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je ne crois pas que l'on ait signalé la récente sortie d'un ouvrage de Michel Laval consacré à Charles Péguy et dont le sujet nous intéresse tout particulièrement : Tué à l'ennemi. La dernière guerre de Charles Péguy.
Bonsoir,
Les vieux péguystes de mon espèce (bientôt 50 ans « d’amitié » envers ce génie unique…) se méfient toujours des « nouveaux »,qui écrivent sur Péguy alors qu’ils sont inconnus au bataillon des « spécialistes ». Je craignais donc, moi aussi, un simple « démarcage » du bouquin de Victor Boudon, d’autant que le sous titre s’offrait fort pour induire cette erreur.
Mais il n’en est rien. V. Boudon suivait Péguy pas à pas, jour à jour ; je dirais volontiers : Péguy, et rien que Péguy.
Dans ce nouveau livre, nous avons bien plutôt un récit, jour à jour aussi, certes, mais de la Guerre ; la Guerre dans son ensemble, Péguy étant, presque, relégué au rang de simple fil rouge…
Un récit très honnête, bien documenté, sans trop « d’erreurs » (j’ai tout juste aperçu 2 ou 3 inadvertances de plume plutôt que des erreurs proprement dites.)
Cette orchestration générale constitue un certains nombre de rappels salutaires du contexte, de l’ambiance de ce mois d’Août14 ; contexte si souvent oublié, ou négligé ; rappels dont devraient tirer profit nos pacifistes simplistes : « la guerre, c’est la faute des grands capitalistes », « la faute des méchants généraux sanguinaires », etc… et réponse à nos grands intellectuels qui débattent et dissertent sur « contrainte ou consentement » etc….
Cela dit, deux grosses réserves de ma part sur ce livre ; le style d’abord : n’est pas Péguy qui veut… L’auteur, contaminé par le style de son sujet nous livre un texte dense, sans alinéa !! sur deux ou trois pages d’impressions ; et cela sans le moindre répit. Le procédé est vraiment un peu lourd, parfois, et la lecture fatigante. Impression, parfois, d’une copie d’articles successifs d’un dictionnaire.. . Mais au moins, on peut saluer le sérieux avec lequel l’auteur s’est documenté. Deuxième chose, beaucoup plus grave : les vers, de Péguy et de Hugo, essentiellement, sont cités à la queue-leu-leu ! sur la même ligne, sans respecter les mises à la ligne ! Nous sommes là en plein crime de lèse-Poésie !!
Bref, un texte pas vraiment agréable à lire à cause de sa densité graphique ; d’autre part privé des références des textes cités. Peut être, un fois de plus, ce stupide impératif d’éditeur, qui sévit depuis déjà bien longtemps chez certains de ces producteurs-vendeurs de textes qui se croient tout permis envers et contre ces textes mêmes…
Dommage ! Car les textes de Péguy méritaient d’être mieux repérés dans l’océan de sa production ; au moins ont-ils le mérite d’être cités ; au moins les lecteurs qui ne le connaissent pas connaitront-ils ces lambeaux…
En résumé, un livre à lire… à l’occasion, sans obligation si vous connaissez bien Août14, et si vous connaissez aussi bien Péguy… mais qui vous enrichira sans aucun doute si vous avez quelques lacunes pour l’un ou l’autre.
Bonne lecture éventuelle donc…
Bien à vous,
[:achache:1]
Achache
Émouvante forêt, qu'avons-nous fait de toi ?
Un funèbre charnier, hanté par des fantômes.
M. BOIGEY/LAMBERT, La Forêt d'Argonne, 1915
