vingré. Déposé en plein champ, le Régiment se rassemble aux abords des ruines du village, dont l'emplacement n'est plus indiqué que par une grande tache blanchâtre, et après une petite étape, bivouaque à Morsain.

Aux payages verdoyants de la Lorraine succède, sans transition, l'étendue aride des Plateaux tabulaires du Soissonnais, coupés de failles profondes aux parois abruptes et seules garnies de verdure.

Le 4 septembre la division, qui fait partie de l'Armée Mangin (Xe Armée), relève la division marocaine vers Crécy-au-Mont. Le 96e, placé en réserve, opère de nombreuses translations en arrière de la ligne de feu.

Le 26 septembre, le Régiment prend possession du secteur de Moyenbrie, à l'est des ruines de Coucy-le-Château, face au massif boisé de Saint-Gobain, la puissante charnière de la ligne Hindenburg.

Bousculé en Champagne, enfoncé dans la Somme, l'ennemi devra abandonner bientôt devant nous la haute forêt de Coucy si puissamment organisée. Afin de suivre minute par minute les intentions de nos adversaires, de fréquentes et téméraires incursions sont exécutées, parfois en plein jour, sur le front du régiment devant Bassole-Aulers, Aulers, La Croix-de-Bois. Le 28 septembre, le lieutenant Plaisir réussit une très belle opération capturant 20 prisonniers et une mitrailleuses.

Le général Mangin félicite le régiment pour l'activité qu'il déploie dans son secteur.

Le 12 octobre, pressé de tout part, l'ennemi lâche pied, talonné par nos bataillons qui se lancent à sa poursuite et traversent de nuit la foret de Saint-Gobain au milieu des pires difficultés. Les Allemands ont méthodiquement préparé Lleur retraite. Les routes, coupées par d'énormes entonnoirs de mine, sont de plus, obstruées en pleine forêt par de grands arbres soigneusement abattus. Des pièges de toute nature sont semés sous nos pas (obus amorcés, mines à retard, effondrements, etc..). Surmontant tous les obstacles, le Régiment débouche de la foret de Saint-Gobain à l'aube du 13 et découvre la vaste plaine de Laon.

A 11 heures, le chef de bataillon Escarguel, officier supérieur adjoint au chef de corps, guidant les éclaireurs du 3e bataillon, entre à leur tête dans Crépy-en-Laonnois, dont les habitants, ivres de joie, ont peine à croire une si prompte délivrance. Quelques Boches, cachés dans les granges, nous sont amenés par des enfants.

Dans la nuit du 13 au 14, malgré de très violentes rafales de mitrailleuses, Vivaise est dépassé. Le Régiment qui ne cesse d'être en flèche marque un temps d'arrêt devant Chéry-les-Pouilly qui est enlevé le 15 par le bataillon Pebay (IIIe), dont les éléments avancés poussent jusqu'au contact de la Hunding-Stellung très fortement organisée et enlèvent deux mitrailleuses.

Le raid, qui en quarante-huit heures a conduit nos unités de Moyembrie à Chéry-les-Pouilly, restera mémorable. L'artillerie et le ravitaillement n'ont pu traverser la foret de Saint-Gobain et nos soldats, courbés sous le poids de leur « barda», de leurs mitrailleuses, oublient la faim, surmontent la fatigue parce qu'ils courent sus à l'ennemi.

Du 15 au 22, l'ennemi réagit violemment et cause quelques pertes au bataillon Soulet (IIe) qui, le 22, à l'aube, constatant un nouveau repli de l'ennemi, se lance à sa poursuite. Bien qu'en flèche sur le front de la division, il franchit d’un bond, sous le feu, les larges réseaux et les tranchées bétonnées du Bouc et du Nez, s'empare du village de Chalandry, passe la Souche sur des fascines et traversant un glacis de 1000 mètres sous une grêle de balles de mitrailleuses, atteint la Serre qu'il borde par son élément de droite, à 10 h, 15.

A la suite. de cette opération le commandant Soulet qui, depuis la forêt de Saint-Gobain enlève si crânement son bataillon, reçoit sur le champ de bataille, dans Chalandry, croulant sous les obus, la croix de la Légion d'honneur.

Le 24, les sapeurs du capitaine Borello, en coopération avec Ia 3e compagnie, lancent, malgré un feu meurtrier, une première passerelle sur la Serre. Au prix d'efforts héroïques, le lieutenant Ribes fait passer ses hommes, un à un, sur la rive nord. Le 24, en fin de journée, la 3e compagnie entière a franchi la rivière. Ce sont les premiers éléments de la Division touchant la rive nord « Honneur à l'officier et aux soldats qui ont ouvert le passage de la Serre », écrit le 30 octobre notre général de corps d'armée (Général Deville).

Les passerelles sont multipliées grâce à la résistance de la 3e compagnie que l'ennemi canonne sans répit.

Le 25, à l'aube, la 1ere compagnie s'empare par surprise du pont détruit 66 et pousse une patrouille jusqu'à Crécy-sur-Serre. Elle capture ainsi plus de 80 prisonniers et 7 mitrailleuses. Une contre-attaque ennemie, forte d'un bataillon, débouchant de Crécy par la rive sud de la Serre, coupe nos éléments avancés qui n’évitent l'encerclement qu'en passant la rivière à la nage.

Le lieutenant Bécherelle se distingue particulièrement dans cette opération.

Le 26, la 10e compagnie rétablit notre tête de pont et l'élargit jusqu'au pont 66. Crécy tombe le 27. L'ennemi va abandonner la Serre. Depuis le 24 ses obus à ypérite inondent la vallée et Chalandry de gaz toxiques, traîtreusement invisibles.

Le Régiment qui a si souvent bravé la mitraille et défié les plus furieux assauts, fond rapidement sous le poison.

Privé de son colonel, de ses chefs de bataillons, d'un grand nombre d'officiers et des trois quarts de son effectif, le 96e, engagé sans répit depuis deux mois, continue le combat.

De leur propre initiative, les débris des bataillons en ligne accentuent leur pression sur l'ennemi qui faiblit à nouveau, puis lâche pied.

L'ordre de relève du 27 octobre surprend nos tirailleurs en pleine poursuite, à plus d'un kilomètre sur la rive nord de la Serre.

Le Régiment, retiré du combat, dans les premiers jours de novembre est transporté dans le Multien (Acy-Rosoy), où il apprend la capitulation de l'Allemagne le 11 novembre 1918.

Après plus de quatre ans de luttes héroïques, le 96e régiment d'infanterie de Béziers peut avec fierté jeter un regard en arrière. Son glorieux Drapeau a parcouru tous les champs de bataille de la Mer du Nord à la frontière suisse. Il est sorti de chaque épreuve anobli par la vaillance et le sacrifice de ses braves soldats.

Au milieu de l'allégresse générale, notre pensée va pieusement vers ceux qui sont morts pour la France et qui resteront les plus nobles artisans de sa gloire.

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Philippe THERON
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Re: Langemarck 1914

Message par Philippe THERON »

Un grand merci, Trésignies.
Cordialement.
Philippe.
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florence_yvonne
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Re: Langemarck 1914

Message par florence_yvonne »

Bonjour, je cherche le lieu d'inhumation de Paul Aubert mort en 1914 à Langemarck merci
Qui cherche ne trouve pas toujours, mais qui ne cherche pas ne trouve jamais.
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