Présentation et fraternisations

[francis du vivarais]

" L' histoire est un éternel recommencement et les gens ne le savent pas."
Bonjour à tous,
Tout nouveau sur ce forum trés riche d'histoire de 14-18, je vais essayer de me présenter en qqs mots. Je suis Ardéchois et intéressé depuis longtemps par l'histoire en général. J'ai donc commencé par celle de ma famille avec la généalogie , ce qui m'a conduit à écrire qqs biographies, publiées par une revue Ardéchoise. Je me suis intéressé, il y a 3 ans, à mon G. P. maternel , chasseur Alpin, revenu intact de la guerre et que par sillogisme , je croyais naïvement avoir été planqué. Quelle ne fut pas ma surprise de voir qu' il avait participé à une douzaine de grandes batailles avec le 46° BCP (14-15-16-17) et le 17° BCA (18) . Je me suis mis à lire tout ce qui me tombait sous la main , et ma biblio. s'est enrichie de nombreux livres, et j'ai surtout recherché dans le Gard et l'Ardèche , tous les témoignages,à chaud de poilus; lettres, carnets de routes, documents qui dénotent les sensibilités et les réflèxions de nos anciens qui ne peuvent pas être appréhendées de la même façon, par nos esprit modernes.J'ai eu la chance de découvrir qqs documents de grande valeur. Pour bien parler de 14-18, il faut l'avoir vécu, c'est pourquoi j'attache beaucoup d'importance au témoignage direct, et nous ne pourrons nous approcher qu'au plus prés de la vérité, sans la saisir dans son entier.
J'ai consulté la moitié des messages du forum, et j'ai des réponses à plusieurs interrogations. Je ne vais pouvoir répondre qu' à une seule pour l'instant qui va lier les fraternisations et "Joyeux Noël". J'ai été assez stupéfait à la page 128, de l'attaque générale contre le film de Carion et en particulier contre la scène des chants, j'y ai même retrouvé Denis Rolland, que j'ai croisé à Chavignon pour le 90° anniversaire de la Malmaison et pour le livre duquel j'ai une grande estime. Mais enfin, ces poilus qui ne connaissaient ni le cinéma, ni la télé, ni le tiercé, ni le dieu foot-ball, quand ils étaient capables de lire et d'écrire étaient trés férus de musique, et pas seulement les "bourges". J'ai à ce sujet un èxemple frappant avec le carnet de route de Raoul Monier, brancardier au 15.9 RIA qui écrit des pages émouvantes sur L'Hosanna de Granier chanté par son compagnon brancardier Burquin, organiste de la cathédrale de Paris.Burquin sera tué dans la même attaque où va périr le Gal Barbot.Le film de Carion a parfaitement restitué dans sa solennité les écrits de Monier.
Monier a par ailleurs décrit les fraternisations de Noèl 1915,qui se sont produites sur le front d'Artois, et j'ai eu la chance de tomber sur le livre de P.Minvielle " La guerre de mon Père"qui montrait 2 photos de cet évènement et sur le site de Bruno Tardy qui en recelait 7 ou 8. Un article est paru dans "Etudes dromoises " n°30 sur ce sujet.
Depuis un autre témoignage, par une lettre du Lieutenant Fernand Armand du 15.9 RIA lui aussi, nous a été signalé. Ce Lieutenant sera tué à Souchez en septembre 1915, là où il avait été témoin de ces fraternisations. Ce cas de plusieurs témoignages est probablement unique, et peut-être que Norton-cru n'en connaissant qu'un seul l'eut-il réfuté ?
A bientôt sur d'autres sujets. F.B.

[francis du vivarais]

Bien sur qqs uns connaissaient le cinéma mais ce n'était pas leur quotidien!

[alain chaupin]

bonsoir
Petite observation les quelques fraternisations sur le front d'Artois ont eu lieu en 1914 et non en 1915.
Bien cordialement
Alain

[Bruno Tardy]

Bonsoir à tous,

Il y a bien eu des fraternisations fin 1915 en Artois.
Le cas dont parle "Etudes "Dromoises" est noté dans ses carnets par Raoul Monier, brancardier au 159e RIA, à partir du 25 décembre 1915, Allemands et Français étant sortis des tranchées distantes de 30 mètres et completement inondées, il en reparle les 26, 27, et 28 décembre.
C'est pendant ces quelques jours que le docteur Minvielle, médecin auxiliaire à la compagnie 14/63 du 4e Génie (compagnie divisionnaire de la 77e DI dont faisait aussi partie le 159e RIA), et non au 28e Génie, a pris les deux photos reproduites par son fils dans le livre "La guerre de mon père". Ce médecin avait d'ailleurs envoyé un des deux clichés à l'Illustration qui l'a publié, ce qui lui a valu 60 jours d'arrets de rigueur.
Mon père était à la compagnie 14/63 du 4e Génie et a pris 6 clichés datés du 3 janvier 1916. Sur l'un d'eux on voit au fond la cote 140, située au dessus du talus des Zouaves. Il a eu la bonne idée de garder les photos pour lui !
Pour P. Mercadal : en allant à Colombier le Vieux, passez donc à St Félicien, j'y ai une maison.

