COQUETTE
Goélette à hunier de 167 tx.
Armateur Marc Dubosq. Société Commerciale de Bordeaux.
Capitaine Jules TROUVE inscrit à Granville
Equipage de sept hommes tous français
Effectue une traversée Swansea – Bordeaux avec du charbon.
La perte de COQUETTE
La goélette passe Lizard le 4 Février à 11h00 par temps bouché. A 13h30, la brume se lève et il est survolé par un hydravion anglais. Vers 14h00 cet hydravion s’éloigne vers la côte anglaise.
Beau temps. Jolie brise de NNE. Très bonne visibilité.
Route au SSW à 5 nœuds.
A 16h00, un sous-marin est aperçu à 3 milles sur tribord, faisant route sur eux à 10 nœuds. Il tire un coup de semonce, suivi de 4 coups de canon. Le 4e obus vient frapper le plat-bord tribord.
La goélette met en panne et le canot est affalé. Tout l’équipage y embarque avec les papiers du bord et des vivres.
Le sous-marin s’approche et accoste l’embarcation. Il prend quatre hommes à son bord, qui sont remplacés par le second du sous-marin et trois marins porteurs de bombes cylindriques. Les Allemands montent sur la goélette, s’emparent de quelques vivres, pain, vin et café, puis installent les bombes le long de la coque sur tribord. Ils quittent le navire en arrachant le rugueux et les bombes explosent 5 minutes plus tard. COQUETTE coule en 10 minutes.
Le second allemand, qui parle très bien français, dit au capitaine qu’il a bien vu l’hydravion et qu’il a attendu son départ pour attaquer tranquillement.
L’officier enquêteur note :
« L’avion n’a probablement rien vu, alors que le sous-marin l’a bien distingué »
Il ajoute :
« Le capitaine est à l’abri de tout reproche. Il comptait profiter du temps bouché pour traverser la Manche. Mais le ciel s’est soudain dégagé ».
Description du sous-marin
Kiosque central. Un périscope. Un canon sur l’avant du kiosque. Pas de pavillon. Peinture très vieille.
Ont été vus :
Le commandant, assez gros, petit, blond avec moustache, environ 38 ans. Portait une casquette et une veste semblant avoir un galon.
Le second, plutôt grand et mince, brun, environ 28 ans. Parlait très bien le français.
L’ingénieur mécanicien et une douzaine de marins. Ils portaient un bonnet dont on n’a pu déchiffrer entièrement l’inscription : « WIL…………BRAS » ? ou quelque chose d’approchant.
Voici le dessin fait du sous-marin (que l’on peut comparer avec celui fait par le capitaine de l’ANNA MARIA)

Sauvetage
L’embarcation a fait route en direction du sud toute la nuit. Les naufragés ont été recueillis le lendemain matin par le contre-torpilleur CLAYMORE à 10 milles dans le nord du Four.
Note particulière
A la fin du rapport, l’officier enquêteur ajoute cette note :
« Les quatre hommes qui sont allés à bord du sous-marin sont unanimes à reconnaître qu’ils ont été reçus de façon courtoise et qu’ils n’ont été soumis à aucun autre interrogatoire que leur nationalité. Le capitaine déclare que les Allemands lui ont permis de prendre des vivres dans le canot. Le commandant lui a conseillé de rejoindre la côte anglaise qui était la plus proche. Ce n’est que la brise favorable qui l’a décidé à faire route sur la côte française où il a été recueilli par le CLAYMORE. Le commandant allemand a gardé le rôle d’équipage, les connaissements, l’acte de francisation et les instructions nautiques. Il n’y avait pas de documents secrets à bord.
En résumé, il n’y a pas de plainte de l’équipage au sujet des agissements de l’ennemi à son égard. »
Le sous-marin attaquant
C’était l’U 83 qui avait coulé l’ANNA MARIA le matin même (voir fiche de ce navire). Il était commandé par le KL Bruno Hoppe.
Les descriptions des officiers faites par les deux capitaines concordent tout à fait et je pense que l’on a tout de suite identifié le sous-marin, bien que ce ne soit pas mentionné dans le rapport d’enquête.
Même le caractère du commandant, qui se dégage des deux rapports, apparaît clairement ; c’est un sous-marinier qui agit sans faire preuve de dureté ou de fanatisme, peut-être même trop confiant, d’où sa disparition fin Février. Le fait qu’il laisse ses matelots donner des renseignements à l’adversaire est aussi un signe de trop grande confiance.
Il serait intéressant de connaître le nom du second qui parlait si bien français, ainsi que celui de l’officier rescapé qui aurait été repêché quinze jours plus tard par le FARNBOROUGH . S’agit-il du même ?
Cdlt