Bonne soirée et bon Noël à tous;
cordialement
Bruno

[peyo]

Bonsoir a toutes et tous

Je suis en train de lire Chroniques de Guerre 1914/1918 SAC AU DOS de Marcel MAIRE

le jour de Noël 1914 un goupe de soldats Français profitant de l'absence d'officiers a quitté la tranchée pour aller échanger tabac, cigares et chocolat etc et ils ont même vidé une bouteille d'eau de vie, mais la fête a tourné court lorsque les officiers sont rentrés chacun a reintegré sa tranchée sans qu'aucun coup de feu ne fut tiré

Bonne soirée et Joyeux Noël à tous
Peyo

[Stephan @gosto]

Bonjour P.,

Quel a été, selon vous, l'impact de ces rapprochements plus ou moins temporaires et quelle qu'en soit l'origine - dont on fait aujourd'hui grand cas - sur le déroulement de la guerre du coté allié comme du coté allemand ?

A mon avis, aucun.

Le phénomène fut spontané, temporaire et très localisé, ce qui ne lui donna pas assez de "corps" pour avoir une quelconque incidence sur la suite des évènements.

Aussi, il est vrai que la mise en avant récente de ces fraternisations reste certainement disproportionnée en regard de leur poids et de leur impact réel.

Néanmoins, je reconnais que l'aspect anecdotique de tels faits fait souvent le sel de nos recherches ! Concernant le 74e R.I., ces fraternistations viennent un peu comme une bouffée d'air frais - du neuf, chouette ! - lorsque j'étudie la vie de ces hommes au cours de leur stationnement dans ce secteur dit "calme" pendant plus de sept mois. Ils nous ont fait un joli "cadeau de Noël" !! Et il est alors plaisant d'observer le phénomène sous toutes ses coutures ! Et puis après.... après la guerre continue !

Amicalement, et Joyeux Noël !

Stéphan

[francis du vivarais]

Bonjour Bruno et bonjour à tous,
Je me suis mal exprimé sur le dernier message car si Monier, le Dr Minvielle et le caporal Tardy ont bien vu les fraternisations de décembre 1915, le Lieutenant,Antonin Armand ne pouvait les avoir vu, car tué à l'ennemi le 26
septembre 1915 à Souchez.Sa lettre dâtée du 27 décembre 1914, dans les environs d'Arras parle donc d'une autre fraternisation: voici ce qu'il dit :" Je vais vous raconter un fait qui est autentique. Le soir de Noël des soldats bavarois ont fait des gestes au dessus de leurs tranchées, les notre voyant qu'ils n'avaient pas d'armes les ont laissé approcher, les bavarois arrivé à mi distance de notre tranchée se sont arrêté et ont fait signe au notre de s' approcher et sans arme ce qui a été fait. Bavarois et Français ont fété la noël ensemble et ils se sont échangé des cigares. Ceci fait chacun a regagné son camp. Les soldats bavarois disent en avoir assez et qu'ils voudraient bien se rendre mais les prussiens leur ont promis que s'ils se rendaient leurs famille serait fusillée alors ils ne veulent pas faire subir ce sort. C'est une sale race ils emploient tous les moyens pour en venir à bout."
(Orthographe respectée ) Antonin Fernand ARMAND était protestant, né à Comps le 23 juillet 1890 dans le canton de Dieulefit.
Les soldats du 15.9 ont donc bien assisté à 2 fraternisations pour les fêtes de Noël en 1914 et 1915, dans la région d'Arras prés de la côte 140. F.B.

[rohmer]

Bonjour à toutes et tous,

Combien de régiments se sont trouvés dans ce cas de fraternisation ?
Avez vous des chiffres....?...un pourcentage...?
A-t-on répertorié ces régiments ? Ont-ils été sanctionnés ?

Je n'ai pas d'exemples de fraternisations à vous offrir, mais quelques lignes d'un soir de Noël en zone occupée.
Journal de guerre le l'Abbé Villemin.1914-1918 Soc. philomatique vosgienne.
Senones, une ville vosgienne sous l'occupation.

" 24 décembre 1914 à Senones, Vosges.
Temps - 2.
Il fait un froid de loup.
Quelques coups de canons le matin, français et allemands, sur la Mère Henri.
Le soir, à 1 heure, les grosses pièces se mettent à chanter.
Les français envoient plusieurs obus sur les Gouttes.Maison démolie et six personnes bléssées.
Beau ramage pour entendre la confession.
les Allemands font partout des arbres de Noël et vont faire la fête le soir avec le vin réquisitionné depuis neuf jours.
On m'a dit ce matin à l'hôpital qu'il leur était défendu de tuer une vache; que si on voulait la tuer, il fallait d'abord la payer au gouvernement allemand.
Donc non seulement le gouvernement allemand ne paie pas ses réquisitions, mais on est forcé de lui payer ce qu'on possède en toute propriété si l'on veut en user."

Bien cordialement.
Evelyne.

[chatrou51]

Bonsoir à tous,

Je vous place un article paru dans le magasine Les Chemins de la Mémoire du MD, très interessant, de notre très ancien poilu Lazare Ponticelli.
Il évoque notamment une fraternisation avec les soldats Autrichiens.

http://chatrou51.free.fr/Chemins/

Le fichier image : CheminMemoire.jpg

Cdt
Philippe

[Eric Mansuy]

Bonsoir à tous,
Bonsoir Evelyne (et Marc),
Parmi les unités concernées, on peut citer le 29e B.C.P., comme en témoigne ce document, retranscrit puis généreusement transmis par le général Bach (qu'il en soit ici remercié). Il a été inclus dans un document sur les trêves et fraternisations sur le front de la VIIe Armée, jadis en ligne sur le défunt site de l'Abri-Mémoire (ou le site du défunt Abri-Mémoire ?), mais n'y est plus disponible. Je ne désespère pas de trouver un autre hébergeur pour ce type de fichier...

Amicalement,
Eric

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SHD/DT 16 N 1529

6e Corps d’Armée
127e Division
Infanterie 16 N 1529
N° 3460

Le 24 Novembre 1917

29e BATAILLON DE CHASSEURS

COMPTE-RENDU

Le Bataillon étant arrivé en secteur dans la nuit du 5 au 6 Novembre, l’ennemi a provoqué des échanges de tabac contre du pain à la 5e Compagnie. Ces échanges ont cessé le 9 sur l’intervention des Officiers de la Compagnie. Pendant un séjour en ligne antérieur au même emplacement, la 5e compagnie avait reçu un billet lancé de la ligne ennemie et proposant du tabac tyrolien en échange de pain. Ce billet avait été transmis au commandement. Cette fois l’ennemi a payé d’audace et a commencé lui-même à offrir des cigares. Un allemand sortant du PP situé à l’Est de la Petite Carrière du Schratz s’est approché de notre réseau et a passé un paquet de cigares à l’extrémité d’une perche ; des chasseurs lui ont jeté du pain. Un chasseur ayant manifesté des intentions plus conformes à l’honneur militaire, ses camarades lui ont fait remarquer que leur situation deviendrait intenable.
Le caporal S. est coupable de n’être pas intervenu plus énergiquement et de n’avoir pas adressé sur le champ un compte-rendu précis à ses chefs. Le chasseur D. reconnaît avoir lancé du pain à un ennemi.
Des sanctions ont été prononcées contre les coupables. Il y a dans leur faute une forte part d’inconscience imputable à la jeunesse, inconscience manifestée par ce fait que les Officiers ont été rapidement mis au courant par les coupables eux-mêmes.
Le Commandant de Cie a entendu le 9 le caporal S. dire à haute voix : « Si j’avais voulu, j’en aurais choppé deux ». D’autre part D. auquel le Sous-lieutenant LANTREBECQ faisait remarquer qu’il fumait un gros cigare, lui répondit « Ce sont les fritz qui nous les ont envoyés ».
Le caporal S., interné par les Allemands en 1914 à EMBERMENIL comme prisonnier civil, s’est évadé au bout de deux mois ; c’est un gradé de la classe 17 qui a eu une très belle attitude au Chemin des Dames ; en raison de ses antécédents, je n’ai pas prononcé sa cassation.
Le Chasseur D. est assez médiocre à l’arrière, mais se conduit bien au feu. Il est patrouilleur volontaire.
Le 17 Novembre, un ennemi s’est montré à nouveau au même PP. Le Sous-lieutenant DUPUIS qui était présent l’a abattu d’un coup de fusil. A la suite de cet incident une certaine activité de grenades s’est manifestée sur le PP 871 et au Nord.
Il est intéressant de signaler qu’un Allemand qui s’était approché du réseau avec un paquet de cigares est rentré précipitamment dans son PP en disant « artillerie Offizier », l’incident ayant coïncidé avec des réglages sur la région Griotet, Combe-Kopf. Il est à supposer que le PP est utilisé comme observatoire d’artillerie.

Signé Dumont